Jacques Abeille et le secret des grands écrivains, par Jean-Michel Devesa
Mis en ligne sur Diacritik.com le 1er février 2021
"Une voix s’est tue, celle d’un ami et d’un immense écrivain, artisan d’une œuvre touchant à la poésie, au roman, à la nouvelle, au dessin et à la peinture, auteur d’une production patiemment élaborée comme une invitation au voyage et au merveilleux, délibérément placée sous l’aiguillon du désir, probablement le signifiant majeur ayant aimanté son exigeant travail de la langue. La voix de Jacques Abeille s’est éteinte : cette belle voix dont le timbre grave me bouleversait chaque fois qu’en public elle portait un de ses textes et l’offrait en partage, érigeant en cérémonie l’exercice désormais convenu de l’auteur qui lit sa page au terme d’une conférence ou lors d’une causerie dans un salon, et je n’étais pas le seul à en être chaviré, vous le diront toutes celles et tous ceux qui ont entendu lire Abeille ; cette voix profonde et généreuse qui, dans la sphère privée, conjuguait la plus exquise sensibilité et la rigueur intellectuelle, les ors de l’association et la rectitude éthique, les rires et la spontanéité d’une enfance jamais refoulée ni rabrouée et la fermeté d’un goût sûr et éclairé par l’étude et la bibliothèque. […]"
(Photo: © Clara De Amorin)