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Ecrire, penser l'instabilité dans les littératures d'expression française (Gafsa)

Ecrire, penser l'instabilité dans les littératures d'expression française (Gafsa)

Publié le par Université de Lausanne (Source : sihem hasni)

Le département du français de l’Institut Supérieur des Etudes Appliquées en Humanités de Gafsa

organise une journée d’études :

Écrire, penser l’instabilité dans les littératures d’expression française

Le 8 avril 2020 à l’Institut Supérieur des Etudes Appliquées en Humanités de Gafsa (Université de Gafsa).

 

Argumentaire

On se propose de prendre pour objet d’étude la notion d’instabilité dans les littératures d’expression française. L’instabilité sous toutes ses formes d’incertitude, de vicissitude, de  versatilité…est au cœur du discours littéraire : elle en est un élément constitutif. En répercutant les bouleversements incessants de la condition humaine, l’œuvre littéraire ne saurait être indemne des circonstances historiques. Par exemple, au XXème siècle c’est dans les décombres de l’Europe en guerre, des génocides, des illusions sur l’humanisme, que la majorité des œuvres littéraires s’enracinent. Celles-ci développent leur fonction éthique et idéologique en sapant toute forme de certitude morale, pratique sociale, lucidité intellectuelle, sûreté du langage et de la logique…

L’instabilité trouve son expression dans le statut incertain du personnage, particulièrement dans les œuvres romanesques et dramatiques. Le théâtre de Samuel Beckett offre, par exemple, un spectacle saisissant  de l’instabilité  des personnages qui se sentent constamment menacés dans leur unité psychologique et physique et qui sont le plus souvent incapables d’agir ou même de bouger de peur de  se briser en mille morceaux. Le je est du coup contaminé par cette instabilité ; il est devenu impensable, innommable, impossible chez Beckett : « assez de cette putain de première personne » déclare  le narrateur de L’innommable (Les Éditions de Minuit, 1969, p.139).

L’instabilité est celle également de la pensée de l’écrivain et du sens de son œuvre, tous deux fluctuants et indécidables, générateurs d’une œuvre déconcertante. Celle-ci s’avère sujette à de multiples anamorphoses et métamorphoses créant ainsi chez son récepteur un certain malaise, oscillant entre la volonté de construire un sens monovalent et le plaisir de s’abandonner au vertige. L’œuvre romanesque de Robbe-Grillet nous offre un bel exemple des bouleversements de la structure, de l’action, de l’intrigue… À l’encontre de la linéarité du récit, il multiplie les procédés de rupture – éclatement de l’histoire en plusieurs fragments, répétitions de la même scène, non respect de l’ordre chronologique – qui brouillent la narration. Là s’imbriquent deux tendances de la narration : d’un côté répéter, préciser et de l’autre gauchir ou effacer. D’où l’abondance des ruptures brutales, des retours en arrière, des répétitions qui empêchent la construction d’un sens monovalent. C’est en introduisant le désordre dans le texte, en laissant libre cours à l’incertitude, à l’indécidabilité du sens et aux contradictions que l’œuvre littéraire se trouve travaillée en profondeur par des interrogations sur ses limites, sur celles de la morale, de la pensée, de l’identité, etc.

Cette instabilité se traduit également au niveau  générique et transgénérique. En effet,  certains écrivains n’hésitent pas à mêler les diverses formes d’écriture et à brouiller les codes esthétiques. Divers systèmes sémiotiques sont ainsi adoptés dans la même œuvre romanesque : le narratif est contaminé par  le musical (Jean-Christophe  de Romain Rolland), par  le pictural (Autumn de Philippe Delerm), par le théâtral (Jean Barois de Martin du Gard), par le poétique (Bangkok blues de Hédi Bouraoui ) etc. Ce métissage engendre un nouveau mode d’écriture fondé sur l’hétérogène ainsi que sur le rejet du discours monologique.  C’est que « l’hybride se construit, comme le note Jean Bessière, contre l’unidimensionnel de l’histoire, de l’écrit, de la communication sociale » (Jean Bessière, « Hybrides romanesques, interdiscursivité et intelligibilité commune : Claude Simon, Italo Calvino, Botho Strauss », Hybrides romanesques,  fiction (1960-1985), sous la direction de Jean Bessière, Presses universitaires de France, 1988, p. 133) et donc contre toutes les formes d’écriture traditionnelles fondées sur le respect de l’ordre établi et sur la stabilité.

Par ailleurs, la volonté d’écrire et de penser l’instabilité permet une manipulation de la langue et donne naissance à deux paradigmes: l’hybridité linguistique et le subvertissement de la langue. Ainsi, cette réflexion se caractérise par un style tendant à changer perpétuellement, une interdiscursité, une fragmentation, une rupture de l’ordre canonique des mots émanant de l’articulation entre le défait de la régulation et l’hybridité et l’irrégularité entre les contraintes syntaxiques et la prise en charge énonciative. La construction du discours devient alors un moyen qui bannit le caractère linéaire du langage, refuse de cacher les traces de la création et projette l’écriture dans un nouveau mode de représentation, brisant la traditionnelle mimésis, hybridant mots et images, fiction et réalité et interrogeant l’hybridité linguistique non seulement  dans tous ses domaines : stylistique, sémantique, syntaxique, etc., mais aussi l’hybridation des formes selon des enjeux fondamentaux reflétant l’inconstance de la pensée. La langue devient donc comme le souligne Dominique Soulès « un outil avec lequel un univers peut être construit avec le texte». Désormais, cette hétérogénéité conséquente de l’instabilité pourrait affecter l’épousement du discours dans sa continuité et l’esthétique de l’œuvre du XXe siècle.

Les contributions pourraient porter sur les axes suivants :    

1/ L’instabilité dans l’œuvre littéraire, expression de la condition humaine.

2/ L’œuvre littéraire et l’inconstance de la pensée.

3 / L’œuvre littéraire et les fluctuations du sens. Cette entrée est plus axée sur la poétique.

4/ L’instabilité générique et transgénérique.

5/ L’instabilité et réception de l’œuvre  littéraire.

6/ L’(in)stabilité linguistique et l’évolution de la langue

7/ Les effets de l’instabilité au niveau esthétique et éthique.

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Comité scientifique

Salwa Béji, (Université de Sousse)

Arselène ben Farhat, (Université de Sfax)

Mohamed Bouattour, (Université de Sfax)

Mokhtar Farhat, (Université de Gafsa)

Samia Kassab (Université de Tunis)

Gleya Ksira, (Université de la Manouba)

Naima Meftah, (Université de Sousse)

Mustapha Trabelsi (Université de Sfax)

Farah Zaiem, (Université de la Manouba)

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Responsables

Sihem Hasni, Neila Manai et Béchir Kéhia

Comité d’organisation

Mohamed Anis Abrougui, Noureddine Ameur, Monia Bouali, Wejdène Bousleh, Manel Brahmi, Najeh Ellouni, Walid Hamdi, Jamil Ghouaidia, Taoufik Kahri, Béchir Kéhia, Hatem Krimi, Neila Manai et Awatef Sdiri.

Calendrier

  • 15 février 2020 : date limite de soumission des propositions de communication
  • 28 février 2020 : notification de l’acceptation ou du refus
  • 30 mars 2020 : réception des textes définitifs des auteurs : les participants doivent envoyer leurs textes complets et définitifs.
  • 08 Avril  2020 : tenue de la journée

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Modalités de soumission des propositions de communication

  • Les propositions de communications (durée : 20 minutes + 10 minutes de discussion) sont à envoyer simultanément aux adresses électroniques suivantes : m_neilafr@yahoo.fr et hasni0122000@yahoo.fr