Université d’été 2023 de l'EUR du Grand Paris FRAPP - Francophonies et Plurilinguismes : Politique des langues / "Traduction et politique : un horizon pour les sciences humaines et sociales ?"
Université d’été EUR du Grand Paris FRAPP « Francophonies et Plurilinguismes : Politique des langues » (ANR-18-EURE-0015)
sur le thème :
Traduction et politique : un horizon pour les sciences humaines et sociales ?
22-25 mai 2023
Université Paris-Est Créteil et Maison de l’Ile-de-France de la Cité internationale universitaire de Paris
"...d’une langue à l’autre, la situation est bien celle de la dispersion et de la confusion. Et pourtant la traduction s’inscrit dans la longue litanie des « malgré tout ». En dépit des fratricides, nous militons pour la fraternité universelle. En dépit de l’hétérogénéité des idiomes, il y a des bilingues, des polyglottes, des interprètes et des traducteurs."
Paul Ricœur, Sur la traduction
La diversité linguistique et culturelle de l’après Babel a été considérée par certains comme un bienfait et par d’autres comme une malédiction. Quoi qu’il en soit, la traduction est là et force est de constater que les études théoriques sur ce que traduire veut dire et sur ce que la réflexion sur la traduction peut apporter aux sciences humaines et sociales se sont multipliées à partir de la fin des années 60, tout comme les travaux critiques sur les traductions dans différents champs disciplinaires. Beaucoup de chercheur.es parlent d’un « tournant traductologique », un tournant qui a, bien évidemment, des racines plus anciennes, comme le montre Michaël Oustinoff, en 2007, lorsqu’il écrit :
Les Translation Studies ont, par leur rayonnement depuis les années 1970, fait de la traductologie (et ses diverses variantes, Übersetzungswissenschaft, traduttologia, perevodovedenie, etc.) une discipline internationalement reconnue au sein des sciences humaines. Néanmoins, il ne faudrait pas croire que le « tournant traductologique » ait attendu la fin du XXème siècle pour se produire : il a eu lieu le siècle précédent dans l’Allemagne romantique. Enfin, du fait de la multitude de formes que peut prendre la traduction et que vient encore démultiplier la mondialisation, la traduction ne saurait être l’apanage des seuls spécialistes de la traduction : elle demande à être appréhendée sous l’angle de l’interdisciplinarité la plus large.
Le projet de l’EUR FRAPP met au premier plan cette approche interdisciplinaire, en l’occurrence un intérêt particulier pour la question de la traduction dans ses multiples acceptions et comme praxis adaptée aux exigences contemporaines d’une politique du langage (E. Apter). Il souhaite encourager l’analyse des rapports entre traduction, pouvoir et politiques des langues et la réflexion sur la productivité des mistranslations, non seulement d’un point de vue esthétique mais surtout d’un point de vue politique.
Portés par le large consortium de l’EUR du Grand Paris FRAPP, les ateliers proposés pour cette université d’été mettront en œuvre une réelle interdisciplinarité associant spécialistes des pratiques langagières et des politiques linguistiques et chercheur.es en sciences humaines et sociales (anthropologie, droit, histoire, histoire de l’art, littérature, science politique, analyse du discours, communication, géographie, économie, philosophie, sociologie). En résonance avec l’un ou l’autre des trois axes de l’EUR du Grand Paris FRAPP – Plurilinguisme dans les institutions et les organisations (axe 1), Communautés imaginées et politique des langues (axe 2), Ethique et gestion de projets interculturels (axe 3), ils prendront la forme de tables-rondes, de sessions ou panels, de workshops ou ateliers pratiques et pourront explorer les pistes suivantes (sans exclusive) :
· La traduction au sein de la même langue, la traduction entre langues.
· Traduction et pouvoir / Traduction et politiques des langues.
· (In)traductibilité. L’intraduisible.
· Traduction et hospitalité. « De langue à langue » (SB Diagne).
· L’éthique du traduire (Berman).
· Traduction et réflexion sur le langage (Benjamin).
· La traduction comme « épreuve de l’étranger » (Berman).
· Le désir de traduction (Ricœur).
· Traduction et lecture (Borges).
· « Comprendre, c’est traduire » (Steiner).
· Traduction et études de genre.
· Politique de la traduction, traduction et domination, « traduction agonique » (T. Samoyault).
· L’inévitabilité de la mistranslation.
· Mistranslation et productivité esthétique.
· Mistranslation comme geste politique : le sens de la traduction depuis les périphéries (S. Waisman).
· Théories de la traduction.
· Traduction et standardisation de la langue cible. L’impossible neutralité diatopique de la traduction.
· La traduction de différents genres (poésie, roman, théâtre, essai). La traduction du rythme.
· L’apport de la traduction aux différentes disciplines : ce que la traduction donne à voir dans le domaine de la littérature, de la linguistique, du droit, de la philosophie, l’histoire, etc.
· Traduction scientifique et circulation des théories et des concepts.
· Traduction et mondialisation.
· Traduction et nouvelles technologies, traduction et intelligence artificielle.
· Traducteurs et interprètes face aux violences politiques, aux crises de la démocratie.
Calendrier :
Les propositions d’atelier sont à adresser à eur.frapp@u-pec.fr avant le 10 mars 2023.
Des propositions de communication individuelle peuvent également être adressées à eur.frapp@u-pec.fr avant le 31 mars 2023.
Comité scientifique et d’organisation : Comité exécutif et doctorant.es de l’EUR FRAPP
Quelques pistes bibliographiques
· Apter Emily, Against World Literature. On the Politics of Untranslatability, London / New York, Verso, 2013.
· Apter Emily, Zones de traduction. Pour une nouvelle littérature comparée, trad. Hélène Quiniou, Paris, Fayard, 2015.
· Artyushkina Olga, Yurchenko Yulia et Zaremba Charles (dir.), Le plurilinguisme à l’épreuve de la traduction, 2020, https://books.openedition.org/pup/11658?lang=fr
· Balibar Etienne, « Politique et traduction », Asylon(s), n°7, 2009-2010.
· Benabdennour Saif, « Literatura, traducción y poder », in : Antropología Experimental, n° 22 (Pensar desde lo decolonial), Universidad de Jaén, 2022.
http://revistaselectronicas.ujaen.es/index.php/rae
· Casanova Pascale, La Langue mondiale. Traduction et domination, Paris, Seuil, 2015.
· Cassin Barbara, « La langue de l’Europe ? », in : Po&sie, revue trimestrielle, Belin, 2017/2 N° 160-161, p.154-159.
· Diagne Souleymane Bachir, De langue à langue. L’hospitalité de la traduction, Paris, Albin Michel, 2022.
· Godard Barbara, « L’Éthique du traduire : Antoine Berman et le "virage éthique" en traduction », in : Traduction, terminologie, Rédaction (TTR), Volume 14, Nº 2, 2e semestre 2001, p. 49–82, https://doi.org/10.7202/000569ar
· Oustinoff Michaël, « Après Babel ou la traduction comme clé de compréhension majeure du monde contemporain », in : Hermès, La Revue 2021/1 (n° 87), CNRS Éditions, p. 253-258.
https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2021-1-page-253.htm
· Oustinoff Michaël, « Les “translation studies” et le tournant traductologique », in : Hermès, La Revue 2007/3 (n°49), CNRS Éditions, p.19-28, Les « translation studies » et le tournant traductologique | Cairn.info
· Paci Francesca, « La traduction : défis et problématiques » (traduction de l'italien par Mariela Slancheva), Observatoire du Plurilinguisme, 2017
https://www.observatoireplurilinguisme.eu/dossiers-thematiques/culture-et-industries-culturelles/177778372-technologies-de-la-traduction/11399-la-traduction-d%C3%A9fis-et-probl%C3%A9matiques
· Samoyault Tiphaine, « Langues en lutte : limites des éthiques de la traduction », in: Arnold Castelain (Hsgb.), Traduction et migration, Presses de l’Inalco, 2020.
· Samoyault Tiphaine, Traduction et violence, Seuil, Fictions & Cie, 2020.
· Sapiro Gisèle (dir.), Translatio. Le marché de la traduction en France à l’heure de la mondialisation, Paris, éditions du CNRS, 2009.
· Waisman Sergio, Borges And Translation: The Irreverence Of The Periphery, Bucknell University Press,U.S., 2005 ; Borges y la traducción. La irreverencia de los márgenes, Buenos Aires, Adriana Hidalgo, 2005.
· Yannic Aurélien, « Francophonie, plurilinguisme, traduction : la mondialisation des enjeux identitaires », in : Hermès, La Revue 2010/1 (n° 56), CNRS Éditions, p. 29-34.
Bibliographie classique
· Benjamin Walter, La Tâche du traducteur [1923], Œuvres I, Gallimard, Paris, 2000.
· Berman Antoine, L’Epreuve de l’étranger, Paris, Gallimard, 1984.
· Cassin Barbara (dir.), Après Babel, traduire, Arles et Marseille, Actes Sud/Mucem, Beaux-Arts Hors collection, 2016.
· Cassin Barbara (dir.), Vocabulaire européen des philosophies : dictionnaire des intraduisibles, Paris, Éditions du Seuil/Le Robert, 2004.
· Derrida Jacques, Le Monolinguisme de l’autre, Paris, Galilée, coll. « Incises », 1996.
· Derrida Jacques, « Des tours de Babel » in Psyché, Inventions de l'autre, Paris, Galilée, coll. « La philosophie en effet », 1987, rééd. 1998.
· Eco Umberto, La Recherche de la langue parfaite dans la culture européenne, [1993] Paris, Éditions du Seuil, 1997 (traduit de l’italien).
· Jakobson Roman, « Aspects linguistiques de la traduction », in Essais de linguistique générale, trad. fr. et Préface de N. Ruwet et R. Jakobson, Paris, Éditions de Minuit, 1963, nouvelle éd. 2003.
· Meschonnic Henri, Poétique du traduire, Paris, Verdier, 1999, rééd. 2002.
· Ricœur Paul, Sur la traduction, Paris, Les Belles Lettres, coll. « Traductologiques », 2018 [1re éd. 2004].
· Steiner George, After Babel. Aspects of Language and Translation, London, Oxford University Press, [1975] ; Après Babel. Une poétique du dire et de la traduction, trad. fr L. Lotringer, Paris, Albin Michel, 1978.