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Sur les pas de Guy de Maupassant au Maghreb : le réel et la fiction ou la naissance d’une écriture hybride (Sfax, Tunisie)

Sur les pas de Guy de Maupassant au Maghreb : le réel et la fiction ou la naissance d’une écriture hybride (Sfax, Tunisie)

Publié le par Marc Escola (Source : Mohamed Amine KACEM)

Université de Sfax (Tunisie)

Faculté des Lettres et Sciences Humaines

Laboratoire de Recherche Interdisciplinaire en Discours, Art, Musique et Economie (LARIDIAME, LR18ES23)

et Association des Amis de Flaubert et de Maupassant (Rouen- France)

Colloque international

Appel à communications

 « Sur les pas de Guy de Maupassant au Maghreb : le réel et la fiction ou la naissance d’une écriture hybride »

1, 2 et 3 mars 2023

À l’occasion du 130e anniversaire de la mort de Guy de Maupassant survenue le 6 juillet 1893, « Le Laboratoire de Recherche Interdisciplinaire en Discours, Art, Musique et Économie » (le LARIDIAME LR18ES23) et « l’Association des Amis de Flaubert et de Maupassant » (Rouen, France) organisent un colloque international intitulé « Sur les pas de Guy de Maupassant au Maghreb : le réel et la fiction ou la naissance d’une écriture hybride » à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Sfax (Tunisie) le mercredi 1er, le jeudi 2 et le vendredi 3 mars 2023.

Le but de ce colloque est d’étudier la place qu’occupent l’Algérie et la Tunisie chez Guy de Maupassant. En fait, dès le début de sa carrière, il est attiré par le Maghreb où il séjourne à trois reprises. Son premier voyage a eu lieu en juillet 1881 et a duré environ trois mois. Il se rend en Afrique du Nord en tant que reporter chargé, par Le Gaulois, d’une enquête journalistique sur la vie des colons et des arabes ainsi que sur l’insurrection de Bou-Amama et les troubles dans la région d’Oran et à la frontière tunisienne. Il traverse l’Atlas vers Saida, Ain El Adjar, Trafaoua et Krafallah et découvre Alger, la Kabylie et Constantine. 

En novembre 1888, Maupassant part pour son deuxième voyage en Afrique. Après avoir séjourné à Alger et à Hammam Righa, il arrive le 10 décembre à Tunis. Il fait une expédition dans le sud, qui donnera lieu à l’article « Vers Kairouan », publié le 1er février 1889 dans la Revue des Deux Mondes.

Du 25 septembre à la mi-novembre 1890, Maupassant effectue son troisième voyage en Afrique, en compagnie de Marie et Édouard Kann, de la nièce de Marie, Ida Rubinstein, et de Pierre Pichot, directeur de la Revue britannique.

Ces divers voyages dévoilent la vie d’errance et de « locomotion perpétuelle sur terre et sur mer » (Goncourt, Journal, 15 juin 1889) qu’aime mener l’auteur de Bel-Ami. Il est en déplacement constant et fait défiler sous nos yeux de multiples paysages dans des chroniques comme « Sur les hauts plateaux »[1], « Dans le désert, paysages d’Afrique »[2] et « Le Pays du sel »[3]. En fait, Maupassant veut tout voir et tout découvrir de ses propres yeux comme il l’affirme dans la première chronique qu’il envoie d’Alger au Gaulois : « En traversant l’Algérie, province par province, je m’efforcerai de saisir si c’est possible, la situation exacte où se trouvent le colon et l’indigène. »[4]

Or, pour réaliser un tel projet, Maupassant est confronté à plusieurs défis : comment saisir cette réalité maghrébine si mouvante et si complexe ? Lui est-il possible de surmonter les obstacles linguistiques et culturels, appréhender le Maghreb dans sa diversité et son opacité et se libérer de l’esthétique des récits de voyage des Orientalistes de l’époque ? Par quels moyens réussit-il à conduire les lecteurs du Gaulois à trouver non pas la confirmation du déjà lu, mais la découverte de l’actualité politique, sociale, économique, culturelle de l’Algérie et de la Tunisie de l’époque ?

Il est évident que Maupassant, le chroniqueur, n’est pas un simple voyageur, il est, d’une part, un observateur attentif et curieux, avide d’aventures et d’histoires qui cherche, à travers ses observations minutieuses des choses et des hommes, à comprendre le système colonial. Il est, d’autre part, un artiste fasciné par les spectacles de la nature et du désert : « Son œil est comme une pompe qui absorbe tout »[5]. Il parcourt les vastes étendues du Maghreb à cheval, à pied, en train, en voiture à cheval, en bateau, etc., et il se rend dans différentes villes algériennes comme Boukhrari, Bougie, Saïda, Constantine, Alger, etc. En Tunisie, il nous fait découvrir Tunis, Hammamet, Enfidha, Hergla, Mahdia, Kairouan et Sousse. Il signale les diverses étapes de son déplacement, indique chaque fois les villes, les villages, les quartiers et les régions traversées, mêmes les plus misérables, enregistre les évènements vécus, les impressions ressenties et les émotions éprouvées, « se gorge de soleil, de sensations et de couleurs »[6] comme le signale Noëlle Benhamou et les transmet aux lecteurs français à travers ses textes en adoptant une double stratégie d’écriture : une écriture poétique fondée sur des figures de style et des termes porteurs de connotations euphoriques (soleil, désert, palmiers, lumière, éblouissement, féeries et rêves) et une écriture analytique qui s’intéresse au vécu des Algériens, des Tunisiens et des colons, qui scrute la complexité du système colonial et ses conséquences sur la vie économique, sociale et politique des pays colonisés en Afrique du Nord. Les participants au colloque vont être amenés à se demander si ces deux modes d’écriture coexistent dans le même espace textuel des chroniques, s’ils génèrent un « style spatial » selon la terminologie de François Vanoosthuyse[7] et s’ils créent la toile de fond d’un Maghreb réel et/ou imaginaire.

Bien plus, les divers séjours de Maupassant en Algérie et en Afrique ne vont pas alimenter uniquement ses nombreuses chroniques, mais également ses récits brefs comme « Marroca », « Mohamed-Fripouille », « Un soir » et « Allouma » et même son roman Bel-Ami qui évoque, à travers l’affaire marocaine, l’expédition coloniale en Tunisie. Maupassant va encore plus loin en franchissant les frontières génériques. Les chroniques africaines sont reprises et réinvesties dans un autre genre qui correspond au récit de voyage comme Au soleil et La Vie errante. L’un des enjeux importants du colloque est de voir si la confrontation de ces textes pourrait être une voie qui nous permet d’une part d’explorer les frontières entre le récit bref et la chronique et d’autre part de rendre compte des glissements et des passages d’une forme à une autre.

Le deuxième enjeu de ce colloque est d’élargir la problématique en comparant les quatre genres (la chronique, le récit de voyage, le récit bref et le roman) qui s’inspirent de ses divers voyages et séjours en Afrique du Nord. Certes, le traitement de l’expérience africaine diffère en fonction du genre. La chronique privilégie la dimension référentielle, alors que le roman, le conte et la nouvelle valorisent l’imaginaire. Par contre, le récit de voyage emprunte la voie de la fiction et du réel. Toutefois peut-on affirmer qu’au-delà de leurs différences, les quatre genres « se nourrissent les uns les autres dans une constante circulation de thèmes, de motifs et de traits formels » comme le signale Yvan Leclerc[8] ? Peut-on considérer l’écriture maghrébine de Maupassant comme un moyen de dénonciation du régime colonial, des abus et de l’incompétence des autorités locales ?

Quelques pistes bibliographiques :

·         Éditions des œuvres :

- Guy de Maupassant, Lettres d'Afrique (Algérie, Tunisie), Présentation et notes de Michèle Salinas, Paris, collection La boîte à documents, 1990.

- Guy de Maupassant, Écrits sur le Maghreb : récits, nouvelles, lettres, préface Denise Brahimi, Paris, Minerve, collection Traversées, 1991.

- Guy de Maupassant, Récits d'Afrique, préface, notes et bibliographie par Noëlle Benhamou, Lyon, Éditions Palimpseste, collection Singuliers, 2005. 

- Guy de Maupassant, Carnets de Voyage : Au soleil, Sur l'eau, La Vie errante, éd. Gérard Delaisement, Paris, Éditions Rive Droite, collection Documents, 2006.

- Guy de Maupassant, Chroniques, Edition critique établie par Gérard Delaisement, Editions Rive Droite, 2003, tome 1 et tome 2.

- Guy de Maupassant, Œuvres complètes, Chroniques I (1876- 1882),  Edition établie par Marie-Françoise Melmoux-Montaubin et Anne Geisler-Szmulewicz, Classiques Garnier, 2019, 1105 p.

·         Études critiques (ouvrages et articles) :

- Dorra Barhoumi, « De Tunis à Kairouan de Guy de Maupassant. Voyage au bout des origines », Multilinguales, n° 8, Bejaia (Algérie), 2017.

https://www.researchgate.net/publication/326227944_De_Tunis_a_Kairouan_de_Guy_de_Maupassant_Voyage_au_bout_des_origines

- Arselène Ben Farhat, « Le Maghreb à l’ombre de l’Orient dans les chroniques de Guy de Maupassant », dans Les Orients désorientés ou le détour de l'Occident, sous la direction d’Axel Gasquet et Jean-Pierre Dubost, Editions Kimé, 2013.

- Noëlle Benhamou, « “Oh ! Fuir, partir !” Maupassant au Maghreb : reportage ou écriture de soi ? », Anales de Filología Francesa, Murcia (Espagne), nº 24, 2016.

https://revistas.um.es/analesff/article/view/282751 

- Myriam Boucharenc, direction, Roman et reportage. Rencontres croisées, Limoges, Presses universitaires de Limoges, coll. Mediatextes, 2015, 284 p.

- Myriam Boucharenc et Joëlle Deluche, direction, Littérature et reportage, Presses Univ. Limoges, 2001, 367 p.

-  Mariane Bury, « Maupassant pessimiste ? », Romantisme, 1988, n°61, p. 75-83.

-  Mariane Bury, La Poétique de Maupassant, Sedes, 1994, 304 p.

- Ahlème Charfeddine, « Maupassant et l’idéologie coloniale » in Pellerin Pascale (dir.), Les Lumières, l’esclavage et l’idéologie coloniale, XVIIIe-XXe, Paris, Garnier Flammarion, « Rencontres », Le dix-huitième siècle, 2020, 560p., pp.411-438.

-Ahlème Charfeddine « Maupassant en Afrique du Nord », dans Ecrivains marcheurs du Romantisme au XXIe siècle, textes réunis par François Le Guennec, publication en ligne mars 2019, pp.54-61.

https://ufuta.fr/wp-content/uploads/2019/05/Actes-colloques-Ecrivains-marcheurs-2018-V3.pdf

-Ahlème Charfeddine, « Les vestiges romains dans les récits africains de Maupassant » , dans Présence de l’Africa romana dans l’Antiquité et à l’époque moderne et contemporaine. Regards croisés, textes réunis par Amina Ben Damir. En hommage au Professeur Samir Marzouki, Tunis, Publications de la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis, 2020, pp.211-220.

- Gérard Delaisement, « Vers l’Afrique, derrière le voyageur… le poète, l’historien », dans Jacques Bienvenu (éd.). Maupassant et les pays du soleil, Paris, Klincksieck, 1999.

- Jacques Dupont, « La vie errante : aspects de l’expérience sensible », Bulletin Flaubert-Maupassant, 31, 2015.

- Anne Geisler-Szmulewicz, « Maupassant et la chronique-reportage : l’exemple des "Chroniques algériennes" », dans Bulletin Flaubert-Maupassant, 31, 2015.

- Marlo Johnston, « Les dates du deuxième voyage de Maupassant en Afrique du nord (6 nov. 1888-16 janv. 1889), d’après sa correspondance », Bulletin des Amis de Flaubert et de Maupassant, nº 9, 2001, p. 243-253. [Certaines lettres de 1887 sont redatées, une fausse lettre est éliminée, et des lettres inédites sont citées pour situer le voyage en 1888.]

- Marlo Johnston, Guy de Maupassant, biographie, Fayard, 2012.

- Marlo Johnston, « Récits de voyage publiés et non publiés : vue panoramique », Bulletin Flaubert Maupassant, n° 21, 2015, p. 275-287.

- Colette Juilliard, Imaginaire et Orient, l'écriture du désir, Paris, Éditions l’Harmattan, 1996.

- Yvan Leclerc, « Journal d’un article sur Flaubert et Maupassant voyageurs en Tunisie », dans Tunis, Carthage, l'Orient sous le regard de l'Occident du temps des Lumières à la jeunesse de Flaubert, Presses Universitaires de Rouen, 1999. 

https://books.openedition.org/purh/7926?lang=fr 

- Yvan Leclerc, Maupassant, le noir plaisir de raconter, La Maison Tellier, Contes du jour et de la nuit, ouvrage coordonné par Yvan Leclerc, PUF, 2011.

- Véronique Magri-Mourgues, « Du récit de voyage à la nouvelle. L’exemple de Maupassant : Au Soleil, Marroca, Mohammed-Fripouille, Un Soir, Allouma » dans Philippe Antoine et Marie-Christine Gomez-Géraud (éds.), Roman et récit de voyage. Paris, Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, 2001.

- Francis Marcoin, « L’éventail poétique de Maupassant » dans Revue des sciences humaines, Imaginer Maupassant, 235, juillet-septembre, 1994.

- Francis Marcoin (direction), Imaginer Maupassant, Revue des Sciences humaines n°235, juillet-septembre, 1994.

- Francis Marcoin, « Mutisme de Maupassant », Maupassant miroir de la nouvelle (colloque de Cerisy), Presses universitaires de Vincennes, 1988.

- Marie-Françoise Melmoux-Montaubin, « Maupassant chroniqueur : le cas des “chroniques-nouvelles” » Bulletin Flaubert-Maupassant, n° 31, 2015.

- Marie-Françoise Melmoux-Montaubin, L’Ecrivain-journaliste au XIX e siècle : un mutant des lettres, Saint-Etiennes, Editions des Cahiers intempestifs, Collection Lieux littéraires/6, 2003, 469 p.
- Henri Mitterand, « Maupassant, de la chronique au conte, variation sur les mœurs du jour », dans Mario Petrone et Maria Cerullo éd., Actualité de l’œuvre de Maupassant au début du XXIe siècle, Napoli : Il Torcoliere, coll. "Collana di Letteratura Comparate", 2009. 

- Nadine Satiat, Maupassant. Paris, Flammarion, Grandes Biographies, 2003.

- Marie-Claude Schapira, « Guy de Maupassant en Algérie : critique du fait colonial et portrait du colonisé », dans Sarga Moussa (éd.), L’idée de « race » dans les sciences humaines et la littérature (XVIIIe-XIXe siècles), actes du colloque de Lyon (16-18 novembre 2000), Paris, L’Harmattan, 2003.

- Pierre Soubias, « La place de l’Afrique dans l’imaginaire de Maupassant : une lecture des nouvelles africaines », Maupassant multiple, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail, 1995.

- François Vanoosthuyse, « Sur la route. Le “style spatial” de quatre pièces d’Alexandre Dumas (1830-1834) », dans Sylviane Robardey-Eppstein (dir.), Sculpter l’espace, ou le théâtre d’Alexandre Dumas à la croisée des genres, Paris, Classiques Garnier, collection « Rencontres », 2018, p. 231-246.

 —

Les propositions de communication, d’environ une demi page, (titre et résumé) accompagnées d'une courte notice biographique sont à envoyer aux responsables du colloque ( Arselène Ben Farhat et Mustapha Trabelsi) uniquement par voie électronique avant le 15 août 2022 à l’adresse suivante :

benarselene@gmail.com

- L’hébergement : La réservation à l’hôtel pour les chercheurs tunisiens et étrangers sera assurée par le comité d’organisation. Mais le payement sera effectué à l’hôtel par les participants tunisiens et étrangers eux-mêmes.

Comité scientifique : 

Noëlle Benhamou, Arselène Ben Farhat, Myriam Boucharenc, Mariane Bury,  Sonia Fitouri-Zlitni, Foued Laroussi, Yvan Leclerc, Francis Marcoin, Marie-Françoise Melmoux-Montaubin, Monia Mouakhar kallel, Mustapha Trabelsi et François Vanoosthuyse.

Comité d’organisation : 

Inès Hamed, Mohamed Amine Kacem, Samia Kathoumi, Sonia Meziou et Mouna Sassi. 

Calendrier 

15 août 2022 : réception des propositions de communication
30 août 2022 : notification aux auteurs
1, 2 et 3 mars 2023 : Colloque international

Décembre 2023 : publication

 

Responsables : Arselène Ben Farhat et Mustapha Trabelsi 

 

Responsable : Laboratoire de Recherche Interdisciplinaire en Discours, Art, Musique et Économie (LARIDIAME LR18ES23)

Adresse :   Faculté des Lettres et Sciences Humaines - Sfax (Tunisie)


 
[1] Guy de Maupassant, « Sur les hauts plateaux », Chroniques, édition critique établie par Gérard Delaisement, Editions Rive Droite, 2003, t. 1, p. 261.
[2] « Dans le désert, paysages d’Afrique », ibid., t. 1, p. 314.
[3] « Le Pays du sel », ibid.., t. 1, p. 339.
[4] « Alger à vol d’oiseau », ibid., t. 1, p. 240.
[5] Guy de Maupassant, « Les amateurs d'artistes », Chroniques, Edition critique établie par Gérard Delaisement, Editions Rive Droite, 2003, t. 2, p. 1016.
[6] Noëlle Benhamou, « "Oh ! Fuir, partir !" Maupassant au Maghreb : reportage ou écriture de soi ? » Anales de Filología Francesa, n.º 24, 2016, p. 8.
[7] François Vanoosthuyse, « Sur la route. Le “style spatial” de quatre pièces d’Alexandre Dumas (1830-1834) », dans Sylviane Robardey-Eppstein (dir.), Sculpter l’espace, ou le théâtre d’Alexandre Dumas à la croisée des genres, Paris, Classiques      Garnier, coll. « Rencontres », 2018, p. 231-246.
[8] Yvan Leclerc, « Genres », Maupassant, le noir plaisir de raconter, La Maison Tellier, Contes du jour et de la nuit, ouvrage coordonné par Yvan Leclerc, PUF, 2011, p. 63.