
Cinéaste imprégné de philosophie, à travers des références plus ou moins diffuses (Platon) ou officielles (Kant), Eric Rohmer a cité explicitement l’œuvre de Blaise Pascal dans les dialogues de son cinéma et de son théâtre.
La pensée pascalienne est chez lui un objet de débat inépuisable, qu’il s’agisse de l‘Entretien sur Pascal (avec le philosophe Brice Parain), de Ma nuit chez Maud (discussion sur le pari appliqué au sens de l’Histoire hégélien), ou encore de Conte d’hiver et du Trio en mi bémol (déclinaison du même thème dans le champ des relations amoureuses)...
L’exploration des archives rohmériennes met en outre en lumière des liens biographiques, dont la ville de Clermont-Ferrand fut le décor privilégié.
A l’occasion du quatrième centenaire de la naissance de Pascal, on s’interrogera sur le rôle que jouent ces questionnements récurrents dans la vision du monde rohmérienne, et, en retour, sur l’apport de cette relecture cinématographique à la compréhension des Pensées.
Programme
Matin
9 h 30
Pascal Ribier, président de l’assocation La Maison Rohmer, Agnès Gameiro-Delteil pour la ville de Tulle
Accueil des participants et présentation succincte du projet Maison Rohmer à Tulle.
Modérateur : Marc Cerisuelo
10 h 00
Marco Grosoli
Chercheur à l’université de Bologne
“Vanité que la peinture : mimesis selon Rohmer, à travers Pascal”
“Vanité que la peinture, qui attire l’admiration par la ressemblance de choses dont on n’admire point les originaux !” De cette phrase de Pascal, commentée par Rohmer dans son article des Cahiers du cinéma en 1952, naît une idée de la mimesis que développera le cinéaste, moins en fait dans La Marquise d’O... ou Les Rendez-vous de Paris que dans Triple agent.
10 h 30
Daniel Augusto
Enseignant de littérature, Université de Sao Paulo
“Christianisme sans Christ”
L’enjeu de cette intervention sera d’aborder les aspects de l'œuvre de Pascal présents dans L'Amour, l'après-midi. Un des objectifs serait de nuancer la relation que Keith Tester a faite entre les Six Contes Moraux et Pascal dans son livre Film as Theology (Palgrave, 2008). Surtout, l'intérêt serait de souligner les traces de philosophie présentes dans le cinéma de Rohmer - même quand elle n'est pas explicitement nommée.
11 h 00
Violaine de Schuytter
Agrégée de lettres
“L’écrivain, le cinéaste et la joie”
Rohmer a misé sur l’unité de l’œuvre, faisant le “pari” d’une création partageable, refusant un certain désespoir contemporain. Il est difficile de ne pas voir dans les “pleurs de joie” qu’il a mis en scène une trace de Pascal. Mais de quelle nature exacte ? Quels sont les enjeux et les limites de ces moments d’incarnation, voire de grâce ? La joie est-elle, ultimement, au rendez-vous des contes rohmériens ?
11 h 30
Louis Gall
Enseignant de philosophie, lycée Edmond-Perrier de Tulle
“Qu’est-ce qu’un bon chrétien ? Deux réponses de Rohmer et Pascal”
S'ils semblent s'opposer sur leur manière de vivre et d'exprimer le christianisme (démonstrative pour l'un, contenue pour l'autre), Pascal et Rohmer ont à travers leurs œuvres partagé une même interrogation : qu'est-ce qu'une foi authentique ? Comment aimer et désirer en chrétien ?
12 h 00
Discussion avec le public
Modérateur : Noël Herpe
Après-midi
14 h 30
Marianne Alphant
Écrivain
“D’un trouble de lecture”
Le pari de Pascal apparaît sous deux éditions différentes dans Ma nuit chez Maud. Edition de Chevalier pour Trintignant dans la librairie de Clermont-Ferrand, édition de Brunschwig pour Vitez chez Maud. S’agit-il des mêmes Pensées ? Et que dit cette présence d’éditions différentes de Pascal chez Rohmer ?
15 h 00
Laurent Thirouin
Professeur émérite de littérature française du XVIIeme siècle, Université Lyon-2
“Le pari de Pascal compris par Rohmer”
Il sera question de l’interprétation par Rohmer du pari de Pascal : comment sa lecture du célèbre argument évolue entre Ma nuit chez Maud et Conte d’hiver ; comment, grâce à son intime et durable fréquentation de Pascal, le cinéaste a mis le doigt sur des éléments cruciaux, généralement manqués par la critique “professionnelle” pascalienne.
15 h 30
Sylvie Robic
Maître de conférences en littérature française du XVIIeme siècle, Université Paris-10
"Le vent, la pluie, la neige... : réécritures rohmériennes du pari de Pascal"
Et si, au-delà des citations et allusions explicites, il existait une forme d’imprégnation ou infusion de Pascal dans les films d’Éric Rohmer ? Comme un imaginaire de la pensée du philosophe où le cinéma lui-même devient l’enjeu du pari. Comme un imaginaire pascalien dédramatisé, travaillant une poétique filmique délibérément ouverte à l’incertain. Et si, pour Rohmer, quelque chose d’une grâce pouvait se jouer, dans la matière même des films, dans les hasards du vent, de la pluie et de la neige ?
16 h 00
Table ronde avec Serge Bozon et Eugène Green, réalisateurs
16 h 45
Marc Cerisuelo
Professeur de cinéma à l’université de Marne-la-Vallée. Allocution de synthèse
17 h 15
Discussion avec le public
18 h 00
Projection d’Entretien sur Pascal, film d’Eric Rohmer (1965, 22 mn)
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Contacts : Pascal Ribier – Maison Rohmer - pascal.ribier@free.fr