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Imaginaire et pensée du futur africain dans les fictions et essais francophones (Ottawa)

Imaginaire et pensée du futur africain dans les fictions et essais francophones (Ottawa)

Publié le par Marc Escola (Source : Kasereka Kavwahirehi )

Colloque

« Imaginaire et pensée du futur dans les fictions et essais francophones ». 

Université d’Ottawa, 8-9 mai 2025

Afrofuturisme, Afroprophétisme, Afrotopisme, utopies africaines, Afrique au futur. A partir de la fin des années 1990, la catégorie du futur s’est imposée sur la scène de production intellectuelle, artistique et littéraire, comme s’il fallait conjurer avec force, au début du nouveau millénaire, la représentation de l’Afrique comme un continent à la dérive ou sans avenir. Outre les interventions de certains essayistes comme Achille Mbembe, l’accueil enthousiaste réservé à l’essai de Felwine Sarr, Afrotopia (2016), a été un moment fort. A la rhétorique teintée de pessimisme qui avait dominé les décennies précédentes (Tidiane Diakite, L’Afrique malade d’elle-même (1986), Alain et Edgar Hazoume, Afrique, l’avenir, en sursis(1988), Axelle Kabou, Et si l’Afrique refusait le développement (1992)) s’est substituée une rhétorique de l’euphorie. Des romanciers et romancières africains comme Abdourahmane Waberi et Léonora Miano, ont aussi produit des fictions futuristes d’une nouvelle Afrique n’ayant plus rien de commun avec celle au sujet de laquelle le philosophe congolais Kä Mana (1989) et l’économiste camerounais Daniel Etounga Manguelle (1991) pouvaient se demander si, faute de changer d’imaginaire, ou d’un Programme d’Ajustement Culturel elle n’allait pas mourir ou disparaître de la carte de l’humanité inventive, créatrice. La science-fiction africaine (Mutt-Lon (2013), Nnedi Okorafor (2013), Nsafou (2022), etc.) émerge aussi, mue par la volonté de revaloriser l’imaginaire et de produire un autre discours sur l’Afrique et ses descendants et dessiner un autre futur riche aussi bien des savoirs endogènes que des technologies avancées. Enfin, se basant sur les ressources dont regorge le continent et sur la croissance démographique et économique, des politiciens comme des chercheurs déclarent que l’Afrique était « l’avenir du monde ». 

C’est cette idée du « futur africain », qui émerge au moment même où en Occident, certains penseurs parlent de « la fin de l’histoire » (Fukuyama, 1992), de « l’évanouissement de l’avenir » (Augé 2011) et de l’inutilité du concept de futur lancé par le futuristes italiens (Berardi, 2011), que le colloque devra interroger du point de vue de sa genèse et de ses sources, de son inscription dans l’histoire de la pensée/littérature africaine depuis les indépendances, du visage de l’Afrique  et du monde qu’elle projette devant nos yeux et de sa thématisation dans les fictions dites futuristes, et de son esthétique. En analysant des essais,  des romans futuristes africains (comme Aux États-unis d’Afrique de Waberi, Rouge impératrice de Miano, Elle sera de jaspe et de corail de Werewere Liking, et la science-fiction africaine, l’objectif est, d’une part, de mettre en lumière l'imaginaire qui produit cette notion d'un futur africain radieux, ses multiples modes d’expression, ses modalités d’inscription dans les romans et la science-fiction africaine et sa théorisation dans les essais contemporains. D’autre part, de répondre à la question de savoir si l’on peut véritablement parler d’utopies africaines ouvrant un nouvel espace de possibles ou de possibilisation d’un futur autre du continent et non d’un « nouveau catéchisme médiatique » comme certains le pensent. La période d’émergence de l’afrofuturisme et de la science-fiction étant une période de crise sociale et politique accentuée par les Programmes d’ajustement structurel, le projet vise aussi à examiner la productivité de cette crise au niveau de l'imagination, c’est-à-dire comme temps de la parole, de l’historicité et des genèses comme au niveau de l’exploration d’autres rationalités et savoirs considérés « hier comme des survivances de l’obscurantisme propre aux sociétés dites  primitives » (Mbembe), mais qui pourraient s’avérer susceptibles de réenchanter un monde desséché par des technologies coupées de leur source spirituelle. Les propositions de communication pourront s’inscrire, entre autres, dans les axes suivants :

-       Inscription de l’afrofuturisme et de la Science-fiction dans l’histoire de l’essai et les littératures francophones 

-       Essais francophones : de l’afropessimisme à l’afrofuturisme ou du désenchantement à l’enchantement

-       L’utopie dans les littératures francophones avant 1990

-       Roman futuriste, Science-fiction africaine, pensée et avenir du monde

-       Science-fiction africaine et revitalisation des imaginaires africains

-       Afropolitanisme, afrofuturisme, afrotopos : identité et différences

-       Espaces, savoirs, et exploration du futur dans la science-fiction

-       Science-fiction africaines et afrocentrisme

-       Science-fiction, roman futuriste et exploration de nouveaux modèles de gouvernance, de systèmes économiques plus équitables et de modes de vie durables.

-       Esthétique, poétique et narration prospective en Science-fiction

-       Science-fiction africaine, vivier ou laboratoire de rationalités alternatives

-       Afrofuturisme : idéologie et/ou utopie?

Les propositions de contributions (max 300 mots) accompagnées d’une notice biobibliographique sont à envoyer à :

kkavwahi@uottawa.ca et senavjoel@yahoo.fr

Date limite de soumission des propositions de communications : 31 octobre 2024

Annonce des propositions retenues : 25 novembre 2024.

Bibliographie

Amabiamina Flora & Alain Roger Boayéniak Bayo (sous la dir.), La Science-fiction africaine. 

Questionnements et enjeux d’un genre en construction, Douala, Cameroun, éditions Pygmies, 2024.

            Augé, Marc, Où est passé l’avenir ?, Paris, Seuil, 2011.

Berardi, Franco Bifo, After the Future. Edited by Gary Genosko & Nicholas Thoburn, Edimburg,

                        AK Press, 2011.

Diakite, Tidiane, L’Afrique malade d’elle-même, Paris, Karthala, 1986.

Etunga Manguelle, Daniel, L’Afrique a-t-elle besoin d’un Programme d’Ajustement Culturel?,

            Paris, Editions Nouvelles du Sud, 1991.       

Fukuyama, Francis, La fin de l’histoire. Le dernier homme, Paris, Flammarion, 1992.

Hazoumé Alain &Edgar Hazoumé, Afrique, un avenir en sursis, Paris, Éditions l’harmattan,

            1988.

Kä Mana, L’Afrique va-t-elle mourir? Bousculer l’imaginaire africain, Paris, Karthala, 1991.

            Kabou, Axelle, « Et si l’Afrique refusait le développement? », Paris, L’harmattan, 1992.

Mbembe Achille, Sortir de la grande nuit. Essai sur l’Afrique décolonisée, Paris, La

            Découverte, 2010.

Mbembe Achille, Brutalisme, Paris, La Découverte, 2020.

Mbembe Achille, La communauté terrestre, Paris, La Découverte, 2023.

Mudimbe, V. Y., L’invention de l’Afrique. Gnose, philosophie et ordre de la connaissance

            Paris, Présence africaine, 2021.

Mudimbe, V. Y., L’odeur du père. Essais sur les limites de la science et de la vie en Afrique noire

            Paris, Présence africaine, 1982.

Mangeon, Anthony, L’Afrique au futur. Le renversement des mondes, Paris, Hermann, 2022.

Miano, Leonora, Rouge impératrice, Paris, Grasset, 2019.

Mutt-Lon, Ceux qui sortent dans la nuit, Paris, Bernard Grasset, 2013.

Nsafou, L., Nos jours brûlés. Les flammes ivoire, Paris, Albin Michel, 2022.

Nnedi Okorafor, Qui a peur de la mort ? Trad. Française de Laurent-Philibert Caillat, Paris,

            Panini, 2013.

Sarr, Felwine, Afrotopia, Paris, Philippe Rey, 2016

Sarr, Felwine, Les lieux qui habitent mes rêves, Paris, Gallimard, 2002.

Waberi, A., Aux États-Unis d’Afrique, Paris, J.-C. Lattès, 2005.

Ricoeur, Paul, Idéologie et utopie, Paris, Seuil, 1988.

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Kasereka Kavwahirehi                                                          Sowou Avougna                                 

Département de français                                                       Doctorant en lettres françaises

Université d’Ottawa                                                              Université d’Ottawa

E-mail : kkavwahi@uottawa.ca