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Itinéraires caribéens : voies tracées et cartographies à venir (Revista criação & crítica)

Itinéraires caribéens : voies tracées et cartographies à venir (Revista criação & crítica)

Publié le par Perrine Coudurier (Source : Henrique Provinzano Amaral)

Itinéraires caribéens : voies tracées et cartographies à venir

Revista criação & crítica, Claudia Amigo Pino, 2021.

 

Au Brésil, on constate un moment privilégié de réception de textes caribéens. Dans ce contexte, ce numéro de Criação & Crítica se situera au seuil de deux temporalités : la première revendique la célébration des chemins critiques parcourus jusqu’ici qui sont en mesure de contredire l’affirmation selon laquelle « la bibliographie sur les Antilles est encore très rare au Brésil » (FIGUEIREDO, 1998, p. 11, nous traduisons), écrite dans un autre temps historique. La seconde cherche à regrouper des voix, d’ici et d’ailleurs, afin de frayer le chemin pour d’autres cartographies possibles de l’archipel caribéen.

Récemment des parutions de plus en plus nombreuses de textes antillais au Brésil, aussi bien en littérature qu’en théorie, témoignent un effort toujours renouvelé de réception critique et traductive d’auteurs provenant des îles de la Caraïbe dans toute leur diversité linguistique, socioculturelle et ethnique. Dans le champ traductif, il faut noter un nombre croissant de retraductions, phénomène remarquable dans un contexte encore limité d’ouvrages traduits en portugais. En 2019, une deuxième traduction est parue du roman de Maryse Condé, Moi, Tituba sorcière... noire de Salem, vingt-deux ans après sa première version. L’année suivante la nouvelle traduction du roman Gouverneurs de la Rosée, de l’écrivain haïtien Jacques Roumain a vu le jour. Encore dans cette période, on a recensé de nouvelles parutions des classiques Discours sur le colonialisme, d’Aimé Césaire, et Peau noire, masques blancs, de Frantz Fanon.

Dans le champ des traductions inédites, l’anthologie Estilhaços (2020, dirigée par Henrique Provinzano Amaral) a présenté le premier recueil de poésie haïtienne contemporaine au Brésil en version bilingue portugais-français. En 2021, la traduction de Lettres à une noire, de Françoise Ega, a révélé les lettres adressées (mais jamais livrées) par la Martiniquaise à la brésilienne Carolina Maria de Jesus. Parallèlement, une anthologie des Contes de nuits et de jours aux Antilles, d’Ina Césaire, en traduction signée par Jéssica Pozzi e Samanta Siqueira a été publiée. En matière de critique, on peut souligner la parution dans l’année présente des livres Tradução em (ent)revista : Simone Schwarz-Bart e as tradutoras brasileiras, de Vanessa Massoni da Rocha, et Com a palavra, a memória : La Lézarde de Édouard Glissant, de Janaína de Azevedo Bispo.

Au-delà de l’univers d’expression française, on peut faire référence aussi à la récente parution de traductions de livres venant d’autres territoires et langues de la Caraïbe. À titre d’exemple, The autobiography of my mother, de l’écrivaine antiguayenne Jamaica Kincaid a été traduit de l’anglais. De l’espagnol, on a un recueil de six poètes cubains contemporains, Nocaute : 6 poetas/Cuba/hoje, ainsi que plusieurs autres anthologies poétiques.

En accord avec cette croissance significative des publications en livre et des échanges culturels, on voit aussi une augmentation du nombre de travaux (articles et thèses) et de congrès consacrés aux thèmes caribéens. Au Brésil, cela configure de manière inédite un contexte apte à rassembler de différentes générations de chercheurs et chercheuses autour d’approches qui valorisent la quête du « diversel contre l’universel » (CHAMOISEAU, 2014, p. 13) et qui se veulent capables de créer « du neuf à partir de ses racines multiples » (MAXIMIN, 2006, p. 16). Dès lors, un nouveau cycle est venu où de multiples hybridismes et transversalités contribuent à l’ancrage des poétiques du Divers e du Tout-Monde (GLISSANT, 1995 ; 1997).

Dans ce contexte, les perspectives post-coloniales et décoloniales (MIGNOLO, 1996 ; 2014) gagnent du terrain en fonctionnant comme des outils aigus pour l’analyse des manifestations littéraires caribéennes sous l’égide de leur large éventail d’éléments culturels, historiques, sociaux et identitaires. Il importe aussi d’interroger les confluences du poétique et du politique, constitutives des oeuvres de plusieurs auteurs caribéens, notamment Édouard Glissant (DAMATO, 1995).

Le numéro accueillera aussi les analyses de textes et des autres manifestations culturelles qui bouleversent les catégories étroites : les essais et manifestes, les littératures orales ou l’«oraliture », etc. En outre, son intérêt portera sur les rapports que suscitent et entretiennent les textes verbaux avec d’autres manifestations artistiques caribéennes, comme l’ainsi appelé art naïf, si commun en Haïti, et le laghia, danse-lutte semblable à la capoeira brésilienne.

Au-delà de la célébration des rapports Brésil-Caraïbe, on souligne que ce numéro cherche à accueillir des travaux de chercheurs et de chercheuses provenant de plusieurs espaces et intéressés aux itinéraires caribéens. En ce sens, on valorise la diversité des perspectives théoriques et critiques capables de faire résonner la multiplicité d’un monde en Relation (GLISSANT, 1990).

Voici quelques axes thématiques possibles :

  • La réception de textes caribéens (traduits ou non) au Brésil ;
  • Échanges culturels Brésil-Caraïbe ;
  • Perspectives socio-historiques (post)coloniales et décoloniales ;
  • Multilinguisme, diglossie et « oralitures » ;
  • Exils, diasporas et migrations ;
  • Textes et miroitements identitaires ;
  • Les rapports traductifs Brésil-Caraïbe ;
  • Négritude, Créolité, Créolisation, Antillanité et d’autres discours en relation.

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Nous accepterons des articles écrits en portugais, français, espagnol et anglais, ainsi que des comptes rendus, entretiens, traductions et exercices de style (textes à la lisière entre le discours critique et le littéraire).

Les contributions seront soumises à travers le site, en suivant les directives aux auteurs (disponible sur https://www.revistas.usp.br/criacaoecritica/about/submissions), jusqu’au 15 février 2022.

 

Ce numéro sera coordonné par Vanessa Massoni da Rocha (Universidade Federal Fluminense – Brésil) et Henrique Provinzano Amaral (Universidade de São Paulo – Brésil).