Dessins et vignettes de Michel Danton.
Le carnet s’offre à ma droite, le matin, pour y jeter les déboires, les tristesses du jour précédent, les menues satisfactions aussi, comme d’une lettre envoyée ou reçue, d’une petite arrivée d’argent, et puis, peut-être, d’une idée.
Publiés entre septembre 1987 et octobre 1988, ces neuf Dextre Senestreconstituent l’ultime ensemble, à la suite de nos Reportage (2020) et Amorces(2021), des pages de carnet soumises à la NRF et, jusqu’ici, jamais réunies en volume. Bribes de rêves, citations perçantes, survol du présent et observations vagabondes sont marquées du regard attentif et malicieux qu’Henri Thomas porte sur lui et son monde. Ne suivant aucune règle – surtout pas celles qu’imposerait un genre littéraire – si ce n’est le besoin d’écrire et son plaisir, la plume traverse les évènements, aussi anodins soient-ils, pour qu’y soient sondés les désirs et les craintes de l’homme qui les rapporte. Comme les fragments qu’elles sont, ceux d’une œuvre qui mériterait à être plus amplement remarquée, ces notes épousent le rythme de l’existence – ses imprévus, sa soudaineté – et forment, en tous sens, une juste et délicieuse littérature.
Henri Thomas est né en 1912. Proche de Gide et du groupe de la NRF, il noue très tôt de solides amitiés littéraires. Il publie en 1940 son premier roman, Le seau à charbon, puis l’année suivante son premier recueil poétique, Travaux d’aveugle. Après quelques années à Londres, John Perkins, prix Médicis en 1960, puis, Le promontoire, prix Femina en 1961, lui assureront une certaine notoriété. L’année 1965 marque le début d’une période sombre. Devenu veuf il ne publie que de minces plaquettes avant de renouer, en 1985, avec une intense activité créatrice.