Agenda
Événements & colloques
Littérarisation(s) 3 (Amiens)

Littérarisation(s) 3 (Amiens)

Publié le par Marc Escola (Source : Audrey Duru)

Cette journée d'étude s'inscrit dans un cycle de rencontres organisées depuis un an autour d’une enquête collective. Elle poursuivra le travail entamé par des membres du Grihl (Groupe de Recherche Interdisciplinaire sur l'Histoire du Littéraire, EHESS-Paris 3) sous la forme de présentations de dossiers problématisées, suivies de temps de discussion.

Telle serait même une définition possible de la littérature à ce moment de son histoire, une définition par défaut qui rendrait compte du processus de constitution de l’objet qu’on cherche à définir (on le sait, le terme de littérature ne commence à être employé dans le sens qui nous est familier que dans le second tiers du XVIIIe siècle) : elle pourrait être l’ensemble des productions scripturaires qui ne peuvent être identifiées à une discipline de savoir s’incarnant dans un lieu fixe, un corps (l’Université par exemple) ou un statut social juridiquement codifié. […] Au fond, « la » littérature n’est alors que l’espace mouvant d’une littérarisation.
Christian Jouhaud, Pouvoirs de la littérature. Histoire d’un paradoxe, Paris, Gallimard, « Nrf Essais », 2000, p. 21.

Ce projet consiste en l’exploration de processus de classement des écrits qui, dans des configurations sociales données, aboutissent à leur qualification comme « littéraire ». Ces processus, que l’on choisit de désigner sous le nom de « littérarisation », commencent à devenir particulièrement identifiables avec le développement d’un marché de la nouveauté imprimée en français, à partir de la seconde moitié du XVIe siècle. On observe alors la prolifération de discours qui s’autonomisent, comme l’a montré Ch. Jouhaud, des lieux, corps et institutions auxquels se rattachait traditionnellement la production des discours. Ces processus engagent de multiples acteurs sociaux impliqués dans la production de discours et de livres : auteurs, éditeurs / imprimeurs, patrons et mécènes, critiques et lecteurs, etc. Leur étude demande de s’inscrire dans un long terme, qui permet d’analyser les modes de classement, déclassement ou revalorisation des productions dites littéraires de leur première publication à nos jours.

Sans vouloir fixer à priori une définition stable du mot « littérarisation », on cherchera à analyser des procédés d’inscription des écrits dans la littérature et la manière dont cette catégorisation détermine leurs modes d’existence sociale et les usages qui en sont fait, leur circulation, leur transmission, ainsi que leur intégration dans un certain type de patrimoine, à la fois matériel (des collections, des bibliothèques…) et symbolique. On voudrait ainsi faire apparaître les gestes de catégorisation et de différenciation qui ont participé à l’institution de « la » littérature à part d’autres genres d’écriture et les processus sociaux spécifiques que cela engendre. Il ne s’agit pas de dire qu’il y a des textes qui sont de la littérature et d’autres pas, mais bien de se pencher sur les opérations de valorisation des écrits et des auteurs que produisent la possibilité et le fait d’en désigner certains comme « littéraires ».

La notion de « littérarisation » est à ce titre un outil permettant de réfléchir sur l’institution de la valeur des discours dans différentes configurations sociales. Le projet n’interdit nullement de travailler des objets très inscrits dans le patrimoine littéraire aussi bien que sur des écrits moins légitimes. Il permet de revenir sur des récits canoniques d’apparition de la littérature et d’interroger les temporalités cumulatives de la production de ce patrimoine.

Programme

10 h – Introduction, Fanny Boutinet et Audrey Duru

11 h – Du parterre au cabinet : la littérarisation du répertoire de la Comédie-Française (1720-1760) dans la presse périodique, une affaire d’impressions ?
Sara Harvey – Université de Victoria (Canada), Études françaises et francophones

13 h 30 – La littérarisation d’une banlieue de Paris, le Romainville de Paul de Kock
Constance Barbaresco – E.H.E.S.S. (Paris), Littérature française des XIXe-XXe s.

15 h 00 – Les gestes éditoriaux de Marie de Gournay : le cas de l’Adieu (1610 ; 1626)
Lucie Rousseaux – Université de Dijon, Littérature française du XVIIe siècle

16 h 30 - Conclusions de la journée

Participants à la discussion

Mathilde Bombart, Lyon 2
Laurence Giavarini, Dijon
Flavie Kérautret, Nanterre
Caroline Mogenet, Versailles-Saint-Quentin
Marine Roussillon, Arras
Nicolas Schapira, Nanterre

Organisation : Fanny Boutinet et Audrey Duru, université de Picardie-Jules Verne