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Oralité et ordonnancement du discours : ponctuation et

Oralité et ordonnancement du discours : ponctuation et "mise en page" chez Flaubert

Publié le par Ivanne Rialland (Source : Déborah Boltz et Florence Pellegrini)

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Oralité etordonnancement du discours : ponctuation et « mise en page »chez Flaubert

Flaubert. Revue critique et génétique

Dossier numéro 7, coordonné par Déborah Boltz et Florence Pellegrini

A paraître : juin 2012.

Le22 juillet 1852, Gustave Flaubert écrit à Louise Colet : « Une bonne phrase de prose doit être comme un bon vers, inchangeable, aussi rythmée, aussi sonore ». Confrontée àce que nous savons sur l'usage flaubertien du « gueuloir », cetteexigence rythmique assignée à la prose romanesque, nous incite à penser laponctuation comme un des éléments centraux du projet par lequel Flaubert entendfaire du roman une oeuvre d'art à part entière.

C'estau sens large que nous prendrons ici le terme de ponctuation en y incluant nonseulement les marques traditionnelles (autographiques et typographiques :telles que point, point-virgule, virgule, deux-points, parenthèse, tiret, exclamation,interrogation, suspension, etc.) mais encore, dans les manuscrits, lesidiosyncrasies propres aux graphies de l'écrivain et, bien sûr, tous lesaspects de la mise en page du texte et de l'avant-texte (alinéas, blancs,enchaînements asyndétiques et/ou polysyndète).

Plusproche d'une pratique poétique du souffle et d'une conception orale de laponctuation que des normes logiques qui se généraliseront à la fin du XIXesiècle, l'écriture flaubertienne semble se caractériser par une ambitionrythmique qui explique peut-être chez lui quelques usages déviants auxquels cedossier voudrait consacrer des études précises : l'usage systématique dutiret, la rareté du point-virgule, une utilisation parfois déroutante du point,une place particulière donnée à la virgule (souvent ajoutée pour détacher lesujet et le verbe, le verbe et son complément, ou devant une épithète rejetéeen fin de phrase), etc.

Autresquestions qui solliciteraient une recherche aussi bien dans le champs dumanuscrit de travail que dans celui des éditions imprimées : les alinéas,la structuration en paragraphe, l'élaboration des blancs (y comprisl'éventuelle diversité de ces blancs) ou encore toute intervention d'écrivainmarquant une décision particulière de « mise en page ».

L'objectifglobal de ce dossier serait d'avancer dans notre connaissance des phénomènesspécifiques par lesquels Flaubert s'approprie et détourne les règles de laponctuation pour mieux agir à toutes les échelles du texte sur le rythme (de laphrase, de la page, du chapitre, etc.) en cherchant à inventer une nouvellemusicalité de la prose, capable peut-être de transmettre la voix de l'écrivain.

Plusieurspistes sont possibles pour cette enquête, à commencer par les recherchesportant sur la diachronie des opérations d'écriture qui permet de suivrel'émergence et les métamorphoses de la ponctuation autographe en cernant auplus près les intentions de l'écrivain au travail.

Maisle dossier s'intéressera également à l'ensemble des conversions qui s'opèrententre l'avant-texte et la première édition des oeuvres publiées du vivant del'auteur, ainsi qu'aux variations qui peuvent s'observer dans les éditionssuccessives du texte. Il s'agira alors de s'interroger sur le degré deresponsabilité de l'écrivain et/ou de l'imprimeur dans les évolutions que ledevenir éditorial de l'oeuvre met en évidence. On sait que Flaubert entretientun rapport de plus en plus distant à son texte au fur et à mesure que samatérialisation s'éloigne de l'original autographe : jusqu'à quel pointdélègue-t-il à son copiste, puis au correcteur et à l'imprimeur les décisionsde modifier éventuellement ses propres choix ?

Laquestion paraît d'autant plus intéressante qu'historiquement les dernièresannées de la carrière de Flaubert coïncident avec des transformations sensiblesdans les normes typographiques de l'édition française (rationalisation desusages logiques de la ponctuation). Le terrain de cette recherche pourra doncaussi bien porter sur les manuscrits de travail, les manuscrits définitifs, lesmanuscrits des copistes que sur les textes imprimés des oeuvres.

Onpourra également apporter un soin particulier à l'examen de tous lesmétadiscours flaubertiens sur ce sujet et spécialement aux prises de positionde l'écrivain dans la correspondance (aussi bien dans les lettres de réflexionesthétique sur la prose que dans les lettres de travail avec les éditeurs).

Desétudes spécifiquement génétiques peuvent être envisagées sur la ponctuationprivée des manuscrits et ses idiosyncrasies, qui sont autant d'indications derégie : points de suspension pour signifier un ajout à venir, crochetsdroits, barres verticales pour encadrer des éléments en suspens destinés à uneéventuelle suppression, etc.

Ilva de soi que cette enquête sur la ponctuation peut, dans certains cas, croiserd'importantes questions transversales sur le style flaubertien et sagenèse : c'est le cas par exemple pour l'élaboration progressive du styleindirect (ou indirect libre) à partir d'une écriture qui, au stade scénariqueou dans les premiers brouillons, peut commencer sur le modèle du style direct.

Enfin,cette étude sera l'occasion de réfléchir sur les choix opérées par les éditeursd'aujourd'hui pour l'établissement des textes non publiés du vivant de l'auteurqu'il s'agisse de manuscrits proprement dits ou d'avant‑textes presque achevéscomme Bouvard et Pécuchet. Quels protocoles éditoriaux ont étémis en place ? Quel serait le meilleur compromis entre une fidélitéstricte à la ponctuation originale et le respect des normes actuelles de lalisibilité ?

Onpourra s'interroger également sur ce type d'option dans le cas particulier destraductions, où l'ordonnancement du discours flaubertien s'affronte à ce queJean-Michel Chevalier nomme « l'orthonymie » : en quoi lesexigences rythmiques de la langue cible permettent-elles ou non de restituer laponctuation originale ? En quoi exigent-elles au contraire son remaniementen faveur d'une plus grande fidélité à la ponctuation source ?


Lespropositions d'articles (titre et résumé d'environ 300 mots) sont à envoyer auplus tard le 1er novembre 2011.

Lesarticles sont à remettre au plus tard le 4 mai 2012.

Lespropositions et les articles sont à envoyer à :

DéborahBoltz

deboraboltz@orange.fr

FlorencePellegrini

florence.pellegrini@univ-montp3.fr