Appel à contribution pour un projet d’ouvrage collectif
La nouvelle francophone au Maghreb : entre féminisme et misogynie
L’intitulé de cet appel à contribution pour un projet d’ouvrage collectif invite à réfléchir sur la nouvelle maghrébine francophone, même si l’espace littéraire de la Méditerranée est fortement influencé par la langue et l’écriture arabe. L’intérêt de la réflexion réside, justement, dans une analyse de textes dont la singularité s’observe à deux niveaux que sont la pertinence de la thématique dans un contexte arabo-musulman (féminisme/misogynie) et l’univers marqué par une viscérale concurrence linguistique (arabe dialectal, classique, berbère, français, anglais, etc.).
Malgré l’espace sociolinguistique peu favorable, la nouvelle maghrébine de langue française brille de mille feux grâce aux auteurs de grande renommée comme par exemple en Algérie Rachid Mimouni, La ceinture de l’Ogresse (Seghers, 1990), Rabah Belamri, La lune va manger l’Ogresse (Le Serpent à plumes, 1990) , Leila Sebbar , Le ravin de la femme sauvage, ( Nouvelles Nouvelles, 1989), Assia Djébar, Femmes d’Alger dans leur appartement ( Albin Michel, 1980), en Tunisie , Salah Garmadi, Le Frigidaire ( Alif, 1986) , Leila Mâmi, Sawanaa tahtareq ( Un minaret brûle , 1968) et au Maroc, Tahar Ben Jelloun, Nouvelles ( Le grand livre du mois, 1997), Fouad Laroui, Les Noces fabuleuses du Polonais ( Julliard ,2015). Ces auteurs, en effet, ont, en majorité, ébauché plus d’une fois la problématique de la femme dans la société maghrébine. La question y occupe une place de choix dans la mesure où il s’agit de représenter la femme maghrébine dans une sphère sociale durement éprouvée ou embastillée par l’Islam et par des coutumes austères à coloration phallocratique. Pour Jacques Chevrier, dans un tel environnement, il faut bien le dire d’emblée, la première constatation qui s’impose au lecteur, c’est d’abord le refus pur et simple de la féminité . Ce refus de la féminité a fait la fortune de la littérature maghrébine pendant des décennies au point qu’elle a forgé un mythe péjoratif autour de la femme. Etre femme, écrit Chevrier, constitue donc pour certains personnages féminins « une infirmité naturelle » dont tout le monde a fini par s’accommoder. L’imaginaire maghrébin est, de la sorte, diabolisant vis-à-vis de la femme avec tout le champ lexical dépréciatif qu’il renferme : le corps, le sexe, la maternité, la prostitution, les travaux champêtres et domestiques, l’épouse en situation de polygamie, la soumission, la frustration, etc. En réalité, les personnages féminins, chez beaucoup d’écrivains de l’espace maghrébin (hommes et femmes) sont investis de rôles secondaires bien régis par la coutume et la religion islamique. On peut le dire aisément, la tendance misogyne de cette littérature est explicite dans une telle acception de la femme réprimandée, chosifiée, rejetée, conditionnée pour occuper les seconds rôles.
A contrario, dans les années 1980, une nouvelle génération d’écrivains majoritairement des femmes émerge sur les rives de la Méditerranée pour faire changer la donne. Dans leur quête de nouveaux horizons, ce mythe péjoratif construit autour de la femme est de plus en plus contesté. L’on parle d’émancipation, de révolte, de libération, d’indépendance de la femme nord-africaine longtemps mise dans une sorte d’enclos. Des prises de position féministe sont narrées sans contrainte. L’on évoque même l’idée d’un féminisme d’intention pour mettre en évidence ce revirement de situation. Le mythe de la femme positive, utile, et capable de s’émanciper prend toute la littérature et le Maghreb semble aborder un virage déterminant dans ce sens. Ce féminisme de fait participe de la richesse de cette littérature et la nouvelle qui en est un maillon important porte très loin les deux tendances thématiques : le féminisme et la misogynie. Il s’agit donc, au regard de ce qui précède, de présenter une contribution qui prend en compte l’une des deux tendances thématiques ou les deux à la fois.
L’objectif principal du projet d’ouvrage collectif est d’aboutir à des études pertinentes de nouvelles francophones du Maghreb qui abordent sans faux-fuyant la question du féminisme et celle de la misogynie dans un cadre balisé par la religion et des coutumes rudes. En clair, il s’agit de mettre en relief l’exploitation du féminisme et de la misogynie dans les nouvelles écrites en français au Maghreb.
Les propositions d’articles pourront s’inscrire dans les deux thèmes majeurs et, bien évidemment, dans leurs ramifications en n’omettant pas l’évidente question de l’écriture narrative nouvelliste en rapport avec la thématique de base.
Les contributions en français ne dépasseront pas 20 pages.
La date limite pour envoyer les articles précédés d’un résumé (avec les mots clés) est fixée au 31 décembre 2022.
Les contributions pourront être envoyées à : Antonin Zigoli, Maître de Conférences, Université FHB de Cocody Abidjan, zigolibokobli@gmail.com.
Les propositions (le titre de la contribution suivi d’un résumé provisoire) sont à faire parvenir, le plus tôt possible à l'adresse indiquée.