Questions de société

"Le gouvernement cherche à en finir avec le conflit dans les universités" (Le Monde, 26/02)

Publié le par Florian Pennanech

Le gouvernement cherche à en finir avec le conflit dans les universités

LE MONDE | 26.02.09 | 08h06  •  Mis à jour le 26.02.09 | 10h01

Pas une contre-attaque, un déminage.   Alors qu'une quatrième journée demanifestations à l'appel des enseignants chercheurs et des étudiantsest prévue jeudi 26 février, le premier ministre a pris les devants,mercredi, et tenté de désamorcer le conflit en faisant un geste qui estloin d'être anodin sur le plan politique.

A l'issue d'uneréunion avec la Conférence des présidents d'université (CPU), enprésence de la ministre de l'enseignement supérieur, Valérie Pécresse, François Fillona annoncé qu'aucune suppression d'emploi ne serait effectuée en 2010 eten 2011 dans les universités. Quant aux 450 postes supprimés en 2009,la compensation financière promise aux établissements cette année serareconduite les années suivantes. Cela représente 12 millions d'euros en2010. En outre, de nouveaux professeurs agrégés du secondaire (les"PRAG"), pourraient rejoindre les 15 000 d'entre eux qui enseignentdéjà dans le supérieur.

Les universités échapperont donctotalement au principe présidentiel, par ailleurs maintenu, du nonremplacement d'un fonctionnaire partant à la retraite sur deux. Mais iln'est pas dit que le gouvernement parviendra à maintenir fermée laboîte de Pandore. L'annonce pourrait provoquer de dangereuses jalousiesdans le reste de la fonction publique.

Quoi qu'il en soit, cette décision est "la preuve de ce que le gouvernement place bien l'université au rang de priorité",commentait-on dans l'entourage de Valérie Pécresse. La preuve, aussi,qu'il veut maintenant en finir avec un conflit qui perturbel'enseignement supérieur depuis un mois. Et il compte sur la CPU pourl'y aider.

Si certains présidents d'université approuvent la mobilisation, tel Georges Molinié,à Paris-IV, d'autres ont commencé à exprimer leurs inquiétudes quantaux dégâts que le conflit pourrait engendrer. Président de l'Université Pierre-et-Marie-Curie (UPMC), Jean-Charles Pomerol, se disait, mercredi, "sérieusement inquiet": "C'est la LRU [loi relative aux libertés et responsabilités des univeristés] qui est menacée."

La grogne, partie il y a un mois de la réforme du statut desenseignants chercheurs s'est de fait étendue à l'ensemble de lapolitique du gouvernement en matière d'enseignement supérieur, àcommencer par la LRU, votée en 2007 et d'ores et déjà appliquée dansvingt universités. Pour déminer le terrain, le gouvernement est obligéde multiplier les gestes avant que les dicussions reprennent sur ledécret contesté.

"REPARTIR À ZÉRO"

Valérie Pécresse a convié les présidents d'université et lessyndicats vendredi pour discuter des grandes orientations de lanouvelle mouture du projet. Là encore, François Fillon a pris lesdevants: il a rappelé les principes de la réforme qui consiste àmoduler les temps d'enseignement et de recherche des enseignantschercheurs et à confier une partie des promotions aux présidentsd'université : l'évaluation se fera par les pairs, le fonctionnementsera collégial, un équilibre sera trouvé entre les instances nationaleset locales pour les promotions.

Mais il a aussi demandé que ce fameux décret soit "entièrement réécrit". Ce qui ressemble à une mise au point. "Valérie Pécresse doit comprendre qu'il faut tourner la page, repartir à zéro", confirme -t-on à l'Elysée. La volonté au sommet de l'Etat est d'en finir au plus vite avec la contestation.

FrançoisFillon a fait deux autres gestes sur la réforme de la formation desenseignants, qui est un autre point de crispation. Cette réforme, plusconnue sous le nom de "mastérisation", prévoit l'entrée en fonctionimmédiate des candidats titulaires d'un master qui auront réussi leurconcours d'enseignant. Face aux inquiétudes, le premier ministre aannoncé la mise en place d'"une commission de suivi permanent de la réforme" et le renforcement du "temps de formation complémentaire" pendant la première année.

Tousces gestes suffiront-ils à sortir de la crise ? Pour l'heure lesréactions restent très prudentes. Dans un communiqué, la CPU s'estmontrée satisfaite des "avancées", tout en restant réservée :elle attendra le 5 mars pour se prononcer, le temps de voir commentévoluent les discussions et de vérifier que les promesses sont tenues.Le Snesup-FSU, majoritaire dans l'enseignement supérieur, note "quelques inflexions" mais, "pas de nature à sortir de la crise". Quant à participer à la réunion de vendredi, il réserve toujours sa réponse.

Benoît Floc'h