Actualité
Appels à contributions
 

"Le sacrifice d'Isaac" (colloque Graphè 2022)

Publié le par Université de Lausanne (Source : J.-M. Vercruysse)

Au sein de l’axe TransLittéraires du centre de recherche Textes et Cultures (UR 4028) à l’université d’Artois, les colloques annuels Graphè ont pour objet d’étude la Bible et son influence sur le patrimoine culturel, littéraire et artistique des nations. L’exploration de cet horizon intertextuel est menée dans trois domaines principaux : la Bible en tant que littérature, la Bible et les productions littéraires et esthétiques, et enfin la Bible comme champ d’études épistémologiques et herméneutiques. 

Parmi la geste d’Abraham, l’un des événements les plus connus est le sacrifice de son propre fils, Isaac, que lui impose Dieu après lui avoir promis une descendance aussi nombreuse que les étoiles dans le ciel. L’épisode est célèbre par la violence qu’il renferme et a la particularité d’être présent dans les trois religions monothéistes. La tradition juive parle de la « ligature d’Isaac » (aquéda) quand l’islam, dans la sourate 37, évoque, à travers une vision, l’immolation du « fils d’Ibrahim », sans en préciser le nom. Et le christianisme y voit la préfiguration de la croix du Christ et de l’eucharistie (Gn 22 et He 11). L’épisode pose fondamentalement la question de la soumission à la volonté divine.

Face à cet ordre, aussi scandaleux qu’incompréhensible, les interprétations sont nombreuses ; elles oscillent entre fanatisme religieux et consentement exemplaire. Philon d’Alexandrie se réfère au sens étymologique d’Isaac (autour du rire) pour expliquer l’acceptation d’Abraham de renoncer à ce qui faisait sa joie. La tradition chrétienne est inaugurée par Méliton de Sardes qui met en place la lecture typologique de l’épisode. Il sera suivi par toute la littérature patristique d’Origène à Augustin et ce pendant tout le Moyen Âge. La première tragédie en langue française que l’on doit à Théodore de Bèze s’intitule Abraham sacrifiant (1550) ; elle met en scène le doute d’Abraham et sa peur d’être abandonné par Dieu. L’ordre est tellement surprenant et scandaleux que, dans certains cas, comme chez Du Bartas, il sera interprété comme une ruse de Satan. Une étape importante dans l’histoire de la réception est franchie par Søren Kierkegaard lorsqu’il interroge l’attitude d’Abraham sous le signe de l’éthique et de la foi, dans Crainte et tremblement (1843). Les événements tragiques du XXe siècle vont alimenter une vision laïcisée, voire révoltée, de l’épisode. Isaac devient un emblématique survivant pour Élie Wiesel tandis que le poète Claude Vigée s’attarde sur la figure du bélier et que la psychanalyste Marie Balmary voit dans YHWH un Dieu qui veut guérir l'homme de sa soumission.

La scène, parmi les plus suggestives de la littérature biblique, n’a cessé d’interroger et d’inspirer. Les représentations iconographiques s’inscrivent dans cette diversité d’interprétations (Caravage, Rembrandt, Rubens, Chagall...). Le sacrifice d’Isaac par Abraham reste intrigant et bouleversant à la fois, que l’on se situe du côté du père ou que l’on se mette à la place du fils ; il conserve un réel mystère....

Toujours au regard du texte biblique, dans une perspective diachronique et une démarche interdisciplinaire afin de retracer les grandes étapes de sa réception, l’appel à communications porte sur les récritures littéraires et artistiques que le sacrifice d’Isaac par Abraham a suscitées dans la culture occidentale.

Les actes du colloque (17 et 18 mars 2022) seront publiés dans le volume 31 de la collection éponyme à l’Artois Presses Université.

Les propositions de communications (titre, court résumé et bref C.V.) sont à envoyer avant le 31 août 2021 à : jmarc.vercruysse@univ-artois.fr