Essai
Nouvelle parution
Lionel Piettre, L'ombre de Guillaume Du Bellay sur la pensée historique de la Renaissance

Lionel Piettre, L'ombre de Guillaume Du Bellay sur la pensée historique de la Renaissance

Publié le par Université de Lausanne

La littérature renaissante accorde une place forte à l’histoire-jugement, soit l’histoire écrite du point de vue de ses acteurs, qui mêle témoignage et commentaire, méditation humaniste sur la fortune et réflexion politique sur les conseils et leurs effets. L’entourage de François Ier espéra que son règne serait ainsi raconté par un Thucydide ou un César français, rôle qui échut à Guillaume Du Bellay, seigneur de Langey (1491-1543).

Si ses Ogdoades inachevées furent le fruit d’une réflexion collective (associant Rabelais, Jean Du Bellay, Sleidan), elles sont pourtant profondément originales, comme le révèle l’analyse du Prologue (ici édité) et des fragments des Ogdoades. Leur influence se donne à lire chez Bodin et, plus encore, chez Martin Du Bellay et Blaise de Monluc, tous héritiers de la méthode de Langey. L’ombre de Guillaume Du Bellay s’étend enfin sur les Essais de Montaigne qui, tout en refusant d’écrire l’histoire, la commente en « diligent lecteur » – selon le mot de Langey.

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TABLE DES MATIÈRES

CONVENTIONS BIBLIOGRAPHIQUES ET ÉDITORIALES

INTRODUCTION

L’histoire-jugement : essai de définition

Écrire et juger l’histoire

Le conseil, « note fondamentale » de l’histoire-jugement

La vérité de l’histoire-jugement

PREMIÈRE PARTIE. Historia magistra prudentiae. Nécessité de l’histoire-jugement sous le règne de François Ier

PROLOGUE : Jeux d’ombres

CHAPITRE PREMIER : Le conseil, « note fondamentale » de l’histoire-jugement

Le « privé » au coeur de la décision politique

Le conseil, pratique et culture de gouvernement

Le conseil, le jugement et l’action dans la pensée de la prudence

Du jugement du conseiller à la « discrétion » de l’historien-juge

Historiographie et représentations des conseils

Le conseil à la jonction de l’éloquence et de l’ars historica

Rhétorique et raison politique : les « concions » ou la mise en discours des conseils

« Concions et privés discours » : vérité des conseils, franchise de l’historien

Autour de Plutarque et Lucien : franchise et discrétion de l’historien

Limites de l’hypothèse foucaldienne d’une parrhêsia anti-rhétorique et orale

Comprendre la parrhêsia par ses effets : la franchise est ce par quoi « brille » la vérité

Comprendre la parrhêsia par ses causes : « discrétion » du conseiller et de l’historien

CHAPITRE II : L’histoire contre mauvaise fortune

L’historien-juge, litteratus : l’utilité de l’histoire, une invention humaniste ?

Élever l’histoire par la rhétorique

« Restituer » l’histoire comme maîtresse de prudence

L’historien-juge, illitteratus : l’histoire comme expérience politique

Le modèle césarien

Enseignements de Commynes

L’historien-juge, « personne suffisante et digne » : l’historiographie à la croisée d’ambitions humanistes, nobiliaires et royales

« Les vaincus éclairés par la modestie » : Pavie et les lumières de l’histoire

« Apprendre son rôle » à la noblesse

L’honneur des armes et des lettres

Annexe 1. Paul Émile de Véronne, préface au De rebus gestis francorum

Annexe 2. Jacques Colin, épître dédicatoire à la noblesse de France

CHAPITRE III : L’épée, la plume et les corneilles. Mythes et mystères de Langey

Le mythe Langey, ou les visages d’un idéal

Mars et Minerve

Prudence et Fortune

Défaire le mythe

Histoire d’une histoire

La carrière de Langey : agir, donc écrire

La composition des Ogdoades : Langey maître d’oeuvre

La publication des Ogdoades : problèmes et hypothèses

Annexe 1. Pietro Aretino à Guillaume Du Bellay, 25 août 1541

Annexe 2. Tombeaux poétiques de Guillaume Du Bellay

Annexe 3. Tombeau de Guillaume Du Bellay, cathédrale du Mans

DEUXIÈME PARTIE. Empreintes et fragments. Langey en ses Ogdoades

PROLOGUE : Des visages de Langey

CHAPITRE IV : Les Ogdoades au coeur d’une réflexion collective sur l’historiographie

Culture et formation de Langey

Dolet historiographe

Jean Du Bellay : fragments d’une histoire-jugement

Sleidan : le regard du juriste

Rabelais ou l’histoire véritable

Annexe. Sleidan, « Praefatio »

CHAPITRE V : Une révolution historiographique. Le Prologue des Ogdoades

«Diligence » et « discrétion » de l’historien-juge

« Hystoire » contre « croniques »

Langey : « prebiteur » ou « prerepteur » ?

Une féconde indétermination générique

Annexe. Guillaume Du Bellay, Prologue des Ogdoades

CHAPITRE VI : Ulysse historien. La mise en oeuvre du projet des Ogdoades

«Débattre les causes et motifs des choses »

Les fragments latins : petites fautes et grands effets

L’Epitome : la raison dans le mythe

Les fragments français : comment le « feu » vient aux princes

L’expression du jugement des acteurs de l’histoire

Conseils précipités, conseils mesurés

Colères et expostulations

Paroles aux princes

Mémorialiste, avocat ou historien du roi ? La toile de Langey

« Ces memoires » : Langey, Je, Moi et la famille

La vérité des situations, ou la prudence vive

Haine, faveur et franchise

TROISIÈME PARTIE. L’art et l’inconvénient de « se mêler d’histoire »

PROLOGUE : Après les Ogdoades

CHAPITRE VII : Troubles dans les genres historiques

Développements de la méthode

L’ombre de Langey, dans celle de Commynes

Infortunes de Paul Jove

Fortunes de Langey

« Ce temps calamiteux des guerres civiles »

Les Du Bellay en une paix « Malassise »

Monluc : métamorphose d’une « remonstrance » en « commentaires »

Contours génériques et sociaux des Mémoires d’épée

Genres, limites, transgressions

Le regard de l’historien-juge

Histoires de famille

Annexe. Anonyme, Martin Du Bellay Seigneur de Langey preste serment de Chevalier de St Michel en 1555

CHAPITRE VIII : Ordre et désordres dans l’écriture du « commentaire »

« Le vent et la tourmente vint » : conseils et « hazards » de la guerre dans les Mémoires de Martin Du Bellay

La représentation des conseils : de la prudence à l’effroi

« Mais autrement en advint » : défaites et mauvaise fortune

L’écriture du désordre

Les voies de la vérité dans les Commentaires de Monluc

Le discours du professionnel : une question de maîtrise

À César, ce qui est à César : le discours sur les causes dans les Commentaires

Le bûcher des vanités : stratégies rhétoriques et ethos du parrhèsiaste

CHAPITRE IX : « Faits et dits » de soldats. La militarisation de l’histoire-jugement

Les « dits », ou l’éloquence de l’épée

La conformité du style au caractère

Les « dits » militaires

Les « petits faits », ou les limites de la prudence

Prudences bornées

Batailles et détails

À qui s’adressent les Mémoires et les Commentaires ?

ÉPILOGUE : Montaigne, « lecteur studieux et diligent » de Langey

Les Essais, l’histoire-jugement sans l’histoire

Du discours sur l’histoire à « l’histoire de ses moeurs et actions »

Le refus d’écrire l’histoire contemporaine

L’ombre de Langey dans les Essais

Montaigne vs. Langey : expérience et parrhêsia

Montaigne vs. Bodin : comment se mêler d’histoire sans être un « excellent historien » Un emprunt au Prologue des Ogdoades dans les Essais (I, 5)

La « discretion » de Montaigne, ou comment se passer des « effets »

Des « effets » aux Essais

Juger les hommes : bassesse et excellence de la « discretion » montaignienne

«Comme un voisin, comme un arbre »

CONCLUSION: L’histoire au futur

Un « moment Guillaume Du Bellay » : le mythe du bon conseil sans effets

«Dire sur ce qui peut advenir »

Moi ou Je

Le poids des circonstances

BIBLIOGRAPHIE

Sources primaires

Sources secondaires

INDEX