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Genre, pouvoir, discours (Casablanca, Maroc)

Genre, pouvoir, discours (Casablanca, Maroc)

Publié le par Marc Escola (Source : Najate Nerci)

Genre, pouvoir, discours

Colloque international organisé

Les 9 et 10 Mai 2024 à la FLSH de Mohammedia (Maroc)

L’équipe de recherche : Genre, culture, discours (ICM) 

de la FLSH de Mohammedia, Université Hassan II-Casablanca (Maroc)

Projet : Genre et droits humains (Programme Ibn Khaldoun d’appui à la recherche dans le domaine des sciences humaines et sociales, CNRST),

le Centre pour les politiques de l’égalité des chances (Université de Bucarest, Roumanie)

et 

l’équipe de recherche Plurielles (Université Bordeaux-Montaigne)

Coordination : Najate Nerci et Ionela Băluță

 Entre nord et sud, la question du genre ne connaît pas les mêmes cheminements. Divers facteurs (historique, politique, culturel et social) se conjuguent pour instaurer des disparités en matière de révision des liens de pouvoir et de la genèse des discours sur le genre. La combinaison de ces facteurs et les différences qu’elle engendre entre nord et sud n’empêche pas pour autant de déceler la persistance des formes de pouvoir patriarcal de part et d’autre. Les divers procédés et modes de construction du féminin et du masculin continuent à servir de fondements à la perpétuation de la hiérarchisation des sexes au niveau des trois sphères : domestique, sociale et politique. La coexistence entre valeurs hiérarchiques et valeurs égalitaristes, entre pratiques discriminatoires et pratiques égalitaires perdurent et esquissent de fines frontières entre patriarcalisation, dépatriarcalisation et (re)patriarcalisation des identités et des rapports de genre (Macé 2015). En Europe néolibérale, des procédés de constitution hiérarchique des différences de genre œuvrent pour pérenniser des subalternités multiples, des dominations diverses qui par leur imbrication produisent des catégories stigmatisées. En Afrique, les normes sociales et culturelles traditionnelles notamment dans le milieu familial (les mariages précoces, les inégalités en héritage, l’excision, la non-scolarisation des filles, l’intégrité physique restreinte, la prévalence du masculin, l’accès réduit aux ressources et aux biens et la limitation des libertés) continuent à jouer un rôle déterminant dans la perpétuation des inégalités liées au genre. Ces disparités prennent une plus grande ampleur lors des guerres inter-ethniques et dans les discours et les pratiques liées à la montée du radicalisme. 

Qu’il soit constitué des arrangements sociaux de la différence sexuée (Scott, 1986), qu’il soit une construction historique, culturelle et sociale du sexe (Fougeyrollas-Schwebel et al., 2003) ou composé d’actes performatifs (Butler, 2005; West, Zimmerman, 1987), le genre et les questions qui lui sont attachées continuent à animer les débats les plus fougueux que ce soit en Europe ou en Afrique. En plus d’être une des grandes questions qui traversent les sciences humaines et sociales et jouent un rôle fondamental dans la compréhension des sociétés humaines, il est devenu une question politique épineuse, dans laquelle intervient l’action publique, ce qui rend la mise en examen des imbrications genre, pouvoir, discours des plus judicieux. 

Il importe particulièrement de focaliser le questionnement sur la manière dont les différences et les dominations s’élaborent en discours vu que la faculté dichotomique de « la différence des sexes » est la clé de la domination. Le discours est pris ici comme un ensemble de formes langagières élaborées et circulant dans des contextes sociaux et dans ses différents domaines (politique, médiatique, juridique, littéraire, religieux, filmique etc). Mais considéré aussi dans sa dimension symbolique d’établissement de la « normalité » et dans sa visée performative. Faut-il rappeler que les discours sur le genre en circulation dans les institutions de socialisation des individus participent de la répartition des pouvoirs puisque le genre est « une manière première de signifier les rapports de pouvoir » (Scott, 1988) ? En effet, examiner le pouvoir sous le prisme du genre revient inéluctablement à interroger « l’ordre sexué » (Sénac-Slawinski, 2007) qui génère domination et hiérarchie.

Le discours sur le genre façonne les convictions, les comportements et les représentations collectives. En analysant comment le genre est abordé dans tous discours confondus, nous pouvons reconnaître le rôle central qu’ils détiennent dans la construction et la déconstruction des normes de genre. Ce sont les normes, le langage et les jeux de pouvoir qui modèlent le « sexe » mâle et femelle (Butler 2005a : 15 ; 2005b : 67-70). En révélant justement les normes culturelles et sociales en matière de genre, les discours peuvent renforcer les attentes traditionnelles et les stéréotypes et partant les hiérarchies existantes ou, au contraire, les remettre en question.  

C’est pour cela que le colloque aspire à ne pas jeter la lumière uniquement sur les structures qui produisent la hiérarchie des sexes mais également sur les modes d’action des individus, leur discours et contre-discours circulant en Europe et en Afrique. Il mettra en accent les incessantes négociations et les interventions des différents acteurs pour procéder à une remise en question des schémas de pensée préexistants et abolir les discriminations. 

D’où l’importance de saisir les représentations dominantes, entérinées et consacrées dans des productions discursives en repérant les idéologies, les stratégies et les rapports de force en jeu, permettant ainsi d’affiner la contextualisation des discours.  La question du sujet et de la subjectivité dans le discours (Pêcheux 1975 ; 1990), tous discours confondus, nous mènera à la construction discursive des positions de sujets et des subjectivités légitimes ainsi qu’aux portées et aux stratégies en vigueur dans les énoncés des actrices et des acteurs. L’intérêt d’étudier la situation des locuteurs/trices en termes d’identité, d’éthos et de positionnement, etc., tient de l’importance des paramètres contextuels et des points de vue énonciatifs.  

Le colloque ambitionne de réfléchir dans une perspective pluridisciplinaire en tentant de tracer la conjugaison des facteurs qui contribuent à inscrire les rapports de genre et de pouvoir dans le contexte de culture et de discours en reconfiguration en Europe et en Afrique, sans pour autant adopter une perspective comparative. 

Les chercheur.es, toutes disciplines confondues, auront l’occasion de partager leurs travaux, sur la question, en traçant les interactions entre les structures du genre et celles du pouvoir, leurs interdépendances et leur matérialisation discursive. Le colloque aspire plus spécifiquement à explorer les axes suivants : 

Ø  Production discursive des identités et mobilisation des catégories de genre ;

Ø  Stratégies de légitimation ou délégitimation des hiérarchies entre les sexes ;

Ø  Stratégies discursives de dé-ritualisation des féminités et des masculinités ;

Ø  Savoirs situés, performativité ;

Ø  Dissonance et réinvention du langage sur le genre ;

Ø  Espace public, espace privé : de l’exclusion à l’agentivité ;

Ø  Genre, pouvoir et technodiscursivité (corps, photographies, voix, vidéos, œuvres artistiques, etc.) ; 

Ø  Stratégies de résistance et d’offensive contre les études de genre.

Bibliographie indicative :

Delphy. Christine. 1998. L’ennemi principal. Tome 1  : Économie politique du patriarcat. Paris : Éditions Syllepse 

Delphy. Christine. 2001. Penser le genre. L’ennemi principal. Tome 2. Collection « Nouvelles Questions Féministes ». Paris : Éditions Syllepse.

Guillaumin. Colette. 1992. Sexe, Race et Pratique du pouvoir. Paris, Côté- femmes

Mathieu. Nicole-Claude. 1991. L'anatomie politique. Catégorisations et idéologies du sexe. Paris, côté-femmes, 

Althusser, Louis. 1970. « Idéologie et Appareils Idéologiques d’État : Notes pour une recherche », La Pensée. Revue du Rationalisme moderne, 151, 3-38. 

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Pêcheux. 1990. L’inquiétude du discours (Paris : Éd. des Cendres).

Colette Guillaumin,1992, Sexe, race et pratiques du pouvoir, Paris, Côté-femmes.

Comité scientifique : 

Anne-Marie PAVEAU ( Université de Paris 13, FRANCE) ;

Agnélé LASSEY (Université de Lomé, T0G0) ;

Aimée- Danielle LEZOU KOFFI (Université Félix Houphouet Boigny, COTE D’IVOIRE) ;

Duygu ÖZTİN (Université Dokuz Eylül, TURQUIE) ;

Emanuela IGNATOIU-SOR (Université de Bucarest, ROUMANIE) ;

Fatima SADIQI (Université Hamad Bin Khalifa, Doha, le QATAR) ; 

Géraldine PUCCINI (Université Bordeaux-Montaigne, FRANCE) ;

Ionela BALUTA (Université de Bucarest, ROUMANIE) ;

Martine RENOUPREZ (Université Cadix, ESPAGNE) ;

Mercedes MONTORO (Université de Grenade, ESPAGNE) ;

Najate NERCI (Université Hassan II de Casablanca, MAROC) ;

Renato BOCCALI (Université IULM de Milan, ITALIE) ;

Rachid BENBIH (Université Ibn Zohr d’Agadir, MAROC)

Roxana MARINESCU (Université des Etudes Economiques de Bucarest, ROUMANIE) ;

Théodorine NTO AMVANE (Université Omar Bongo, GABON).

Principales échéances :

v  10 Mars 2024 : Date limite de soumission des propositions de communication  avec indication de l’axe choisi (250 mots) comportant une présentations succincte de l’autrice ou l’auteur ; Les propositions sont à déposer au site :https://genrepouvoir2024.sciencesconf.org/ (Navigation>Nouveau Dépôt) jusqu'au 16 juillet 2023 inclus.

En cas de difficulté pour déposer la proposisition sur le site, notamment si vous ne disposez pas d'identifiants HAL, vous pouvez également nous l'envoyer à l’ adresse suivante : Genrepouvoirdiscours@gmail.com

v  25 Mars 2024 : Notification des propositions acceptées ;

v  25 Avril 2024 : Rentrée des textes définitifs pour publication, accompagnés de leurs résumés (en français et en anglais) ;

v  9 et 10 Mai 2024 : Tenue du colloque à la FLSH de Mohammedia- Université Hassan II de Casablanca ;

Les communications peuvent être présentées dans une des langues suivantes: français ou anglais. Les propositions de communication en français ou en anglais (titre, résumé – une vingtaine de lignes–, 5 mots clefs) seront accompagnées d’une présentation de l’autrice ou l’auteur (10 lignes).