Actualité
Appels à contributions
Texte. Fragmentation. Créativité (Lublin, Pologne)

Texte. Fragmentation. Créativité (Lublin, Pologne)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Jolanta Rachwalska von Rejchwald)

COLLOQUE INTERNATIONAL
Texte - Fragmentation - Créativité
21-22 octobre 2016, Lublin, Pologne

Le présent colloque se propose de réfléchir sur les aléas du texte, produit d’une activité discursive. La notion de fragmentation qui unit ici deux perspectives méthodologiques – linguistique et littéraire – évoque l’idée de brisure et de rupture, contrebalancée par l`idée d’ensemble, de totalité. Le phénomène envisagé peut être mesuré aux différents niveaux de l’architecture du texte – autant à l’échelle de la séquence qu’à l’échelle de l’œuvre.
La fragmentation ne sera pas appréhendée comme un agent perturbateur, voire destructeur de l`ensemble régi par un ordre canonique ou la norme, mais comme une invitation à (re)penser les possibilités latentes de la structure établie, comme une invitation à faire valoir son potentiel de la (ré)invention, de sa (ré)organisation créative. La fragmentation sera envisagée comme une opportunité de faire émerger une structure dont l`apparent dé-sordre est, en réalité, un autre ordre.

Nous proposons donc que l`interrelation entre la fragmentation et la totalité soit une nouvelle approche pour penser le texte, littéraire ou non, en termes de processus et de mouvement ; pour penser le texte comme un laboratoire de formes qui refuse l`immobilité de la forme achevée et qui cherche son énergie créatrice dans un perpétuel ré-ajustement de sa fragile complétude.

Volet linguistique
Le texte est vu aujourd’hui comme une structure globale complexe dont la cohésion et la cohérence sont assurées par différents facteurs sémantiques, syntaxiques et contextuels. Comme le montrent les études récentes effectuées dans le cadre de la linguistique textuelle, la recherche se focalise en particulier sur les problèmes de l’unité du texte et de ses unités constitutives, de facteurs et effets de continuité et de discontinuité et du lien entre textualité et généricité (Adam 2014).
En situant la problématique du colloque dans cette perspective générale, on tentera d’examiner les « conditions d’émergence » des textes fragmentés et d’observer quels sont les motifs qui poussent le locuteur à dépasser les cadres « traditionnels » de l’énonciation. Il s’agira aussi de la prise de conscience des conséquences de cette fragmentation au niveau d’une organisation des échanges communicationnels et d’une relative clarté d’interprétation des intentions du locuteur.
L'importance de ce phénomène linguistique justifie le choix de la thématique du colloque dont l'objectif sera de rechercher des mécanismes expliquant la fragmentation du texte, « ces brisures supposées permettant de donner un statut propre à chaque élément, en préservent au maximaum la possibilité d’une analyse compatible avec la linéarité » (Le Goffic 1993 : 80). La structure fragmentée du texte met en jeu divers procédés et opérations linguistiques. Les interventions pourront s'articuler autour des axes suivants :
- l’emploi des structures qui inversent l’odre canonique (linéaire) de la phrase (Excellent, ce fromage !), des phrases emphatiques clivées et des structures détachées (disloquées) ;
- le mélange de plusieurs sortes de progressions thématiques ou celui des niveaux énonciatifs ;
- les ruptures de progression thématique, dues aux exigences actuelles de la perspective fonctionnelle de l'énoncé ;
- la rupture entre cohésion et cohérence due aux aspirations des locuteurs à s'exprimer d'une manière créatrice ;
- la métaphore et la cohérence du texte ; la démétaphorisation dans le contexte et l’émergence d’un sens nouveau ;
- la question du décodage du sens et le rôle de l’inférence dans l’interprétation du texte fragmenté ; l’importance des compétences linguistiques et socio-culturelles du récepteur dans le calcul interprétatif du message ;
- la déconstruction et la reconstruction du sens dans différents types de textes (littéraire, journalistique, médiatique, politique....) ;
- le fonctionnement de l’allusion et de la citation appréhendées comme fragments convoqués dans un texte ;
- la mise en question de la stabilité formelle et sémantique des séquences stéréotypées allant de la reformulation minime jusqu’à leur désintégration totale ébranlant le fondement même de l’unité phraséologique ; la désémantisation apparente de celle-ci et son réinterprétation dans l’espace sémantique du texte ;
- la re-construction du sens et la traduction.

Volet littéraire
En replaçant la problématique générale du colloque sur le terrain des littératures de langue française, nous proposons de voir dans le va-et-vient entre le fragment et la totalité un lieu de tension où s`élabore la forme de l`Œuvre tiraillée entre l`idée d`un tout homogène et l`idée d`un ensemble constitué de fragments, à la fois libres et solidaires.
L`idéal classique de l`Œuvre « qui file et coule » (Barthes), qui va, se complétant progressivement, dès son début jusqu`à la fin, censée incarner le symbole de l`unité absolue, voire d`une transcendance n`a plus de mise.
Nous proposons de réfléchir sur l`œuvre littéraire appréhendée comme un siège de deux forces opposées qui agissent simultanément. D`une part, il s`agit des forces disruptives de dé-composition, prédilectionnant l`hétérogène, distendant la structure, cherchant le heurt, le blanc, le silence, la brisure, instaurant l`ordre du dés-ordre, celui de la fragmentation ; de l`autre côté, il y a des forces opposées qui tendent simultanément à relier, à ressouder, à fédérer les parties rebelles pour re-créer le tout et atteindre cette illusoire complétude.
Cette relation complexe entre le Fragment et le Tout peut fournir le fil conducteur entre les différentes thématiques dont nous ne mentionnons, sans prétendre à aucune exhaustivité, que quelques-unes :

Macrostructure :
- rapports entre le mot / la phrase / le paragraphe / le chapitre / la lettre (en poésie) / la lettre (dans les mémoires ou dans une œuvre épistolographique)
- intermédialité et fragmentation : l`image / la photographie et l`ensemble de l`œuvre littéraire ; l`iconicité du fragment ;
- Y a-t-il des fragments-rebelles, introduisant la « différance » (Derrida), qui tendent à s`autonomiser et à dominer l`ensemble ?
- le fragment itinérant : problèmes de migration interne du fragment au sein de l`œuvre littéraire
Zones frontalières et limitrophes :
- rapports entre l`œuvre littéraire et ses « seuils » (Genette)
- rapports entre l`œuvre et ses « extrêmes » qui sont le début et la fin. Quel est le degré de solidarité de ces excipit et incipit avec l`ensemble textuel ?

Zones mitoyennes :
- les ambivalences du fragment : peut-il être, à la fois, autonome et solidaire ?
- Quelle est la nature du lien fédérateur, de cette « colle logique » (Barthes) qui relie le fragment à la totalité de l`œuvre?
- Incomplétude programmée :
- le statut des « inachevés », de ces œuvres « souffrant d`incomplétude », manquant d`un fragment pour les uns, « en devenir incessant » pour les autres ;

Cycles et séries :
- le fonctionnement du fragment dans les œuvres sérielles ;

Réception :
- l`impact de la fragmentation sur le mode de lecture (lecture linéaire vs lecture tabulaire).

Sans être exhaustive, cette liste d’axes de recherche possibles, aussi bien dans le domaine linguistique que littéraire, peut être complétée par toute autre approche théorique et méthodologique s’inscrivant d’une manière pertinente dans la problématique du colloque.

Repères bibliographiques :
Adam J.-M. (dir.) 2014, Faire texte. Frontières textuelles et opérations de textualisation, Besançon, Presses Universitaires de Franche-Comté.
Bonhomme M. (2014), Pragmatique des figures du discours, Paris, Champion.
Le Goffic P. (1993), Grammaire de la phrase française, Paris, Hachette.
Belloï L., Delville M. (dir.) (2006), L`Oeuvre en morceaux. Esthétiques de la mosaïque, Paris/Bruxelles, Les Impressions Nouvelles.
Omacini L.. Bellini L.E. (dir.) 2004, Théorie et pratique du fragment. Actes du Colloque SUSLLF, Genève, Slatkine érudition.
Garrigues P. (1995), Poétiques du fragment, Paris, Klincksieck esthétiques.

Modalités de soumission
Les propositions de communication, incluant le titre et un court résumé, doivent être adressées simultanément aux deux organisatrices du colloque (ae.krzyzanowska@umcs.pl, jolanta.rachwalska@poczta.umcs.lublin.pl ) avant le 30 avril 2016.

La langue d’expression est le français.
Frais d’inscription : 420 PLN / 100 €
Les frais de logement sont à la charge des participants.
La publication des actes du colloque est prévue en 2017 chez Peter Lang.

Calendrier :

première circulaire : janvier 2016
réception de propositions de communication : jusqu’au 30 avril 2016
notification d’acceptation : le 15 mai 2016
deuxième circulaire : 30 mai 2016
règlement des frais d’inscription : jusqu’au 30 juin 2016
colloque : 21-22 octobre 2016

Comité scientifique :

Olivier Aïm (Université Paris Sorbonne)
Elżbieta Biardzka (Université de Wrocław)
Marc Bonhomme (Université de Berne)
Bernard-Marie Garreau (Université de Bretagne Occidentale)
Francis Grossmann (Université Grenoble Alpes)
Czesław Grzesiak (Université Marie Curie-Skłodowska)
Marek Kęsik (Université Marie Curie-Skłodowska)
Greta Komur-Thilloy (Université de Haute Alsace)
Encarnación Medina Arjona (Université de Jaén)
Vincent Nyckees (Université Paris 7-Denis Diderot)

Comité d’organisation :

Anna Krzyżanowska (Université Marie Curie-Skłodowska)
Jolanta Rachwalska von Rejchwald (Université Marie Curie-Skłodowska)
Marta Sobieszewska (Université Marie Curie-Skłodowska)
Aneta Filipiuk (Université Marie Curie-Skłodowska )
Monika Bazyl (Université Marie Curie-Skłodowska)
Andżelina Mikoda (Université Marie Curie-Skłodowska)