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Revue Synergies Italie : "Plurilinguisme et littératie dans les pays francophones et italophones"

Publié le par Aurelien Maignant (Source : Roberto Dapavo)

"Plurilinguisme et littératie dans les pays francophones et italophones"

Revue Synergies Italie, n° 18

 

PRÉSENTATION

La revue Synergies Italie, revue francophone indexée dans de nombreuses bases de revues scientifiques dont ERIH PLUS, Scopus  et Anvur lance un appel à contributions pour la publication du n°18 sur le thème  suivant :

"Plurilinguisme et littératie dans les pays francophones et italophones"

Numéro coordonné par Sara Vecchiato

Dans un cadre général de grands changements sociaux, accélérés par la crise pandémique mondiale, les compétences linguistiques s’inscrivent dans des espaces sociaux en tension (Berthoud & Burger, 2014) et augmentent leur importance à bien des égards. En effet, sur un marché où l’impact des technologies de l’information est en train de remodeler la division du travail (Frey & Osborne, 2017 ; Levy & Murnane, 2012), plusieurs professions de niveau « moyen » disparaissent. Face à cet effet sablier (Vittori, 2009) partageant de plus en plus la société, le fait de parler plusieurs langues est important pour l’épanouissement personnel et professionnel de l’individu (Grin, 2015). La formation linguistique touche de près l’ensemble des compétences mobilisées en lecture et en écriture, désignées sous le nom de « littératie » (ou « lettrisme », cf. Pruvost, 2019) : alors que l’évolution de la société impose des niveaux de plus en plus élevés de littératie, les phénomènes de l’analphabétisme et de l’illettrisme marginalisent des fractions importantes d’adultes (OCDE, 2020 ; Vertecchi & Gallina, 2007). Puisque le plurilinguisme est configuré comme un « capital culturel » (Bourdieu & Passeron, 1970 ; Coffey, 2018), l’éducation aux langues a une valeur d’émancipation sociale (De Mauro, 2018).

Premièrement, la question du plurilinguisme est d’une grande actualité à un moment historique où l’Europe débat de son avenir et où l’équilibre entre les langues est en train d’être redessiné (Ginsburgh et al., 2017 ; Somssich, 2016). En effet, s’il existe un consensus sur le fait que pouvoir s’exprimer et accéder à des services dans sa propre langue est un droit (Varennes, 2016), la co-édition de textes en plusieurs langues au niveau européen soulève un certain nombre de problématiques (Raus, 2010), si bien que le coût du maintien du plurilinguisme au niveau européen fait débat (Ginsburgh et Moreno-Ternero 2020). D’autre part, il est bien connu qu’au niveau économique, le manque de compétences en langues étrangères parmi les employés entraîne un préjudice qui a été quantifié dans plusieurs études (Commission Européenne 2009 ; Holmes, 2018), tandis que certain.e.s chercheur.e.s ont souligné le rôle du plurilinguisme comme stratégie de communication efficace dans les entreprises (Gerolimich & Vecchiato, 2016 ; Lüdi, 2020). La valeur économique des langues étrangères dans la carrière professionnelle d’un individu semble être une donnée acquise, quoique les études scientifiques sur ce sujet aient une extension variable selon les pays, notamment en ce qui concerne l’Italie (Gazzola, 2017). Toujours est-il que le modèle d’une langue véhiculaire unique a longtemps été remis en question (Hogan-Brun, 2017 ; Mattioda, 2013). Parmi les alternatives possibles, la pratique de l’intercompréhension, ou lingua receptiva, a reçu l’attention de la Commission européenne (Ten Thije et al., 2017) et pourrait représenter un tournant communicatif, notamment pour les langues romanes (Badelita, 2016). En même temps, les compétences plurilingues et pluriculturelles (Coste et al., 2009 ; Gibault, 2018) risquent d’être présentées de manière enthousiaste comme la panacée à toutes les inégalités sociolinguistiques, alors qu’elles peuvent aussi faire l’objet d’exploitation par le marché, sans que l’individu en tire aucun bénéfice (Duchêne, 2011 ; Duchêne & Heller, 2012).

Deuxièmement, le plurilinguisme comme gage de la connaissance et de la reconnaissance de l’Autre constitue le pari de l’Observatoire Européen du plurilinguisme qui a soumis au Conseil de l’Europe et au Parlement européen une Charte européenne du plurilinguisme (Observatoire européen du plurilinguisme, 2005 ; Telmon, 2018). En effet, l’utilisation de répertoires linguistiques plurilingues (Lüdi, 2006) permet à la personne d’entrer en contact avec d’autres cultures et d’explorer son identité d’un autre point de vue (Kinginger, 2008). Toutefois, le plurilinguisme n’est ni conçu ni accepté de la même manière au niveau international et au niveau national : la pression en faveur du monolinguisme justifie alors des revendications empreintes de purisme qui justifient l’abandon des répertoires linguistiques plurilingues au niveau local (Cerquiglini, 2003 ; sous presse ; Telmon et al., 2012). Cette divergence sur le plan symbolique devient d’une pertinence absolue dans certains contextes tels que les régions frontalières (Buonocore, 2018). Lorsque, d’autre part, l’éducation linguistique intervient positivement dans la formation de l’individu, le plurilinguisme peut donner lieu à une expérience privilégiée de réflexion sur soi, comme c’est le cas dans la proposition pédagogique de « l’autobiographie linguistique » (Favero & Sofia, 2018).

Troisièmement, le plurilinguisme touche directement la transmission du savoir, bien que ce rôle soit resté relativement discret (Berthoud & Gajo, 2020). En effet, le monolinguisme de plus en plus répandu dans la communication scientifique comporte le risque pour les langues qui ne sont pas « hyper-centrales » (au sens de Calvet, 1999), comme le français et l’italien, de mener des batailles d’arrière-garde pour défendre un héritage culturel du passé (Cabiddu, 2017 ; Hamel, 2013). Inversement, la « littératie plurilingue » peut entrer en jeu dans les entreprises, les institutions, et surtout dans l’éducation (Egli Cuenat et al., 2020 ; Legros et al., 2009 ; Lo Bianco, 2000). Les éducateurs se confronteront alors à une valorisation fortement asymétrique des langues selon le pays et au phénomène de l’illettrisme dans la langue maternelle accompagné de la scolarisation de l’enfant dans une langue qu’il maitrise mal ou pas du tout (Conseil de l’Europe et Assemblée parlementaire, 2006). Voilà pourquoi les études de langues étrangères et le temps consacré à la lecture-écriture dans l’enseignement font l’objet d’une attention particulière dans la planification de l’éducation au sein de l’Union européenne (DEPP, 2020).

 

AXES

Ce numéro de Synergie Italie se veut une occasion de faire le point sur le plurilinguisme et la littératie, en les considérant à la fois de façon autonome et à travers leurs points d’intersection. Un accent particulier sera mis sur leur rôle dans les pays francophones et italophones. Voici une liste (non exhaustive) des questions examinées :

  • plurilinguisme et identité(s) sociale(s), compétences pluriculturelles, droits linguistiques ;
  • littératie plurilingue, compétences d’écriture dans un milieu multilingue ;
  • illettrisme en L1, éducation au plurilinguisme, intercompréhension, lingua receptiva ;
  • valeur économique des langues, marché des langues ;
  • communautés translinguales, communautés plurilingues et écrilectes.

 

RÉFÉRENCES

Badelita, C.-G. (2016). « L’intercomprensione – una possibile svolta comunicativa in ambito romanzo ». Colóquio Internacional Comunicação e cultura na Romània europeia 2015, pp. 274–282.

Berthoud, A.-C., & Burger, M. (2014). Repenser le rôle des pratiques langagières dans la constitution des espaces sociaux contemporains. De Boeck Superieur.

Berthoud, A.-C., & Gajo, L. (2020). The Multilingual Challenge for the Construction and Transmission of Scientific Knowledge. John Benjamins.

Bourdieu, P., & Passeron, J.-C. (1970). La Reproduction: Éléments pour une théorie du système d’enseignement (édition électronique). Minuit.

Buonocore, A. (2018). « Quelques réflexions sur la didactique de la langue, de la civilisation et de la littérature françaises dans un contexte plurilingue ». Synergies Italie, n° 14, pp. 69–80.

Cabiddu, M. A. (2017). L’italiano alla prova dell’internazionalizzazione. Guerini e associati.

Calvet, L.-J. (1999). Pour une écologie des langues du monde. Plon.

Cerquiglini, B. (A c. Di). (2003). Les langues de France. Presses Universitaires de France.

Coffey, S. (2018). « Choosing to Study Modern Foreign Languages: Discourses of Value as Forms of Cultural Capital ». Applied Linguistics, n° 39(4), pp. 462–480.

Conseil de l’Europe, & Assemblée parlementaire. (2006). APCE - Recommandation 1740 (2006) — La place de la langue maternelle dans l’enseignement scolaire.

Coste, D., Moore, D., & Zarate, G. (2009). Compétence plurilingue et pluriculturelle. Vers un Cadre Européen Commun de référence pour l’enseignement et l’apprentissage des langues vivantes: études préparatoires. Version révisée et enrichie d’un avant-propos et d’une bibliographie complémentaire. Conseil de l’Europe, Division des Politiques linguistiques. https://www.coe.int/fr/web/language-policy/home

De Mauro, T. (2018). L’ educazione linguistica democratica. Laterza.

Duchêne, A. (2011). « Néolibéralisme, inégalités sociales et plurilinguisme: L’exploitation des ressources langagières et des locuteurs ». Langage et societe, n° 136(2), pp. 81–108.

Duchêne, A., & Heller, M. (2012). Language in Late Capitalism: Pride and Profit. Routledge.

Egli Cuenat, M., Manno, G., & Desgrippes, M. (2020). « Littératie(s) plurilingue(s) dans le contexte de l’apprentissage et de l’enseignement des langues – des perspectives complémentaires ». Bulletin VALS-ASLA, pp. 1–13.

Commission Européenne. (2009). Languages mean business: Companies work better with languages : recommendations from the Business Forum for Multilingualism established by the European Commission. Publications Office of the European Union. http://op.europa.eu/en/publication-detail/-/publication/d5ee6ef0-986c-49e6-b8ac-71da8401efc6/language-en/format-PDF

Favero, E., & Sofia, V. (2018). L’autobiografia linguistica nella pratica didattica: Una proposta per valorizzare la madrelingua e il plurilinguismo. Aracne.

Frey, C. B., & Osborne, M. A. (2017). « The future of employment: How susceptible are jobs to computerisation? ». Technological Forecasting and Social Change, n°114, pp. 254–280.

Gazzola, M. (2017). Multilinguismo ed economia in Italia. In M. A. Cabiddu (A c. Di), L’italiano alla prova dell’internazionalizzazione. Guerini e associati.

Gerolimich, S., & Vecchiato, S. (A c. Di). (2016). Le plurilinguisme et le monde du travail / Plurilingualism and the Labour Market. Entre besoins, défis et stratégies / Language needs, challenges and strategies. Peter Lang.

Gibault, F. (2018). « Langues, interculturalité et emploi: Comment préparer les étudiants et l’université à une société globalisée ? », Synergies Italie, n°14, pp. 45–53.

Ginsburgh, V., Moreno-Ternero, J. D., & Weber, S. (2017). « Ranking languages in the European Union: Before and after Brexit ». European Economic Review, n° 93(C), pp.139–151.

Grin, F. (2015). « La valeur des langues dans l’activité professionnelle ». In C. Carrère (A c. Di), L’impact économique des langues. Implications pour la francophonie. Ferdi, Economica, pp. 1–21.

Hamel, R. (2013). « L’anglais, langue unique pour les sciences? Le rôle des modèles plurilingues dans la recherche, la communication scientifique et l’enseignement supérieur ». Synergies Europe, n° 8, pp. 53–66.

Hogan-Brun, G. (2017). Linguanomics -. What is the Market Potential of Multilingualism? Bloomsbury Academic.

Holmes, B. (2018). « Speaking to a Global Future: The Increasing Value of Language and Culture to British Business Post-Brexit ». In M. Kelly (A c. Di), Languages after Brexit: How the UK Speaks to the World. Springer International Publishing, pp. 61–74.

Kinginger, C. (2008). « épertoires: Décentrages et expression identitaire ». In G. Zarate, D. Lévy, & C. J. Kramsch (A c. Di), Précis du plurilinguisme et du pluriculturalisme, pp. 47–50.

Legros, D., Bounouara, Y., Acuna, T., Benaicha, F. Z., Hoareau, Y. V., & Sawadogo, F. (2009). « TICE et Cognition de la Littératie plurilingue. Vers un modèle intégrateur ». Synergie Algérie, n°6, pp. 21–28.

Levy, F., & Murnane, R. J. (2012). The New Division of Labor: How Computers Are Creating the Next Job Market. Princeton University Press.

Lo Bianco, J. (2000). « Multiliteracies and multilingualism ». In B. Cope, M. Kalantzis, & New London Group (A c. Di), Multiliteracies: Lit Learning. Routledge, pp. 89–102.

Lüdi, G. (2006). « De la compétence linguistique au répertoire plurilingue ». Bulletin VALS-ASLA, n°84, pp. 173–189.

Lüdi, G. (2020). « Plurilingual speech as legitimate and efficient communication strategy ». International Journal of Bilingual Education and Bilingualism, n°23(1), pp. 36–48.

Mattioda, M. M. (A c. Di). (2013). Présentation / Presentazione. Synergies Italie, n°9, pp. 5–21.

Observatoire européen du plurilinguisme. (2005). Charte européenne du plurilinguisme https://www.observatoireplurilinguisme.eu/images/Fondamentaux/CharteplurilinguismefrV2.13.pdf

OCDE. (2020). L’importance des compétences: Résultats supplémentaires de l’évaluation des compétences des adultes. OECD Publishing.

Pruvost, J. (2019). « Avant-propos de la ‘littératie’, de la ‘santé’ et de Condorcet…. », Etudes de linguistique appliquee, n° 195(3), pp. 267–276.

Raus, R. (A c. Di). (2010). Multilinguismo e Terminologia nell’Unione Europea. Hoepli.

Somssich, R. (2016). What Language for Europe. ELTE Law Journal, 103.

Telmon, T. (2018). « Plurilinguismo e politiche linguistiche. L’esempio del CIEBP ». Lingue Antiche e Moderne, 7, 5–22.

Telmon, T., Raimondi, G., & Revelli, L. (éds.). (2012). Coesistenze linguistiche nell’Italia pre e postunitaria. Società linguistica italiana, Bulzoni.

Ten Thije, J. D., Gooskens, C., Daems, F., Cornips, L., & Smitss, M. (2017). « Lingua Receptiva: Position Paper on the European Commission’s Skills Agenda. European Journal of Language Policy », 9(1), 138–143.

Varennes, F. de. (2016). « Importance de la médiation dans la protection des droits linguistiques : Une perspective juridique ». Etudes de linguistique appliquee, n° 181(1), 35–42.

Vertecchi, B., & Gallina, V. (2007). Il disagio, l’alfabeto, la democrazia. Riflessioni sui risultati del progetto Predil. FrancoAngeli.

Vittori, J.-M. (2009). L’effet sablier. Grasset.

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Consignes, format de soumission et sélection :

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Les propositions d’articles seront présentées sous forme d’un résumé de deux pages maximum (format A4, police Times taille 10), incluant 5 mots-clés et les éléments essentiels de bibliographie, et envoyées par courriel à l’adresse suivante : synergies.italie@gmail.com  

Elles seront transférées pour évaluation au comité scientifique de la revue.

NB : Les doctorants et chercheurs francophones italiens menant leurs travaux dans un autre domaine couvert par la revue (Ensemble des Sciences Humaines et Sociales, culture et communication internationales, sciences du langage, littératures francophones, didactique des langues-cultures, éthique et théorie de la complexité) sont également invités à participer dans la limite de l’espace éditorial disponible  et selon les étapes d’évaluation décrites dans les consignes aux auteurs.

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Calendrier :

Date limite de l’envoi des résumés : 31 mai 2021

Retour des avis aux auteurs : 30 juin 2021

Envoi des articles : Avant le 30 septembre 2021

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