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Appels à contributions
Nerval conteur (Revue Nerval, n° 5, 2021, J.-N. Illouz, H. Scepi, dir.)

Nerval conteur (Revue Nerval, n° 5, 2021, J.-N. Illouz, H. Scepi, dir.)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Jean-Nicolas Illouz)

Nerval conteur

Revue Nerval, n°5, 2021,

sous la direction de Jean-Nicolas Illouz et de Henri Scepi

 

Outre des Varia pour lesquels le sujet est libre (voir https://www.fabula.org/actualites/revue-nerval-n-5-2020_94131.php), le numéro 5 de la Revue Nerval comportera cette année un dossier sur Nerval conteur, pour lequel nous lançons cet appel à contributions :

Nerval conteur

Nerval fut perçu par nombre de ses contemporains comme un « incomparable conteur », donnant d’emblée à sa manière poétique une puissance d’invention, une liberté d’allure, et une grâce dans l’adresse au lecteur, qui conviennent en effet au genre protéiforme du conte. C’est cet art du conteur que nous voudrions étudier dans ce dossier du numéro 5 de la Revue Nerval, en montrant comment Nerval donne au conte, selon ses emplois, ses formes et ses valeurs les plus variés, sa plasticité la plus grande.

Celle-ci est déjà assez indiquée par la diversité des modèles poétiques auxquels Nerval se réfère, directement ou par allusions. Il peut s’agir du conte symbolique ou initiatique, à la manière de L’Âne d’or d’Apulée, ou bien de la fable allégorique à la manière du Songe de Poliphile de Francesco Colonna ; il peut s’agir du conte folkloriques, des légendes villageoises ou des contes de veillée, dont Nerval recueille les souvenirs dans sa province du Valois, et dont il imite la manière dans la Reine des poissons, en l’associant en outre à celle des contes pour enfants et des livres d’étrennes dans un article du National du 29 décembre 1850 ; il peut s’agir du conte oriental renouvelé des Mille et Une Nuits dans l’Histoire de la Reine du Matin et de Soliman prince des génies, où l’érudition va de pair avec l’invention la plus personnelle et où la narration se donne comme la transcription d’un récit d’abord oral ; il peut s’agir du conte philosophique du siècle des Lumières, dont Nerval rappelle l’histoire et dont il dévoile les envers ténébreux au début de son étude sur Jacques Cazotte dans Les Illuminés ; il peut s’agir du conte fantastique, à la manière de Hoffmann, ou de Nodier, ou bien du conte merveilleux, tel qu’il réapparaît au chapitre VI, « Othys », de Sylvie, à mi-chemin entre le récit villageois et le märchen des romantiques allemands ; il peut s’agir des contes et nouvelles chers aux camaraderies romantiques, celles du Bousingo ou des Jeune-France, où Nerval, Théophile Gautier, ou bien encore Pétrus Borel mettent au goût « bohème » les facéties des fables médiévales, la goguenardise des romans renaissants ou baroques, aussi bien que les fantaisies frénétiques reprises à l’air du temps ; ce peut être aussi bien de simples canards de presse, fantasques ou canularesques, qui nourrissent la veine humoristique de Nerval journaliste, quand le vrai et le faux se mêlent dans les journaux non moins que le rêve ne s’épanche dans la vie réelle dans Aurélia.

Plusieurs questions se posent :

  • Qu’en est-il de la valeur symbolique du conte, dont Nerval suit à la fois les dégradations successives et les relèves incessantes au cours des siècles, – de sa valeur allégorique dans les traditions médiévales ou renaissantes, à sa valeur philosophique au siècle des Lumières, et de sa valeur toute profane dans le feuilleton moderne à sa valeur infiniment poétique réaffirmée au sein même d’une époque « où toutes les croyances ont été brisées » ? Quelle tentative de « resymbolisation » le conte nervalien tente-t-il alors d’opposer à la désymbolisation du langage et au désenchantement du monde ? Comment, à travers lui, la croyance compose avec l’ironie, et comment la poésie naïve se double d’une conscience réflexive qui en augmente la valeur ?
  • Qu’en est-il du nœud que le conte opère non seulement entre la fiction et la vérité, mais encore entre la fiction et la vie, s’il est vrai que Nerval écrit sa propre histoire sur le canevas immémorial de quelque fable d’amour et de mort répétée d’âge en âge, et s’il est vrai qu’il est de ces auteurs qui, comme Cazotte ou Apulée, « croient » en leur fable, et pour qui « inventer » revient à se « ressouvenir ».
  • Qu’en est-il enfin de la communauté que suppose le conte, si cette communauté ne peut plus être celle des veillées villageoises d’autrefois, ni celle du public des cafés orientaux, ni celle des soupers philosophiques du siècle précédent, ni davantage celle des camaraderies trop tôt disparues, ni non plus, après l’échec de la révolution de 1848, celle du Peuple des temps démocratiques ? Qu’en est-il alors de la manière dialogique du conte, quand l’écriture de Nerval, quoiqu’en appelant toujours à une écoute amie, se découvre adossée à la solitude, et quand la figure du conteur, telle que Nerval la maintient jusque dans la conscience de son éloignement historique, est dépositaire d’une expérience qui ne peut plus être aussi aisément partagée selon le lien de la parole ?

Les études pourront porter sur quelques-uns des textes du corpus rapidement balisé ici ; mais elles pourront aussi susciter des perspectives nouvelles, notamment en mettant Nerval en relation avec d’autres conteurs, choisis parmi ses modèles antérieurs, parmi ses compagnons d’écriture, ou encore parmi ceux qui le suivront et verront en lui un modèle à continuer.

*

Les propositions de contributions doivent nous parvenir avant le 1er avril 2020, sous la forme d’un résumé de 1500 signes environ, assorti d’une courte biobibliographie, à :

Jean-Nicolas Illouz et Henri Scepi

jean-nicolas.illouz@wanadoo.fr et henri.scepi@orange.fr

Pour les propositions retenues, les articles eux-mêmes doivent nous être remis au plus tard au 1er septembre 2020. 

Le numéro 5 de la Revue Nerval paraîtra en avril 2021.