Josué Guébo est une figure active de l’univers littéraire ivoirien et africain. Depuis la publication de sa première œuvre poétique (L’Or n’a jamais été un métal), en 2009, cet écrivain s’impose avec acuité dans les milieux littéraires africains, non seulement, par le rythme effréné de ses publications, mais aussi, par les distinctions primant la qualité de ses productions. Il est, en effet, à ce jour, l’auteur de plus d’une vingtaine d’œuvres littéraires, sans compter ses contributions dans d’innombrables ouvrages collectifs. Ses œuvres s’inscrivent dans plusieurs genres (poésie, théâtre, nouvelle, littérature de jeunesse, essai), même s’il faut reconnaitre une nette dominance du genre poétique. Parmi ses multiples distinctions, l’on note le prix Tchicaya U Tam’si de la poésie africaine en 2014 avec Songe à Lampedusa, le deuxième prix d’excellence 2015 pour la littérature en Côte d’Ivoire, le Grand prix national Bernard Dadié, en 2017, pour son œuvre Aux chemins de Babo Naki.
Cette performance est corrélée à une intense activité pour la promotion de la littérature. Préfacier de nombreux textes, Président honoraire de l’Association des Écrivains de Côte d’Ivoire, ancien président de cette association (2011-2016), initiateur de multiples activités littéraires, Josué Guébo marque incontestablement la vie littéraire de cette dernière décennie, en Côte d’Ivoire. Cette posture militante, à la fois génératrice d’œuvres attrayantes et promotrice de la littérature, le situe dans la droite lignée d’illustres écrivains et universitaires ivoiriens comme Zadi Zaourou et Séry Bailly (pour ne citer que ceux-là) qui ont cru au pouvoir des belles lettres à transformer les mentalités. Cet engagement se perçoit surtout, au niveau de son écriture, à plusieurs niveaux : social, politique, culturel et esthétique.
On entendra par militantisme, l’engagement de l’écrivain au service d’une cause qui le transcende. Ainsi, au niveau social, l’écriture de Guébo prend parti pour les êtres fragiles et les défavorisés du sort. Qu’il s’agisse de ses œuvres poétiques ou de ses œuvres théâtrales, Josué Guébo ne cesse de prôner des idéaux de justice et d’humaniste. De la dénonciation de l’assujettissement de la femme en proie à la tyrannie du mâle (D’un mâle quelconque) à la plaidoirie pour un monde plus ouvert et plus juste où, par exemple, le sort des migrants africains ne se joue plus à « dos d’un radeau » dans les profondeurs de la méditerranée (Songe à Lampedusa), l’écrivain ivoirien aspire à un monde harmonieux et plus tolérant dans lequel les différences engendrent le progrès (Le blues des oranges).
Au niveau politique, son écriture est marquée par les rapports entre l’Occident et l’Afrique, notamment la revendication de la liberté du continent africain vis-à-vis de l’ancienne puissance colonisatrice. Presque toutes les œuvres de Josué Guébo portent la marque d’une telle revendication. Les œuvres les plus emblématiques porteuses de cette vision sont L’or n’a jamais été un métal, Carnet de doute et Mon pays, ce soir. Cette écriture de l’événement politique, s’inscrivant dans « l’urgence de l’actualité » et caractérisée par « une proximité avec les protagonistes » (Adom, 2014), met en relief l’engagement du poète ivoirien.
Refusant l’idée d’une littérature-monde dans laquelle toutes les différences culturelles sont effacées au profit d’un universalisme douteux, Josué Guébo opte plutôt pour une écriture de l’interculturalité. Son mot d’ordre semble « ni enfermement sclérosant, ni ouverture avilissante). C’est une écriture de la synthèse qu’il prône. C’est pourquoi elle « emprunte à la culture occidentale les moyens littéraires par lesquels le poète tente de combattre ce que, au plan politique, il considère comme l’idéologie ‘‘négriticide’’ de cette civilisation » (Adom, 2014). Mais, cela ne l’empêche pas de revisiter les mythes et les genres du terroir, afin de mettre à hauteur du regard sa vision du monde, comme l’illustrent des œuvres telles qu’Aux chemins de Babo Naki et Ô divin Zibody. L’un des lieux stratégiques de cette écriture de l’interculturalité semble les livres de jeunesse où la culture occidentale et la culture africaine se côtoient dans une perspective du donner et du recevoir.
Sur le plan strictement formel, l’écriture de Josué Guébo est riche d’une multitude de procédés stylistiques qui en font des moments d’extase et de haut degré de littérarité. Il s’y mêle de façon judicieuse une esthétique de la brièveté et de l’allusion, un jeu de symbolisation, un système figuré aussi dense que varié, le tout embarqué dans un style digeste. Chez Guébo, tous les procédés langagiers ne sont pas un formalisme creux qui se dissocierait de la dynamique militante qui engage toute son écriture. Les choix des symboles, de telle ou telle figure sont très souvent au service d’une rhétorique militante. Sa fameuse formule « Un mot n’est jamais aussi explosif que comprimé » illustre bien cette idée.
Outre ses productions littéraires, il s’agit aussi de prospecter la vision profonde de son expression artistique en général – il est également parolier – et son engagement philosophique, religieux et politique dont ses essais, articles de presse, et tribunes en accès libre sur les réseaux sociaux sont l’expression. C’est donc la question du penser et de l’impensé du discours chez Guébo qui sera au cœur de ces journées d’échanges scientifique ; et c’est l’écriture d’une posture d’écrivain autant que celle d’une posture d’auteur aussi engagé qu’est Josué Guébo que le laboratoire Observatoire National de la Vie et du Discours Politiques (ONVDP) et le Centre de Recherche et d’Études en Littérature et Sciences du langage (CRELIS) entendent soumettre à interrogation à l’occasion du colloque qu’ils organisent les 26, 27 et 28 octobre 2022. Ils invitent donc les spécialistes des Lettres et Sciences humaines, en général, à soumettre leurs réflexions sur l’écriture de Josué Guébo. L’objectif du colloque n’est pas de rendre hommage, avant l’heure, à un artiste qui continue de vivifier l’univers littéraire de ses productions. Il s’agit de croiser les regards transitoires de plusieurs spécialistes sur les fondements social, politique, culturel et esthétique d’une écriture qui continue encore son cheminement. Les axes de réflexion non exhaustifs sont les suivants :
- AXE 1 : Écriture et engagement chez Josué Guébo (littérature, chroniques, postures, positionnement, écriture migratoire, etc.) ;
- AXE 2 : Style et littérarité chez Josué Guébo ;
- AXE 3 : Ritualité, ancrage socioculturel et dimension philosophique de l’écriture guéboenne ;
- AXE 4 : Rhétorique, imaginaires et formes d’expression dans l’écriture de Josué Guébo (humour, argumentation etc.) ;
- AXE 5 : Paratexte et intertexte : entre héritage et influences dans la production guéboenne (mythopoétique, mythogenèse, etc.) ;
- AXE 6 : Humanisme, panafricanisme et interculturalité chez Josué Guébo.
NB : Ces axes sont indicatifs, toute proposition en rapport avec l’auteur et son inscription dans un courant de pensée artistique ou philosophique, de même que dans une historicité ou une thématologie spécifique sera appréciée.
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Bibliographie indicative
ADOM Marie-Clémence, 2014, Anthologie de la poésie ivoirienne (Tome 3). Découvrir les poètes de la dernière décennie, Paris, L’Harmattan.
ADOU Kouadio Antoine et ANGOHO Nomba Appolinaire, « Les humanités en péril dans l’écriture poétique de Josué Guébo et de Tanella Boni », disponible sur https://www.nzassa-revue.net.
ADOU Kouadio Antoine et ANGOHO Nomba Apollinaire, « Les humanités en péril dans l’écriture poétique de Josué Guébo et de Tanella Boni, NZASSA 1/2019, https://www.nzassa-revue.net/admin/img/paper/25.%20ADOU%20Kouadio%20Antoine%20et%20ANGOHO%20Nomba%20Appolinaire.pdf
DAO Sory, Décembre 2021, « Analyse stylistique de la phrase dans la poésie de Josué Guébo », In Lɔŋgbowu, Revue des Lettres, Langues et Sciences de l’Homme et de la Société, N° 012, Vol. 2, Université de Kara (Kara, Togo).
GNALÉGA René, 2018, Regard kaléidoscopique sur la poésie ivoirienne écrite, Abidjan, DOXA et PUMCI.
KAKPO Arnaud Pamphile Oyrou, Décembre 2019, « La transgressivité des espaces dans Destin de clandestin de Josué Guébo », In Sociotexte, Revue de sociologie de l’Afrique littéraire, No2, Université Félix-Houphouët Boigny (Abidjan, Côte d’Ivoire).
TERHMINA Imane, Black Odysseus: Mediterranean ‘Blues’ and Clandestine Migration in Josué Guébo’s Songe à Lampedusa, Contemporary French and Francophone Studies Volume 25, 2021 - Issue 3
https://bostonreview.net/articles/poets-sampler-josue-guebo-todd-fredson/
https://kenyonreview.org/reviews/april-micro-reviews/
https://angelcityreview.com/my-country-tonight/
https://medium.com/anomalyblog/between-the-naked-water-and-the-flower-of-the-iroko-c5996d5458dc
Modalités de soumission
Les propositions de résumé en français, n’excédant pas 500 signes, devront indiquer l’axe de référence, les Nom, Prénoms, et l’adresse de l’auteur ainsi que l’institution de rattachement. Elles seront être envoyés simultanément aux adresses suivantes le 07 septembre au plus tard :
sorydao84@yahoo.fr ;
diomandemory2002@yahoo.fr ;
dorgeleshouessou@gmail.com ;
Les frais de participation s’élèvent à 30.000 CFA pour les enseignants-chercheurs, 20.000 CFA pour les travailleurs et 10.000 CFA pour les éttudiants.
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Porteurs du projet
DAO Sory, Assistant, Université Alassane Ouattara
DIOMANDÉ Mory, Maître-Assistant, Université Félix Houphouët-Boigny
Dorgelès HOUESSOU, Maître-Assistant, Université Alassane Ouattara
Comité d’organisation
Membres de l’ONVDP et du CRELIS
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Comité scientifique
KOUADIO N’guessan Jérémie, Professeur (Linguistique), Université Félix Houphouët-Boigny, Membre de l’ASCAD (Côte d’Ivoire)
DADIÉ Djah Célestin, Professeur (Poésie), Université Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire)
KOUABENAN-KOSSONOU François, Directeur du Département de Lettres Modernes, Université Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire)
N’GUESSAN Assoa Pascal, Professeur (Stylistique), Université Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire)
FOBAH Éblin Pascal, Professeur (Stylistique), Université Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire)
KOUADIO Kobenan N’guettia Martin, Professeur (Stylistique), Université Félix Houphouet B. (Côte d’Ivoire)
GNALÉGA Réné Makagnon, Professeur (Poésie française), Université Félix Houphouet B. (Côte d’Ivoire)
ABOA Abia Alain, Professeur (Linguistique), Université Félix Houphouet B. (Côte d’Ivoire)
TOH BI Emmanuel, Professeur (Poésie africaine), Université Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire)
LOUKOU Koffi Fulbert, Professeur (Stylistique), Université Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire)
KOUACOU Jacques Raymond, Professeur (Littérature Orale Africaine), Université Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire)
COULIBALY Nanourougo, MCF (Analyse du discours), Université F.H.B. (Côte d’Ivoire)
KOBENAN Léon, MCF, (Roman) Université Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire)
BLÉ Kain Arsène, MCF, (Roman) Université Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire)
KOFFI Ehouman René, MCF, (Grammaire et linguistique françaises), UAO (Côte d’Ivoire)
KONAN Kanga Arsène, MCF, (Roman) Université Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire)
ADJASSOH Christian, MCF, (Poésie) Université Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire).