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Appels à contributions
Les hôtes du hasard. La poésie hodéporique (revue Semicerchio)

Les hôtes du hasard. La poésie hodéporique (revue Semicerchio)

Publié le par Marc Escola (Source : Michela Landi)

Le numéro 63 de la Revue de Poésie comparée «Semicerchio» (Florence), sous la direction de Michela Landi,

avec la collaboration de Sara Svolacchia, propose aux contributeurs le sujet suivant:

Les hôtes du hasard: la poésie hodéporique/

Gli ospiti del caso: la poesia odeporica/

The Guests of Chance: hodeporic poetry

 

Par une formule du poète anglais William Wordsworth nous nous proposons d’étudier le phénomène du «passage» en poésie autant sous l’aspect thématique que formel. Le «pas» en tant qu’unité rythmique et unité de mouvement s’articule en fait à plusieurs niveaux: se traduisant d’abord en schèmes mentaux, il est à l’origine de nombreuses représentations culturelles.  

Connue aussi sous le nom de «poésie viatique» («viatic poetry»), la poésie hodéporique concerne tout d’abord l’expérience de l’espace, soit par voie directe (voyage à pied) soit par la médiation réelle et imaginaire des moyens de transport. 

Si dans la tradition gréco-latine et judéo-chrétienne les métaphores du ‘transport’ du sens, très récurrentes, se rattachent à la possibilité d’une transmission du sens, au moyen âge l’écriture est, elle-même, voyage (Curtius), et la plûme le moyen de transport métaphorique élu. L’idée d’une République des Lettres dans le milieu humaniste, où la métaphore du voyage est foisonnante, sembre céder la place, en Europe, à une société ‘classique’, qui associe aux stabilités des formes la primauté de l’idée de permanence.

Le mouvement en tant que valeur se repropose, avec ses implications imaginaires, à l’époque des Lumières où le voyage est associé à l’idée de progrès et de formation du sujet. C’est bien sur cette base que le romantisme récupère, par la figure du Wanderer,un certain mysticisme viatique, en l’associant volontiers à la forme libre et ouverte. Cette dernière prépare l’avènement du courant verslibriste, qui se propose d’affranchir la poésie de la prosodie normative, pour récupérer la composante rythimique et pnéumatique inscrite dans le mouvement naturel de la langue. D’autres poètes, à vocation formaliste, vont par contre reconnaître, dans la forme close, la nécessité de l’expérience de la limite, laquelle seule peut porter au niveau de la conscience créatrice le mouvement du corps et de la pensée. Chutes, trébuchements, présence d’obstacles symboliques, se font alors l’expression d’une poétique dysfonctionnelle et critique à la fois. 

À l’époque industrielle, où triomphe le moyen de transport en tant qu’amplificateur du temps et de la volonté du sujet, le déplacement à pied en vient à acquérir une valeur inédite. Là où le physiologue Balzac revendiquait, par sa «théorie de la démarche» (1833), la paternité d’une science ‘urbaine’, la pratique de la flânerie allait répondre polémiquement à la soustraction du temps subjectif à la loi homorythmique (Barthes) de la production et du dressage social. C’est au début du XXe siècle – au moment même où on exalte la vitesse de l’automobile – que se développe, suite à l’exemple de Walt Whitman, une variante de la poésie hodéporique, connue sous le nom de «poésie déambulatoire» (Bernard), ou «pedestrian poetry». Cette dernière, tout en contemplant la possibilité d’autres moyens de déplacement, valorise l’activité pédestre ouverte, en l’associant au vers libre, et à la suppression de la ponctuation. De la nécessité d’une intéraction harmonique entre sujet et milieu atteste, plus récemment, l’attention portée par de nombreux poètes, pour la plupart redevables du théâtre pulsionnel d’Antonin Artaud, à la lecture performative du texte poétique. Parmi d’autres, Charles Olson relance, dans les années cinquante du XXe siècle, une conception énérgétique de la poésie, où la respiration et le pas de danse accompagne la lecture dynamique du texte. En Italie, les «pensées vagabondes» (pensieri viandanti) d’Italo Testa reproposent aujourd’hui une «poétique de la marche» à travers des occasions de performance collective.

Voici, ci-dessous, quelques suggestions thématiques: 

1)      La poésie hodéporique: de l’époque classique à la poésie déambulatoire moderne et contemporaine  

2)      Symétries, dissymétries, achronies et abasies: pas et mètre dans la poésie viatique 

3)      Épiphanies du hasard dans la flânerie métropolitaine  

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Bibliographie essentielle:

Giampaolo Nuvolati, L’interpretazione dei luoghi. Flânerie come esperienza di vita, Firenze, FUP, 2013.

André Spire, Plaisir poétique et plaisir musculaire. Essai sur l’évolution des techniques poétiques, Paris, Corti,1949.

Niccolò Scaffai, Letteratura e ecologiaForme e temi di una relazione narrativa, Roma, Carocci, 2017.

K. Benesch-F. Specq, Walking and the Aestetics of Modernity: Pedestrian  Mobility in Literature and the Arts, London, Palgrave Macmillan, 2016.

Michel Baglin, Poésie et pesanteur, Villelongue d’Aude, Atelier du Gué, 1984; réed. 1992.

Kirk Freudenburg, The Walking Muse: Horace on the Theory of Satire, Princeton Legacy Library, 1992.

Pensieri viandanti I: Antropologia ed estetica del camminare, a cura di Italo Testa, Parma, Diabasis, 2008.

Pensieri viandanti III. Poetiche del camminare, a cura di Italo Testa, Parma, Diabasis, 2010.

Kate North, Charles Olson’s, Projective verseThe Breath and the Line, in Portable Poetry Workshop, edited by Nigel Mc Loughlin, London, Palgrave-Macmillan Publishers, 2017, pp. 201-207.

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Modalité de soumission des contributions:

Les résumés, rédigés en anglais, français, italien, espagnol, allemand, sont à envoyer à:

semicerchiorpc@libero.it

avant le 30 juin 2020. Réponse de la part du comité avant le 15 juillet.

Les contributions, qui ne dépasseront pas les 30.000 caractères espaces compris, seront remises en format word avant le 30 septembre 2020.