Questions de société
Tyrannies de la transparence et éloges de l’opacité. Présentation conjointe des revues Multitudes, Réfractions et de la Revue française d'éthique appliquée (Paris, 16 avril 2019)

Tyrannies de la transparence et éloges de l’opacité. Présentation conjointe des revues Multitudes, Réfractions et de la Revue française d'éthique appliquée (Paris, 16 avril 2019)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Sébastien Clayes)

Nous vivons à l'âge de la transparence, son idéal semble s’imposer à tous les esprits comme une évidence. L’omniprésence des dispositifs de surveillance aux mains de l’État (police scientifique, caméras ou normalisation et bureaucratisation augmentées), la diffusion croissante de l’image intime dans les réseaux sociaux ou bien les formes inédites de traçage des individus induites par Internet et son monde connecté : voilà maints exemples qui justifient de parler d’âge de la transparence. Celle-ci est défendue au nom de la rationalité comme de la promesse d'un monde plus démocratique et plus sécurisé, valorisant la clarté, la limpidité, l’intelligibilité et la vérité. Toute opacité est suspecte de cacher des pratiques douteuses (népotisme, corruption, détournement, abus) en faisant obstacle à une indispensable soif de vérité.

À l’occasion d’une présentation des derniers numéros des revues MultitudesRéfractions et Revue française d’éthique appliquée, nous souhaitons prendre à contre-pied cette aspiration à tout rendre transparent et faire droit à toutes les formes de résistance s’organisant - même implicitement - contre la surexposition imposée. Nous tentons de souligner certains des coûts, des écueils et des victimes collatérales de l’impératif de transparence. En soulignant ses aspect « tyranniques », en faisant « l'éloge de l’opacité », nous rappelons qu’il importe de cultiver des formes de discrétion et de réserve qui en arrivent à constituer de véritables pratiques de résistance et d’échappée au pouvoir.