
En quête de Terre. Représentations francophones de la crise écologique (revue Nouvelles Études Francophones)
Appel à contributions
Nouvelles Études Francophones
En quête de Terre. Représentations francophones de la crise écologique (Amanda Vredenburgh)
La dévastation subie à Mayotte lors de l’arrivée du cyclone Chido le 14 décembre 2024 a provoqué des conversations autour des problèmes sociaux préexistants à Mayotte, qui a le taux de pauvreté le plus élevé parmi les départements français, et a alimenté le débat sur le lien entre les territoires d’outre-mer et l’Hexagone. La vulnérabilité de l’île face aux catastrophes naturelles souligne l’importance d’une approche double qui analyse des questions écologiques d’une perspective postcoloniale ou décoloniale, mise en avant dans les ouvrages récents Ecotexts in the Postcolonial Francosphere (éds. Nsah Mala et Nicki Hitchcott), Écologies littéraires africaines (Sara Buekens), et Cohabiter l’espace postcolonial (Étienne-Marie Lassi) et théorisée par Malcom Ferdinand dans Une écologie décoloniale. Dans ce premier ouvrage, Ferdinand propose le concept de « l’habiter colonial » pour expliquer l’imposition d’une certaine façon d’habiter la terre, basée sur l’exploitation des vies humaines et non-humaines, dans les plantations lors de l’époque coloniale. Pourtant Ferdinand précise que ce système d’exploitation, intimement lié au capitalisme et à la géopolitique postcoloniale, existe encore sous de nouvelles formes, telles que des usines et l’agriculture intensive.
Dans son deuxième ouvrage, S’aimer la terre, paru en 2024, Ferdinand poursuit son interrogation de « l’habiter colonial » à partir d’un cas particulier : l’usage du chlordécone aux Antilles, où plus de 90% des Guadeloupéens et des Martiniquais ont été contaminés par ce pesticide. Mais S’aimer la terre interroge aussi les limites de la communauté scientifique, qui analyse la contamination environnementale sans prendre en compte les particularités des rapports sociaux aux Antilles, notamment la colonialité qui sous-tend ces sociétés. Afin de « défaire l’habiter colonial », Ferdinand souligne l’importance de la réintroduction du vécu dans les discours politiques et scientifiques ainsi que des solutions « marronnes » qui conservent la culture locale face à des pratiques scientifiques aliénantes. Il nous invite à formuler une nouvelle conception des problèmes écologiques à partir d’optiques propres aux cultures francophones.
Dans le sillage de S’aimer la terre, ce dossier cherche à explorer diverses perspectives sur la crise écologique provenant des cultures francophones. En particulier, nous invitons des propositions interdisciplinaires qui intègrent des perspectives des études postcoloniales et décoloniales, mais aussi de l’écoféminisme, des études autochtones, ou des études animales. Comment des représentations littéraires, cinématographiques, ou visuelles des espaces francophones présentent-elles les enjeux de la crise écologique ? Dans quelles manières des questions postcoloniales et écologiques s’entremêlent-elles ? À travers une optique écologique, pouvons-nous également identifier de nouveaux modèles pour comprendre, voire démanteler les structures provenant de la période coloniale ? Les axes de réflexion suivants, sans être exhaustifs, peuvent servir de point de départ :
- Décolonisation des récits écologiques
- Le colonialisme vert
- Représentations apocalyptiques des catastrophes naturelles
- Justices environnementales
- Patriarcat et exploitation du non-humain
- Écocide et esclavage
- Sciences et (dé)colonisation
- Écologie et migration
- Savoirs autochtones et écologie
- Alliances interespèces et déshumanisation des personnes racisées
- Terre-mère et écoféminisme
- Une politique de soin ou d’amour
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Bibliographie
Buekens, Sara. Écologies littéraires africaines : l’imaginaire de l’environnement dans la littérature francophone postcoloniale. Brill, 2025.
Guibert, Nathalie. “Des députés pour ‘un changement total du lien entre les outre-mer et l’Hexagone.” Le Monde, 16 janvier 2025, https://www.lemonde.fr/politique/article/2025/01/16/des-deputes-pour-un-changement-total-du-lien-entre-les-outre-mer-et-l-hexagone_6500630_823448.html
Goar, Matthieu. “L’exemple de Mayotte, ou comment les inégalités sociales amplifient les effets du changement climatique.” Le Monde, 15 janvier 2025, https://www.lemonde.fr/planete/article/2025/01/15/l-exemple-de-mayotte-ou-comment-les-inegalites-sociales-amplifient-les-effets-du-changement-climatique_6499945_3244.html
Ferdinand, Malcom. S’aimer la terre: Défaire l’habiter colonial. Éditions Seuil, 2024.
Ferdinand, Malcom. Une écologie décoloniale : Penser l’écologie depuis le monde caribéen. Éditions Seuil, 2019.
Lassi, Étienne-Marie. Cohabiter l’espace postcolonial: Écologie du roman africain. Brill, 2023.
Mala, Nsah et Nicki Hitchcott (eds.). Ecotexts in the Postcolonal Francosphere, Liverpool UP, 2025.
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Les propositions de contribution sont à remettre avant le 15 mars 2026. Elles comprendront un court résumé (250-500 mots), un titre provisoire, vos coordonnées, votre affiliation institutionnelle et une courte notice bio-bibliographique (environ 120 mots).
Veuillez envoyer votre proposition à Amanda Vredenburgh: ajvreden@central.uh.edu.
Remise des articles (5500-6000 mots) : le 15 septembre 2026. Si votre proposition est retenue, vous recevrez le protocole de rédaction à suivre avec la réponse d’acceptation de votre proposition.
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Nouvelles Études Francophones (NEF), ISSN 1552-3152, publiée par les Presses Universitaires du Nebraska, est la revue officielle du Conseil International d’Études Francophones (CIÉF). Revue scientifique bi-annuelle de langue française, NEF diffuse la recherche dans les domaines de la langue française, de la littérature, des arts, des sciences sociales, de la culture et de la civilisation des pays et régions francophones.