
Créer et écrire pour l’enfance et la jeunesse francophone afrcicaine et diasporique. Biennale des littératures africaines 2026 (Bordeaux)
Colloque international
Biennale des littératures africaines 2026.
Créer et écrire pour l’enfance et la jeunesse francophone africaine et diasporique
19-20 novembre 2026 – Université Bordeaux Montaigne
CLEFF- Cité des Langues étrangères, du Français et des Francophonies
Organisateurs : Alpha Barry – Yamna Chadli Abdelkader – Sylvère Mbondobari
CELFA-Plurielles UR 24142 et Chaire DiANA’T LAM UMR 5115
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Que peut la littérature d’enfance et de jeunesse en contexte post-colonial et transnational ? Comment exprime-t-elle une conscience africaine et/ou afrodiasporique ? Qui l’édite ? Qui la lit ? Qui la commente ? Telles sont les principales questions soulevées par le colloque international sur les littératures pour l’enfance et la jeunesse en contexte africain et diasporique.
Le champ des études de la littérature d’enfance et de jeunesse francophone africaine, notamment dans ses expressions diasporiques, est relativement peu exploré. Et pourtant, le corpus dédié à ce sous-champ de la littérature francophone est de plus en plus important et très diversifié. Outre la bande dessinée inspirée du vécu et de l’histoire des afrodescendants, on retrouve des recueils de contes pour enfants, des romans à énigme, des récits autobiographiques, des récits de science-fiction, des comics, etc. Les textes et les films de la littérature d’enfance et de jeunesse afrodiasporiques portent en eux les traces d’un vécu et d’une histoire spécifique, transnationale et transculturelle que les auteurs cherchent à transmettre, comme l’indique la collection Je découvre mon héritage. La foi qui anime certains auteurs (Tadjo, Condé, Kanor, etc.) est le reflet d’un engagement qui dépasse la simple recherche esthétique pour donner forme à une quête identitaire et à une attente de plus en plus significative. Comme l’indique Mélissa Francisco, responsable de la collection Je découvre mon héritage : 6 souverains africains destinée aux 5 à 10 ans, « Au fil des récits, les enfants découvriront la richesse et la grandeur de leur héritage ! ». Les nuances propres et différentielles des écrivains afrodiasporiques sont dans les caractères nécessairement uniques qu’ils tiennent de leurs trajectoires et de leurs époques marquées par les revendications identitaires et la racialisation des rapports sociaux et interculturels. Leur élan vers la réalité afrodiasporique est plus résolu, plus hardi et, parfois, plus offensif que la littérature de migration dite « classique » ; leur sentiment humaniste et universaliste apparaît davantage renforcé par l’affermissement de la conscience diasporique chez les afrodescendants dans un contexte de mondialisation de la littérature (Perrot). En ce sens profond, la littérature de l’enfance et de la jeunesse afrodiasporique touche à des domaines aussi différents que l’histoire coloniale, la situation post-coloniale en Afrique et en Europe, les questions d’immigration, les identités afropéennes, le multiculturalisme, etc. Elle s’inscrit aisément dans la continuité de la tendance postcoloniale de la littérature afrodiasporique, dont elle ne fait qu’appliquer plus largement les principales thématiques à un public plus jeune. Elle charge le langage le plus spontané d’un imaginaire de la condition afrodiasporique. L’on assiste donc encore ici à la fois à un retour à l’histoire et aux mythes des mouvements de la diaspora africaine et à une prise en charge des grandes problématiques de la présence africaine en Europe, en Amérique du nord et en Amérique du Sud (Bébel-Gisler, Fagour-Daïri, etc.).
Habités par une « conscience diasporique » très affirmée, les auteurs et autrices cherchent souvent à combler le vide laissé par l’industrie du livre de jeunesse occidentale en proposant des héros et des héroïnes afrodescendant.es (Véronique Tadjo, Serbin, Condé, etc.). La problématique principale retenue est celle de la construction identitaire, aspect majeur de la littérature d’enfance et de jeunesse francophone africaine, notamment dans ses expressions diasporiques. Il s’agit là, à la fois, de montrer les dynamiques littéraires et culturelles contemporaines à partir d’un genre relativement peu étudié (du point de vue des contenus comme de la forme), et d’explorer une question de sociologie littéraire où se greffent bien plus que de simples nuances entre les postures et les prises de position des écrivains, des éditeurs et des critiques.
Une attention particulière est également à porter aux modalités concrètes de réception et d’appropriation de cette littérature par ses publics cibles : enfants, familles, enseignants, éducateurs, médiateurs du livre. La manière dont ces œuvres sont introduites dans les espaces éducatifs et culturels (école, bibliothèque, cercle familial, réseaux sociaux) participe à la construction identitaire et culturelle des jeunes lecteurs. De même, les enjeux liés à leur reconnaissance critique et à leur intégration dans les corpus institutionnels (programmes scolaires, revues spécialisées, prix littéraires) soulèvent des questions essentielles sur la légitimité de cette littérature et sa capacité à influer sur les imaginaires collectifs. En outre, la circulation transnationale de ces œuvres (parfois traduites, parfois autoéditées, souvent diffusées de manière informelle ou numérique) pose la question de leur visibilité dans l’espace francophone et au-delà. Dans quelle mesure les logiques éditoriales globalisées favorisent-elles ou freinent-elles leur diffusion ? Cela suppose souvent d’observer de près l'esthétique visuelle de ces œuvres : le rôle de l’image (illustration, bande dessinée, graphisme, animation) dans la construction d’une identité africaine ou afrodiasporique visuelle est fondamental, en particulier dans les albums pour enfants ou les romans graphiques. Par ailleurs, la place de l’enfant comme sujet de parole, de mémoire ou de résistance (que ce soit par le biais de la narration à la première personne ou par l’oralité transmise) interroge les modalités d’énonciation spécifiques à cette littérature. Quels types de voix enfantines sont mobilisées pour dire l’exil, la mémoire, la transmission ?
L’intérêt de ce colloque international est de signaler une évolution importante de la littérature francophone africaine pour l’enfance et la jeunesse, et en particulier de ses formes afrodiasporiques. S’il est vrai qu’elle reprend à l’histoire des migrations africaines notamment ses grands thèmes, cette littérature produite en Afrique comme dans les diasporas tend en réalité vers la valorisation de l’identité et de la culture africaine plurielle dans un monde globalisé. Les œuvres sont des témoignages frappants des enjeux identitaires, politiques et esthétiques.
Sept axes de recherche
(1) Conditions sociologiques et culturelles de la production des œuvres. Champ éditorial de la littérature de jeunesse notamment dans le contexte diasporique.
(2) Modalités de représentations des réalités spécifiques comme la violence, la marginalité, les conditions sociales et psychologiques des personnages dans les textes.
(3) Configurations narratives et modalités d’une écriture qui se veut à la fois transnationale, le lieu de transmission des valeurs culturelles ancestrales et véhicule des valeurs républicaines.
(4) Poétiques postcoloniales afrodiasporiques : formes et esthétiques de la mémoire, de l’exil et de la filiation. Réinvention des héritages littéraires dans une perspective postcoloniale et diasporique.
(5) Iconotextualité et sémiotique visuelle dans les albums jeunesse francophones : symbolisme, construction d’un imaginaire visuel par des références culturelles africaines et diasporiques.
(6) Réception, critique et reconnaissance institutionnelle des littératures africaines et afrodiasporiques de jeunesse : place dans la critique universitaire, les prix littéraires, les débats publics, et les médias spécialisés.
(7) Pratiques pédagogiques et médiations éducatives : usages de cette littérature dans les systèmes éducatifs francophones (programmes scolaires, bibliothèques, ateliers d’écriture, etc.) et dans les initiatives citoyennes de transmission culturelle.
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Bibliographie indicative
Appadurai, Arjun. Après le colonialisme : les conséquences culturelles de la globalisation. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Françoise Bouillot ; introduction traduite par Hélène Frappat ; préface de Marc Abélès. Paris : Payot, coll. Petite Biblio Payot - Essais, n°560, 2015, 333 p.
Beckett, Sandra L. De grands romanciers écrivent pour les enfants. Montréal : les Presses de l'Université de Montréal ; Grenoble : Éd. Littéraires et linguistiques de l’Université de Grenoble, coll. Espace littéraire - Études, 1997, 317 p.
Foucault, Jean ; Manson, Michel ; Pinhas, Luc, éds. L’Édition de jeunesse francophone face à la mondialisation. Paris : L’Harmattan, coll. Références critiques en littérature d’enfance et de jeunesse, 2010, 299 p.
Keita, Fatou. « L’édition pour la jeunesse en Côte-d’Ivoire : historique et état des lieux », dans : Pinha, Luc. Dir. Situations de l’édition francophone d’enfance et de jeunesse. Op.cit., pp. 205-223.
Levêque, Mathilde. « La littérature d’enfance et de jeunesse : pour une nouvelle épistémologie comparatiste ? », in : Anne Tomiche, éd. Le comparatisme comme approche critique. Tome 3 : Objets, méthodes, et pratiques comparatistes. Paris : Classique Garnier, coll. Rencontres, 314, 453 p. ; pp. 267-281.
Mabanckou, Alain ; Troël, Yuna (ill.). Le coq solitaire. Paris : Seuil jeunesse, 2019.
Malanda, Elodie. L’Afrique dans les romans pour la jeunesse en France et en Allemagne. 1991-2010. Les pièges de la bonne intention, Paris, Honoré Champion, coll. « francophonies », 2019, 583 p.
Nières-Chevrel, Isabelle. Introduction à la littérature de jeunesse. Paris, Didier Jeunesse, coll. Passeurs d’histoires, 2009, 238 p.
Perrot, Jean. Jeux et enjeux du livre d'enfance et de jeunesse. Paris, Cercle de la Librairie,
Perrot, Jean. Mondialisation et littérature de jeunesse. Paris, Éditions du Cercle de la librairie, coll. Bibliothèques, 2008, 381 p.
Sapiro, Gisèle. Les contradictions de la mondialisation éditoriale. Paris : Nouveau Monde, 2009, 410 p.
Schneider, Anne. La littérature de jeunesse migrante : récits d’immigration de l’Algérie à la France. Paris : L’Harmattan, 2013, 422 p.
Stuart Hall. Identités et cultures : politiques des cultural studies. [Édition établie par Maxime Cervulle ; traduit de l'anglais par Christophe Jaquet.] Paris, Éditions Amsterdam, 2017, 558 p.
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Calendrier
Le colloque aura lieu à l’université Bordeaux Montaigne en mode hybride (présentiel et visio) les 19 et 20 novembre 2026.
Les propositions de communication sont attendues pour le 28 novembre 2025 au plus tard. Elles devront comporter 300 à 500 caractères (espaces compris), assorties d’une notice bio-bibliographique succincte (statut, institution de rattachement et adresse mail).
Dans le sillage du colloque, les contributions seront publiées dans la collection « Études africaines et créoles » des Presses Universitaires de Bordeaux.
Adresse mail de réception des propositions de communication : alfabari@free.fr