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Conceptualisation et réception des stéréotypes dans les discours littéraire, médiatique et didactique

Conceptualisation et réception des stéréotypes dans les discours littéraire, médiatique et didactique

Colloque national en format hybride 11-12 mai 2022

Conceptualisation et réception des stéréotypes dans les discours littéraire, médiatique et didactique

Argumentaire

 

Marquée par la bivalence selon Ruth Amossy, la notion de stéréotype revêt un aspect puissant quant aux opérations de catégorisation et de généralisation. Emprunté au registre de l’imprimerie, le stéréotype est un type en relief, il est donc « l’objet dupliqué à l’infini grâce à la reproduction d’un même modèle » (Amossy, 1991 : 22). Appréhendé comme un élément fondamental qui forge la construction sociale et permet la mobilité des images stéréotypées à grande échelle, le stéréotype devient une « structure cognitive acquise […] le stéréotype plonge cependant ses racines dans l’affectif et l’émotionnel car il est lié au préjugé qu’il rationnalise et justifie ou engendre » (Bardin, 2001 : 55). Stéréotypes, clichés, représentations mentales, constructions imaginaires, préjugés, etc., sont autant d’appellations qui renvoient aux expressions toutes faites impliquant des idées, a priori adoptées, car puisées dans un terroir commun et un imaginaire collectif.

Sachant que la mémoire collective est souvent constituée de plusieurs niveaux de stéréotypies qui gèrent l’acte de lecture, il nous paraît opportun de suggérer des pistes de réflexion sur les genres et les catégorisations issues de schémas qui nous ont été légués, comme la représentation de l’Autre, de l’étranger, du genre, etc. Il s’agit aussi de prêter une attention particulière aux images stéréotypées d’un Orient malade tels le choléra indien, la typhoïde africaine, la peste asiatique, le virus chinois (Covid19) afin de lutter contre certaines images déformées conduisant à des discriminations.

L’objectif de ce colloque est de porter un regard critique sur la notion de « stéréotype », et d’en analyser les usages au sein de différents dispositifs inhérents à la société notamment la littérature et les médias ainsi que les supports pédagogiques. En s’inspirant des recherches actuelles d’Amossy (1991), de Herschberg Pierrot (1994), de Moliner et de Vidal (2003), et en considérant cette notion comme un objet d’analyse, nous nous arrêterons sur certaines conceptions de la communication littéraire et médiatique qui structurent les représentations sociales. Dans ce contexte, nous nous pencherons ici sur les questions suivantes :

Quel est l’impact des stéréotypes dans la compréhension, l'interprétation et l'évaluation des textes littéraires et des discours médiatiques ? Quels genres de représentations produisent les stéréotypes ? Comment ces derniers acquièrent-ils le pouvoir d’agir sur la société ? Et quels en sont les modes de réception ? Notre souhait est que ces interrogations s’inscrivent résolument dans les recherches contemporaines afin de nous fournir de nouvelles perspectives  émanant des communications qui seront discutées lors de ce colloque, ouvrant ainsi de nouvelles pistes de recherche qui pourraient concourir à reconsidérer la conceptualisation du stéréotype et sa réception dans le milieu social et le champ scolaire.

Les communications qui seront acceptées devront mobiliser plusieurs champs de recherche et cerner les aspects interprétatifs des stéréotypes, dans la mesure où ils permettront de distinguer l’efficacité ou non de ces lieux communs.

En littérature, nous remarquons que le stéréotype s’inscrit dans un croisement entre la littérature et les sciences sociales en ce qu’il permet d’imprimer les innovations d’une époque. La littérature accorde une grande place au cliché comme le souligne Ruth Amossy quand elle écrit que « le cliché et le stéréotype deviennent l’objet des théories de la lecture et de la réception, qui croisent aussi la didactique de la littérature » (2011 : 55). De même, le stéréotype est emprunté au langage courant, les images dans nos têtes médiatisent notre rapport au réel (2011 : 26). Celui-ci est une représentation toute faite, un schème culturel préexistant qui permet à chaque individu de filtrer la réalité ambiante (Lippmann). On peut dire que le stéréotype relève d’un processus de génération, en ce qu’il favorise une vision schématique et transfigurée de l’autre entraînant des préjugés. Dans le roman Jamais sans ma fille, de Betty Mahmoody, nous lisons : « la voix des milliers de femmes en tchador noir. Elles pleurent abondamment, de grosses larmes en signe de deuil. » (p. 96). En effet, le lecteur mobilise certaines compétences pour comprendre un texte, parce que la maitrise de ces lieux communs constitue en fait la base de toute lecture ; selon Jean-L. Dufays (1991) le stéréotype est le « socle de compétence » qui permet à un lecteur non seulement de comprendre et d’interpréter, mais aussi de modaliser et d’évaluer un texte. Cependant, la répétition du stéréotype dans le temps à travers la mémoire contribue à sa stabilité et son mode de transmission : « on le développe et le confirme de cas en cas, on le nourrit d’exemples, on lui reconnaît s’il le faut des exceptions, on l’adapte selon les circonstances en jouant plus ou moins sur l’accentuation de ses traits, et il se pourrait même qu’on le perfectionne à force de s’en servir » (Rouquette, 1997 : 33).

Sachant que les stéréotypes participent à la fabrique de l’identité d’un groupe ou d’une communauté, il nous semble important de s’intéresser aussi à l’impact du discours médiatique dans la transfiguration des objets et du monde, d’une part en stigmatisant des représentations sociétales et d’autre part en les détournant de leur sens premier comme les images qui marquent voire dévalorisent l’Autre dans les différents niveaux médiatiques. Il est à noter que le stéréotype n’est pas le fruit du hasard, il est induit par un mode de pensée. Il surgit pour servir de raccourci dans un souci d’ergonomie par la facilité d’usage qu’il offre, fonctionnant ainsi sur la schématisation et donc la réduction. Alors en quoi le stéréotype structure-t-il par exemple la rédaction d’un article, d’une chronique ou d’une affiche publicitaire et quel en est l’effet sur le lecteur ? Ainsi ne lit-on pas des expressions telles que « il tire la sonnette d’alarme » ou encore « dans l’œil du cyclone » galvaudées à tout bout de champ ?

Dans le champ scolaire, le contenu de l’enseignement peut aussi illustrer le rôle du stéréotype dans la lecture du texte. Le livre scolaire est le lieu de tous les stéréotypes puisqu’il a pour rôle principal de reproduire une praxis sociale. En effet, selon Fontanini, les manuels scolaires « ont un rôle dans la formation des normes et des opinions des élèves » (2007). Nous reprenons dans ce cas le constat de la didacticienne Annette Béguin qui, dans son ouvrage Lire-écrire (1991) explique que « pour l’élève, intégrer des modèles figés, c’est accéder à la possibilité de lire. Jouer avec ces modèles, les reconnaître à travers les transformations qu’ils subissent dans les textes, c’est accéder à la lecture critique et au pouvoir de se situer par rapport à ce qu’on lit ». Faudrait-il donc mettre le stéréotype à distance ou l’intégrer dans sa lecture pour mieux comprendre un texte ?

Portant la réflexion au croisement de ces différentes champs et disciplines, les domaines de recherche que nous proposons dans ce colloque s’articulent autour des axes suivants et qui restent volontairement ouverts et non exhaustifs :

  • Les stéréotypes dans les champs littéraires et culturels
  • Les stéréotypes dans le champ médiatique
  • Les stéréotypes dans le champ scolaire
  • Le pouvoir du stéréotype dans la lecture du texte littéraire et médiatique.
  • Repenser la notion du stéréotype.
  • Le stéréotype comme représentation sociale : les tensions entre identité et altérité.
  • Le rôle de l’image dans l’ancrage du stéréotype : image de soi/image de l’Autre.
  • L’effet de l’image sur l’interlocuteur (photos, illustrations, affiches publicitaires, ).
  • L’impact de la langue et de la culture dans la mise en œuvre du stéréotype.
  • Stéréotypes et problèmes de catégorisation et de classification.
  • L’impact des stéréotypes dans le processus enseignement / apprentissage
  • Vers une déconstruction ou atténuation du stéréotype : quels moyens et quelles démarches ?

 

Bibliographie

Alain Ruscio, (2004). « Des Sarrasins aux Beurs, une vieille méfiance », Le Monde diplomatique [en ligne]. URL : https://www.monde-diplomatique.fr/2004/02/RUSCIO/10999

Annette Béguin, (1991). Lire-écrire. Pratique nouvelle de la lecture au collège, éd. L’Ecole des loisirs, Paris

Charlotte Schapira, (1999), Stéréotypes en français : proverbes et autres formules, Editions Ophrys, Paris

Christian Plantin, (1993). « Lieux communs dans l’interaction argumentative », In C. Plantin,

Lieux Communs, topoi, stéréotypes, clichés.  Paris : Kimé.

Christine, Fontanini, (2007), « Les manuels de lecture de CP sont-ils encore sexistes ? », Actualité de la recherche en éducation et en formation,

Henri Boyer. 2008. « Stéréotype, emblème, mythe. Sémiotisation médiatique et figement représentationnel », Les langages du politique, p. 99-113

Jack Goody, 2003, La peur des représentations. L’ambivalence à l’égard des images, du théâtre, de la fiction, des reliques et de la sexualité, La Découverte, coll. « Laboratoire des sciences sociales », Paris, Pierre-Emmanuel Dauzat.

Jean-Louis Dufays, 1991, « Lire avec les stéréotypes. Les conditions de la lecture littéraire en classe de français », Enjeux, p. 5-18

Jean-Louis Dufays.1993. « Initier à la conscience des stéréotypes : un enjeu essentiel du cours de français », Enjeux, pp. 47-59.

Leyens et al., Stéréotypes, discrimination et relations intergroupes, Mardaga

Michel-Louis Rouquette, (1997), La chasse à l’immigré : violence, mémoire et représentations, Mardaga

Moliner, Vidal, J. (2003). « Stéréotype de la catégorisation et noyau de la représentation ». Revue Internationale de Psychologie Sociale. 1, 157-176.

Mohamed Dridi, 2017. « Les représentations stéréotypées de la famille dans le nouveau manuel de français de la 3ème Année Primaire », Revue des Sciences humaines et sociales, n 31, 27-40

Ruth Amossy, Les idées reçues, Sémiologie du stéréotype, Coll. « Le texte à l'œuvre »

Ruth Amossy, Stéréotypes et clichés : langue, discours, société, Armand Colin, Paris.

Walter Lippmann, 1922, Public Opinion, Lanham, Start Publishing LLC, 2015.

 

Modalités de soumission

Les propositions de communication (en français) devront contenir les informations suivantes :

  • Nom, Prénoms, adresse courriel et affiliation
  • Notice bio-bibliographique.
  • Titre de la communication et un résumé de 500 signes maximum.
  • Date limite de soumission des propositions de communication est fixée au 17/ 03/2022 à l’adresse suivante: colloque.dptfran.relizane@gmail.com
  • 21 mars 2022 : notification d’acceptation des propositions
  • 17 avril 2022 : envoi des communications
  • 30 avril 2022 : notifications de la décision du comité scientifique
  • 05 mai 2022 : envoi du programme.
  • 10/11 mai 2022 : tenue du colloque.
  • 30 mai 2022 : envoi des communications pour une possibilité de publication (Articles sélectionnés par le comité scientifique).

 

Responsable scientifique du colloque

Merahia BOUAZZA, Maître de conférences, Université de Relizane, Algérie.

 

Comité scientifique

Aini BETTOUCHE, Professeure, Université Mouloud Mammeri, Tizi-Ouzou. Latifa SARI MOHAMED, Professeure, Université Abou Bakr Belkaid, Tlemcen Mohamed. TOUATI, Professeur, Université Mohamed Ben-Ahmed Oran2. Fayçal BENSAADI, Professeur, Université Mohamed Ben-Ahmed Oran2. Fatima-Zohra LALAOUI-CHIALI, Professeure, Université Mohamed Ben-Ahmed Oran2 Abdelkrim BENSLIM, Professeur, Université Belhadj Bouchaib, Ain Témouchent.

Mohammed Yacine MESKINE, Professeur, Université Moulay Tahar, Saida. Haouari BELLATRECHE, Professeur, Université Abdelhamid Ibn Badis, Mostaganem Djamila BOUTALEB, Professeure, Université Mohamed Ben-Ahmed Oran2. Zoulikha TABET-AOUL, Université Mohamed Boudiaf, USTO, Oran Amel MAAFA, MCA, Université 8 mai 1954, Guelma. Khaldia AISSA, MCA, Université Mohammed Ben-Ahmed Oran2. Amel DERAGUI, MCA, Université Mohamed Ben-Ahmed Oran2. Fatima-Zohra HARIG, MCA, Université Mohamed Ben-Ahmed Oran2. Merahia BOUAZZA, MCA, Université de Relizane. Nadia BENTAIFOUR, MCA, Université Abdelhamid Ibn Badis, Mostaganem. Sid-Ahmed KHELLADI, MCA, Université Ahmed Draya, Adrar. Kheira YAHIAOUI, MCA, ENS d’Oran

 

Comité d’organisation

Abdelkader CHERATTI, MAA, Université de Relizane / Samira BERDJI, MCB, Université de Relizane / Nabil-Zoheir BERREHAL, MAA, Université de Relizane/ Djamila BENAOUDA MAA, Université de Relizane / Lamia BENKHETTAB, MCB, Université de Relizane / Fatima YAGOUB, MCB, Université de Relizane/ Fatiha BENAOUF, MAA, Université de Relizane / Kadda BEKHAT, MAA, Université de Relizane.

Mohamed Amine CHEIKH, Doctorant, Centre universitaire Ahmed Salhi de Naâma / Slimane DAOUD, Doctorant, Centre universitaire Ahmed Salhi de Naâma / Larbi NADJEM, Doctorant, Université Hassiba Benbouali de Chlef.

Mohammed Amin BERZIGA, Mehdi BENADDA, Zakaria MEKARBAA, (Etudiants en 2ème année master «  Langue et culture », Université de Relizane).