Atelier

La collection Terre humaine: dans et hors de la littérature


Vincent Debaene


«Dans et hors de la littérature»: cette formule vise à cristalliser la position paradoxale occupée par la collection Terre humaine dans le paysage littéraire français du second demi-siècle. Cette position est la conséquence à la fois d'un héritage historique et d'un positionnement idéologique, et on étudiera successivement l'histoire de cette collection et le discours qui est le sien - car il y a un «discours Terre humaine», et cela seul en un sens mérite qu'on s'y arrête.

Quelques mots d'abord à propos de la collection. La collection est une réalité éditoriale, c'est-à-dire d'abord d'ordre institutionnel et économique. Si l'on oppose, selon un partage à la fois tentant et toujours un peu vain, une approche «textuelle» à une approche «externe», historique ou sociologique, de la littérature alors la collection est un objet qui impose une approche externe. En un sens, la collection manifeste la part impure de la littérature; elle contraint à parler en termes de créneau, de marché, de structure de l'édition à telle ou telle époque. D'un autre côté, une collection est également une réalité symbolique; l'appartenance d'un ouvrage à une collection donnée relève du paratexte étendu. La collection, en tant que rassemblement d'ouvrages divers sous une même «étiquette», est une construction, c'est entendu, mais c'est une construction opératoire, qui conditionne l'appréhension du livre. Terre humaine est un cas particulièrement intéressant à cet égard, car cette construction est particulièrement élaborée et va bien au-delà de la charte graphique qui, en édition brochée comme en édition de poche, permet d'identifier ou d'associer les volumes entre eux: il y a, à propos de Terre humaine, un discours de collection, et même un militantisme de collection. Si certaines collections («Poètes d'aujourd'hui», la «Bibliothèque de la Pléiade», etc.) ont une identité marquée et renforcée par l'histoire, il n'y a sans doute pas d'équivalent, dans le paysage littéraire français, à la tentative de singularisation de Terre humaine.

Un élément est particulièrement révélateur à cet égard: les ouvrages de la collection ne proposent pas, en début ou en fin de volume, de rubrique «Du même auteur»; en revanche, tous les volumes s'achèvent sur une présentation de Terre humaine et la liste des 85 (à ce jour) titres de la collection, comme pour manifester que ceux-ci ne relèvent pas d'abord d'une œuvre personnelle mais ne sont qu'une voix contribuant à cette «symphonie» «orchestrée» depuis 1955 par Jean Malaurie (selon une formule de Henri Mitterand). Une seule exception, semble-t-il, à cette règle: les ouvrages de Jean Malaurie lui-même, fondateur de la collection. Seuls en effet Les Derniers Rois de Thulé (1955 pour la première édition) et Hummocks (1999) renvoient à une réalité éditoriale extérieure et nous apprennent que Malaurie a écrit une thèse de géomorphologie aux éditions du CNRS et, dès 1954, un journal d'exploration dans le massif de l'Ahaggar. Mais ni Tristes tropiques, ni Les Quatre Soleils ne nous renseignent sur le reste des oeuvres de Claude Lévi-Strauss ou de Jacques Soustelle, et à lire ou écouter Jean Malaurie, L'Eté grec est d'abord et avant tout un volume de Terre humaine et n'est que très secondairement un ouvrage de Jacques Lacarrière - ce qui n'est pas inintéressant après tout; on sait assez que l'identité de l'auteur n'est pas une donnée naturelle de l'interprétation. Reste à comprendre l'effet d'une telle substitution (la collection plutôt que l'auteur) et ce que produit, à la fois pour le lecteur et pour l'histoire de la littérature, une telle affiliation.

Historique

Terre humaine est donc fondée par Jean Malaurie en 1955 aux éditions Plon. L'historien de la littérature rencontre ici une difficulté méthodologique: un secret jaloux entoure les archives de la collection. On peut, en s'appuyant sur des sources extérieures, réinscrire la création de la collection dans une chronologie assez serrée et se faire une idée assez juste du contexte éditorial au moment où Jean Malaurie fonde Terre humaine, mais il est impossible de connaître exactement son projet initial; on sait qu'il a écrit un programme de collection à l'intention de Charles Orengo, alors directeur littéraire de Plon, mais ce que ce texte contient et annonce, les circonstances de la rencontre entre Claude Lévi-Strauss et Malaurie, tout ce qui concerne les allers-retours des manuscrits entre la maison Plon et les auteurs, ou la question cruciale, par exemple, des échanges entre l'ethnologue et l'«indigène» dans le cas d'une autobiographie parlée: tout cela demeure très obscur. On ne peut que se fier aux reconstructions tardives de Malaurie lui-même, reconstructions qui datent pour l'essentiel des années 1975-80. C'est au cours de cette période en effet que le discours de et sur Terre humaine prend une ampleur nouvelle. L'histoire de la collection peut ainsi se diviser en deux temps: de 1955 à 1975, et de 1975 à aujourd'hui.

Après l'extinction de la génération des éditeurs résistants (Vercors, Max-Pol Fouchet, Seghers...), les années 1950 voient une complète restructuration de l'édition française sous l'effet de trois évolutions conjuguées[i]: la création des Clubs, en particulier le Club français du livre fondé en 1946, et le développement de la vente par correspondance[ii]; l'avènement du Livre de poche en 1953; et plus généralement, la prise de contrôle de l'édition française par quelques «grands groupes»: les deux «anciens», Gallimard et Hachette, et les trois nouveaux: les Presses de la Cité (du Danois Sven Nielsen), Julliard et Robert Laffont. A ces nouvelles réalités économiques, s'ajoute une modification sociologique du public: les cadres et les étudiants constituent un nouveau lectorat, en même temps que la France entre progressivement dans une société de consommation et de loisir, parfaitement représentée par le succès immédiat du Livre de poche (les «J'ai lu» n'étaient initialement disponibles que dans les Prisunic et les Monoprix). Concernant l'offre, deux évolutions sont à noter: d'abord, la multiplication des traductions surtout d'auteurs américains; ensuite, le développement de l'édition en sciences humaines: «Liberté de l'esprit» est fondée en 1947 et dirigée par Raymond Aron chez Calmann-Lévy; la «Bibliothèque de philosophie» est créée par Sartre et Merleau-Ponty en 1950 pour Gallimard; la même année, les Presses Universitaires de France s'enrichissent de la «Bibliothèque de psychanalyse et de psychologie clinique» dirigée par Daniel Lagache et de la «Bibliothèque de sociologie contemporaine» dirigée par Georges Gurvitch.

La maison Plon résiste et fait face à cette conjoncture en s'adaptant[iii]. Historiquement, elle réunit trois tendances: c'est d'abord la maison «des maréchaux et des comtesses» (son catalogue propose les œuvres de Georges Clemenceau, du Maréchal Foch, de Raymond Poincaré, et La France et son armée de Charles de Gaulle (1938)); elle est ensuite connue pour abriter les œuvres de quelques auteurs-phares (Bernanos, Claudel pour quelques titres) parmi lesquels surtout des célébrités conservatrices: Maurice Barrès, René Bazin, Paul Bourget, Henry Bordeaux, les frères Tharaud; enfin, Plon est l'éditeur des «grands auteurs étrangers», en particulier grâce à la collection «Feux croisés» créée en 1927 et dirigée par Charles du Bos et Gabriel Marcel dans les années 1930: cette collection propose les traductions des œuvres de Virginia Woolf, Graham Greene, James Joyce, Alberto Moravia, etc. Ces trois orientations persistent après 1945, moyennant quelques renouvellements: la politique de traduction se poursuit; les héros de la Première Guerre Mondiale font place à ceux de la Seconde, avec les Mémoires de W. Churchill (1948), prix Nobel de littérature en 1953, et surtout les Mémoires de guerre de de Gaulle en 1954; enfin, le catalogue s'enrichit de quelques nouvelles figures, en particulier Marguerite Yourcenar (les Mémoires d'Hadrien sont publiées en 1951) et François Mauriac, ancien auteur Grasset, qui rejoint Plon en 1949. C'est en 1949 également que Plon rachète70 % du capital de la Table ronde et relance du même coup les hussards anti-sartriens (Roland Laudenbach, Thierry Maulnier).

Maurice Bourdel, directeur général de Plon, définit dans un entretien de 1952 la politique de sa maisonpar une double orientation, à la fois littéraire et politique: il entend combiner la promotion de «jeunes auteurs originaux» et une position sans concession dans le combat est-ouest, en oeuvrant pour la «défense de la civilisation occidentale» et le maintien des «couleurs éternelles de la civilisation humaniste et chrétienne»[iv]. Depuis 1949, Charles Orengo occupe dans les faits le poste de directeur littéraire (titre qui deviendra officiel à partir de 1954); il décide d'ouvrir très largement la maison aux sciences humaines et socialesen lançant successivement trois collections à la tête desquelles il place trois chercheurs, jeunes et peu connus: en 1952, les «Recherches en sciences humaines» dirigées par Eric de Dampierre (qui publiera plusieurs ouvrages de Raymond Aron, les traductions de Weber, de Merton et de Karl Popper); en 1953, la collection «Civilisations d'hier et d'aujourd'hui» dirigée par Philippe Ariès qui, outre L'Enfant et la Vie familiale sous l'Ancien régime (1960) d'Ariès lui-même, publiera Folie et déraison. Histoire de la folie à l'âge classique (1961), la thèse de Michel Foucault initialement refusée par Gallimard; enfin, en 1954, «Terre humaine. Civilisations et sociétés. Collection d'études et de témoignages» sur une proposition, semble-t-il, de Jean Malaurie lui-même et dont les deux premiers ouvrages paraîtront en1955.

Le rythme de publication initial est très lent: dix ans après sa création, Terre humaine compte six titres, et seize volumes seulement paraissent entre 1955 et 1967, signe que Terre humaine ne s'est pas encore engagée à cette date dans la politique de fidélisation du lecteur qui sera la sienne à partir des années 1970. En réalité, si on considère les douze titres publiés avant 1968, le visage de la collection semble assez indécis: on y trouve la réédition d'une fiction de 1907 (Les Immémoriaux de Victor Segalen, troisième volume de la collection en 1956); la traduction d'une monographie savante en deux volumes de 1928 et 1935 (Mœurs et Sexualité en Océanie de Margaret Mead (1963)); deux traductions de témoignages de minorités (Soleil Hopi de Don C. Talayesva (1959), Un village anatolien de Mahmout Makal (1963), dont les publications initiales datent respectivement de 1942 et 1949) et surtout huit récits ou autobiographies intellectuelles de savants voyageurs, parmi lesquels Les Derniers rois de Thulé de Jean Malaurie (1955), Tristes tropiques de Claude Lévi-Strauss (1955), Afrique ambiguë de Georges Balandier (1956), L'Exotique est quotidien de Georges Condominas (1966) et Les Quatre Soleils de Jacques Soustelle (1967).

On l'a dit, il est impossible de connaître le projet initial de Jean Malaurie. A en croire plusieurs entretiens qu'il donna après 1970,le contrat de publication des Derniers Rois de Thulé était assorti d'une promesse de création d'une collection et d'un «manifeste» à l'intention de Charles Orengo - manifeste dont la teneur demeure malheureusement inconnue. Si l'on se fie au témoignage de Claude Lévi-Strauss ainsi également qu'à un encart de la Vie des lettres de 1955, Terre humaine se voulait une «nouvelle collection de voyages philosophiques» et cela semble confirmé par ces huit titres de voyageurs savants.

On note à partir de 1968 un changement d'orientation: le témoignage des minorités et des «oubliés de l'histoire» prend le pas sur l'autobiographie intellectuelle - sans s'y substituer pour autant. Il semble pourtant que cela ne suffise pas à assurer la pérennité de la collection, et selon plusieurs témoignages[v], le conseil des contrôleurs de gestion mis en place par les Presses de la Cité se plaint du caractère peu rentable de la collection, à tel point que Terre humaine semble appelée à disparaître au milieu des années 1970. Le basculement a lieu en 1975, avec le succès à la fois inattendu et considérable du Cheval d'orgueil de Pierre Jakez Hélias (entre 300000 et un million d'exemplaires vendus en trois ans selon les sources), multiplié par l'habile politique commerciale de Bernard de Fallois, ancien directeur du Livre de poche chez Hachette et directeur des Presses de la Cité depuis 1975[vi]. Ce succès est conforté l'année suivante par celui de L'Eté grec de Jacques Lacarrière vendu lui aussi à plusieurs centaines de milliers d'exemplaires. Cette période 1975-1976 inaugure une nouvelle tendance appelée à prendre une place importante au sein de la collection et qu'on peut qualifier de «retour vers le proche»: après le Cheval d'orgueil - chronique de la vieille civilisation rurale bretonne -, paraissent Gaston Lucas, serrurier d'Adélaïde Blasquez - récit autobiographique d'un artisan «anti-héros», recueilli et mis en ordre par une romancière - (1976), Le Grand Métier de Jean Recher - «Journal d'un capitaine de pêche de Fécamp» - (1977), Toinou d'Antoine Sylvère (1980), autobiographie d'un fils de métayers auvergnats, etc.

En même temps qu'elle assure sa sécurité financière, Terre humaine se dote d'un discours destiné à affermir son identité. De cette période date ce qui, plus que tout, fait la singularité de la collection, à savoir la vaste entreprise para-éditoriale qui vise à la fois à la célébrer et à l'imposer comme un tout indivisible: de 1978 et 1985, est publié à 30000 exemplaires un Bulletin Terre Humaine; chaque anniversaire de la collection est l'occasion d'hommages et d'expositions; depuis 1998, se sont constitués des «pôles Terre Humaine» dans différentes villes de France qui accueillent colloques et conférences, la bibliothèque locale se voyant par ailleurs céder une série complète de la collection... Cette célébration continuée a atteint son apogée en 2005 avec le cinquantenairede la création, marqué en particulier par une exposition et un colloque à la Bibliothèque nationale de France et la publication de plusieurs ouvrages. Ainsi Terre humaine est-elle devenue dans les faits quasiment inséparable d'une proliférante littérature seconde, faite d'ouvrages, d'articles ou d'entretiens, très répétitifs, très hagiographiques, et qui ont bien souvent pour point commun une absence complète de perspective historique.

En 2006, la collection compte 85 titres(sans tenir compte des sous-collections annexes, «Courants de pensée» et «Albums Terre Humaine»), et ceux-ci se sont vendus à plus de onze millions d'exemplaires, dont 1 million 200000 pour le seul Cheval d'orgueil (et sans doute beaucoup plus pour Tristes tropiques, traduit en 27 langues). Chaque année paraissent deux à trois livres, dont le tirage initial varie entre 8000 et 20000 exemplaires, certains étant ensuite repris dans des éditions «club» comme «Le Livre du mois» ou «France-Loisirs» - c'est le cas en particuler de Toinou d'Antoine Sylvère (1980) vendu à 500000 exemplaires dans la réédition du «Livre du mois».

Discours

Ainsi donc, la fin des années 1970 voit la réorientation de la collection autour du témoignage autochtone, réorientation accompagné de ce «retour vers le proche» qui est aussi celui des sciences humaines à la même époque. C'est au cours de cette période que se construit le discours offensif de la collection qui va demeurer inchangé jusqu'à aujourd'hui:

«Terre Humaine» a créé dans les sciences sociales et la littérature, depuis quarante ans, un courant novateur dont on n'a pas fini de mesurer la fécondité. Traquant la vie, cette collection de regards croisés a, d'abord, renouvelé la littérature de voyage et construit, livre après livre, une anthropologie à part entière, toute interprétation ne s'élaborant que sur une expérience vécue et même un engagement. [...] Les auteurs les plus célèbres (Zola, Lévi-Strauss, Ramuz, Segalen, Balandier, Duvignaud, Hélias, Lacarrière, Thesiger, Ripellino, Lucas) rejoignent, avec un air de famille, ouvriers, paysans, marins les plus anonymes - certains parfois même illettrés (témoignages en direct d'autochtones) - pour faire prendre conscience au lecteur, non seulement de la complexité des civilisations et des sociétés, mais de sa propre intelligence des problèmes. Elle est stimulée par une totale indépendance des auteurs[vii].

Cette collection est un des courants d'idées majeurs des cinquante dernières années. Littérature éclatée ouvrant sur l'universel, elle nous fait découvrir avec des sans-grade et des académiciens, des dominicains et des communistes chinois, des paumés et des ravis, des braqueurs de banque et des philosophes, le roman de la vie, de sa réalité des rues, des métiers, des prisons, des camps de concentration, des hommes de la forêt, des grands déserts et de la toundra[viii].

Deux éléments sont à noter dans ce discours. D'abord, le postulat de l'homogénéité de la collection. Terre Humaine se donne comme une unité organique: elle est le «roman fleuve de notre temps», «une nouvelle Comédie humaine» qui, «comme La Divine Comédie de Dante, [...] a ses cercles, son paradis et son enfer»[ix]; c'est «une œuvre en soi, une et multiple: œuvre de science et œuvre d'art, réunissant de nombreuses plumes, mais modelée par un unique esprit», «un roman symphonique, au sens étymologique du terme, une "symphonie du nouveau monde", dont un chef d'orchestre à la baguette sûre a harmonisé tous les timbres, toutes les mélodies et tous les rythmes»[x]; c'est «un fleuve aux mille sources», «un cours fait d'eaux multiples et métissées»[xi]... Ensuite, ce discours de collection se place d'emblée sur un terrain socio-moral: il est question de donner la parole à ceux qui en sont privés- «ouvriers, paysans, marins les plus anonymes - certains parfois même illettrés» -, parole sans fard et sans ornement, littérature brute, prélevée à même la source: «témoignages en direct d'autochtones.» C'est là un élément essentiel, qui doit impérativement être pris en compte dans l'analyse, car il est d'une grande efficacité: il est en effet très inconfortable de contester les prétentions littéraires d'un instituteur d'Anatolie ou d'un fils de métayers auvergnats (Toinou). Sommé de rendre raison du jugement de valeur inhérent à l'idée qu'il se fait de la littérature, le lecteur se trouve en difficulté et un mélange de scrupule moral et de political correctness fait que, faute de savoir comment répondre à de telles revendications, il préfère les ignorer. Ce moralisme sous-jacent joue un rôle central dans la stratégie de Terre humaine qui anticipe une mauvaise conscience du lecteur: la littérature n'est pas ce que l'élite universitaire ou parisienne tente d'imposer; c'est aussi et surtout le témoignage des «voix profondes qui expriment la sève d'un peuple»[xii], c'est ce que le public lit et achète, à preuve l'immense succès de certains ouvrages de la collection. Délaissant Soleil hopi ou Gaston Lucas, serrurier, on peut certes invoquer des goûts personnels, ou même, si on ose l'avouer, l'ennui suscité par de telles lectures, mais le désintérêt même est coupable, et le signe d'une conception à la fois étroite et élitiste de la littérature.

Il n'est ainsi guère facile de s'opposer à ce discours selon lequelTerre humaine constitue une nouvelle forme de littérature, un courant autonome et nouveau, une œuvre «éclatée ouvrant sur l'universel», car il est extrêmement prégnant, tacitement accepté, et doté d'une efficacité performative certaine. L'idée d'un «air de famille» entre l'académicien et le paysan anonyme concorde d'abord avec l'idéologie générale de la collection (en réalité, elle en est le postulat), mais elle programme également la lecture, comme le montre avec éclat par exemple l'ouvrage de Pierre Aurégan, Des récits et des hommes, publié en 2001, qui se présente comme une analyse de la collection, mais qui ne fait que la célébrer selon les critères qu'elle impose.

La puissance de ce discours est accrue par les stratégies para-éditoriales déjà évoquées (le Bulletin Terre Humaine, les«pôles Terre Humaine», etc.) et par une conjoncture historique,puisque son émergence coïncide avec la fin des paradigmes unifiant en sciences socialeset l'avènement d'une idéologie humanitariste et tiers-mondiste après la fameuse «faillite des grands systèmes». Pourtant, ce discours qui présente la constitution de la collection comme une rupture s'inscrit, par son contenu et ses présupposés, dans une tradition historique. Cette tradition est celle de la «querelle de propriété» entre littérature et sciences de l'homme. Cette formule provient d'un article de Ramon Fernandez, publié en 1935 dans La Nouvelle Revue françaiseet intitulé «Connaissance et science de l'homme». Ramon Fernandez y met en scène la lutte entre l'homme de lettres et le savant spécialiste de sciences humaines:

Tant qu'il s'agissait des mesures des corps, ou de leurs transformations, nous n'avions rien à dire. À présent le sociologue, le psychologue de laboratoire, l'historien des lettres et des arts, s'en prennent à tout ce qui fut toujours l'objet du poète et du moraliste. Ils s'occupent de connaître l'homme. Notre querelle avec eux est une querelle de propriété[xiii].

La première manifestation historique de cette querelle est le pamphlet anti-durkheimien d'Agathon, L'Esprit de la Nouvelle Sorbonne[xiv]; cette lutte connaît ensuite différentes formes, tantôt pacifique, tantôt franchement agonistique. Terre humaine s'inscrit indubitablement dans cette tradition de contestation, par la littérature, des prétentions à la connaissance de l'homme par les sciences sociales; il s'agit toujours de montrer qu'il est dans l'homme un résidu qui échappe à la science et auquel la littérature seule peut donner accès. On peut cependant noter deux déplacements par rapport aux formes plus traditionnelles de cette querelle. D'abord un changement de lieu sociologique. La protestation ne provient plus des avant-gardes ou des «grandes revues». Ce n'est plus Breton qui, au nom de la poésie, s'attaque à la rationalité froide des ethnologues ou Bataille qui exige que l'ethnographe s'incline devant l'écrivain, et on est loin du forum que constituait la rubrique «sociologie» de la Nouvelle Revue française entre les deux guerres. L'expression de la querelle émane à présent d'un espace extérieur à la littérature, et qui, de plus, se veut tel: «en dehors des Appareils et même contre eux», la collection réunit «80 réfractaires»[xv]. Autrement dit, Terre humaine se présente et se pense comme un lieu de résistance, résistance non seulement (comme on va le voir) à l'université et à la science, mais aussi résistance à la littérature: on ne compte pas les déclarations de Jean Malaurie et des chantres de Terre humaine contre le XXe siècle et sa littérature déshumanisée, «les épigones de Valéry» ou «l'impasse détestable du Nouveau Roman»[xvi]. Cette rupture de continuité historiqueest une véritable nouveauté: Terre humaine se donne comme une tentative de refondation de la littérature à l'écart d'une évolution qui a été la sienne depuis le milieu du XIXe siècle, dans une relative continuité à la fois sociologique (la circonscription d'un «champ» autonome) et esthétique (à travers la reprise de problèmes partagés, la succession des avant-gardes, et la perception d'une histoire commune dont témoignent quantité de gestes de filiation et de défiliation à l'égard des générations précédentes). Lorsqu'il s'agit de chercher des racines à sa collection, Jean Malaurie refuse toute affiliation avec la littérature du XXe siècle et plonge directement dans le XIXe siècle, se réclamant ou des premières autobiographies ouvrières, ou, plus fréquemment, des «grandes fresques» de Zola ou Balzac, avant de convoquer Montaigne et Rousseau qui «avaient bien compris» que connaissance de l'homme et littérature sont inséparables.

Le second élément notable de cette nouvelle forme de «querelle de propriété» est la radicalisation du discours anti-scientifique. A la différence de ce qu'on observe autour d'une collection comme «L'Espèce humaine» dirigée par Michel Leiris chez Gallimard à partir de 1937, l'idéologie de Terre humaine est fondamentalement anti-scientifique. La collection prétend fonder une «Université nouvelle des Sciences sociales», et «créer une anthropologie réflexive proche des hommes et à la portée du public»[xvii], ou proposer «un autre regard sur les sciences de l'homme»[xviii], mais c'est in fine pour soustraire l'homme à la science. Il est acquis, et constamment répété, que celui-ci se dérobe, qu'il sort des cadres dans lequel on voudrait l'enfermer, que, par essence, il oppose une résistance au savoir[xix]. Mais surtout - et l'argument est nouveau - la science est discréditée par le lieu même où elle se déploie: l'université et le «ghetto des publications spécialisées»[xx]. «Il est une plus grande université, et la vraie. Elle est hors les murs: c'est celle du public», affirmait récemment Jean Malaurie[xxi], reprenant une conviction exprimée dès l'éditorial du deuxième Bulletin «Terre Humaine» en 1978:

Une Université nouvelle des Sciences sociales se profile où une réflexion globale, totale, sur le cours dramatique de l'humanité, aura pour auxiliaires les hommes obscurs et ceux-là même qui inventent, les créateurs. On y entendra enfin les cris des musiciens et des peintres, des poètes et des gueux.

«Sans tomber pour autant dans la tentation de l'exotisme ou du pittoresque, sans abdiquer non plus l'indispensable rigueur de la recherche»; «Ne céder ni aux attraits du folklore ou de l'exotisme, ni à l'objectivité réductrice du regard ethnologique»[xxii]: ce discours est ainsi un parfait exemple de ce que Barthes qualifiait, dans une célèbre mythologie, de critique «Ni-Ni»: ni littérature déshumanisée, ni anthropologie desséchante, donc véritable Littérature et véritable Anthropologie:

On fait le compte des méthodes avec une balance, on en charge les plateaux, à volonté, de façon à pouvoir apparaître soi-même, comme un arbitre impondérable doué d'une spiritualité idéale, et par là même juste, comme le fléau qui juge la pesée.

[...] Selon un vieux procédé terroriste (n'échappe pas qui veut au terrorisme), on juge dans le même temps que l'on nomme. [...]

Tout se passe comme s'il y avait d'un côté des mots lourds, des mots tarés (idéologie, catéchisme, militant), chargés d'alimenter le jeu infamant de la balance; et de l'autre, des mots légers, purs immatériels, nobles par droit divin, sublime au point d'échapper à la basse loi des nombres (aventure, passion, grandeur, vertu, honneur), des mots situés au-dessus de la triste computation des mensonges; les seconds sont chargés de faire la morale aux premiers: d'un côté des mots criminels, de l'autre des mots justiciers[xxiii].

Les mots criminels sont ici science, structure, objectivité, esthétique; les mots justiciers sont les mêmes: aventure, homme, grandeur, auxquels on peut ajouter quelques mots chargés d'un contenu métaphorique riche d'une puissance de rêverie élémentaire: la pierre, la terre, le fleuve aux mille sources, etc.

Pourtant, il ne suffit pas de répéter qu'on «n'abdique pas l'indispensable rigueur de la recherche», et qu'on dépasse les clivages entre objectif et subjectif ou entre science et littérature. Ce mouvement qui consiste à affirmer qu'on ne renonce pas à la connaissance de l'homme tout en la reportant sans cesse parce qu'elle est inassignable a une conséquence essentielle: la connaissance se réduit à un fait d'autorité. Seuls deux types de parole sont autorisés: celle de l'indigène qui seul peut parler de sa propre expérience; celle du «savant épique», héroïsé par ses voyages et son expérience du désert ou de la banquise. «Une étape est franchie : l'ethnologie sera le fait d'une rare et exigeante élite ; l'ethnographie, elle, devra compter avec les voix profondes qui expriment la sève d'un peuple[xxiv]

Cette argumentation aboutit à la résurrection d'un humanisme moral héroïque qui réserve la connaissance à quelques «fortes personnalités», car in fine, c'est le seul point commun que Malaurie veut bien reconnaître aux différents volumes de sa collection: ils sont tous le fait de «caractères», de «réfractaires», de «fortes personnalités» unies par une «parenté secrète». On est ici dans la droite ligne des Théodore Monod et Saint-Exupéry, et c'est également une tentation de l'ethnologie depuis ses débuts, consistant à faire du savant le lieu unique de réconciliation de l'hétérogène. Ainsi est-on pris dans un tourniquet qui bascule sans cesse d'une affirmation de connaissance au constat selon lequel cette connaissance se dérobe à toute transmission et à toute formalisation: ne reste que le sentiment d'un «air de famille» entre l'académicien et le paysan breton - mais il n'est pas sûr que cela fasse une université, ni une anthropologie.

Il importe d'abord, en conclusion, de relever la singularité de l'entreprise Terre humaine qui prétend constituer, volume après volume, un contre-canon. Ce discours de contestation est unique dans le paysage littéraire français. On ne peut ensuite faire l'économie d'une évaluation d'un tel projet; à cet égard, force est de constater le demi-échec ou demi-succès de l'entreprise: cette tentative de refondation de la littérature sur de nouvelles bases est demeurée relativement isolée. Elle ne semble pas avoir réellement modifié, pour l'instant, la perception de l'histoire littéraire du second demi-siècle, en tout cas du point de vue des «dominants» - les universitaires parisiens. On se heurte ici bien sûr à la question de la légitimation. De la Bibliothèque Nationale de France à Radio-France, en passant par les succès commerciaux des rééditions dans le «Livre du mois», Terre humaine demeure surtout consacrée par des instances «hétéronomes», extérieurs au champ littéraire. En même temps, il est difficile, pour l'université, d'intégrer une collection qui la refuse, et la posture de bastion ou de citadelle assiégée qui coupe les ponts avec tous les discours contemporains - qu'ils soient scientifiques ou littéraires - pour se réclamer d'un art et d'un homme de tous les temps et de tous les lieux ne facilite pas l'inscription historique et l'intégration au canon (pour ne rien dire du dialogue avec les sciences sociales). Il faut enfin ajouter que ce qui précède est une analyse du discours de Terre humaine, et non une analyse des textes eux-mêmes, mais en l'occurrence, ce discours de collection est tellement envahissant qu'il importe de le déverrouiller. Cette étude s'interrogeait, en ouverture, sur les conséquences de l'affiliation d'un ouvrage à une collection plutôt qu'à un auteur, et sur la façon dont l'appartenance à une collection conditionne l'appréhension du texte: encore une fois, une telle «paternité» - la collection plutôt que l'auteur - ne pose pas de difficultés de principe, mais on peut se demander si un discours unifiant n'est pas voué à une certaine pauvreté; destiné à souligner un dénominateur commun, on peut craindre qu'il induise, pour citer Barthes une dernière fois, une certaine «fermeture du sens».

Vincent Debaene

Columbia University


Annexes

Titres de la collection Terre humaine (1955-1969)

1- Jean Malaurie, Les Derniers rois de Thulé, 1955

2- Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, 1955

3- Victor Segalen, Les Immémoriaux, 1956 [1907]

4- Georges Balandier, Afrique ambiguë, 1956

5- Don C. Talayesva, Soleil hopi, 1957 [1942, traduit de l'américain]

6- Francis Huxley, Aimables sauvages, 1960 [1956, traduit de l'américain]

7- René Dumont, Terres vivantes, 1961

8- Margaret Mead, Mœurs et Sexualité en Océanie, t. I et II, 1963 [1928 et 1935, traduit de l'américain]

9- Mahmout Makal, Un village anatolien, 1963 [1949, traduit du turc]

10- Georges Condominas, L'Exotique est quotidien, 1966

11- Robert Jaulin, La Mort sara, 1967

12- Jacques Soustelle, Les Quatre Soleils, 1967

13- Theodora Kroeber, Ishi, 1968 [1961, traduit de l'américain]

14- Ettore Biocca, Yanoama, 1968 [1965, traduit de l'italien]

15- Mary F. Smith & Baba Giwa, Baba de Karo, 1969 [1954, traduit de l'anglais]

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19- James Agee & Walker Evans, Louons maintenant les grands hommes, 1972 [1939, traduit de l'américain]

20- Pierre Clastres, Chronique des Indiens guayaki, 1972

...

26- Pierre Jakez Hélias, Le Cheval d'orgueil, 1975

...

28- Jacques Lacarrière, L'Eté grec, 1976

29- Adélaïde Blasquez, Gaston Lucas, serrurier, 1976

...

36- Antoine Sylvère, Toinou, 1980

...

46- Emile Zola, Carnets d'enquêtes, 1987...

Repères chronologiques

1952: fondation de «Recherches en sciences humaines», collection dirigée par Eric de Dampierre

1953: fondation de «Civilisations d'hier et d'aujourd'hui», collection dirigée par Philippe Ariès

1955: fondation de «Terre humaine. Civilisations et sociétés. Collection d'études et de témoignages», dirigée Jean Malaurie,

1961: Plon passe sous la coupe de l'Union financière de Paris

1962: création de la collection «10/18» au sein de l'Union générale d'édition, filiale de Plon. Tristes tropiques (1962), Afrique ambiguë (1962), Les Derniers Rois de Thulé (1965), Les Immémoriaux (1968), La Mort sara (1971) sont réédités dans cette collection.

1975: Le Cheval d'orgueil

1976: L'Eté grec

1978-1985: publication du Bulletin «Terre humaine» (9 numéros)

1982: création de la collection «Terre humaine / poche» au sein de Presse Pocket (une quarantaine de titres en 2005).

1987-1998: collection «Terre humaine. Courants de pensée» (5 volumes)

1989: Pour Jean Malaurie, 102 témoignages en hommage à quarante ans d'études arctiques, sous la direction de Sylvie Devers, Plon (940 pages)

1995: exposition Hommage à Jean Malaurie, organisée par la Bibliothèque centrale du Muséum national d'histoire naturelle.

1998: début de la création des «pôles Terre Humaine» dans différentes villes de France, pôles qui accueillent colloques et conférences, en même temps qu'une série complète de la collection est cédée à la bibliothèque locale.

2001: Pierre Auregan, Des récits et des hommes. "Terre humaine" : un autre regard sur les sciences de l'homme, Nathan/ Plon (préface de Henri Mitterrand)

2005: Jan Borm, Jean Malaurie: un homme singulier, Éd. du Chêne

2005: «Terre humaine», une anthologie, textes réunis et présentés par Pierre Chalmin, Plon/ Pocket.

2005: «Terre humaine», cinquante ans d'une collection, exposition de la Bibliothèque nationale de France (deux volumes sont publiés à cette occasion: un volume d'entretien avec Jean Malaurie et un recueil d'hommages, sous la direction de Mauricette Berne et de Jean-Marc Terrasse (Bibliothèque nationale de France, 2005))



[i] Voir Pascal Fouché, L'Edition française depuis 1945, Paris, Cercle de la Librairie française, 1988.

[ii] Voir A. Cerisier, «Les clubs de livres dans l'édition française (1946-1970)», Bibliothèque de l'Ecole des Chartes, 1997,vol.155,no2,p.691-714.

[iii] J'emprunte les informations qui suivent au riche article de Jean-Yves Mollier, «Une aventure éditoriale hors des sentiers battus», Terre humaine. Cinquante ans d'une collection. Hommages, Bibliothèque nationale de France, 2005, p. 129-140.

[iv] Cité par Jean-Yves Mollier, art. cit., p. 135.

[v]

Ibid., p. 139.

[vi] «Fallois est aussi l'artisan du phénoménal succès commercial du Cheval d'orgueil, celui qui a su monter les ventes en faisant de la publicité à bon escient, dans la durée, en un mot, élever un récit de souvenir du pays bigouden au statut d'authentique best-seller». (Jean-Claude Dubost et François Laurent, «De Terre humaine à terre humaine poche», Terre humaine: cinquante ans d'une collection, op. cit., p. 146).

[vii] «Terre Humaine», texte de présentation de 1993 (présent dans tous les volumes, après la table des matières et avant la liste des titres de la collection).

[viii] Jean Malaurie, présentation de la collection sur la page «Terre Humaine» du site Internet «Transpolair', l'aventure polaire»: www.transpolair.com/sciences/cea/terre_humaine.htm

[ix] Pierre Auregan, Des récits et des hommes, Nathan/ Plon, 2001, p. 422, 424.

[x] Henri Mitterand, préface à Des récits et des hommes, op. cit., p. vii, p. x.

[xi] Jacques Lacarrière, texte liminaire de Terre humaine. Cinquante ans d'une collection. Entretien avec Jean Malaurie, Bibliothèque nationale de France, 2005, p. 7.

[xii] Jean Malaurie, éditorial du deuxième numéro du Bulletin «Terre Humaine», 1978.

[xiii] Ramon Fernandez, «Connaissance et science de l'homme», La Nouvelle Revue française, XLV, 2, 1935, p. 255.

[xiv] Voir sur ce point mon article:

http://www.fabula.org/atelier.php?Le_lettr%26eacute%3B_et_la_division_sociale_du_travail#_ednref33

[xv] Jean Malaurie. Respectivement, éditorial du premier Bulletin «Terre Humaine» et présentation de la collection sur la page «Terre Humaine» du site Internet «Transpolair', l'aventure polaire»: www.transpolair.com/sciences/cea/terre_humaine.htm

[xvi] Respectivement, Pierre Aurégan, op. cit., p. 399 et Jean Malaurie, Hummocks, t. I., op. cit., p. 109.

[xvii] Jean Malaurie. Respectivement, éditorial du premier Bulletin «Terre Humaine» et entretien (L'Express du 26 juillet 2001).

[xviii] Sous-titre de l'ouvrage de Pierre Aurégan, Des récits et des hommes, op. cit.

[xix] Sur les naïvetés épistémologiques de telles déclarations, voir mon article «Ethnographie / fiction / littérature. Quelques confusions et faux paradoxes», L'Homme. Revue française d'anthropologie, n° 175-176, juillet-décembre 2005, p. 219-231.

[xx] Pierre Aurégan, op. cit., p. 73.

[xxi]

Terre humaine, cinquante ans d'une collection. Entretien avec Jean Malaurie, BNF, 2005, p. 45.

[xxii]

Ibid., p. 47, p. 259.

[xxiii] Roland Barthes, «La critique Ni-Ni», Mythologies, Seuil, 1957, p. 144-145.

[xxiv] Jean Malaurie, éditorial du deuxième Bulletin Terre humaine.



Vincent Debaene

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Dernière mise à jour de cette page le 1 Mars 2007 à 20h05.