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Écritures dramatiques en langue française : des textes et des auteur·rice·s. État des lieux d’une séquence théâtrale 2015-2022 (Bordeaux)

Écritures dramatiques en langue française : des textes et des auteur·rice·s. État des lieux d’une séquence théâtrale 2015-2022 (Bordeaux)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Pierre Katuszewski)

APPEL À COMMUNICATIONS

Colloque international
 
Écritures dramatiques en langue française

Des textes et des auteur·rice·s. État des lieux d’une séquence théâtrale 2015-2022
 
29 novembre-1er décembre 2022 Université Bordeaux Montaigne-Théâtre national de Bordeaux Aquitaine
 
Organisé par 
 
Pierre Katuszewski (MCF-HDR, Université Bordeaux Montaigne, UR ARTES)
 
Kevin Keiss (dramaturge, auteur associé à la direction du CDN de Dijon-Bourgogne, PAST, Université Bordeaux Montaigne, UR ARTES)
 

En France, les écritures dramatiques textuelles contemporaines sont foisonnantes et variées à la fois dans le fond et dans la forme et, pourtant, peu de colloques universitaires leur sont consacrés. Quelque peu invisibilisées par la séquence des écritures de plateau, il est à constater un retour en force de l’écriture dramatique ou plutôt de la présence et de l’activité des auteur·rice·s de théâtre au sein des institutions culturelles depuis une dizaine d’années. 
Ce colloque entend mobiliser et réunir des chercheur·se·s et des professionnel·le·s de l’écriture dramatique (auteur·rice·s, éditeur·rice·s, traducteur·rice·s, etc.) afin de réfléchir et d’échanger sur ces écritures très contemporaines.

La période choisie, de 2015 à 2022, est, en effet, volontairement circonscrite afin de penser les écritures les plus actuelles qui, malgré le nombre important de publications et de mises en scène, sont peu étudiées, peut-être trop proches dans le temps ou bien parce que les outils de l’analyse des textes n’auraient pas été assez renouvelés.

2015, c’est à la fois une année pendant laquelle la France est terrassée par des attentats sans précédents et au cours de laquelle le mouvement #MeToo est créé – même s’il faudra attendre 2021 pour qu’un mouvement #MeTooThéâtre voit le jour. La teneur de l’écriture théâtrale s’en voit profondément modifiée. La prise de conscience du manque dramaturgique d’une partie de la population et de périodes historiques a conduit à la production de nombreux textes et spectacles. Le théâtre voit une nouvelle génération d’auteur·rice·s émerger qui s’empare avec force des questions de genre, de sexualité, décoloniales et postcoloniales, écologiques, etc. mais aussi des problématiques comme les violences policières, migratoires, faites aux femmes, ou encore la précarité et la ruralité. Apparaissent des personnages et/ou des interprètes racisé·e·s pour parler du racisme, de la décolonisation et de ses répercussions dans des trajectoires intimes, familiales, traditionnelles, nationales. On peut citer par exemple Points de non-retour d’Alexandra Badea (L’Arche, 2018-2022), Féminines de Pauline Bureau (disponible sur le site de la compagnie des Anges), Désobéir de Julie Berès, Kevin Keiss et Alice Zeniter (Actes-Sud Papiers, 2022), Saïgon de Caroline Guiela N’Guyen (Théâtre national de Bretagne et compagnie les Hommes Approximatifs, 2017), Neuf mouvements pour une cavale de Guillaume Cayet (Éditions théâtrales, 2020), Le Iench d’Eva Doumbia (Actes-Sud Papiers, 2020), Pistes de Penda Diouf (Quartett, 2021), Au cœur de la violence d’Édouard Louis et Thomas Ostermeier (Seuil, 2019), Flamme(s) d’Ahmed Madani (Actes-Sud Papiers, 2017), Les Rêveurs de Christophe Pellet (L’Arche, 2020), etc.

On peut noter des initiatives comme le festival Auteurs en tandem d’Artcena (rencontre entre « deux auteur·rice, l’un de théâtre, l’autre de cirque ») ou l’Académie Totem(s) initiée en 2015 par Roland Auzet et la Chartreuse, Centre National des Écritures du Spectacle, pour ouvrir des espaces concrets de recherche dans le domaine de la musique d’aujourd’hui et du théâtre musical. Les résidences à la Chartreuse entre jeunes auteur·rice·s et compositeur·rice·s aboutissent à des compagnonnages par duo pour la création d’un projet commun d’opéra de chambre ou de théâtre musical.
 
Soutiens institutionnels

Si les institutions théâtrales subventionnées fonctionnent majoritairement selon le modèle de l’échange et de la sélection de quelqu’un·e·s (Joëlle Gayot, Centres dramatiques nationaux. Maisons de l’art, du peuple et de la pensée, Les Solitaires Intempestifs, 2019), le réseau des théâtres nationaux, centre dramatiques nationaux, scènes nationales, scènes conventionnées, etc., restent des espaces favorables à la mise en lumière de ces écritures inédites. Un renouvellement des directions ces dernières années a permis une plus grande visibilité des auteur·rice·s et la mise en lumière d’un véritable désir de découverte des écritures contemporaines par des publics qu’on disait attachés aux classiques. Certains directeurs de théâtre, comme Stanislas Nordey avec la revue Partage, animée par Frédéric Vossier, dédiée aux auteur·rice·s, impulse une dynamique très favorable aux auteur·rice·s de théâtre. Dans plusieurs centres dramatiques nationaux, des auteur·rice·s sont associées pour plusieurs années, comme à la Comédie de Caen, au CDN de Normandie-Rouen, au Théâtre des Ilets-CDN de Montluçon, au TnBA à Bordeaux, au Préau à Vire, au CDN de Dijon-Bourgogne pour ne citer qu’eux. 
Les formations ne sont pas en reste avec la section écriture dramatique de l’ENSATT dirigée par Marion Aubert et Pauline Peyrade et le parcours auteurs et autrices de l’École du Nord. À l’université, plusieurs masters d’écriture littéraire existent (université de Cergy, université de Toulouse 2, le master FABLI (Fabrique de la littérature) à l’université de Limoges, le master Métiers de l’écriture à l’université de Toulouse Jean Jaurès, le parcours « Littératures et création » du master Lettres et Création littéraire à l’université Clermont Auvergne).

Les lieux de résidences se sont développés ainsi que les aides financières et dramaturgiques à l’écriture avec l’association à mots découverts dont l’« objectif est d’offrir aux auteurs une expertise dramaturgique ainsi qu’un espace d’accompagnement critique où l’écriture se questionne et s’éprouve en lien avec l’acteur et le plateau, en amont de la création » ; la présence de Catherine Dan à la direction de La Chartreuse-Centre National des Écritures du Spectacle entre 2013 et 2020 a largement contribué au développement de l’écriture dramatique ; la transformation du CnT en Artcena sous la direction de Gwénola David ; la pérennisation de Théâtre Ouvert malgré sa délocalisation et le travail de Caroline Marcillac et Pascal Gâteau ; une politique de soutien des auteur·rice·s de théâtre à la SACD avec les Sujets à Vif à Avignon, etc.

Les éditeur·rice·s qui consacrent tout ou partie de leur activité à l’édition de textes dramatiques œuvrent avec constance mais non sans une grande difficulté à la diffusion des écritures contemporaines, on citera Actes Sud-Papiers, L’Arche, Les Solitaires intempestifs, Les Éditions Théâtrales, Lansman, Espace 34.
 
Actions d’envergure : les EGEET
 
En 2018, un mouvement sans précédent s’organise, rassemblant la quasi-totalité des auteur·rice·s du théâtre public mais aussi certain·e·s auteur·rice·s du théâtre privé, en réaction à un dossier dans Libération : « A-t-on encore besoin des auteurs ? ». Ce qui ne devait être qu’une réponse par des échanges de mails prend de l’ampleur : des réunions informelles sont mises en œuvre (dans des associations, des CDN, des cafés, etc.) puis structurées en association : Les États Généraux des Écrivains et Écrivaines de Théâtre (EGEET). Ils sont lancés le 7 janvier 2019 au Théâtre National de la Colline. Soutenus par la Direction Générale de la Création Artistique, Artcena, La Chartreuse-CNES et la SACD, ils ont réuni 200 écrivaines et écrivains de théâtre ayant pour objectif d’établir un état des lieux de leurs pratiques et de devenir une force de proposition pour le théâtre et l’écriture théâtrale. Lors des États Généraux des 11, 12 et 13 juillet 2019 à la Chartreuse-CNES de Villeneuve-lez-Avignon, dix tables rondes se sont tenues afin d’aboutir à 54 préconisations. Ainsi, les EGEET mettent en avant la place du texte comme fondement dans la chaîne de production artistique et la nécessité de la présence des écrivains et écrivaines de théâtre dans les structures culturelles.

Durant trois ans, le travail mené par un petit comité de pilotage du mouvement et signé par plus de 200 écrivaines et écrivains a conduit à l’élaboration de trois chartes et de trois préconisations fortes encouragées par le ministère de la Culture et de la Communication visant à revaloriser la présence et les aides allouées aux auteur·rice·s :

- Favoriser le fait que chaque théâtre associe nécessairement un·e auteur·rice.
- Encourager les structures aux soutiens des auteur·rice·s sur trois étapes : écritures, montage, diffusion.
- Mettre en place des dispositifs de coordination et de promotion qui seraient exclusivement dédiés aux écritures contemporaines. 
 
 Rencontres, recherches et publications
 
C’est dans ce contexte spécifique que quelques actions sont entreprises sur le terrain.

Ainsi, l’auteur, acteur et metteur en scène Lazare organise quatre rencontres autour des « Récits manquants » : « Après les attentats du 13 novembre, nous avons voulu inviter des artistes qui ont envie de repenser ce monde de division. Les écarts se creusent. La précarité, l’oubli des cités ou de la ruralité disent des manques et ces manques se comblent par d’autre chose d’inquiétant. Ensemble, nous avons voulu réfléchir à ces récits manquants, à ce qui peut s’inventer… ». Les rencontres ont lieu au Théâtre Louis Aragon à Tremblay-en-France, à Théâtre Ouvert, au CNSAD et à la MC93 de Bobigny. Les thèmes sont « L’État d’urgence culturel », « Les récits manquants sur les plateaux », « Différences et modèle dominant » et « L’hospitalité des théâtres ».

Ces rencontres qui réunissent des auteur·rice·s, metteur·se·s en scène, acteur·rice·s, enseignant·e·s, sociologues, etc., donnent lieu à des écrits et textes manifestes de différents auteur·rice·s et praticien·ne·s de la scène (Lazare, Mario Batista, Dieudonné Niangouna, Catherine Boskowitz, etc.).  

Des publications sont initiées par des auteur·rice·s et des universitaires. En 2020, Pauline Bouchet coordonne le numéro 4 de la revue Percées (Explorations en arts vivants) intitulé Dramaturgies françaises contemporaines (2000-2020) et Enzo Cormann un ouvrage de bilans et de perspectives de la formation du département d’écriture dramatique de l’ENSATT (fondé en 2003) : Pensée plurielle, écritures singulières. Pédagogie critique et collective de l’écriture dramatique (Les Solitaires Intempestifs). En 2019, Thibault Fayner, auteur et universitaire, publie Apprendre à écrire pour le théâtre. Histoire et méthodes des enseignements de l’écriture théâtrale en France (Les Solitaires Intempestifs). Du côté de la dramaturgie, en 2020, à l’initiative de Catherine Dan, dix auteur·rice·s « répondent par des textes courts et percutants à la question : "Écrire le réel, pour vous, qu’est-ce que cela implique, dans votre rapport d’artiste au monde, aux autres, au théâtre, et surtout à l’écriture ?" » (Écrire le réel, Éditions Théâtrales). La revue Pratiques. Linguistique, littérature, didactique consacre en 2021 un numéro aux écritures contemporaines : Théâtre contemporain : écritures et représentations (sous la direction de Delphine Edy et André Petitjean). En 2017, la revue Théâtre/Public consacre un numéro aux Nouvelles écritures dramatiques européennes.
Cette liste n’est pas exhaustive mais le constat est flagrant : il existe peu de publications dédiées aux écritures théâtrales contemporaines. Ce colloque permettra d’enrichir les recherches et de fournir un état des lieux des écritures textuelles théâtrales contemporaines. Une publication des actes du colloque est prévue, enrichie d’entretiens d’auteur·rice·s, d’éditeur·rice·s, etc.
 
Les axes suivants seront privilégiés pour les communications (30 minutes environ) : 
 
1) Genres, sexualités, transidentités dans les écritures théâtrales contemporaines.
 
2) Post et décolonialisme dans les écritures théâtrales contemporaines.
 
3) Les conflits sociaux, luttes/transfuges de classes, conflits patron.ne.s/salarié.e.s dans les écritures théâtrales contemporaines.
 
4) L’écologie dans les écritures théâtrales contemporaines.
 
5) Les auteur·rice·s étranger·e·s en langue française.
 
6) Les professions : auteur·rice, éditeur·rice, traducteur·rice, etc.
 
7) Être auteur·rice dans les institutions et hors des institutions.
 
8) Les formations en écriture dramatique.
 
9) Traduction et diffusion des textes théâtraux contemporains français en langue étrangère.
 
10) Enseigner les écritures contemporaines théâtrales dans le secondaire et dans le supérieur. 
 
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Les propositions de communications d’environ 2000 signes (espaces compris) accompagnées d’un titre provisoire et d’une courte bio-bibliographie sont à envoyer avant le 1er avril 2022 aux adresses suivantes : kevinkeiss@yahoo.fr, pierre.katuszewski@u-bordeaux-montaigne.fr
 
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Comité scientifique 
 
Leïla Adham, MCF, Université de Poitiers
 
Sylvain Diaz, MCF, Université de Strasbourg
 
Raphaëlle Doyon, MCF, Université Paris 8-Vincennes-Saint-Denis
 
Thibault Fayner, auteur, MCF, Université de Poitiers
 
Omar Fertat, MCF, Université Bordeaux Montaigne
 
Bérénice Hamidi-Kim, Professeure, Université Lumière Lyon 2
 
Pierre Katuszewski, MCF-HDR, Université Bordeaux Montaigne
 
Kevin Keiss, dramaturge, auteur associé à la direction du CDN de Dijon-Bourgogne, PAST, Université Bordeaux Montaigne
 
Barbara Métais-Chastanier, autrice, dramaturge, MCF Université Albi
 
Margot Reyraud, doctorante, Université Bordeaux Montaigne.