Atelier


Glossaire établi par le Réseau des Narratologues Francophones




Pour faciliter l'ancrage des travaux des narratologues francophones dans l'actualité de la recherche internationale, le Glossaire élaboré par le Réseau des Narratologues Francophones se propose de traduire et définir les concepts clés circulant dans les travaux étrangers, notamment anglophones, de manière à encourager une circulation internationale et pluriculturelle des savoirs.



  • Narratologie transmédiale / Transmedial Narratology, par Anaïs Goudmand et Raphaël Baroni.

On assiste depuis quelques années à une multiplication des travaux programmatiques consacrés à la notion de narratologie transmédiale (voir Thon 2016; Baroni 2017; Ryan 2018). Cependant, ainsi que le souligne Jan-Noël Thon, l'usage de l'adjectif transmédial varie selon les chercheurs. Au sens large, qui est le plus couramment utilisé mais qui est aussi le plus vague, la narratologie transmédiale désigne l'étude des « pratiques narratives dans différents médias » (Herman 2009). Lire la suite…

  • Monde narratif / Storyworld, par Anaïs Goudmand.

L'expression “monde narratif” est une traduction du terme “storyworld”, issu de la narratologie cognitive. Cette notion reprend partiellement l'approche binaire du récit développée par les théories formelles du récit (division fabula/sujet chez les formalistes russes, histoire/discours ou histoire/récit chez leurs héritiers structuralistes, sur le modèle de l'opposition signifiant/signifié), mais tente de dépasser ses limites et incomplétudes en s'émancipant de la théorie bipartite du signe de la linguistique saussurienne, qui tendait à évacuer la question de la référentialité (Herman 2018, Pier 2018). Lire la suite…

  • Disnarré / Disnarrated, par Gerald Prince.

Le disnarré inclut les éléments qui, dans un récit, se réfèrent explicitement à ce qui n'a pas eu lieu mais qui aurait pu avoir lieu: “il n'aurait tenu qu'à moi d'être admise au secret des plus grandes magnificences intérieures; mais je ne demandai pas à voir si la splendeur de la chemise répondait à celle de la jupe”. Le disnarré comporte donc des expressions aléthiques de virtualité (inaccomplie) ou d'impossibilité, des expressions déontiques d'interdiction (respectée), des expressions de vœux non exaucés, d'espoirs trompés, de faux calculs et ainsi de suite. Lire la suite…

  • Remédiatisation / Remediation, par Jan Baetens.

La remédiatisation, ou transfert d'une œuvre d'un support médiatique à l'autre, s'est imposée comme un enjeu capital des recherches en narratologie. L'intérêt pour ce mécanisme dépasse toutefois le seul domaine des études du récit. Lire la suite…

  • Narratologie postclassique / Postclassical Narratology, par Raphaël Baroni.

La narratologie postclassique renvoie à différents courants de la narratologie contemporaine se distinguant peu ou prou des approches structuralistes ou formalistes, ces dernières étant perçues comme caractéristiques de la période « classique » de la théorie du récit, située dans les 1960-1970. Lire la suite…

  • La narratologie non naturelle / Unnatural Narratology, par Brian Richardson.

La narratologie non naturelle est l'étude et la théorie des éléments et stratégies anti-mimétiques dans la fiction narrative. Selon la définition la plus répandue, le non-naturel est constitué d'événements, de personnages, de décors ou d'actes narratifs qui sont anti-mimétiques, c'est-à-dire qui défient les présupposés des récits non fictifs et les pratiques du réalisme (dont le modèle est fondé sur les récits non fictifs). Lire la suite…

  • La narratologie naturelle / Natural Narratology, par Monika Fludernik.

Dans Towards a "Natural" Narratology, Monika Fludernik (1996) propose une approche des récits basée sur des paramètres cognitifs, et donc "naturels", afin d'élargir les modèles narratologiques classiques (structuralistes), pour aborder la fiction postmoderniste, laquelle n'a pas été considérée en détail par la théorie du récit traditionnelle. En même temps, l'approche des récits décrite dans Towards a "Natural" Narratology vise à montrer l'existence d'une continuité entre la fiction et les récits conversationnels – ce qui permet d'analyser le développement diachronique des récits du Moyen Âge à nos jours, en se concentrant particulièrement sur la façon dont les textes anglais vernaculaires de la fin du Moyen Âge et du début de la période moderne ont adopté des structures narratives conversationnelles et les ont progressivement modifiées. Lire la suite…

  • Théories poétiques de la narration / Poetic Theories of Narration, par Sylvie Patron.

Sous le terme « théories poétiques de la narration », on regroupe les théories d'Ann Banfield (1995 [1982]; 2019) et de S.-Y. Kuroda (2012), deux linguistes formés à l'école de la grammaire générative de Noam Chomsky et dont les travaux se sont développés de manière coordonnée. On peut leur associer rétrospectivement la théorie de Käte Hamburger (1986 [1957, 1968]), qui constitue une référence majeure pour les deux premiers. Le terme « théorie poétique de la narration » est dû à Kuroda (1975: 284, 292; voir aussi 2012: 121, 132, 148, 173). Il s'oppose en contexte à « théorie communicationnelle de la narration » (ou à ses synonymes, « théorie narratrice » ou « narratoriale » de la narration, en anglais narrator theory of narration). Lire la suite…

  • Narrateur non fiable / Unreliable narrator, par Frank Wagner.

La notion de « narrateur non-fiable » recouvre les divers cas de figure où, face à un récit de fiction, le lecteur est conduit à douter du bien-fondé de la confiance qu'il est a priori censé éprouver à l'égard de l'instance narrative. Le premier à l'avoir théorisée, dans une perspective rhétorique, est Wayne Clayton Booth (1961 ; 1977). Dans ses travaux, la question apparaît en fait comme un simple corollaire de réflexions plus générales sur l'auteur implicite (« implied author »), qu'il présente comme un « second moi » de l'auteur réel, avec lequel dialogue le lecteur. Le constat de discordances axiologiques dans certains récits le conduit alors à affirmer ceci : "[…] je dirai d'un narrateur qu'il est digne de confiance (reliable) quand il parle ou agit en accord avec les valeurs de l'œuvre (ce qui revient à dire : avec les normes implicites de l'auteur[1]), et je le dirai indigne de confiance (unreliable) dans le cas contraire." (Booth 1977 : 105) Lire la suite…

  • Auteur implicite / Implied Author, par Dan Shen.

Le terme auteur implicite (parfois traduit « auteur impliqué ») a été introduit par Wayne C. Booth dans The Rhetoric of Fiction (1961, voir aussi Booth 2005; 1977) et il est devenu courant dans les cercles internationaux de la narratologie (Nünning 2005; 2017; Baroni 2009; Couturier 1995; Phelan 2005: 38-49; 2017; Kindt & Müller 2006; Schmid 2014). Pour saisir l'essence du concept, il faut comprendre ce que le terme "créer" signifie dans l'affirmation de Booth selon laquelle l'"auteur réel" crée l'"auteur implicite" Lire la suite…

  • Progression cachée / Covert Progression, par Dan Shen

Au cours du nouveau siècle, l'attention critique croissante portée à la progression narrative a beaucoup enrichi la compréhension des rouages de l'intrigue et de la réponse complexe qu'elle suscite chez les lecteurs (Phelan 2007, 2017; Baroni & Revaz 2016; Toolan 2009). Mais dans de nombreux récits de fiction, derrière le développement de l'intrigue, il existe une puissante dynamique qui se manifeste à un niveau plus profond, tout au long du texte. Ce courant sous-jacent, parallèle au développement de l'intrigue, forme ce que Shen désigne comme une progression cachée (Shen 2013, 2016 [2014]). La progression cachée et le développement de l'intrigue constituent une double trajectoire de signification, véhiculant des significations thématiques, des représentations des personnages et des valeurs esthétiques différentes, suscitant ou ayant le potentiel de susciter des réactions contrastées, voire opposées, de la part des lecteurs (Shen 2015; 2018a). Lire la suite…

  • Small stories / Small stories, par Alexandra Georgakopoulou et Sylvie Patron

Le concept de small stories (« petites histoires », « petits récits », « micro-récits », aucune traduction n'est vraiment adéquate) a été introduit dans la discussion scientifique par Michael Bamberg et Alexandra Georgakopoulou (voir Bamberg 2004, 2007 [2006]; Georgakopoulou 2006a, 2007 [2006b], 2007; Bamberg et Georgakopoulou 2008). Il désigne « un ensemble d'activités narratives sous-représentées, comme les récits d'événements en cours, d'événements futurs et hypothétiques, d'événements partagés (connus), mais aussi les allusions à des récits, les récits différés ou encore les refus de raconter » (Georgakopoulou 2007 [2006b]: 122; 2007: vii; Bamberg & Georgakopoulou 2008: 381). Ces activités narratives sont sous-représentées ou ne sont pas considérées comme des récits dans l'analyse narrative traditionnelle héritée des travaux de William Labov et dans tous les travaux sur les récits de vie basés sur des entretiens de recherche. Le but de la small stories research est de déplacer l'attention, auparavant centrée sur les récits de soi, récits longs, pris en charge par un narrateur unique, consacrés à des événements passés non partagés, vers les récits souvent courts et fragmentés que l'on trouve dans les environnements interactionnels de tous les jours, et particulièrement aujourd'hui sur les réseaux sociaux. Lire la suite…

  • Modèle rhétorique des publics / Rhetorical Model of Audiences, par James Phelan (traduit de l'anglais par Raphaël Baroni)

La finesse du modèle élaboré par la narratologie rhétorique pour décrire les publics se comprend plus facilement si on le replace dans un contexte plus large. Dans sa conception rhétorique du récit, James Phelan propose la définition de base suivante : « quelqu'un raconte à quelqu'un d'autre, à une occasion et dans un ou des buts donnés, que quelque chose est arrivé » (2018 : 48 ; voir aussi 1996). Cette définition oriente l'interprétation sur la manière dont la personne qui raconte utilise les ressources du récit (ses éléments fondamentaux étant l'intrigue, le personnage, la perspective, le temps et l'espace) afin de produire certains effets sur quelqu'un d'autre. Pour analyser ces effets, les chercheurs qui adoptent une perspective rhétorique se sont intéressés à différentes couches de la communication, en particulier aux couches affective, éthique, cognitive et thématique, afin de construire une représentation plausible de l'expérience de lecture. Lire la suite…

  • Relatabilité / Relatability, par Jan Baetens

On appelle relatable (le mot est un pur calque de l'anglais, le terme étant proprement intraduisible de manière littérale) une personne, une situation ou un récit auquel on peut s'identifier, dont on se sent proche. Jusqu'à présent, le caractère de relatabilité n'a guère été pris en considération par les narratologies, en dépit de l'importance capitale de cette catégorie dans la création et, surtout, dans le succès ou l'échec des séries télévisées et, sans doute, de la littérature populaire en général, où le rapport personnel entre public réel et personnage fictif joue toujours un rôle de premier plan. Lire la suite…


  • Métalepse / Metalepsis, par Frank Wagner

À l'origine, la métalepse constitue une notion rhétorique (Genette 1972, Roussin 2005), définie comme « une proposition […] [qui] consiste à substituer l'expression indirecte à l'expression directe » (Fontanier (1830) 1977 : 127). Toutefois, plus qu'à cette définition générale, la plupart des théoriciens du récit se sont montrés sensibles à certains de ses sens rapportés, comme « le tour par lequel un poète, un écrivain, est représenté ou se représente comme produisant lui-même ce qu'il ne fait au fond que décrire » (Fontanier (1830) 1977 : 128) ; ou encore celui « par lequel […] au lieu de raconter simplement une chose qui se fait ou qui est faite, on commande, on ordonne qu'elle se fasse » (Fontanier (1830) 1977 : 129). Telles sont du moins les acceptions dérivées du procédé rhétorique sur lesquelles Genette met l'accent au moment de forger la notion de métalepse narrative, qui, dans Figures III, fait système avec analepse, prolepse, syllepse, ou paralepse. Lire la suite…

  • Rythme / Rythm, par Jan Baetens

L'analyse temporelle du récit aborde généralement trois domaines: ordre, fréquence et durée (Genette 1972). Souvent pensée en termes de vitesse, l'analyse de la durée se donne pour but de décrire le rythme du récit. Elle regroupe un certain nombre de questions, tantôt formelles et tantôt thématiques, que Kathryn Hume énumère ainsi : a) descriptions en prose de vitesse physique, b) retardement narratif, c) le calcul du temps diégétique par page, d) les réflexions fictionnelles sur la vitesse comme donnée culturelle (Hume 2005 : 105). Lire la suite…

  • Théorie du déplacement déictique / Deictic Shift Theory, par Mary Galbraith

Deixis (dont l'adjectif correspondant est déictique) est le terme sémiotique utilisé pour renvoyer à un ensemble d'indices personnels, temporels et spatiaux spécifiques (voir Bühler 2009 [1934, 1999], 262-347). Le centre déictique, appelé « origo » chez Karl Bühler, coïncide a priori avec notre propre vécu corporel, inséré dans le temps et l'espace réels. Cependant, à travers des processus psychologiques comme l'identification et la mimèsis, nous avons également la possibilité d'entrer dans la réalité d'êtres imaginaires, dans des espaces et des temps imaginaires, en nous appuyant sur les indices apportés par le texte fictionnel. L'étude de la façon dont les lecteurs déplacent leur centre déictique de la situation spatio-temporelle et personnelle dans laquelle ils se trouvent vers la situation spatio-temporelle et personnelle imaginaire du texte fictionnel constitue la tâche d'investigation prioritaire de la théorie du déplacement déictique. Lire la suite…

À suivre…




Atelier de Fabula

Sommaire | Nouveautés | Index | Plan général | En chantier

Dernière mise à jour de cette page le 12 Mars 2022 à 14h48.