Archives
Poétiques des archives dans les œuvres littéraires et artistiques à la première personne
Appel à contributions - Troisième numéro de la revue en ligne Écriture de soi-R - 2023
Notre revue
Écriture de soi-R est née en 2020 de l'envie de produire un contenu pluriel autour des écritures à la première personne.
Cette revue en ligne s'intéresse à la fois à celles et ceux qui les produisent et à celles et ceux qui les étudient.
Écriture de soi-R propose des articles scientifiques autour des écritures artistiques du Je - autobiographies, autofictions et récits hybrides. Elle publie également des récits à la première personne de chercheurs et chercheuses en littérature à travers le monde et des journaux, compte rendus, témoignages de lecture d'œuvres artistiques interrogeant le Je, le réel, l’acte de création.
Elle propose des contenus réguliers au sein de sa rubrique “Au fil de l’eau”, alimentée tout au long de l’année de textes de différentes formes, envoyés de manière spontanée, s’articulant autour des écritures à la première personne.
Chaque année, elle propose un numéro, consacré aux écritures à la première personne, autour d’un thème particulier.
Écriture de soi-R - Numéro 3 – « ARCHIVES »
Ce troisième numéro de la revue en ligne Écriture de soi-R, "Archives", entend explorer dans toute leur complexité les archives dans la création littéraire et artistique. Au XXIe siècle, les archives connaissent un renouveau dans leur forme et leur usage. Matérielles et immatérielles, sonores, visuelles, numériques ou encore papier, les archives servent la création et amènent à un dépassement de leur seule utilisation à but scientifique et historique. En plus de constituer un matériau nécessaire et complexe, les archives deviennent moteur et sujet de création.
Dans les productions à la première personne les artistes sont amené.e.s à se considérer comme archive vivante afin de faire de leur vécu et de leur corps le matériau principal de leurs créations. Il convient de distinguer deux utilisations des archives produites à partir du Je :
1) les archives utilisées pour faire œuvre (dans le cadre des productions à la première personne)
2) les archives (des productions à la première personne) considérées dans un rapport plus pratique, produites par et/ou pour les archivistes
Que l’on songe, pour le cinéma, au film Blow Up d’Antonioni, en arts contemporains aux installations de Boltansky ou à la dernière exposition de Sophie Calle “Les fantômes d’Orsay” (2022), en philosophie à l’ouvrage Mal d’Archive de Derrida ou encore en littérature à l’ouvrage La carte postale d’Anne Berest, les archives se pensent dans leur singularité et leur pluralité sémantique.
De plus, la place des archives dans les milieux minorisés soulève également bon nombre de questionnements quant au rapport à la mémoire et à la construction de soi. Ainsi, que nous pensions aux archives féministes, postcoloniales ou LGBTQIA+ et à leur influence sur la construction de l’identité, les archives concernent tout à la fois les collectivités et les individu.e.s.
Ce numéro entend contribuer à l’analyse de la place, de la forme, de la fonction ou encore du matériau et du motif des archives dans les créations littéraires et artistiques témoignant d’une dimension intime.
1. Archives physiques
C’est en premier lieu la dimension physique des archives en tant qu’elle peut contribuer à faire œuvre qui nous intéresse. Lorsque le Je est à l’origine de ses propres archives, l’objet constitué par le manuscrit ou par une œuvre originale peut apparaître comme un premier biais d’accès à son identité ou à son intimité.
Le manuscrit, rendu public, relève à la fois de ce qui est conservé de l’acte de création, mais apporte également un outil d’analyse du Je à l’origine de l’écrit. Il peut ainsi être considéré comme éclairant ce qui constitue l’identité d’un.e écrivain.e ou d’un.e artiste dans sa production matérielle mais également être utilisé, réinvesti par les artistes elleux-mêmes comme faisant partie intégrante de leur œuvre.
Concernant cet axe, nous encourageons notamment les critiques généticien.ne.s à éclairer cette analyse physique de l’archive, à la fois support et matériau dans le cadre de l’écriture à la première personne ou dans le cadre de l’étude d’un processus de création.
2. Un objet de mémoire fuyant
D’autre part, parfois, l’archive physique vient à manquer, à disparaître, ou à être détruite. Que cela relève ou non d’une volonté consciente des artistes, nous souhaitons interroger à la fois l’acte de destruction, ce que l’on enlève de soi, et l’acte de compensation, ce que l’on recrée physiquement à partir du manque d’archive.
Lorsque les archives disparaissent, qu’elles sont difficiles d’accès, c’est également parfois en raison de leur contenu : que faire de l'archive ou de son absence quand elle relève d’un épisode traumatique, du point de vue individuel comme collectif ?
Nous souhaitons, dans ce troisième numéro, interroger les liens entre la mémoire et les archives, qu’elles soient familiales ou collectives (archives militaires, archives locales, archives communautaires). Dans les récits de soi, le support et la construction même des archives, apparaît souvent problématique lorsqu’ils s’établissent en lien avec des événements violents, cachés ou traumatiques.
3. Les mémoires oubliées
C’est également le manque d’archive ou la difficulté à les constituer dans le cadre précis d’une communauté dominée ou minorisée qui nous intéresse ici.
L’archive interroge le rapport à l’histoire : elle est souvent à la fois l’instrument et le résultat d’une forme de pouvoir d'invisibilisation conscient.
Dans cette optique, nous serons particulièrement attentif.ves aux propositions témoignant de la production d’archives en direct (proposée par un grand nombre d’associations) et du travail historiographique mené actuellement pour sortir de schémas de domination, et à leur lien avec la construction des identités et des intimités.
4. Utilisation des archives
Ce dernier axe d'appréhension des archives permettra d’interroger leur réinvestissement dans le cadre des écritures à la première personne, ou plus largement des œuvres qui ont trait à l’intime. De nombreux débats se posent régulièrement dans le milieu de l’édition quant à la publication posthume de textes voire d'œuvres intimes. Que fait-on, que peut-on faire, de ce type d’archives ?
De plus, dans le cadre des productions à la première personne, quelle est la place de l’archive, quelle utilisation en font les artistes pour questionner leur Je ? Ces questions entraînent alors celles du matériau et de la forme.
Cet axe d’interrogation ouvre un vaste champ d’étude allant de l’histoire de l’art à la sociologie en passant par la littérature.
5. Les propositions
Les articles et compte-rendus de lecture viendront interroger les liens étroits entre le Je et les archives dans le domaine de la littérature, des arts, et des sciences humaines au sens large - en s’inscrivant dans l’un des axes proposés par l’appel ci-dessus.
Enfin, si les archives peuvent être étudiées dans des articles de fond, nous accepterons également des propositions relevant du témoignage de jeunes chercheur.euse.s ou de jeunes auteur.ice.s qui sauront faire écho, par la restitution de leur expérience, à ces analyses théoriques que nous souhaitons proposer.
Envoi des propositions
Les propositions de contribution devront s’inscrire dans une des catégories suivantes :
- Articles scientifiques de fond consacrés aux sujets et aux interrogations proposé.e.s par ce numéro ;
- Compte-rendus, chroniques ou journaux de lecture d'œuvres littéraires et de manuscrits / recensions théoriques en lien avec les écritures ou expressions à la première personne et la notion d’archives ;
- Témoignages de chercheur.euse.s articulés autour des archives (étudiées ou produites) dans leur travail, ou de leur rapport à la notion d’archives ;
Toutes les propositions de contributions doivent être envoyées au format .docx avant le 10 février 2023 à l’adresse ecrituredesoi.revue@gmail.com
Elles devront comporter un titre, un résumé de votre proposition (environ 300 mots) ainsi qu’une biobibliographie.
Elles seront étudiées par le Comité éditorial avant le 20 février 2023.
Les articles ou textes dans leur version définitive devront nous parvenir avant le 30 avril 2023 et respecter les normes de rédaction de la revue :
https://www.ecrituredesoi-revue.com/normes-de-redaction
Ils seront ensuite transmis au comité scientifique pour une double relecture aveugle.
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Quelques références
- Antonioni, Michelangelo. Blow up, Londres, Bridge Films, 112 min, 1966.
-Basto, Maria-Benedita et Marcilhacy, David. L’Archive sensible : mémoires, intimité et domination. Afrique, Amérique latine, Péninsule ibérique, Paris, Éditions hispaniques, 2017.
- Bouju, Emmanuel, « Le noir et le rouge. Revoir et corriger l’archive/la littérature », Critique, vol. 8-9, n° 879-880 | 2020, 768-780.
- Chevrier, Jean-François et Roussin, Philippe (dir). Le Parti pris du document. Littérature, photographie, cinéma et architecture au xxe siècle, Paris, CETSAH/Seuil, 2001.
- Chevrier, Jean-François et Roussin, Philippe (dir). Des faits et des gestes. Le parti pris du document. 2, Paris, CETSAH/Seuil, 2006.
- Cixous, Hélène. Tours promises, Galilée, 2004.
- Derrida, Jacques. Mal d’Archive, Paris, Galilée, 1995.
- Ernaux, Annie. Les Années, Gallimard, 2008.
- Farge, Arlette. Le Goût de l’archive [1989], Paris, Seuil, Points, 1997.
- Huglo,Marie-Pascale. Poétiques de l’archive, Volume 35, numéro 3, hiver 2007.
- Lacheny, Marc, Huftier, Arnaud, Amsellem, Frédérique, Hincker, Louis. Les Archives familiales des écrivains. Des matériaux, un motif, une question, Presses universitaires de Valenciennes, 2018.
- Piégay-Gros, Nathalie. « Récits d’archives », Écrire l'histoire, 13-14 | 2014, 73-87.
- Sheringham, Michael. « La figure de l’archive dans le récit autobiographique contemporain », Lendemains, nos 107-108 | 2002, 25-41.
- Ruffel, Lionel. « Un réalisme contemporain : les narrations documentaires », Littérature, no 166 | 2012, 13-25.
- Scott, Victoria H. F. « Les archives d’art contemporain », Perspective, no 3 | 2008, 455-461.
- Wachtel, Nathan, Des archives au terrain. Essais d’anthropologique historique, Paris, EHESS/Gallimard/Seuil, 2015.