"Être et agir"
Interstudia no 23/2018
Alma Mater, 2018
EAN13 : 20653204
TABLE DES MATIÈRES
Carmen-Ştefania Stoean
Agir dans et par le discours universitaire écrit. Une approche modulaire / 17
Felicia Dumas
Être et agir dans la littérature de spiritualité chrétienne de langue française / 30
Mahdi Amri
Être et agir dans le discours religieux des prédicateurs religieux islamiques contemporains : le cas de Amr Khaled / 40
Adriana-Gertruda Romedea
Décrire vs Narrer / 49
Gilbert Willy Tio Babena
Corruption et morale. Penser un modèle linguistique holistique / 62
Raluca Galiţa, Elena Bonta
Being and Acting in the Discourse of Street Protests / 76
Meriem Belamri
Analyse comparative des traits distinctifs du pathos dans l’entretien d’écrivains : l’expression de l’affectivité dans/par le discours /84
ÊTRE ET AGIR SUR LE WEB / BEING AND ACTING ON THE WEB / 101Sergio Piraro
Les « nouveaux » médias dans l’enseignement des langues / 103
Abdulrhman Alokla
Le web social et la perspective actionnelle : agir ensemble dans la société cible en tant qu’acteur sociaux / 114
Simina Mastacan
Le ludique comme forme d’action et de représentation sur la Toile / 124
IDENTITÉS ÉNONCIATIVES ET HÉTÉROGÉNÉITÉS DISCURSIVES EN LITTÉRATURE / ENUNCIATIVE IDENTITIES AND DISCURSIVE HETEROGENEITIES IN LITERATURE / 133Cătălina Bălinişteanu-Furdu
When Beauty Meets Decay: Cases of Dandyism, Narcissism and Degeneration of Bodies in J.-K. Huysmans’ “À Rebours” and Oscar Wilde’s “The Picture of Dorian Gray” / 135
Daniela Mirea
Une lecture mythocritique de la coïncidence des contraires dans les fictions de Mircea Eliade et Michel Tournier / 146
Brînduşa Grigoriu
Être et agir dans un roman médiéval : le « Happy End » du Tristan en prose sous un jour pragmatique / 155
Elena Ciobanu
The Dilatory Time of Passionate Discourse in “Othello” / 164
Deniz Aras, Ahmet Beşe,
Identifying Being and Representing by Acting: New Narrative Techniques in Anna Deavere Smith / 173
Mihaela Culea, Andreia-Irina Suciu
Re-enacting Being Authentic. Englishness and Its Simulacra / 185
Hichem Belmokhtar
L’action énonciative comme mécanisme auto-représentationnel dans le métadiscours de Tlemcen ou les Lieux de l’écriture, L’Aube Ismaël, L’Arbre à dires, Simorgh et Laëzza de Mohammed Dib / 197
Elodie Peurou
L’attrition dans le discours d’immigrés portugais / 209
Gabriela Andrioai
Teacher-Student Interaction in Language Acquisition / 222
Kévin Raynaud
Étude de la variation de l’oral en classe de FLE / 228
Petre Roman, Despre pasiune în vremuri de libertate (About Passion in Times of Freedom), (Cristina Cîrtiţă-Buzoianu) / 245
Simina Mastacan, Translation and subjectivity (Réflexions sur le traduire), (Cătălina Bălinişteanu-Furdu) / 249
Être et agir - quelques réflexions sur une problématique actuelle
Le binôme Être/Agir dont on se propose de réexaminer la pertinence dans le présent numéro de notre revue se décline, à travers les contributions qui y sont réunies, de plusieurs manières. L’intérêt que les 23 auteurs ont attaché à la proposition thématique que nous avions lancée confirme l’intérêt constant pour la composante dynamique du discours dans les recherches actuelles. Nous sommes d’ailleurs convaincus que c’est important, surtout de nos jours, d’approfondir la réflexion sur le rapport qu’entretiennent les deux dimensions, ontologique et actionnelle, du langage. C’est une nécessité qui nous apparait clairement lorsqu’on tente de saisir le pouvoir performatif de la parole, dans ses différentes formes de manifestation.
Un bref examen des articles proposés montrent d’ailleurs tout de suite que l’analyse peut s’ouvrir à des espaces discursifs des plus variés : le discours universitaire écrit, le discours religieux, le texte littéraire, le discours de la rue, l’interview, les milieux virtuels, l’enseignement des langues, les interactions quotidiennes. Ainsi, les contributions illustrent quelques facettes de la recherche dans les domaines des sciences du langage, de la littérature, de la didactique des langues. L’idée centrale en est que la signification se construit en situation, par un sujet - vu comme instance d’énonciation - qui agit non seulement sur le contexte lui-même, afin de le recréer, mais aussi sur les co-énonciateurs et, finalement, sur soi-même.
Certes, les interrogations portant sur l’aspect ontologique du langage ont été souvent renvoyées à la philosophie du langage. Or le sens n’est pas immanent au texte et l’intervention du facteur extra-linguistique, cet élément « perturbateur », le montre. Nombre de recherches le soutiennent, en insistant surtout sur le caractère dynamique de la construction du sens, en mettant en évidence la dimension pragmatique, le rôle du contexte, situationnel et communicationnel, les caractéristiques des interactions verbale, le rôle de l’implicite et du paraverbal, la fusion des codes… Autant des formes d’action, qui reconfirment l’idée austinienne qu’on peut agir par le moyen du langage. Qu’il ne faut pas dresser des barrières artificielles, comme on le faisait autrefois, entre la parole et l’action : tout au contraire, les deux se présupposent de manière que la parole devienne elle-même, de plus en plus, une forme d’action.
Ce postulat, aujourd’hui presque banalisé, permet non seulement de parler d’actes de langage (de parole ou de discours, en fonction de la perspective embrassée…) mais aussi de repenser la position du sujet, de son « être » discursif. De bien cerner, en même temps, ses responsabilités discursives, les ressorts de ses actions, tout ce qu’il entreprend et qui le fait changer de statut : ce n’est plus un « être » passif, un objet sans identité précise, mais un « être » dynamique, participant actif à un procès linguistique, sémiotique, argumentatif ou discursif.
D’ailleurs, le discours vu comme forme d’action est la perspective privilégiée par la plupart des signataires, vu que toute forme d’action se caractérise par une finalité, par une intentionnalité et se manifeste dans un cadre interactif, donc intersubjectif. Parler, c’est aussi une forme d’action sociale, c’est une idée récurrente dans plusieurs articles.
L’argumentation suppose, elle aussi, un fort rapport avec l’idée d’action dans et par le discours, à travers les formes structurelles mises en œuvre, mais surtout grâce aux effets extra-discursifs qui lui sont attachés (la persuasion n’en est qu’un exemple). Dans ce sens, l’argumentation est une forme d’action sur l’autre, sur ses opinions ou ses convictions.
« Être » se rattache aussi bien à la place de la « réalité » dans une transfiguration discursive que, si l’on prend la valeur substantivale, à la position du sujet, qu’il soit locuteur, énonciateur, être de discours ou porteur d’un éthos marqué du point de vu subjectif. Le sujet existe-t-il dans la langue, ou il n’est qu’une construction, qu’un « être de discours », une image, une voix sur la scène d’énonciation ?
Toutes ces questions, sommairement formulées, ouvrent autant de pistes de recherche que le lecteur va parcourir et approfondir à l’aise dans le présent numéro. C’est toujours l’échange qui nourrit la pensée, qui permet de comprendre et de décrire l’extraordinaire richesse des formes et des contextes observables dans les pratiques langagières les plus diverses.
Simina Mastacan