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Appels à contributions

"Réécrire" (Doctorales de Sorbonne Université)

Chaque année, l’école doctorale 3  (littératures françaises et comparée) de Sorbonne université (Paris) propose à ses doctorant.es de se rencontrer au cours de deux journées d’étude. Cette année, les doctorales auront lieu les 5 et 26 juin, de 9h à 12h, maison de la recherche, rue Serpente, à Paris. Tout.e doctorant.e peut soumettre une proposition de communication. Attention, les doctorales sont prévues à ce jour en présentiel, les participant.es devront donc s’assurer qu’ils et elles pourront être physiquement présent.es à la date indiquée. Ces dispositions sont cependant susceptibles d’évoluer en fonction de la situation sanitaire.

Réécrire, 26 juin 2021

Les propositions de communication (250 mots) sont à envoyer jusqu'au 7 mai à l'adresse mail suivante: doctoralesed3@gmail.com

Retrouvez également ces informations sur le carnet hypothèses des Doctorales: https://doctorales.hypotheses.org/941

« Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage, / Polissez-le sans cesse, et le repolissez, / Ajoutez quelquefois, et souvent effacez. »

Boileau

Réécrire, pour Boileau, renvoie d’abord à la nécessité pour l’écrivain de remettre « sur le métier » ses propres textes : reprendre un brouillon, proposer des ajouts, supprimer des passages font partie intégrante de la création littéraire. Du point de vue de la poétique, il s’agit donc d’envisager le texte comme une forme évolutive, toujours soumise au regard critique de son auteur. Les théories développées par la critique génétique depuis les années 1970 sur les brouillons d’écrivains de Rousseau à Sartre, en passant par Flaubert, Proust ou Nietzsche, témoignent de cette volonté de mettre au jour la dimension processuelle de chaque œuvre.

Mais l’acte de réécrire nous invite aussi à considérer l’inscription des pratiques d’écriture dans une mémoire transhistorique et transindividuelle ainsi qu’à saisir l’écart et la singularité propres à chaque œuvre littéraire. « Tout livre pousse sur d’autres livres » écrit Julien Gracq dans Préférences, assimilant la littérature à un grand palimpseste. En ce sens, réécrire implique une répétition mais aussi une différence, une proximité et une distance, le souvenir d’une tradition comme un désir d’inventivité, le refuge derrière des autorités littéraires et, surtout à partir du XVIIIe siècle, la recherche d’originalité. L’enjeu réside ici dans le préfixe « ré- » qui ouvre le champ des possibles dans la création à partir du modèle initial. L’« hypotexte », selon la terminologie de Genette, peut subir toute une série de transformations, voire de subversions : plagiat, citation, adaptation dans un autre genre littéraire, parodie (roman rabelaisien, théâtres de foire, Ubu roi…), pastiche (antiromans de Sorel, Furetière ou Scarron), suite (continuations de Don Quichotte), apocryphe, détournement ludique (OuLiPo) ou engagé comme dans la littérature postcoloniale (writing back et mimicry).

La réécriture invite donc à comprendre le texte littéraire dans sa dimension évolutive et métamorphique : sans cesse en mouvement, connaissant améliorations ou rejets critiques, faisant l’expérience de transformations profondes, l’œuvre est in fine loin d’être immuable. Toutes les pratiques de réécriture littéraire pourront être abordées, qu’il s’agisse de se pencher sur la genèse des œuvres, sur la traduction, ou d’envisager l’acte de réécrire comme une forme de réappropriation, entre imitation et subversion.

 

Bibliographie indicative:

Aron, Pierre, Histoire du pastiche, Paris, PUF, « Les Littéraires », 2008.

Ashcroft, Bill, Griffiths Gareth et Tiffin Helen, The Empire Writes Back. Theory and Practice in Post-Colonial Literatures, Londres/New York, Routledge, 1989.

Bhabha, Homi, The Location of Culture, London/New York, Routledge, 1994.

Borges, Jorge Luis, Fictions, trad. fr. Roger Caillois, Nestor Ibarra et Paul Verdevoye, nouvelle édition révisée par Jean Pierre Bernès, Paris, Gallimard, « Folio », 2018.

Bouillaguet, Annick, « Une typologie de l’emprunt », in Poétique, n°80, 1984, p. 489-497.

Bouillaguet, Annick, L’écriture imitative. Pastiche, parodie, collage, Paris, Nathan, 1996.

Cahiers de l’Association Internationale des Études Françaises, n° 12, « Pastiche et parodie », juin 1960.

Compagnon, Antoine, La seconde main ou le travail de la citation, Paris, Seuil, 1979.

Conde, Maryse, « Des Héros et des cannibales : réécriture et transgression dans la littérature des petites Antilles de langue française », in Portulan 99, Nov. 2000. p. 43-52.

Eco, Umberto, Dire presque la même chose, expériences de traduction [2003], Paris, Grasset, 2007.

Gauvin, Lise, « Le palimpseste francophone et la question des modèles », introduction à Littératures francophones, parodies, pastiches, réécritures, Lise Gauvin, Cécile Van den Avenne, Véronique Corinus et Ching Selao (dir.), Lyon, ENS Éditions, coll. « Signes », 2013.

Genesis, n° 44, « Après le texte. De la réécriture après publication », sous la direction de Rudolf Mahrer, Paris, Presses Universitaires de Paris-Sorbonne, 2017.

Genette, Gérard, Palimpsestes : la littérature au second degré [1982], Paris, Seuil, 1992.

Gracq, Julien, Préférences, Paris, Corti, 1961.

Hellegouarc’h, Pascale, « Ironie, parodie, pastiche : au rendez-vous du lecteur », in Mustapha Trabelsi (dir.), L’Ironie aujourd’hui : lectures d’un discours oblique, Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise-Pascal, 2006, p. 69-81.

Proust, Marcel, Contre Sainte-Beuve, précédé de Pastiches et mélanges et suivi de Essais et articles, édition établie par Pierre Clarac avec la collaboration d’Yves Sandre, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1971.

Vila-Matas, Enrique, Mac et son contretemps, trad. fr. André Gabastou, Paris, Christian Bourgois éditeur, 2017.