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Écrire, décrire le social ? Mutations et identité(s) dans la littérature contemporaine en français (d’)après Annie Ernaux (Forum APEF 2023, Braga, Portugal) | 12-13 octobre 2023

Écrire, décrire le social ? Mutations et identité(s) dans la littérature contemporaine en français (d’)après Annie Ernaux (Forum APEF 2023, Braga, Portugal) | 12-13 octobre 2023

Publié le par Faculté des lettres - Université de Lausanne (Source : Maria Cabral)

« Comment ne pas s’interroger sur la vie sans le faire aussi sur l’écriture ? Sans se demander si celle-ci conforte ou dérange les représentations admises, intériorisées sur les êtres et les choses ? Est-ce que l’écriture insurgée, par sa violence et sa dérision, ne reflétait pas une attitude de dominée ? » Formulées par Annie Ernaux dans son discours de réception du Prix Nobel de la littérature, le 10 décembre 2022, de telles questions ne font pas seulement écho aux thèmes de la honte et de la haine, du ressentiment et de la révolte, prégnants dans son œuvre ; elles reflètent le basculement profond du rapport de la littérature au social et des processus mêmes de légitimation. Écrivaine et porteuse des voix des humiliés et des insurgés, mêlée à la sienne propre, son œuvre est la première, dès Armoires vides (1974), à mettre des mots sur des ressentis muets de tout un chacun(e).

Le récit de soi dialogue alors avec l’analyse sociologique ; histoire personnelle et histoire collective s’entrelacent et ouvrent la voie à de nouveaux modes de représentation littéraire ancrée sur la réalité sociale. Les questions des (in)égalités sociales, de la place des femmes et de toutes formes de marginalisation face à la culture dominante nous tendent le miroir du passage d’un monde à un autre. Loin d’une délectation personnelle, écrire devient une révolte permanente : usages, langages et imaginaires se réinventent dans ce mouvement.

La question du statut de la littérature comme celui de la représentation devient par ailleurs, depuis quelques années, particulièrement sensible dans les ouvrages critiques comme dans les discours des écrivains eux-mêmes. Après les successives crises du roman (depuis le naturalisme aux années vingt, en passant par le nouveau roman et en allant jusqu’à l’extrême contemporain), les devenirs et les réévaluations du littéraire dans le monde des Cultural Studies, de la mise en cause du canon et des genres « mineurs », de la notion d’ institution et celle de « champ » ont progressivement invité la littérature à considérer plus explicitement les conditions de production, de réception, de lecture et de circulation que ses en(jeux) proprement esthétiques. Cette tendance s’inscrit dans l’intérêt croissant de la critique littéraire pour d’autres discours (géographie, droit, médecine, éthologie, écologie), à l’heure de la globalisation, où nos références littéraires s’ouvrent au monde (notamment grâce à la traduction et aux approches transculturelles du fait littéraire), ce qu’étaye la notion de « World Literature ».

Or, tout l’enjeu épistémologique des nouveaux paradigmes de la littérature ressortit à un défi : celui qui consiste à se créer une voix propre, dans un processus temporel, personnel et différentiel sans s’aliéner des ressentis de nos sociétés et de nos identités. En quoi la littérature reste-t-elle une parole particulière sur le monde, voire un langage sur le monde ?

En quoi cristallise-t-elle les revendications sociales, culturelles, politiques de notre époque, celles du genre et de la classe et de l’espèce, des migrations et du post-colonialisme, de la mémoire et du trauma, de l’environnement et de l’écologie ? Et en quelle mesure la figure de l’auteur, dégagée de la dimension d’auctorialité consacrée par le Romantisme, mais aussi de la « mort » proclamée par la discussion théorique au XXe siècle, ressortit-elle à une volonté de témoignage, voire d’action ?

Ce sont ces devenirs et ces mutations que nous invitons à décliner et interroger dans la pluralité et la complexité culturelle où se manifeste et se transmet la littérature de langue française à partir de 1974, balise chronologique de départ du corpus considéré dans ce colloque.

Organisée à l’occasion du 20e anniversaire de l’Association Portugaise d’Etudes Françaises (APEF), cette Rencontre se déroulera dans le merveilleux cadre bucolique et écotouristique d’Amares (à 10 km de la ville historique de Braga), plus précisément à la Bibliothèque Municipale Francisco de Sá de Miranda ; ce qui procurera aux participant(e)s un contact privilégié avec la nature tout en restant branché(e)s sur le fabuleux patrimoine culturel de Braga et ses alentours, et à 60 km de Porto.

Les propositions de communication devront s’inscrire dans un ou plusieurs des axes suivants :

·         Construction et identité dans et par la littérature
·         Mutations des régimes d’écriture de soi (autobiographie, autofiction) 
·         Écrire, décrire la réalité sociale en régime littéraire (fiction, théâtre, poésie) 
·         Théorisation de l’utilité de la littérature
·         Sexe et genre : autodétermination, et nouvelles subjectivités
·         Mutation du monde et changement de classe par / dans la littérature 
·         Expérience du monde et appropriation des formes littéraires 
·         Nouvelles figures de l’auteur
·         Champ littéraire et processus de légitimation 
·         Rapport universel / particulier à l’épreuve de la traduction
·         Problématisation, voire contestation du dualisme dominant-dominé dans la littérature
·         Subjectivités posthumaines.

 
Références bibliographiques :

Aron, Paul. 2006. La Littérature prolétarienne en Belgique francophone depuis 1900, Bruxelles, Labor, « Espace Nord ».
Aron, Paul, Bertrand, Jean-Pierre (dir.). 2017. « Le sens du social », Revue Romantisme, 175, 2017/1. 
Baetens, Jan. 2003. « Les ‘Études Culturelles’, encore une exception      française ? ». In (2003). Les Études littéraires francophones : état des lieux. Lille : Travaux du Conseil Scientifique de l’Université Charles-de-Gaulle-Lille 3, pp. 35-47.
Barthes, Roland. 1984. « La mort de l’auteur » (1968), In Le Bruissement de la langue, Paris, Seuil.
Bessière, Jean. 2010. Le Roman contemporain ou la problématicité du monde. Paris,Presses Universitaires de France.
Bhabha, Homi K. 2007. Les Lieux de la culture. Une théorie postcoloniale, trad. de l’anglais par F. Bouillot, Paris, Payot.
Damrosch, David. 2009. Teaching World Literature, New York, MLA.
Moretti, Franco. 2000. « Conjectures on World Literature », New Left Review, n° 1, p. 55-67.
Ernaux, Annie. 2011. (2003). L’Écriture comme un couteau, Entretien avec Frédéric-Yves Jeannet, Paris, Gallimard, rééd. Folio.
Foucault, Michel, « Qu’est-ce qu’un auteur ? ». 1994 (1969). Bulletin de la Société française de philosophie, 63e année, n° 3, juillet – septembre 1969, repris dans Dits et Écrits, I, Paris, Gallimard.
Lejeune, Philippe. 1975. Le Pacte autobiographique, Paris, Le Seuil.
Lestel, Dominique. 2021. Machines insurrectionnelles. Une théorie postbiologique du vivant, Paris, Fayard.
Mbembé, Achille. 2020. Brutalisme, Paris, La Découverte.
Moura, Jean-Marc. 2005. Littératures francophones et théorie postcoloniale. Paris : Presses Universitaires de France.
Pradeau, Christophe, Samoyault, Tiphaine (dirs.). 2005. Où est la littérature mondiale ?, Saint-Denis, Presses Universitaires de Vincennes.
Simon, Anne. 2021. Une bête entre les lignes. Essai de zoopoétique, Marseille, Wildproject.
Viart, Dominique. 2018. « Les littératures de terrain. Enquêtes et investigations en littérature française contemporaine », Repenser le réalisme, Montréal, Cahier ReMix, no 07, http://oic.uqam.ca/fr/remix/les-litteratures-de-terrain-enquetes-et-investigations-en-litterature-francaise-contemporaine.
Viart, Dominique. 2019. « Comment nommer la littérature contemporaine ? », Atelier de théorie littéraire de Fabula, https://www.fabula.org/ressources/atelier/?Comment_nommer_la_litterature_contemporaine.

LANGUE DE TRAVAIL : Français

CALENDRIER :
31 mai 2023 : date butoir pour soumettre des propositions de communication.
15 juin 2023 : date limite pour la réponse du comité scientifique.
1er septembre 2023 : diffusion du programme prévisionnel.

SOUMISSION :
Toutes les propositions de communication seront soumises à l’évaluation du comité scientifique du colloque. Prière d’indiquer l’axe de travail retenu. Les communications admises ne dépasseront pas les 20 minutes. Pour soumettre votre proposition de communication, sous forme d’un résumé de 300 mots accompagné d’une courte notice biobibliographique, nous vous prions de nous joindre à l’adresse électronique suivante : forumapef2023@gmail.com

INSCRIPTION :
Frais : 120,00€
Membres de l’APEF à jour ou nouveaux adhérents APEF : gratuit
CEHUM : 80,00€
MODALITÉS DE PAIEMENT :
Virement bancaire : IBAN : PT50 0010 0000 3413 8130 0014 4
BIC : BBPIPTPL
(Photocopie du virement ATM envoyée en version numérisée au courriel apef.pt@gmail.com)

Les textes sélectionnés à l’issue du colloque feront l’objet d’une publication, sous condition d’avis favorable du comité de lecture (évaluation en double aveugle). 

COMITÉ D’ORGANISATION :
José Domingues de Almeida, APEF, Faculdade de Letras da Universidade do Porto
Cristina Álvares, CEHUM, Escola de Letras, Artes e Ciências Humanas
Ana Maria Alves, APEF, Instituto Politécnico de Bragança
Maria de Jesus Cabral, Escola de Letras, Artes e Ciências Humanas
João da Costa Domingues, APEF, Faculdade de Letras da Universidade de Coimbra
Dominique Faria, APEF, Universidade dos Açores
Sérgio de Sousa Guimarães, CEHUM, Escola de Letras, Artes e Ciências Humanas
Ana Isabel Moniz, APEF, Universidade da Madeira
Maria de Fátima Outeirinho, APEF, Faculdade de Letras da Universidade do Porto
Conceição Varela, CEHUM, Escola de Letras, Artes e Ciências Humanas