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L'esclavage colonial dans les musées européens : mises en récit et regards d'artistes

L'esclavage colonial dans les musées européens : mises en récit et regards d'artistes

Publié le par Marc Escola (Source : Renéee Gosson)

APPEL A CONTRIBUTIONS

PROJET EDITORIAL / COLLOQUE

L'esclavage colonial dans les musées européens : mises en récit et regards d'artistes

BOOK PROJECT / COLLOQUIUM

Colonial Slavery in European Museums: Arts and Representations

 

“Les décors et installations éviteront le style de reconstitution réaliste, qui ne rend compte de rien du tout, car il n’approchera jamais la cruauté des ventres des bateaux et des antres des Plantations.” -Édouard Glissant. Mémoires des esclavages. La fondation d’un centre national pour la mémoire des esclavages et de leurs abolitions. Gallimard, 2007. 153-4.

“[W]e might ask if a museum, as an institution that is profoundly marked by the fantasy of modernity, and whose postmodern trimmings only double its capacity to create a fiction nourished by the West, is a suitable tool for voicing the complex cultural structure born out of slavery …. [T]he slave’s experience is diametrically opposed to that of the museum, since slavery contains within it the ‘scandalous’ version of the very modernist project that the museum works to consecrate." -Christine Chivallon. “Representing the Slave Past : The Limits of Museographical and Patrimonial Discourses” in Nicola Frith and Kate Hodgson, eds., At the Limits of Memory : Legacies of Slavery in the Francophone World. Liverpool University Press, 2015. 43-44.

Sous la direction des professeurs Anne-Claire Faucquez (Université Paris 8), Renée Gosson (Bucknell University, Pennsylvanie), Androula Michael (Université Jules Verne Picardie, Amiens) 

À la croisée des chemins politiques entre les institutions étatiques et les associations qui réclament un renforcement de la mémoire, de la vérité et des héritages coloniaux, les institutions muséales qui parlent de l'esclavage ont historiquement renforcé les discours patrimoniaux qui célèbrent les abolitionnistes européens et neutralisent les prétentions à des mémoires alternatives.

Dix ans après le colloque international "Exposer l'esclavage-méthodologies et pratiques" (Musée du Quai Branly, 11-13 mai 2011), et au milieu des récents appels à "décoloniser" les musées, notre collection cherche à examiner la représentation de la traite négrière coloniale et de l'esclavage dans les contextes muséaux européens. Notre collection se propose d'examiner dans quelle mesure les musées européens qui présentent la traite des esclaves, l'esclavage et leurs abolitions ont répondu à de nombreuses questions soulevées lors de ce colloque par les directeurs de musées, les chercheurs et les artistes. Étant donné la récente explosion des protestations mondiales contre la brutalité policière raciste et la profanation de statues et de monuments symbolisant le racisme, quels autres changements ces musées envisagent-ils ?

De quelle manière le Musée international de l'esclavage de Liverpool, les Musées de Bristol, ou de Glasgow, le Musée d'histoire de Nantes, le Musée d’Aquitaine de Bordeaux, le Musée du Nouveau-Monde de la Rochelle, le Tropenmuseum ou le Rijksmuseum d'Amsterdam, pour n’en citer que quelques uns, narrent-ils l'esclavage dans leurs expositions permanentes et temporaires et comment cela a-t-il évolué au fil du temps ? En l'absence d'objets physiques appartenant aux esclaves, nous sommes particulièrement intéressés par les stratégies muséographiques que les musées mettent en œuvre pour représenter les horreurs finalement indicibles et non représentables de la traite des esclaves et de la plantation.  Par exemple, quel rôle l'art et les artistes contemporains jouent-ils dans les expositions permanentes ou temporaires pour représenter les expériences silencieuses et oubliées des esclaves ? De quelle manière décolonisent-ils ou, comme le dit Christine Chivallon, "scandalisent-ils" l'espace intrinsèquement et peut-être inévitablement occidental qu'est le musée ? Comment l'art se souvient-il différemment, rompant ainsi avec les récits muséographiques nationaux qui maintiennent une hiérarchie de la mémoire et célèbrent superficiellement la cohésion sociale multiculturelle ? 

Enfin, comment l'art aborde-t-il ou peut-il aborder les écarts entre l'histoire et la mémoire et relier le passé de l'esclavage à son héritage culturel, racial, économique et social actuel ? De quelle manière ces œuvres d'art, et les musées qui les "détiennent", incitent-ils les visiteurs à voir et à se rapprocher de ces liens et à s'engager dans la justice sociale ? En particulier en ce moment où, en pleine pandémie mondiale qui a accentué les disparités raciales dans les soins de santé, des protestations mondiales contre la brutalité policière (Black Lives Matter) et la profanation internationale de statues et de monuments liés à l'esclavage, quel rôle le musée devrait-il jouer pour faire évoluer les sociétés vers la postcolonialité ?

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Nous recherchons des contributions - théoriques et/ou descriptives - d'universitaires, de conservateurs et d'artistes sur des sujets tels que:

- Les muséographies de l'esclavage colonial dans les espaces muséaux européens (Au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en France et dans la Péninsule ibérique, Espagne et Portugal)

- L'utilisation de la “muséohistoire” pour interroger la mise en scène et la narrativisation des pièces de musée sur l'esclavage colonial

- Le rôle de l'art dans les expositions permanentes et/ou temporaires sur l'esclavage colonial

- Les limites des discours muséographiques/patrimoniaux pour représenter l'expérience de l'esclave, l’esclave est-il “figure de l’anti-musée” (Achille Mbembe)?

- L'utilisation de muséographies alternatives (technologies numériques, multimédia, interactives, immersives, expositions multisensorielles, musées en ligne) pour compléter, questionner et remettre en question les expositions traditionnelles

- Le rôle du musée comme agitateur/harmonisateur social pour amener les communautés à comprendre/réconcilier une histoire commune

Ce projet de livre est né d'une série de conférences intitulées "Objets et enjeux des représentations de l'esclavage colonial" / "Objects and Stakes of Slavery Commemoration" :

  • "Scénographies et regards d'artistes" / "Scénographies et rôle(s) de l'art" (Paris 8 ; décembre 2018) ; 
  • "Décolonisation des discours et regards d'artistes" (U. de Picardie, Amiens ; mars 2019) ; et
  • "Retours à l'Afrique" / "Retours to Africa" (Université Dschang, Cameroun, novembre 2019).

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Les auteurs seront invités à présenter leurs contributions lors de notre prochain colloque "Objets et enjeux de la commémoration de l'esclavage" : Mapping Slavery Memories and Artistic visions" / "Objets et enjeux des représentations de l'esclavage colonial : Cartographies des mémoires et regards d'artistes" -- qui se tiendra au Musée d'Art et d'Histoire Paul Eluard de la ville de Saint Denis dans le cadre du projet Africa2020 (reporté) avec l'Institut Français. Si les conditions sanitaires ne nous permettent pas de nous réunir, ce colloque aura lieu en distanciel.

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Calendrier du projet :

1. 1er octobre 2020 : Veuillez envoyer un résumé de 250-300 mots en plus d'une biographie de 50-100 mots à slaveinthemuseum@gmail.com. Les articles peuvent être rédigés en français ou en anglais. Vous recevrez une réponse mi-octobre.

2 : Début avril 2021 : Les auteurs des propositions retenues soumettront leurs contributions (de 3 500 à 8 000 mots). Nous acceptons tout type de contributions, de longueurs et de formats différents.

3 : Mai 2021 : Organisés par thèmes de chapitre, les contributeurs seront invités à lire/commenter leurs travaux respectifs avant notre colloque.

4 : 10-11 juin 2021 : Colloque international “Mapping Slavery Memories and Artistic visions” / “Cartographies des mémoires et regards d’artistes”- dans lequel les contributeurs feront une courte présentation de 10 min en lien avec les chapitres des autres membres de leur atelier et en lien avec le projet du livre. (Ouvert au public.)

5. Mi-juillet 2021 : Envoi des versions finales des contributions.

Les participants sont encouragés à inclure des illustrations pour accompagner leurs chapitres.