Atelier



Terminologie linguistique et textes littéraires.

Un bref essai de synthèse



par Gilles Philippe
(Université de Lausanne)



Rédigé à l'automne 2016, relu à l'automne 2018, ce texte resté inédit est publié dans l'Atelier de théorie littéraire de Fabula avec l'aimable autorisation de son auteur.

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Dossiers : Linguistique, Rhétorique.





Terminologie linguistique et textes littéraires

Un bref essai de synthèse



La terminologie en usage dans l'analyse linguistique des textes littéraires résulte d'une négociation entre les disciplines relevant, d'une part, des sciences du langage, d'autre part, du versant dit « formaliste » des études critiques. Cette terminologie fait l'objet de constants ajustements et déplacements selon deux critères principaux : la position de domination scientifique et le prestige académique de l'un ou de l'autre des deux champs disciplinaires concernés, l'évolution générale des imaginaires tant linguistiques que littéraires, et surtout de la sensibilité à la question d'une possible spécificité verbale, voire d'une possible autonomie langagière, de la littérature. C'est en effet de la réponse à cette question que dépendent sans doute le plus largement les choix terminologiques attestés dans l'histoire des sciences linguistiques et littéraires. Les entreprises lexicographiques tendent cependant à aplanir ces inflexions sans prendre vraiment acte de la grande diversité d'origine des termes en usage dans le champ dit stylistique. Mais Bernard Dupriez remarquait en 1980, au seuil de son dictionnaire des « procédés littéraires », que l'étiquetage en vigueur empruntait à plusieurs fonds lexicaux où se croisaient quatre grands « champs socio-historiques » (1980 : 6) : celui de la langue commune, celui de la rhétorique inspirée de la tradition antique, celui de la philologie médiévale et classique, celui enfin des sciences modernes, c'est-à-dire principalement de la linguistique.


Le modèle métalangagier de la rhétorique


Jusqu'à la fin du xixe siècle, c'est la rhétorique qui, passant progressivement du statut de discipline prescriptive à celui de discipline descriptive, a fourni à l'analyse formelle des textes littéraires non seulement la plupart de ses termes mais encore un modèle de démarche (Barthes 1968 : 502). Abandonnant peu à peu l'héritage antique qui orientait ses perspectives du côté de l'éloquence, la fin de l'époque classique française avait fini par voir principalement dans la rhétorique une grille terminologique permettant de penser les productions littéraires en général, poétiques en particulier. En témoigne le triomphe de ce monument que fut, en 1821, le Manuel classique pour l'étude des tropes, ou Éléments pour la science des mots de Pierre Fontanier (dont les exemples proviennent pour l'essentiel de corpus versifiés), le second volet de l'entreprise, le Traité général des figures du discours autres que tropes de 1827, ne constituant pour l'auteur lui-même, puis pour la tradition, qu'un complément de moindre importance.


L'analyse des tropes, qui repose sur la triade métaphore-métonymie-synecdoque, impliquait en effet pour Fontanier un cadre sémantique mieux établi que l'analyse des autres figures, qui prend principalement l'allure d'une taxinomie (figures de construction par révolution, exubérance, sous-entente ; figures d'élocution par extension, déduction, liaison, consonance ; figures de style par emphase, tour de phrase, rapprochement, etc.). Ce classement devait permettre de fournir une structure générale articulant l'ensemble des figures du discours, mais aussi de résoudre le problème de l'émiettement de tours aux appellations assez opaques (astéisme, énallage, expolition, métabole, syllepse, etc.). D'autres taxinomies et nomenclatures tentèrent bien plus tard de s'imposer. À Liège, le Groupe µ (1970) voulut par exemple repenser le classement des figures dans un cadre sémiotique et proposa des termes qui ne furent pas retenus (métaplasme, métataxe, métasémème, métalogisme), contrairement à la distinction opérée par Georges Molinié entre figures macrostructurales de nature logico-discursive et figures microstructurales plus ponctuelles, sonores, syntaxiques ou lexicales (1989 : 119).


Le reflux progressif de la rhétorique entre 1850 et 1950 fut contemporain d'un changement de paradigme dans l'imaginaire de la littérature : l'idée que celle-ci pût se ramener d'une part à des « procédés », d'autre part à des catégories générales parut inacceptable (voir Compagnon 1999). L'Art de la prose de Gustave Lanson en 1908, le célèbre article de Marcel Proust sur le style de Flaubert en 1920 illustrent ainsi la volonté de saisir le matériel langagier des textes à l'aide de catégories non plus figurales mais grammaticales : phrase, adjectif, préposition… (voir Philippe 2002). Le modèle rhétorique ne cessa pourtant de fasciner, et l'on y revint dans les années 1960-1975, dès lors qu'il s'agit de proposer une science générale des observables littéraires. Les travaux de Roland Barthes et de Gérard Genette (qui devait d'ailleurs faire rééditer les manuels de Fontanier en 1977, au point qu'on finît par y résumer toute l'entreprise rhétorique du xixe siècle) témoignent à la fois d'un intérêt marqué pour la théorie des figures et d'une allégeance revendiquée à la linguistique, si bien que le second milita en faveur d'une « nouvelle rhétorique », qui « entrerait tout naturellement […] dans la mouvance de la linguistique, qui est sans doute la seule discipline scientifique ayant actuellement son mot à dire sur la littérature comme telle » (1966 : 16).


Or cette « nouvelle rhétorique » avait besoin d'une terminologie propre. Celle que lui avait léguée le xixe siècle ne correspondait plus aux formes ni aux problématiques dominantes, et la linguistique de l'époque peinait encore à proposer des catégories permettant de dépasser le niveau de la phrase. Le renouvellement terminologique était en outre exigé par les ambitions que se fixait le versant formaliste de la « nouvelle critique » : défamiliarisation des problématiques, redéfinition des objets, revendication et stabilisation d'approches inédites, etc. Pour qualifier son entreprise, Genette opta avec d'autres pour un terme qui, comme rhétorique, avait servi de titre à un traité d'Aristote : poétique, désormais entendu comme « étude de l'art littéraire en tant que création verbale » (Ducrot & Schaeffer 1995 : 162). Si l'on s'arrête ici sur cette entreprise, c'est que la terminologie de Genette eut une influence considérable sur l'ensemble des travaux relevant de l'interface linguistique / critique. Ce succès s'explique d'ailleurs en partie par ses caractéristiques proprement terminologiques : les catégories y sont généralement dénommées par des substantifs obtenus par dérivation savante mais présentant une systématicité par variation / opposition qui tempère leur consonance technique. Les choix terminologiques de Roland Barthes connurent un succès moindre : il s'agit de termes rares plus que de néologismes, souvent d'adjectifs (scriptible, thymique, proairétique, etc.), dont la stabilisation et la mémorisation sont rendues délicates par le fait que, comme les termes de l'ancienne rhétorique, ils ne prennent pas appui sur des éléments de formation identiques, seuls aptes à faire apparaître un système voire une structure.


La terminologie de Genette semble aujourd'hui relever tout autant des études linguistiques que des études littéraires : les premières ont en effet considérablement élargi leur champ depuis les années 1970 et accordent désormais une place centrale aux problématiques énonciatives et textuelles ; les secondes se sont récemment, en partie sous influence anglo-saxonne, réorientées vers les sciences de la culture au détriment des sciences du texte. Parmi les catégories de Genette qui se sont imposées, on retiendra notamment celles qui concernent l'énonciation narrative (narration hétérodiégétique vs homodiégétique voire autodiégétique ; niveau extradiégétique vs intradiégétique ; voir Genette 1973) ou les relations transtextuelles (intertextualité, paratextualité, métatextualité, hypertextualité, architextualité ; voir Genette 1982).


La fin du xxe siècle devait jeter un discrédit parfois trop radical sur l'inflation terminologique de l'époque structuraliste, accusée tour à tour de masquer l'évidence sous des termes complexes, de confondre opacité et scientificité ou d'avoir cédé au « mirage linguistique » jadis dénoncé par Thomas Pavel (1988). Et quoique Genette ait toujours appelé de ses vœux l'avènement d'une poétique résolument historique, on a pu regretter que sa terminologie elle-même essentialise les phénomènes en négligeant leur inscription dans le temps. On a en outre souvent reproché à une telle démarche d'avoir sacrifié la rigueur notionnelle au seul souci lexical. Ainsi le binôme analepse / prolepse ne présente-t-il pas la cohérence qu'il affiche et qui est encore brouillée par le tiers terme de métalepse (Genette 1972). On a aussi considéré que les parallèles fondant la typologie de l'instanciation narrative rappelée plus haut n'emportent la conviction que par leur systématicité terminologique et reconduisent un modèle communicationnel panchronique et simpliste (Patron 2009). La typologie des focalisations (interne, externe, zéro) a encore semblé ne pas présenter de garanties linguistiques réelles, et Alain Rabatel (1997) a proposé de s'en défaire, en recourant par exemple à l'étiquette de point de vue, qui a le mérite de lever la confusion avec l'emploi syntaxique de focalisation (les termes d'anaphore, d'emphase, etc., témoignant de la gêne créée par ce type de polysémie entre un emploi linguistique et un emploi critique).


Plus encore qu'à Aristote (ou à Roman Jakobson), Genette avait emprunté le terme de poétique à Paul Valéry, qui l'avait utilisé en 1937 pour intituler la chaire qui lui avait été offerte au Collège de France et dont il entendait se servir pour dépoussiérer une terminologie critique encore très impressionniste (1937b : 1442) et construire une véritable science des formes littéraires prenant appui sur l'idée que la littérature se définît d'abord comme « une sorte d'extension et d'application de certaines propriétés du langage » (ibid. : 1440). Mais Valéry entendait aussi la poétique comme une poïétique (1937a : 1342), c'est-à-dire comme une science des processus de création. En cela, il revenait aux deux premiers termes de la triade rhétorique inventio / dispositio / elocutio, dont l'intérêt avait été considéré comme prioritairement argumentatif par la rhétorique du xixe siècle, qui les avaient négligés au profit de la dimension couverte par le seul troisième terme.


Dans cette mesure, une des plus récentes disciplines de l'interface linguistique / critique, la génétique textuelle, dont Valéry peut être légitimement considéré comme l'un des principaux inspirateurs, prend également ses racines dans la tradition rhétorique autant que dans la tradition philologique, dont on la rapproche d'autant plus volontiers qu'elle a toujours voulu s'en démarquer. Pourtant, bien que la génétique textuelle soit fondée sur un néologisme qui est devenu son emblème, celui d'avant-texte (« ensemble constitué par les brouillons, les manuscrits, les épreuves, les “variantes”, vu sous l'angle de ce qui précède matériellement un ouvrage quand celui-ci est traité comme un texte, et qui peut faire système avec lui », Bellemin-Noël 1972 : 15), cette discipline a toujours résisté à la taxinomie ou à une terminologie qui tendrait à figer des observables dont seule la dimension dynamique l'intéressait. De fait, se méfiant même de ses propres catégories, la génétique textuelle n'a eu de cesse que de nuancer des oppositions comme écriture à programme / écriture à processus (Hay 1986-1987) et de recourir au langage commun pour désigner, par exemple, les trois grandes étapes des processus de création textuelle (phases préparatoire, rédactionnelle, éditoriale) ou les quatre grandes opérations qui s'y observent (remplacement, ajout, suppression, déplacement). Comme la plupart des autres notions fréquemment sollicitées par la génétique (inachèvement, planification, variante…), de tels termes sont immédiatement accessibles ; à de très rares exceptions près (comme métascriptural), leur emploi n'exige guère de glose définitionnelle.


Il est pourtant à gager que, née vingt ou trente ans plus tôt, la génétique textuelle aurait eu à cœur de signer par des nouveautés lexicales la nouveauté scientifique qu'elle revendiquait, mais plus encore que le soupçon désormais jeté sur les « systèmes », dont la cohérence serait garantie par un « jargon » spécifique, la retenue terminologique de la génétique illustre également la récente revendication « holistique » des disciplines de l'interface (voir Adam 2010), revendication qui exige la convocation d'outils empruntés aux différents domaines des sciences du langage, voire aux écoles linguistiques les plus diverses, même si la date de naissance de la génétique explique, au moins pour partie, que celle-ci s'inscrive largement dans un paradigme énonciatif et non pas – comme on pourrait s'y attendre – générativiste : les quatre opérations mentionnées ci-dessus sont ainsi conçues sur le modèle culiolien des opérations énonciatives et non sur le modèle chomskyen des transformations syntaxiques (voir Lebrave & Grésillon 2008).


Le paradigme métalangagier autonomiste


Mettant un terme à un siècle de conception « autonomisante » de la littérature (qu'emblématise le mythe mallarméen des « deux langues »), la fin du xxe siècle a décloisonné le littéraire : discours parmi d'autres, son analyse ne semble plus guère requérir de termes spécifiques, et c'est une autre des raisons du soupçon jeté sur le recours à un métalangage propre à l'approche linguistique de la littérature : proposer une terminologie réservée aux textes littéraires reviendrait à renouer avec une mythologie dont ne s'accommode plus la contemporanéité. Un siècle plus tôt, la linguistique s'était construite en rejetant la pertinence des corpus littéraires pour l'analyse de la langue. Charles Bally, pour ne citer que lui (mais son influence fut considérable), avait ainsi avancé qu'il n'était pas possible de décrire une langue à partir de ses réalisations littéraires, qui étaient soit artificiellement archaïsantes, soit artificiellement innovantes (voir par exemple 1909 : 237, 244-247).


Le décloisonnement progressif du vocabulaire linguistique dans ou pour l'analyse littéraire s'observe d'ailleurs dans le recul du terme de littérarité, celui-ci n'étant plus guère utilisé aujourd'hui qu'avec une redéfinition pragmatique : le propre du texte littéraire serait d'être produit et interprété comme tel. Cette définition n'est pas aussi tautologique qu'il semble : elle prend acte de la spécificité du protocole de lecture « esthétique » de certains textes, qui suppose par exemple que soient suspendues ou desserrées les maximes communicationnelles (clarté, exhaustivité, pertinence, etc.) qui assurent le bon fonctionnement du discours ordinaire. Mais ce n'est plus là le sens que le terme recevait chez Tzvetan Todorov (1965 : 37), qui l'avait introduit en français pour traduire le literaturnost' de Roman Jakobson. Pour celui-ci, comme pour la plupart des théoriciens que l'on regroupe sous l'étiquette de « formalistes russes » et pour nombre de leurs émules, il était en effet possible de relever des marques linguistiques propres au texte littéraire, soit parce que ces traits lui seraient réservés, soit parce qu'il y seraient surreprésentés, soit parce que leur emploi y ferait écart au regard de la norme usuelle (écart conçu comme marquage du point de vue de la production, comme effet du point de vue de la réception). Cette conception était même radicalisée par l'idée que le texte littéraire fût intransitif, c'est-à-dire d'abord autoréférentiel.


Si le terme de littérarité ne s'imposa jamais vraiment en linguistique ou en critique, c'est qu'au moment même où il apparaissait dans l'Europe de langue française, cette vision autonomiste commençait à être contestée, et l'on acceptait de plus en plus difficilement l'idée d'une extranéité des pratiques langagières littéraires (voir Arrivé 1969). La littérarité fut alors bien vite redéfinie comme un « régime de lecture » (Marghescou 1974) et non plus par des spécificités formelles. On notera cependant que le terme a connu un regain d'intérêt à la parution d'un livre de Gérard Genette, Fiction et diction (1991), qui offrait une solution de compromis, en distinguant la littérarité constitutive (celle de la poésie ou des textes de fiction) et la littérarité conditionnelle, que l'on accorde – par choix ou convention – à certains textes de prose non fictionnelle.


Y a-t-il en effet un sens à proposer des catégories linguistiques qui soient propres aux textes littéraires, c'est-à-dire qui étiquettent des configurations langagières qui lui seraient spécifiques ? La question n'a cessé de se poser, et on peut l'illustrer par un exemple à la fois simple et important, celui de l'expression style indirect libre. En 1912, Charles Bally, à qui nous la devons, voyait dans le phénomène qu'elle désigne « une sorte d'indice stylistique de la langue littéraire », voire « une preuve de l'émancipation toujours plus grande du style littéraire » (1912 : 604). En 1914, dans sa deuxième étude sur le style indirect libre, il devait d'ailleurs réduire l'empan de l'expression pour exclure de son domaine de pertinence les occurrences (orales par exemple) présentant un caractère nettement bivocal et pour la réserver aux cas où le fond énonciativement neutre de la narration impersonnelle (« condition sine qua non pour qu'il y ait style indirect [libre] », 1914 : 409) est infléchi de telle sorte qu'une phrase à l'imparfait ou au présent laisse entendre la parole ou la pensée d'un personnage désigné à la troisième personne. Dans toute autre configuration, nous n'aurions plus affaire à une forme linguistique mais à une figure de pensée (comme l'ironie par exemple), catégorie que Bally empruntait à l'ancienne rhétorique. Un tel choix n'implique pas que l'on conteste l'existence de faits comparables dans les récits dits « à la première personne » ou dans le discours oral, par exemple, mais simplement que les différences d'emploi semblent suffisantes pour qu'il soit préférable de ne pas conserver la même étiquette pour les occurrences romanesques et non romanesques.


De fait, le maintien de l'étiquette de style indirect libre (devenu au fil des décennies discours indirect libre, comme pour l'ensemble des formes citationnelles) ne signifie nullement la survie du cadre de pensée qui la vit naître. Ainsi, malgré l'identité de l'étiquette, le phénomène n'est-il plus conçu aujourd'hui comme une variante du style indirect ; il n'est plus considéré comme l'apanage des textes littéraires, et surtout il est généralement défini comme une forme foncièrement bivocale (Authier-Revuz 1992-1993). Bien que la terminologie de Bally l'ait emporté, on peut se demander si l'histoire n'a pas finalement donné raison à ses détracteurs des années 1910 : le choix même d'une étiquette grammaticale opposait en effet cette approche à celles que préféraient les romanistes allemands du temps et qui reposait sur un traitement interprétatif ou, dirions-nous aujourd'hui, énonciatif du phénomène. De fait, après de longues hésitations, les pays de langue allemande adoptèrent et continuent d'utiliser la désignation erlebte Rede (que l'on pourrait maladroitement traduire par « discours vécu »), selon la proposition faite par Etienne Lorck en 1921.


Si l'exemple de l'expression style indirect libre est si intéressant pour nous, c'est qu'il s'agit ici d'un cas emblématique où une étiquette a été mise au point pour décrire des occurrences littéraires (la nécessité de forger l'expression est fondamentalement liée au succès européen d'Émile Zola), et d'autre part parce qu'il montre que la délimitation des faits langagiers qu'une étiquette recouvre n'est pas seulement déterminée par des critères linguistiques : elle est tributaire d'effets de corpus et engage des imaginaires d'époque. Vers 1900, l'Europe de langue française (mais pas de langue allemande ou anglaise) vivait ainsi encore largement sur une conception « autonomiste » de la langue littéraire et développait une sensibilité fortement grammaticale à la littérature, ce qui explique au moins en partie la différence de repérage, de bornage et d'étiquetage des formes attestées dans les textes.


La question d'une terminologie propre à l'analyse des productions littéraires se pose bien sûr de façon toute particulière pour les textes poétiques, bien qu'à l'inverse des autres grandes traditions européennes, la tradition de langue française moderne considère le roman comme formant le cœur du canon littéraire. On notera cependant que cette même tradition parle volontiers de la langue d'un poète et réserve le terme de style aux prosateurs. Bien que Roman Jakobson, dont le patronage fut si souvent revendiqué, considérât la poésie comme le prototype de l'objet littéraire et comme l'objet premier de la poétique (1960), l'analyse linguistique et l'analyse critique du texte en vers (qui reste le prototype du texte poétique) ont toujours entretenu des rapports complexes. De fait, le système métrique français poserait des problèmes spécifiques à la première : la délimitation du vers classique serait en effet déterminée par des conventions (nombre de syllabes et retour de la rime) rendues nécessaires par l'absence d'accent lexical permettant la construction de cellules rythmiques satisfaisantes. Cette vision des choses est largement nourrie de l'idée, très présente dans l'Europe des xviiie et xixe siècles, d'une impropriété foncière du français à l'expression versifiée voire plus généralement à l'expressivité poétique. La tradition métrique avait dès lors mis au point une terminologie permettant de rendre compte de réalités qui ne se rencontraient pas dans d'autres formes de discours : nomenclature des vers (alexandrin, octosyllabe, vers libre…), de leurs organisations en strophe (distique, quatrain, sonnet, ballade…), étiquetage des rimes (suffisante, féminine, croisée…), de leurs relations à la syntaxe (coupe, enjambement, rejet…).


Ce vocabulaire a pu sembler d'une pertinence linguistique très faible, et l'on a souvent tenté d'y recourir le moins possible, soit en dépassant la conception trop limitée qui le fonderait (d'où les propositions d'Henri Meschonnic [1982] à partir d'une définition très large, holistique et énonciative, du rythme), soit, à l'inverse, en évitant l'éparpillement des catégories et des perspectives (d'où les propositions de Milner & Régnault [1987] autour de la notion de mot phonologique). À de tels déplacements, on a toujours opposé le témoignage de l'histoire, dès lors qu'il reste acquis que les versificateurs ont travaillé dans un cadre et selon un imaginaire du vers tout autre (voir Peureux 2009). Et c'est le grand mérite des approches métrico-métriques de Benoît de Cornulier (1982) puis de Jean-Michel Gouvard (2000) que d'avoir voulu partir de la description des corpus mais aussi de l'évolution des pratiques sans les asservir à un projet démonstratif, ce qui a permis de dédramatiser la question de l'accent, en observant notamment les régularités attestées dans la distribution des phonèmes (le e muet par exemple) dans un vers dont le fondement syllabique n'est pas artificiellement suspendu.


De tels travaux, qui saisissent en quelque sorte « de l'intérieur » la question dudit vers syllabique, exigent le recours à la terminologie en usage dans l'analyse phonologique (souvent construite sur l'opposition fondamentale tonique / clitique), et l'on reste bien loin de la productivité lexicale des analyses à base linguistique des textes romanesques. Ce dernier constat est encore plus frappant si l'on considère que les mots poésie / poétique n'ont jamais été réservés aux seuls textes versifiés. Mais même lorsque, en 1966, Jean Cohen proposa une analyse générale qui posât « l'existence d'un langage poétique », ou lorsque, l'année suivante, Émile Benveniste se lança dans l'étude de la « langue poétique » au prisme de celle de Baudelaire (voir 2011), ni l'un ni l'autre ne voulut renouveler l'appareil métalangagier, si bien que la seule notion développée pour dégager la spécificité du fonctionnement verbal du texte poétique reste aujourd'hui celle d'évocation, entendue par Marc Dominicy (2001) comme une catégorie sémantique voire cognitive, permettant de reprendre à nouveaux frais de questions comme celles de l'autotélicité, de l'iconicité, voire de la poéticité du texte poétique.


Style, un métaterme problématique


Le terme de littérarité avait pour vocation d'aider à appréhender la spécificité proprement langagière des textes littéraires, mais il reposait sur un préconstruit qui n'a pas survécu à l'épreuve du temps. Non que les linguistes aient jamais renoncé à poser la question de l'irréductibilité du statut et du fonctionnement langagiers de la littérature (voir par exemple Milner 1978 : 329-331) ou définitivement écarté la théorie mallarméenne des « deux langues » (voir Encrevé & Braudeau 2007 : 75-77). L'hypothèse d'une sorte d'autonomie de la langue littéraire s'est même étonnamment mieux maintenue dans les sciences du langage que dans les études critiques. Celles-ci continuent en revanche à utiliser une notion que celles-là trouvent trop imprécise, celle de style. Ce terme, comme en témoignent les débats incessants sur sa pertinence ou sa définition, reste en effet l'outil métalangagier le plus fréquemment sollicité dès lors qu'il s'agit de négocier l'interface entre linguistique et critique. Sa plasticité compensant son usure, il a résisté aux appropriations d'école ou à la mutation des imaginaires.


Dans la tradition de langue française, le mot style conserve le plus souvent un sens assez étroit (il désigne généralement des faits strictement langagiers et idéalement singuliers : options lexicales et grammaticales, appariements syntaxiques et sémantiques) et s'applique en toute priorité aux textes littéraires. Mais son assiette dénotationnelle et ses contextes d'emploi se sont considérablement élargis, témoignant à nouveau d'un évident décloisonnement du métalangage littéraire. On notera ainsi, fût-ce un peu marginalement pour nous, que le terme est désormais fréquemment employé en sociolinguistique, pour désigner des ensembles de variantes congruentes (syntaxiques, lexicales, phonologiques, énonciatives…) à valeur sociale (appartenance à un groupe, stratégie de distinction individuelle, gestion de la communication dans une situation ou un contexte donné…). Cet emploi est d'origine anglo-saxonne (le mot style a d'ailleurs toujours eu un sens plus large en anglais qu'en français) ; on le fait souvent remonter aux premiers travaux de William Labov (1966), et on le trouve généralement en contexte d'analyse des productions orales non surveillées (voir Eckert & Rickford 2001). Il recouvre alors ce que l'on appelle plus communément registre en français.


Mais l'élargissement le plus net des emplois du mot style en dehors de toute référence littéraire est tout simplement à chercher dans la langue médiatique, commerciale ou commune. Depuis le début des années 2000, le mot y manifeste en effet une paradoxale injonction collective à la distinction individuelle, sans que cette distinction soit nécessairement verbale (voir Bordas 2008). De fait, la langue elle-même reprend son bien, puisque « façon de parler ou d'écrire » n'a jamais été qu'une définition parmi d'autres du mot style, même si cette acception langagière a tendu à devenir dominante au cours du xviiie siècle et surtout du xixe siècle (voir ibid. : 133-208). Cette acception est étroite, nous l'avons dit : le style recouvre le choix et l'arrangement des termes dans la phrase ; le style est ce qui singularise le scripteur. C'est mutatis mutandis la définition que donnait Émile Littré vers 1870 : « Le langage considéré relativement à ce qu'il a de caractéristique ou de particulier pour la syntaxe et même pour le vocabulaire, dans ce qu'une personne dit, et surtout dans ce qu'elle écrit. »


Mais cette définition a pu sembler trop réductrice aux linguistes comme aux critiques : d'une part, parce qu'elle limite les bases du sentiment intuitif du style au matériel verbal en isolant l'expérience littéraire d'autres expériences artistiques (d'où le récent retour du terme de manière, voir Dessons 2004) ; d'autre part, parce qu'elle repose sur une idéologie dite « romantique », qui veut que la singularité, l'originalité, etc., soient les valeurs esthétiques premières. Selon cette définition, le mot style n'est en effet qu'un synonyme d'idiolecte (sur ce terme, voir Neveu 2006), enrichi d'une connotation valorisante et limité à des emplois littéraires. Ainsi entendu, le style est défini par un ensemble de stylèmes – ce mot, formé par analogie sur phonème et morphème, désignant le plus souvent des traits lexicaux ou grammaticaux récurrents chez un auteur (plus rare est son emploi pour désigner de possibles marqueurs de littérarité, comme dans la sémiostylistique de Georges Molinié ; voir 1989 : 104-105). On notera, de ce point de vue, que l'adjectif stylistique est d'un emploi bien plus ouvert que le substantif correspondant, en ce qu'il permet de désigner des réalités langagières qui vont au delà de la base lexique-syntaxe (on parlera de « valeur stylistique » de tel choix énonciatif par exemple) et en ce qu'il ne relaie pas le préjugé auteuriste.


Leo Spitzer, dont l'influence sur la stylistique française du second xxe siècle fut considérable, nommait simplement traits de style ces récurrences observables sous la plume d'un auteur (1948 : 54). Dans une telle conception (que Spitzer devait un jour nuancer), le style individuel restait appréhendé sur le mode de l'écart, qualitatif ou quantitatif, par rapport à une norme d'usage, aux contours parfois flous. Cette perspective a pu sembler d'un rendement trop faible, puisque son but était d'abord de remonter au « radical » ou « étymon spirituel » des observables langagiers (ibid.), c'est-à-dire à une donnée psychologique propre à un auteur, et de nombreux théoriciens ont voulu redéfinir le terme de style pour lui donner une assise moins intuitive et des enjeux plus ambitieux. La tentative la plus célèbre demeure peut-être celle de Michael Riffaterre, pour qui le style est « un soulignement (emphasis) ajouté à l'information transmise, sans altération de sens. […]. Ce qui revient à dire que le langage exprime et que le style met en valeur » (1971 : 30-31). Une telle définition est venue enrichir la gamme des significations possibles du mot, mais sans s'imposer de façon définitive.


On s'accorde souvent à dire que le style est une notion « préthéorique » (au même titre que mot, phrase, discours…), mais sans doute serait-il plus juste de dire qu'il s'agit tout bonnement d'un terme dont chaque emploi contractualise explicitement ou implicitement l'acception. D'un point de vue plus neutre et peut-être plus satisfaisant linguistiquement, il peut ainsi désigner le « choix que tout texte doit opérer parmi un certain nombre de disponibilités contenues dans la langue » (Ducrot & Todorov, 1972 : 383), c'est-à-dire les modalités de mise en œuvre de la langue dans un contexte littéraire donné, le reste dépendant de l'empan de ce contexte (un texte, un genre, une période, une école, l'œuvre d'un auteur) et des objectifs que l'on se fixe. Au delà de cette définition, revendiquer, congédier ou redéfinir le terme relève d'abord d'un geste de balisage guidé par des options démonstratives. On se souvient par exemple qu'en 1953, Roland Barthes opposait le style (ensemble des habitudes rédactionnelles singulières contraintes par une histoire personnelle) à la langue (état de l'idiome à un moment donné) et à l'écriture (inscription dans tel ou tel modèle rédactionnel).


Barthes devait plus tard desserrer l'étau et inviter à réorienter le projet d'étude des pratiques stylistiques littéraires vers une enquête plus limitée mais plus linguistique, dont l'outil premier serait la notion de pattern : « structures phrastiques, clichés syntagmatiques, départs et clausules de phrases » (1969 : 1270). L'époque voulait que cette enquête fût conçue sur un modèle transformationnel, dont la base était cependant moins le modèle chomskyen que sa réinterprétation par Julia Kristeva (voir 1970), enrichie par l'apport de la linguistique soviétique à laquelle celle-ci emprunterait bientôt (1974) l'idée selon laquelle la surface langagière d'un texte (le phénotexte) est issue de la transformation d'un ensemble de représentations prélangagières (le génotexte).


On peut dire que le chantier ouvert par Barthes en 1969 est aujourd'hui prolongé par deux tendances de l'analyse stylistique. La première est la stylométrie informatisée et statistique, qui permet de mettre au jour des récurrences contraintes par des figements phraséologiques de type lexical (collocation) ou grammatical (colligation). L'étude de ces récurrences est particulièrement intéressante pour la stylistique historique mais aussi pour la stylistique des genres, car elle établit une prévisibilité d'apparition des formes linguistiques en fonction des grandes divisions génériques (poésie vs roman…) ou sous-génériques (roman policier vs sentimental…). L'approche logo- ou textométrique a en effet été utilisée très tôt pour l'étude des grands corpus littéraires, notamment à l'occasion des vastes enquêtes menées par Étienne Brunet, dans les années 1980, sur le lexique de divers auteurs du canon. Pour le reste, la terminologie stylométrique n'a pas vocation à se distinguer de celle qui est en usage dans les autres domaines de l'analyse informatisée des corpus et qui est marquée par de nombreux calques ou emprunts de l'anglais, devenu langue scientifique de référence au moment même où émergeait la discipline (item, itemset, lemmatisation, motif séquentiel, paquet lexical…) ; les objectifs et les objets de la stylométrie littéraire peuvent être en revanche assez spécifiques (voir Magri-Mourgues 2010, Legallois 2018, ou encore Rastier 2001 : 73-97).


La nécessité de contourner le mot style, trop associé à une réalité idiolectale et à une démarche auteuriste, explique d'autre part le retour en usage de l'expression de langue littéraire au début du xxie siècle (Berlan 2006, Philippe & Piat 2009, Narjoux 2010, etc.). Cette expression n'a plus ici le sens d'état stabilisé et normé de l'idiome qu'elle avait usuellement au xixe siècle et qu'elle garde encore parfois en philologie ou en linguistique diachronique : « par langue littéraire, nous entendons non seulement la langue de la littérature, mais, dans un sens plus général, toute espèce de langue cultivée » (Saussure 1916 : 267). Dans l'acception stylistique de l'expression, l'adjectif littéraire a en effet une stricte valeur relationnelle : l'état de la langue ainsi désigné est simplement celui qui s'observe dans les textes littéraires à un moment donné de leur histoire.


Le terme de patron, proposé par francisation et élargissement du pattern anglo-saxon, permet alors de désigner des ensembles de traits langagiers, de tous ordres mais congruents, conventionnellement rattachés à des pratiques rédactionnelles stabilisées, contraintes par des attentes génériques, représentationnelles ou esthétiques (patron de la prose poétique, du roman subjectiviste, de l'écrit oralisé, etc.) et, comme elles, en perpétuelle évolution (voir Maingueneau & Philippe 2002, Duval 2016, etc.). On considère, dans une telle perspective, qu'un objet linguistique donné (la phrase averbale, la métaphore adjectivale…) n'est pas un objet stylistique en soi ; seul forme une unité stylistiquement pertinente le faisceau d'observables considéré à un moment des pratiques et de l'imaginaire de la langue littéraire.


L'incessante négociation de l'interface métalangagière


On ne saurait donc penser la productivité catégorielle et, partant, terminologique des approches formelles de la littérature sur le seul mode de l'importation par la critique de l'appareil descriptif et métalangagier de la linguistique. L'appréhension des phénomènes verbaux connaît d'ailleurs des infléchissements parallèles dans l'analyse littéraire et l'analyse linguistique, sans qu'il soit nécessaire voire pertinent de penser que la première soit entièrement redevable à la seconde : l'une et l'autre sont également et simultanément contraintes par des effets de « moment », qui configurent l'intérêt pour telle ou telle facette des productions textuelles. Mieux encore, il suffirait d'élargir le spectre d'observation au delà des études critiques et linguistiques pour vérifier que la négociation des catégories engage bien plus que de simples distributions académiques voire des options proprement scientifiques.


D'évidents parallèles sont ainsi possibles entre la production ou l'avènement de problématiques et de termes descriptifs et l'attestation même des observables dans les textes littéraires. On pourra illustrer ce constat par un exemple très ponctuel. La lexicologie des années 1880 a déplacé son regard des faits de néologie morphologique (par dérivation ou composition) vers les faits de néologie sémantique (par métaphore) ; en témoigne notamment le changement de perspective entre les premiers livres d'Ernest Darmesteter (Traité de la formation des mots composés, 1873 ; De la création actuelle des mots nouveaux dans la langue française, 1877) et son dernier ouvrage, en 1887, La Vie des mots étudiée dans leurs significations. Or, cette mutation ne résulte pas seulement d'une réorientation scientifique, puisque la prose littéraire du temps connaissait, exactement au même moment, une mutation similaire entre une pratique lexicale de type « impressionniste », qui joue d'abord sur la néologie morphologique, et une pratique proprement « symboliste », qui joue d'abord sur la néologie sémantique.


De telles congruences chronologiques nous mettent en garde contre des explicationnismes causalistes trop étroits quand il s'agit d'appréhender des mouvements de fond encore plus radicaux, comme le passage du « moment grammatical » des années 1890-1940, au « moment linguistique » des années 1950-1970, puis au « moment énonciatif » dans lequel nous sommes entrés au début des années 1980. Dans tous les cas, les mutations sont générales : elles reconfigurent les sensibilités à la langue et à la littérature ; elle se vérifient dans l'évolution même des formes littéraires ; on ne saurait les réduire au déport d'appareils notionnels ou terminologiques entre champs académiques. Il reste cependant vrai que de telles mutations s'observent particulièrement bien dans les infléchissements de la terminologie en vigueur dans les sous-disciplines de l'interface – philologie, rhétorique, stylistique, poétique, sémiotique, génétique… – qui marquent le péage entre linguistique et critique et qui, selon les pratiques et les périodes, se situent de part ou autre de la frontière qui sépare les deux champs.


La fin de la conception autonomiste de la littérature et le reflux de la critique formaliste – parallèles au passage du « moment linguistique » au « moment énonciatif » de la littérature française – expliquent ainsi que, dans les années 1990, on ait assisté à une ouverture de l'analyse du discours aux textes littéraires et, en retour, à l'emprunt de catégories et donc de termes discursivistes par la critique ou au retraitement discursiviste de catégories issues de la rhétorique, comme celle d'ethos. Née au tournant des années 1960-1970, l'analyse du discours dite « à la française » s'était pourtant d'abord spécialisée dans les productions langagières politiques, avant de s'étendre aux autres formes de production publique. Sa démarche, qui reposa un temps sur la traque lexicométrique des formes de phraséologie et des effets d'idéologie, sembla d'abord mal convenir aux œuvres littéraires, qui étaient d'ailleurs, au même moment, presque confisquées par des approches textualistes et décontextualisantes, dont l'esprit structural était peu compatible avec une conception sociale des productions verbales.


Une mention particulière doit être faite ici aux travaux de Dominique Maingueneau, tout d'abord, parce que celui-ci a été un des premiers spécialistes d'analyse du discours à travailler sur des productions que celle-ci écartait, le discours religieux et philosophique, par exemple, mais aussi et tout particulièrement le discours littéraire ; ensuite, parce que ces travaux ont souvent pris la forme de manuels, qui ont assuré une diffusion rapide de leur terminologie dans les universités de langue française ; enfin, parce que Maingueneau a proposé tout un appareil de catégories permettant de rendre compte du fonctionnement discursif de la littérature. Bien que la plupart de ces catégories n'aient pas vocation à être réservées aux seules réalisations littéraires (aphorisation, particitation, surassertion...), certaines – comme celles d'hypergenre, de périlangue, de scénographie et surtout de paratopie – ont été d'abord mises au point pour rendre compte du fonctionnement énonciatif des textes littéraires (voir Maingueneau 1993 et 2004).


Conformément au principe affirmé plus haut, cet intérêt de l'analyse du discours pour la littérature et le succès symétrique de la terminologie discursiviste dans les études critiques doivent être envisagés de façon large, au sein d'un changement plus radical de paradigme, qui explique aussi, par exemple, la mutation des formes littéraires à la même époque (formes désormais à fort affichage communicationnel, avec par exemple la montée de l'autofiction et la régression du protocole romanesque impersonnel, etc.). Il n'y eut donc pas tant « influence » de l'analyse du discours sur l'analyse littéraire que convergence d'intérêt, dans le cadre d'une mutation plus générale qui voyait l'abandon d'un imaginaire de la « littérature-texte » au profit de la « littérature-discours » (pour reprendre les catégories de Vaillant 2003). Ce changement de paradigme explique, bien mieux que le recours simpliste à un mécanisme d'« influence », tant l'accord de l'analyse du discours et de l'analyse critique sur l'idée du nécessaire abandon de l'opposition entre texte et contexte (mort avec le textualisme, l'auteur est ressuscité avec les cultural studies et la sociocritique, qui triomphent actuellement dans la recherche littéraire). Rien d'étonnant, dès lors, si la terminologie linguistique la plus sollicitée par les études critiques soit de nature discursiviste mais aussi énonciative ou rhétorique (la question même des figures fait aujourd'hui l'objet d'un vigoureux retraitement, sans que cela entraîne le rejet des dénominations traditionnelles ; voir, par exemple, Bonhomme 2005 ou Gardes Tamine 2011).


Si ce changement de paradigme n'est pas propre à l'Europe de langue française, sans doute cette dernière inflexion l'est-elle plus ; elle a d'ailleurs été précédée ou accompagnée par un infléchissement énonciatif de la syntaxe chez Gustave Guillaume ou Antoine Culioli. On sait par exemple que la linguistique de langue anglaise (aujourd'hui largement dominante, pour des raisons qui ne sont pas seulement scientifiques) ne dispose pas du mot énonciation, du moins avec le sens technique que nous lui donnons. Cela ne signifie bien sûr pas qu'elle soit insensible aux faits énonciatifs (elle dispose d'ailleurs de catégories comme l'évidentialité que nous n'utilisons que par emprunt), mais simplement qu'elle ne les regroupe pas de façon systématique sous un terme chapeau.


De fait, la tendance au « tout énonciatif » de l'analyse linguistique des textes littéraires dans l'Europe de langue française explique peut-être, et sans qu'il y ait paradoxe, que le terme de pragmastylistics n'ait guère été francisé. À l'inverse des approches énonciatives, la pragmatique n'accorde pas aux faits proprement langagiers une place centrale, alors que la sensibilité littéraire des pays francophones ne s'est pas départie de tout souci formaliste. Le succès des catégories de Maingueneau tient d'ailleurs aussi dans le fait que celui-ci considère que la scène d'énonciation ne précède pas le texte mais est construite par lui. En outre et, presque à l'inverse, conçue comme l'étude des traces laissées dans l'énoncé par l'acte et le sujet singuliers qui l'ont produit, la linguistique de l'énonciation sembla entrer en parfaite résonance avec une stylistique longtemps demeurée auteuriste, et cela de façon d'autant plus décomplexée que l'auteur était de retour…


Mais on doit aussi se souvenir que bien des catégories de la linguistique énonciative actuelle se sont construites à l'interface avec les études littéraires. Sans même évoquer la postérité de la distinction proposée par Benveniste entre discours et énonciation historique (1959), on peut par exemple se souvenir que les termes de polyphonie ou de dialogisme sont issus de la traduction, notamment par Todorov, de textes critiques du cercle de Bakhtine, et c'est encore pour traduire Bakhtine que Julia Kristeva forgea le terme d'intertextualité (1969 : 115, 133), au moment même où, hors du champ littéraire, apparaissait celui d'interdiscours (Culioli & al., 1970 : 7). Par ailleurs, le modèle de l'énonciation théâtrale et romanesque n'est pas étranger à la distinction proposée par Oswald Ducrot entre sujet parlant, locuteur et énonciateur (1984 : 203-210). Au même moment, Anne Ubersfeld commençait d'ailleurs à faire paraître d'importantes analyses sur la spécificité du discours théâtral (1977), et l'analyse dramatique devait bientôt dépasser le seul constat de double énonciation en s'inspirant des problématiques et de la terminologie de l'analyse de la conversation ordinaire qui devaient aussi permettre le renouvellement des approches du dialogue romanesque (Durrer 1994).


Ce type d'échange de termes et de notions s'observe bien sûr dans d'autres domaines que la linguistique énonciative. Bien des catégories de la linguistique textuelle ont également été co-construites ou renégociées à l'interface des champs linguistique et critique. Le cas le plus emblématique reste bien sûr la notion de genre, que les dictionnaires de Ducrot & Todorov (1972) et de Ducrot & Schaeffer (1995) réservaient aux seules subdivisions littéraires, mais qui est aujourd'hui entendue de façon bien plus large, de sorte que les genres sont désormais clairement distingués des types de textes et définis comme des « patrons sociocommunicatifs et sociohistoriques que les groupes sociaux se donnent pour organiser les formes de la langue en discours » (Adam 2011 : 33). Bien des linguistes du texte refusent ainsi d'entériner la distinction « absurde et arbitraire » entre genres littéraires et non littéraires (ibid. : 32), distinction qui reviendrait à reconduire le mythe d'une autonomie langagière de la littérature. Mais ils ont souvent trouvé dans les œuvres littéraires des objets privilégiés, d'abord pour établir des « grammaires du texte » poétiques ou narratifs, puis pour faire apparaître des modèles d'organisation de type séquentiel. Sans rompre avec les catégories transphrastiques usuelles (isotopie, cohésion, cohérence, liage…), cette approche est d'un évident rendement pour les formes et genres littéraires, notamment parce qu'elle permet de rendre compte de l'articulation des différents modes de textualisation (insertion de la description ou du dialogue dans le récit, inserts narratifs dans l'explication et l'argumentation, etc.). La théorie des séquences permet en outre de repenser certaines catégories de la rhétorique (descriptio, exemplum…) ou de la théorie de l'argumentation (sur tout ceci, voir par exemple Adam 2011 et 2015) et de refonder l'analyse de ce que la tradition plaçait sous le terme de dispositio.


*


Le trajet de la terminologie en usage dans l'analyse formelle des textes littéraires, apparaît donc largement configuré par des déterminations historiques : développement parallèle des sciences linguistiques et critiques ; émergence, évolution ou déclin des disciplines de l'interface ; mutation des imaginaires langagiers et esthétiques et, par dessus tout, des réponses apportées à la question de l'autonomie des pratiques littéraires qui seule justifierait une terminologie qui leur fût propre. À ces critères historiques, il convient cependant d'ajouter une dimension géographique, puisque ces évolutions n'effacent pas le maintien d'une spécificité de l'Europe de langue française. Il suffit, pour s'en rendre compte, de comparer la terminologie en vigueur dans celle-ci et dans le monde de langue anglaise. Ce dernier recourt par exemple plus fréquemment à la catégorie de ton et moins à celle de style ; il connaît une opposition entre tone et mood que le français ignore. Au xixe siècle, l'Europe de langue française a progressivement reconstruit son imaginaire de la phrase littéraire sur un critère de longueur (premier fondement de la distinction traditionnelle entre style périodique et style coupé) que ne retient pas l'opposition anglo-saxonne entre periodic sentence et loose sentence, cette seconde catégorie restant sans réel équivalent en français. Des filtres plus complexes comme ceux d'écriture blanche se rendent en anglais par des filtres bien différents, comme celui de journalistic style, qui modifient sensiblement la saisie de réalités langagières pourtant comparables, etc. (sur tout ceci, voir Philippe 2010). De façon générale d'ailleurs, les dictionnaires des « termes littéraires » de langue française (Jarrety 1997, Aron & al. 2002, par exemple) réservent une place incomparablement plus importante aux étiquettes désignant des faits langagiers que leurs équivalents anglophones, dont la couleur est plus théorique que linguistique (voir par exemple Cuddon 1998 ou Macey 2000). Mais cette opposition géographique n'est elle-même encore qu'une construction historique…



Gilles Philippe (Université de Lausanne), 2016 & 2018.


Mis en ligne dans l'Atelier de théorie littéraire de Fabula en avril 2020.



Pages associées : Style, Métalangage?.


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Gilles Philippe

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