Une passion totale, à la fois sentimentale, physique, intellectuelle et politique, voilà ce que suscita chez le philosophe Walter Benjamin une femme beaucoup plus connue et libre que lui à l’époque, mais rendue invisible aujourd’hui : Asja Lacis, pionnière du théâtre politique pour les enfants, intime de Brecht, immergée dans la révolution soviétique et qui l’initia au marxisme. Rencontrée à Capri en 1924, elle fut son alpha et son oméga, il fut partout sur ses traces, à Riga comme à Moscou ou Berlin, la croisa et la recroisa tandis qu’elle vivait sa vie, jusqu’à ce que leurs destins se séparent tragiquement : Asja sera déportée en camp de travail et Walter se suicidera en fuyant les nazis. Dans Walter et Asja (Payot), Antonia Grunenberg brosse le portrait de ce couple de feu, en dessinant de larges pans de l’histoire intellectuelle des années 1920 à l’après-guerre qui défile, celle de la violence, des espoirs aussi, celle des idées et celle du théâtre, dont on doit se souvenir qu’il est un creuset de la politique.