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Re-présentation(s) dans le texte et l'image : transfert, influence, fracture (Brest)

Re-présentation(s) dans le texte et l'image : transfert, influence, fracture (Brest)

Publié le par Marc Escola (Source : Adnana Sava)

2e COLLOQUE DES DOCTORANT·ES ET JEUNES CHERCHEUR·EUSES 

Mercredi 8 et jeudi 9 juin 2022

Laboratoire HCTI EA 4249 (Héritages et Constructions dans le Texte et l’Image) 

Ecole Doctorale Arts, Lettres et Langues 

Université de Bretagne Occidentale 

Brest, France 

 
« Re-présentation(s) dans le texte et l'image : transfert, influence, fracture »

 
(English version below)
La représentation se définit comme « [l’] action, [le] fait de représenter ; [le] résultat de cette action » (dictionnaire CNRTL). Parmi les nombreuses acceptions du terme dans le langage courant comme dans ses usages scientifiques, on trouve l’idée de « rendre quelque chose présent à quelqu'un en montrant, en faisant savoir » ou « sous la forme d'un substitut ou en recourant à un artifice » ou encore de « rendre présent par son existence, par sa propre présence ». La représentation se décline dans de nombreux contextes dont les principaux sont l’art (représentation plastique, littéraire, théâtrale, etc.), les sciences notamment humaines et sociales (représentations mentales, culturelles, etc.) et la politique (représentation démocratique, etc.). Dans les domaines de la philosophie et de la psychologie, il s’agit plus spécifiquement de « ce qui forme le contenu concret d'un acte de pensée ».

Lorsque la représentation est le résultat d’une volonté de signifier la présence par l’emploi ou non d’un artifice, elle s’inscrit pleinement dans la dynamique de l’écart : l’écart entre la chose en elle-même et son représentant, entre le signifié et le signifiant. Ainsi, le trait d’union de « re-présentation » invite à explorer la tension insoluble mais productive entre l’objet, sa présentation et sa présentation de nouveau, sous un nouveau jour. Re-présenter, est-ce copier, créer, ou toujours les deux ? Est-ce une distinction de nature entre la chose à représenter (réel, « représenté ») et ce qui la représente (artificiel, « représentant »), ou bien faut-il examiner ces deux objets ensemble, dans un « continuum fluctuant[1] » ? Finalement, on interroge sans cesse la pertinence de la notion de représentation et ses usages, signe d’une certaine « crise des représentations[2] ».

Ce colloque se propose d’étudier la relation entre l’objet et sa représentation, abordée sur le mode de l’écart et de la distance, ou du refus de cette dualité : la représentation est nécessaire mais insuffisante à cause de cette dichotomie. Cette problématique pourra inspirer des travaux dans divers champs des sciences humaines et sociales. Les trois axes suggérés progressent dans un mouvement excentrique par rapport à l’objet « re-présenté » :

          - Le transfert se produit quand il y a emprunt, délibéré ou non, de caractéristiques d’un objet ou de l’objet entier pour le présenter ailleurs. En d’autres termes, la notion de transfert renvoie au rapport le plus explicite et le plus réfléchi entre ces deux objets. Si l’on peut considérer la traduction comme la manifestation par excellence du transfert, dans la mesure où ce procédé consiste à « dé-territorialiser le champ d’études et de recherches au-delà d’une aire culturelle linguistique et culturelle définie[3] », nous proposons également d’intégrer la question de l’adaptation et ses avatars, c’est-à-dire toute forme de relecture de l’objet initial (réécriture, palimpseste, parodie et pastiche, etc.), ainsi que la réitération, la réactualisation, et la notion deleuzienne de dé-territorialisation. Dans la fiction contemporaine, cette « re-présentation » incessante pourrait être illustrée par l’abondance de propositions mettant en scène, au-delà du texte initial (« the afterlife of a memorable fixture[4] »), des personnages canoniques devenus objets culturels et sans cesse réinventés afin de commenter le réel au prisme d’un intertexte fédérateur, voire hégémonique, et de servir des enjeux contemporains (entre fidélité et irrévérence, hommage et détournement, conservatisme et subversion).

          - L’influence, deuxième axe proposé, est un processus qui repose sur la nécessité d’avoir deux pôles/acteurs en communication : l’influenceur·euse et l’influencé·e. Cette notion permet d’étudier les décisions et comportements des influencé·es, notamment dans les créations littéraires et artistiques, qu’il s’agisse d’une influence (in)directe ou (in)visible.
Il y a influence quand la re-présentation porte une empreinte, pas nécessairement consciente et plus diffuse, de l’objet initial. La notion d’influence inscrit donc de façon plus nette que le transfert la re-présentation dans le temps, puisqu’elle pose la question de la relation entre le contexte de re-présentation et le passé, entre un héritage incorporé qui produit pour nous la naturalité d’un monde, et ce qu’on peut dire, penser, et re-présenter de ce monde hérité dans le présent.
Dans le champ des sciences du langage, il est possible de relier ce concept à deux grandes orientations : la première décrit des stratégies que l’on peut appeler « externes » au processus produit pour convaincre l’interlocuteur et s’appuie principalement sur l’obligation ou l’application de stratégies de contrainte qui forcent les personnes à réaliser une action déterminée. La seconde orientation comprend l’influence comme un processus communicationnel : dans cette vision, l’influence est fondée principalement sur des « transactions symboliques[5] », c’est-à-dire sur la manipulation de symboles où la communication joue un rôle essentiel. Au-delà de l’idée de manipulation, souvent liée par défaut à des intentions négatives, la notion de persuasion pourra également être mobilisée.

          - Enfin, la fracture suppose une rupture avec l’héritage de l’objet initial. Un rapport conflictuel voire violent émerge dans la relation entre objet et re-présentation. Se pose ainsi la question de l’irreprésentable et de l’inadéquation des médiums et de leurs langages.
Penser la fracture en regard de la re-présentation peut conduire dans au moins deux directions : traditionnellement, elle nous amène à une analyse de la notion de re-présentation en s’arrêtant sur le trait d’union de ce terme, point d’articulation autant que de fragilité. On peut aussi être conduit·e à une critique de la notion elle-même : l’alternative entre continuité et distance dépend d’une compréhension naturaliste de la représentation, qui postule d’abord le monde des objets présents, donnés et disponibles à – quoique potentiellement non résorbables dans – la reprise représentative, inaugurant quant à elle le monde des faits de représentation ; mondes dont la frontière ou l’interface serait l’acte lui-même de re-présentation. La fracture est d’abord celle de la suspension de l’attitude naturelle : le « donné » est alors compris comme un « fait », un acte préalable institué, c’est-à-dire une production historique et désacralisée, et devient critiquable eu égard au monde qu’il contribue à structurer et à reconduire, mais aussi aux effets que cette reconduction implique. Cela ouvre un vaste potentiel de remise en question, d’accusation, parfois violente, des « faits » qui structurent le monde des représentations dans lequel on se sait vivre, mais dont on peut également se sentir exclu et, par certains aspects, étranger. La fracture est ensuite celle qui ouvrirait un imaginaire de l’écart, rompant avec l’ancien en l’utilisant comme repoussoir, et un nouveau régime de la représentation qui accepte la primauté et la force cinétique de l’acte pour réorganiser le champ du « donné » institué ; effraction instituante de quelque chose qui n’y est pas à sa place, parce qu’elle n’y a pas sa place, mais prétend néanmoins s’en arroger une. 

Les participant·es sont invité·es à réfléchir, entre autres, aux thèmes suivants :
·      Le transfert culturel
·      L’arbitraire du signe
·      L’appropriation culturelle
·      Les matériaux de la représentation
·      La traduction
·      La prolifération et la saturation
·      L’intertextualité
·      Le discours critique sur l’art
·      L’intermédialité
·      La représentation du discours scientifique
·      L’adaptation
·      Le récit de voyage
·      La notion de post-vérité

Les propositions de communication, en français ou en anglais, d’une longueur de 300 à 500 mots, ainsi qu’une courte bio-bibliographie, doivent être adressées à l’adresse suivante : colloque.hcti2022@gmail.com pour le mardi 15 février 2022, délai de rigueur.
Les notifications d’acceptation seront envoyées aux participant·es fin février 2022.
Le colloque se déroulera les 8 et 9 juin 2022 à la faculté Victor Segalen de l’Université de Bretagne Occidentale, à Brest.
La durée des interventions ne devra pas excéder 20 minutes. La priorité sera donnée aux communications de doctorant·es et de jeunes chercheur·euses.
Une publication d’une sélection des contributions est envisagée dans Motifs, la revue en ligne du laboratoire HCTI.


Membres du comité scientifique : Nadine Asmar (CNU 18), Stanislas Derrien (CNU 11), Lisa Haristoy (CNU 11), Raphaël Haudidier (CNU 11), Javier Reyes (CNU 7), Carole Roudot (CNU 11), Diana Rodová (CNU 10), Semyon Tanguy-André (CNU 17), Fujuan Wang (CNU 7).
Membres du comité d’organisation : Nadine Asmar, Stanislas Derrien, Morgane Lebouc, Carole Roudot, Adnana Sava, Fujuan Wang.

 
Manifestation organisée avec le soutien du laboratoire HCTI, EA 4249 (directeur, Pr. Alain Kerhervé) et de l’École Doctorale Arts, Lettres, Langues (directrice-adjointe de l’ED ALL pour le site de Brest, Pr. Nelly Blanchard).

 
[1] Schaeffer, Jean-Marie. « Fiction et croyance. » Art, création, fiction : entre sociologie et philosophie, sous la direction de Nathalie Heinich et Jean-Marie Schaeffer. Actes Sud, 2004, pp. 163-186.
[2] Heinich, Nathalie. « Les frontières de l’art contemporain : entre essentialisme et constructivisme. » Les frontières esthétiques de l’art, sous la direction de Claude Amey et Jean-Paul Olive. L’Harmattan, 2000, pp. 125-136.
[3] Lüsebrink, Hans-Jürgen. « Les transferts culturels : théorie, méthodes d’approche, questionnements. » Transfert : Exploration d’un champ conceptuel, sous la direction de Pascal Gin et al., Presses de l’Université d’Ottawa, 2014, pp. 25-48. 
[4] Letissier, Georges. « The Havisham Affair or the Afterlife of a Memorable Fixture », Études anglaises, vol. 65, no. 1, 2012, pp. 30-42. 
[5] Miller, Gerald R. « On being persuaded. Some basic distinctions. » The Persuasion Handbook: Developments in Theory and Practice, sous la direction de James Price Dillard et Michael Pfau. Sage, 2010, pp. 3-16.
 

 
DOCTORAL STUDENTS AND YOUNG RESEARCHERS' SYMPOSIUM (2nd edition) 

Wednesday, June 8th and Thursday, June 9th 2022

HCTI Research Unit (Heritages and Constructions in Text and Image)

Ecole Doctorale Arts, Lettres et Langues 

University of Western Brittany

Brest, France 

 
« Re-presentation(s) in text and image: transfer, influence, fracture »


Representation is defined as “the action, the fact of representing; the result of such an action” (CNRTL dictionary). Among the many senses of the term both in common language and in its scientific uses, we find the idea of “making something present to someone by showing it, by making it known” or “in the form of a substitute or through the use of an artefact” or else of “making something present by its existence, its own presence”. Representation is used in numerous contexts, mainly in arts (visual, literary, dramatic representations, etc.), in science, more particularly in the humanities (mental, cultural representations, etc.) and in politics (representative democracy, etc.). In the fields of philosophy and psychology, representation more specifically points to “what constitutes the concrete content of an act of thought”.

When representation results from the will to indicate presence, with or without the use of an artefact or a medium, it completely falls within the dynamics of discrepancy – discrepancy between the thing itself and what stands for it, between the signified and the signifier. Thus, the hyphen in “re-presentation” is an invitation to explore the unsolvable yet productive tension between an object, its presentation and its presentation once again, in a new light. Does re-presenting amount to copying, creating, or always both? Is there a distinction in kind between the thing being represented (real, “represented”) and what represents it (artificial, “representing”), or should we examine both objects together, in a “fluctuating continuum[1]”? In fact, we perpetually question the relevance of the notion of representation and its uses, which signals “a crisis of representations[2].”

We propose to study the relationship between an object and its representation, focusing on discrepancy and distance, or on the refusal of such a duality: representation is necessary but insufficient because of such dichotomy. This line of questioning may inspire studies in varied disciplines among the humanities. The three axes that we suggest follow an outward movement away from the “re-presented” object:

          - Transfer is what occurs when characteristics of an object, or the whole object, are – deliberately or not – borrowed to present the object elsewhere. In other words, the notion of transfer points to the most explicit and self-aware relationship between the object and its representation. One can consider translation as the ultimate manifestation of transfer since it consists in “de-territorialising the field of study and research beyond one precise cultural and linguistic area[3]”. We also propose to include the issue of adaptation and its variations, that is to say any form of reinterpretation of the original object (rewriting, palimpsest, parody, pastiche, etc.) as well as reiteration, reactualisation and the Deleuzian notion of deterritorialisation. In contemporary fiction, this unremitting “re-presentation” could be illustrated by the abundance of propositions displaying, beyond the original text (“the afterlife of a memorable fixture[4]”), canonical characters that have become cultural objects and that are constantly reinvented in order to comment on reality through the prism of a unifying – if not hegemonic – intertext, and to serve contemporary issues (between faithfulness and irreverence, homage and détournement, conservatism and subversion).

          - Influence, the second axis we suggest, is a process that relies on the condition of two poles/actors communicating: the influencer and the influenced. This notion makes it possible to study the decisions and behaviours of those who are influenced, particularly in literary and artistic creation, be it through (in)direct or (in)visible influence.
Influence happens when re-presentation is marked, not necessarily on purpose, and more vaguely, by the original object. Influence as a notion therefore enshrines re-presentation in time in a more distinctive way than transfer does since it brings up the question of the ties between the context of re-presentation and the past; between an integrated legacy which confers us with an organic approach of the world and the things we are able to say and think about this inherited world in the present.
In the field of language sciences, this concept can be connected to two main orientations: the first describes the strategies considered as “external” to the process produced to convince an interlocutor and primarily relies on the obligation or the use of constraining strategies forcing individuals into determinate actions. The second orientation considers influence as a communication process: through this approach, influence is mainly based on “symbolic transactions[5]”, on the manipulation of symbols in which communication plays an active and essential part. The idea of manipulation, often connotated with negative intentions, can also be associated with the notion of persuasion.

          - Finally, fracture implies breaking the ties with the legacy of the original object. A conflicted, and even violent relationship surfaces between object and re-presentation. This then raises the question of the irrepresentable, and of the inadequacy of mediums and their languages.
Fracture, as considered through the angle of re-presentation, can be studied from at least two angles: traditionally, this leads to an analysis of re-presentation as a notion with a focus on the hyphen, a bridge as connecting as it is fragile. It can also lead to a critique of the notion itself: the alternative between continuity and distance depends on a naturalistic comprehension of representation which first and foremost predicates the world of present and given objects, available to —although potentially non-resorbable into— the representative retake which unveils the world of facts of representation; the borders and the interface of such a world being the act of representation itself. The fracture starts with the suspension of the natural attitude: the “given” is then understood as a “fact”, a preceding and instituted act, a historical and “desanctuarised” production, and becomes questionable in view of the world it contributes to structure and extend but also of the effects of said extension. All this makes way for possible reassessment, for sometimes violent accusations of the “facts” that structure the world of representations we all live in, from which we can at times feel excluded and, in some ways, to which we can sometimes feel estranged. Thus, fracture would also refer to the building of an imagery of discrepancy that would break ties with the Old by using it as a deterrent, and create a new regime of representation accepting the preeminence and kinetic energy of the act to reorganize the field of the instituted “given”; the instituting invasion of an element that does not fit in because it does not belong, but nonetheless claims a space of its own.

Participants are invited to reflect on the following themes:
·      Cultural transfer
·      The arbitrariness of the sign
·      Cultural appropriation
·      The material of representation
·      Translation
·      Proliferation and saturation
·      Intertextuality
·      Critical discourse on art
·      Intermediality
·      The representation of the scientific discourse
·      Adaptation
·      Travel writing
·      The notion of post-truth          

Propositions of presentation, in French or in English, of 300 to 500 words as well as a short bio-bibliography must be addressed to colloque.hcti2022@gmail.com before February 15th, 2022.
Acceptance notifications will be sent to participants by the end of February 2022.
The symposium will take place on June 8th and 9th, 2022 at Victor Segalen Faculty, University of Western Brittany, Brest.
Presentations should not exceed 20 minutes. Priority will be given to presentations from doctoral students and young researchers.
Selected contributions might be published in Motifs, the online journal of the HCTI research unit.
 

Scientific committee members: Nadine Asmar (CNU 18), Stanislas Derrien (CNU 11), Lisa Haristoy (CNU 11), Raphaël Haudidier (CNU 11), Javier Reyes (CNU 7), Carole Roudot (CNU 11), Diana Rodová (CNU 10), Semyon Tanguy-André (CNU 17), Fujuan Wang (CNU 7).
Organisation committee members: Nadine Asmar, Stanislas Derrien, Morgane Lebouc, Carole Roudot, Adnana Sava, Fujuan Wang.


This symposium is organized with the support of the HCTI (Heritages and Constructions in Text et Image) research unit (head: Pr. Alain Kerhervé) and of the school of doctoral studies “Arts, Lettres, Langues” (assistant director of ED ALL for the site of Brest: Pr. Nelly Blanchard).


[1] Schaeffer, Jean-Marie. « Fiction et croyance. » Art, création, fiction : entre sociologie et philosophie, edited by Nathalie Heinich and Jean-Marie Schaeffer. Actes Sud, 2004, pp. 163-186. Translations are ours. 
[2] Heinich, Nathalie. « Les frontières de l’art contemporain : entre essentialisme et constructivisme. » Les frontières esthétiques de l’art, edited by Claude Amey and Jean-Paul Olive. L’Harmattan, 2000, pp. 125-136.
[3] Lüsebrink, Hans-Jürgen. « Les transferts culturels : théorie, méthodes d’approche, questionnements. » Transfert : Exploration d’un champ conceptuel, edited by Pascal Gin et al., Presses de l’Université d’Ottawa, 2014, pp. 25-48. 
[4] Letissier, Georges. « The Havisham Affair or the Afterlife of a Memorable Fixture », Études anglaises, vol. 65, no. 1, 2012, pp. 30-42.
[5] Miller, Gerald R. “On being persuaded. Some basic distinctions.” The Persuasion Handbook: Developments in Theory and Practice, edited by James Price Dillard and Michael Pfau. Sage, 2010, pp. 3-16.