Actualité
Appels à contributions
Colloque anniversaire des 5 ans d'Intercripol. Chambres closes et ouvertures théoriques.

Colloque anniversaire des 5 ans d'Intercripol. Chambres closes et ouvertures théoriques.

Publié le par Marc Escola (Source : Caroline Julliot)

On s’accorde généralement sur le fait que le roman policier est né avec la publication de « Double assassinat dans la rue Morgue », de Poe (1841) – inaugurant au passage l’un de ses sous-genres les plus emblématiques, le mystère en chambre close, au sein duquel des auteurs comme G. K. Chesterton, J. D. Carr, P. Halter ou E. Hoch rivaliseront de virtuosité, explorant méthodiquement toutes les combinatoires offertes par le principe d’un meurtre commis dans un espace fermé à double tour, dans lequel l’assassin n’a, à première vue, eu la possibilité ni de pénétrer ni de sortir. Le premier roman à énigme reposant tout entier sur ce principe est Le Mystère de Big Bow d’Israël Zangwill (1891) ; Gaston Leroux, avec Le Mystère de la chambre jaune (1907), donne ensuite ses lettres de noblesse à cette situation insoluble qui connaîtra ensuite d’infinies variations, tant du point de vue du lieu lui-même que de son extension. On passe ainsi, par exemple, d’une chambre à un grenier chez Ellery Queen, ou à une île chez Agatha Christie.

Pour le colloque anniversaire de son premier lustre, l’Intercripol (Internationale de la critique policière), qui, pour mener ses contre-enquêtes, s’est forgée la spécialité de repousser les frontières méthodologiques de l’analyse des textes, propose de chercher de nouvelles clés d’interprétation pour ouvrir les locked rooms. 

Par le défi qu’elle lance à la logique, par sa dimension impénétrable, la chambre close est en effet la métaphore même de l’énigme – et de la volonté de voir et de savoir que celle-ci déclenche. Elle est le lieu à la fois impossible et interdit où se déchaînent, loin des regards, tous les tabous – le lieu de la violence, mais aussi, par contiguïté avec l’imaginaire de la maison close, sur laquelle a joué, par exemple, la photographe Bettina Reims lors de son exposition Chambre close (Maison européenne de la photographie, 1996), celui de la sexualité la plus trouble. En quoi ce modèle de scène de crime peut-elle faire écho à d’autres lieux fermés, notamment son pendant punitif, de l’autre côté du rétablissement de l’ordre social, tribunal ou prison ? A l’instar de la réflexion menée par l’historien de l’art Emmanuel Pernoud, mettre en relation le principe de la chambre close pour penser d’autres motifs de huis clos peut se révéler éminemment fécond.  Et si, comme l’a suggéré Luc Boltanski, toute recherche en sciences humaines peut être pensée sur le paradigme de l’enquête policière, telle qu’elle se déploie dans la littérature de genre, tout nouvel objet scientifique peut-il être abordé dans les mêmes termes de clôture trompeuse – non seulement un espace à comprendre, que l’enquêteur est condamné à observer après-coup, sans se laisser tromper par les apparences fallacieuses, mais un espace où le premier enjeu est de trouver le moyen adapté de rentrer (et éventuellement, ensuite, d’en sortir…).

Pour ce colloque interdisciplinaire, qui réunira, les 7 et 8 Novembre 2024 à Lyon, spécialistes de littérature de divers périodes, mais aussi écrivains, historiens, sociologues et juristes, on privilégiera pour cet événement une approche réflexive, qui sonde les enjeux symboliques, politiques et narratifs de ce dispositif, mais les propositions de critique policière portant sur des énigmes de chambre close seront bien évidemment considérées.

Les propositions, d’une longueur de 3000 signes environ, sont à envoyer au plus tard le 15 Juin, accompagnées d’une courte bio-bibliographie à

maximedecout@yahoo.fr et caroline.julliot@univ-lyon3.fr

Bibliographie indicative

Critique

Le site de l’Intercripol (http://intercripol.org/fr/index.html), et tout particulièrement les pages consacrées à « Double assassinat dans la rue Morgue » de Poe (http://intercripol.org/fr/thematiques/critique-policiere/qui-est-l-assassin-de-la-rue-morgue.html), à Ils étaient dix, et au Crime de l’Orient-Express d’Agatha Christie (http://intercripol.org/fr/thematiques/critique-policiere/theywerenone.html ; http://intercripol.org/fr/thematiques/critique-policiere/sortir-de-la-voiture-istamboul-calais.html) et la la notion de transfictionnalité (http://intercripol.org/fr/thematiques/critique-policiere/enquetes-transfrontalieres/nouvelle-page.html)

P. Bayard, La Vérité sur Ils étaient dix, Minuit, 2019

L. Boltanski, Enigmes et complots, Gallimard, NRF, 2012

M. Decout, Pouvoirs de l’imposture, Minuit, 2018

D. Descotes, Les Mystères de chambre close, H. Champion, 2015

U. Eisenzweig, Le Récit impossible, C. Bourgois, 1987

F. Lacassin, Mythologies du roman policier, C. Bourgois, 1993

E. Pernoud, Chambres closes, art et claustration à l’âge du roman policier, Hazan, 2016

 Anthologies 

R. Lacourbe (dir.) Mystères à huis clos, « Omnibus », 1996

R. Lacourbe (dir.), La Grande anthologie des chambres closes et du crime impossible, t. I, Mannanan, 2014

 Livre d’art

B. Rheims et S. Bramly, Chambre close, Schirmer-Mosel, 2007.