Questions de société

"La France préfère payer (deux fois) pour les articles de ses chercheurs" (rue 89)

Publié le par Vincent Ferré (Source : rue89)

Sur ce sujet, on pourra consulter une vidéo de PhDcomics  et surtout, prendre connaissance de HAL, où les auteurs, chercheurs, docteurs... sont invités à déposer leurs articles, chapitres et productions scientifiques : "L'archive ouverte HAL-SHS (Sciences de l’Homme et de la Société), est destinée au dépôt et à la diffusion d'articles scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d'enseignement et de recherche français ou étrangers, dans toutes les disciplines des sciences humaines et de la société."
 

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[lire l'article sur rue 89]

"Au lieu de donner à tous l’accès aux travaux de ses scientifiques – qu’elle a financés –, la France choisit de verser 172 millions d’euros à un éditeur néerlandais. [...]

La France n’a plus d’argent pour ses universités. Mais elle en a pour les éditeurs.
Tandis que les présidents d’université apprennent que leur dotation est amputée de 400 millions d’euros, le ministère de la Recherche s’engage, dans le plus grand secret, à payer 172 millions d’euros au leader mondial de l’édition scientifique [...] [pour] racheter pendant cinq ans des publications déjà payées par le contribuable pour les rendre accessibles... à leurs auteurs.

Le travail de bénévoles

Le marché de l’édition scientifique est un secteur peu commun : ceux qui créent de la valeur ne sont jamais rémunérés ; au contraire, ils paient souvent pour voir leurs productions publiées. Les auteurs ne touchent rien sur leurs articles ; l’évaluation par les pairs est réalisée bénévolement.

Ce travail considérable est indirectement financé par l’argent public. L’écriture d’articles et la participation à des comités de lecture font partie des activités attendues des chercheurs et donnent lieu à des crédits de recherche, financés par le contribuable.

La publication scientifique est organisée autour de quelques maisons d’édition privées. Elles tiennent les journaux où les résultats des recherches sont publiés. Chaque journal a un comité éditorial, recevant les potentielles contributions ; celles-ci sont ensuite envoyées à des scientifiques bénévoles qui effectuent la revue par les pairs. C’est sur la base de leurs commentaires et retours que l’on décide si un article sera finalement publié ou rejeté et renvoyé à ses auteurs. En cas d’acceptation de l’article, ses auteurs doivent souvent s’acquitter d’une somme donnée afin que la publication se fasse.

Ces revues sont rarement accessibles gratuitement. Les éditeurs vendent l’accès à ces mêmes articles aux bibliothèques universitaires et aux laboratoires de recherche. Les ressources financières pour la publication proviennent des crédits de recherche accordés aux laboratoires ; les accès aux revues sont achetés au niveau de l’institution. Dans les deux cas, les subventions sont publiques.

Aussi bien les recherches publiées que ce droit de lire sont essentiellement financées sur fonds publics. Ces derniers auront donc été versés à [...] deux fois : une première fois pour publier, une deuxième fois pour lire.

[...]

Ailleurs en Europe, pourtant...

Depuis une quinzaine d’années, un grand mouvement international s’est développé en faveur du libre accès aux publications. Il s’agit de les rendre accessibles et réutilisables à tous, non seulement aux chercheurs, mais à tout le monde.

Les chercheurs n’ont en effet aucun intérêt au maintien du système actuel. Ne donnant pas lieu à rétribution, le droit d’auteur n’est qu’une fiction pour perpétuer les droits de l’éditeur. Non seulement cette captation limite l’accès aux publications scientifiques ; elle empêche même le chercheur de réutiliser son propre travail, car il a cédé ses droits lors de la signature du contrat de publication.

D’autres pays européens montrent la voie.

- l’Allemagne a édicté l’année dernière une loi limitant les droits d’exclusivité de l’éditeur à un an : passé ce délai, la publication peut être rediffusée en libre accès ;

  -  les Pays-Bas viennent d’interrompre avec fracas une négociation avec [...] . Le gouvernement néerlandais soutient en effet pleinement les revendications des chercheurs et des bibliothécaires, qui appellent à diffuser la totalité des productions scientifiques en libre accès. [...]