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"La référence à l'antique dans les jeux vidéos", par Laury-Nuria André et Sophie Lécole-Solnychkine.

Communication pour la journée d'étude "Construire les jeux vidéo comme objet de recherche : problématiques, enjeux et méthodes", jeudi 28 mai 2008, Lyon, ENS-LSH.
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La référence à l'antique dans les jeux vidéos


Nous souhaitons ici restituer brièvement l'interrogation qui avait fait l'objet d'une communication exposée à l'ENS LSH en mai 2009. Nous nous proposions alors de questionner l'émergence de «nouveaux modèles paysagers» dans le cadre des jeux vidéo, plus spécifiquement dans un corpus défini par la référence à l'Antiquité (structures mythologiques, tropes et topoï littéraires et picturaux). Celle-ci est, en effet, topique dans le jeu vidéo. Cette récurrence s'explique d'une part par la dimension largement partagée de la culture mythologique gréco-romaine, qui permet une identification aisée des personnages et des hauts lieux de l'action, et assure la possibilité de réemploi des schémas narratifs dans le cadre du scénario de jeu; d'autre part par la forte attractivité qu'exerce toujours l'Antiquité, matrice de notre civilisation et inépuisable réservoir d'imaginaires.

D'une première impression déstabilisante pour le spécialiste (paysager comme antiquisant), la plongée dans le monde – virtuellement nouveau – du game design se révèle en définitive bien surprenante: d'une vision de chaos historique et culturel, facteur de dénigrement scientifique, on passe à l'émergence d'une vision nouvelle du paysage antique, par le jeu vidéo, précisément grâce à cette «confusion». Le détail de l'analyse de la reconfiguration des tropes paysagers empruntés à la littérature et à la peinture antiques(ainsi qu'à leurs refontes successives dans l'art occidental) dans les jeux vidéo de notre corpus nous a, en effet, permis d'évaluer son rôle dans le façonnage incessant des modèles qui circulent, dans la société, du regard aux paysages. Cette recherche appliquée a ainsi fini par montrer en quoi une apparente confusion fonctionnait finalement comme une coprésence des modèles, et permettait de comprendre le jeu vidéo comme le révélateur d'un processus de mise en fiction de notre patrimoine paysager. De ce nouveau mode de gestion de la référence antique semble découler une lecture extensible au paysage grandeur nature: celle-ci serait fondée sur le schème du palimpseste, et désignerait dès lors un mode de lecture des paysages non plus construit sur l'étalement mais sur l'étagement, non plus procédant d'une organisation panoramique de l'espace mais d'un feuilletage de mémoires, dès lors ouvert au dialogisme et à la fictionnalisation. Voici précisément la perspective d'un mode de lecture qui permettrait de ne plus procéder à une séparation brutale des paysages extraordinaires et des paysages ordinaires, et d'ouvrir la contemporanéité vivante de l'espace urbain à sa mise en fiction.


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Laury-Nuria André est doctorante en Lettres Classiques à l'ENS LSH et à l'Université de Paris X. Ses recherches portent sur les formes et les fonctions du paysage dans l'épopée hellénistique classique, dans une double perspective touchant la théorie esthétique du paysage et son traitement littéraire à une période charnière entre l'univers grec classique et la nouveauté de la Rome impériale.

Sophie Lécole-Solnychkine est docteur en Arts Plastiques, et ATER à l'Université de Toulouse II. Ses recherches développent les enjeux esthétiques, éthiques et politiques de lectures du paysage, au regard de la notion de Neutre telle qu'elle fut, naguère, thématisée par R. Barthes.


Pages associées: Dehors de la littérature, Jeu, Jeu vidéo, Modernité et antiquité.

Laury-Nuria André et Sophie Lécole-Solnychkine

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Dernière mise à jour de cette page le 8 Novembre 2009 à 22h07.