Colloque ASL / STIH / LLF / 22 mars 2024
Salle Louis Liard, Sorbonne Université
17, rue de la Sorbonne, 75005 Paris
Comment peut-on (encore) s'opposer à une réforme de l'orthographe ?
Colloque organisé par Philippe Monneret (ASL, Sorbonne Université, STIH), Gilles Siouffi (Sorbonne Université, STIH) et Anne Abeillé (CNRS, LLF)
dans le cadre de l’Association des Sciences du Langage, en collaboration avec STIH et LLF
Entrée libre sous réserve des places disponibles
Inscription obligatoire avant le 19 mars sur ce formulaire :
https://forms.gle/5dYQrcnqNKjWLDkJ7
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L’échec récurrent des tentatives de réforme de l’orthographe n’est pas une fatalité. Il est sans doute imputable, en premier lieu, à la récupération politique difficilement évitable de cette question, fondée, on le sait bien, sur le clivage entre modernistes et conservateurs, mais aussi à une hésitation portant sur les instances légitimes pour statuer sur les questions orthographiques : est-ce à l’Académie française, aux ministères, notamment celui de l’Education Nationale, aux programmes scolaires, aux éditeurs, aux linguistes, aux Français ou aux francophones, via ce qu’on appelle l’usage, d’en décider ? Et dans le doute, on ne change rien : finalement, bien que la langue française n’ait jamais cessé d’évoluer depuis son émergence parmi les langues romanes, un imaginaire persistant de fixité de cette langue demeure installé dans les consciences.
Deux aspects de cette question sont souvent négligés, qui seront au centre de ce colloque : la dimension argumentative d’une part, la dimension éducative d’autre part. S’il est essentiel, en premier lieu, de dépolitiser autant que possible la question de l’orthographe et de neutraliser les récupérations politiques, c’est parce que la question de l’orthographe mérite d’être prise en charge dans l’espace de la discussion rationnelle. Dans un tel cadre, il devient alors envisageable d’examiner posément les arguments de celles et ceux qui, par principe, s’opposent à toute réforme orthographique, quelle qu’en soit la nature ou la portée. Or l’examen révèle que ces arguments sont peu nombreux et qu’ils ne résistent guère à un examen fondé sur les connaissances stabilisées dont nous disposons sur le français et sur les processus linguistiques en général. On peut donc espérer que la situation actuelle pourrait être débloquée par une explicitation patiente des réponses à ces arguments, ce que ni les médias ni la sphère numérique ne permettent, en raison de la tendance à la polarisation des idées, donc à la simplification, qui les caractérise.
Mais s’il convient de mettre à l’épreuve les arguments de celles et ceux qui résistent à toute évolution de la langue écrite, il est tout autant nécessaire d’expliquer pourquoi une réforme de l’orthographe est jugée nécessaire, voire urgente, notamment par les linguistes et les professeurs de français, dans leur très grande majorité, en France et à l’étranger. Bien entendu, on pourra toujours prétendre que les vrais problèmes sont ailleurs. Cependant, nous ne manquons pas de raisons, aujourd’hui, de penser que l’objectif d’une bonne maitrise de la langue française à l’école passe par un apprentissage sérieux de la grammaire du français, désencombré de l’étude de certaines des irrégularités orthographiques qui affectent la langue française. A cet égard, le soutien des Ministères de l’Education Nationale et de la Culture est essentiel, et c’est l’un des objectifs de ce colloque que de sensibiliser l’Education Nationale à la mise en œuvre d’une réforme de l’orthographe, qui lui donnerait le moyen d’atteindre ses objectifs d’excellence en matière de maitrise du français, pour le plus grand nombre d’élèves. Il faut choisir : soit chérir toutes les « subtilités » du français, qui sont le plus souvent des scories léguées par les hasards de son évolution historique et que seule une petite partie de la population pourra maitriser (souvent moins bien qu’elle le croit, d’ailleurs), soit débloquer l’évolution du français, lui redonner la possibilité d’appartenir de nouveau à ce grand mouvement historique qu’il a toujours connu, comme toutes les langues, en direction d’une rationalisation de ses structures, et donner en même temps la chance à un plus grand nombre de locuteurs du français, en France ou ailleurs, de s’approprier pleinement cette langue et de contribuer à son rayonnement.
Toutefois, l’ASL ayant pour vocation de préserver un espace pour la discussion scientifique, ce colloque, bien qu’il soit clairement orienté en faveur de la réforme, accordera aussi une place aux arguments des linguistes qui demeurent hostiles ou très réservés à l’égard des réformes orthographiques.
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Programme
9h30. Philippe Monneret, Malika Temmar, Marina Krylyschin (ASL) : introduction.
10h. Intervention de personnalités : avec notamment Marie Depleschin, François de Closets, Michel Ocelot, Viviane Youx (présidente de l’Association Française pour l’Enseignement du Français).
11h00. Gilles Siouffi : « "L'usage n'a pas suivi" : la place de l'argument de l'usage dans les débats sur l'orthographe ».
11h45. Anne Abeillé : « Est-il sacrilège de réformer l’orthographe grammaticale ? ».
12h30. Déjeuner
14h. Christophe Benzitoun : « "L'orthographe, c'était mieux avant" : état des lieux de la maitrise de l'orthographe hier et aujourd'hui ».
14h45. Anne Dister : « Les réformes orthographiques en Belgique francophone. Où il sera aussi question des consonnes doubles ».
15h30. Pause
16h. Table ronde et échanges avec le public : avec notamment Cynthia EID (présidente de la Fédération internationale des professeurs de français), Jean-Pierre Sueur, Martial Maynadier, Jean-Louis Chiss (Sorbonne Nouvelle), Jacques David (Cergy Paris Université), Dan Van Raemdonck (ULB), Patrick Charaudeau (Sorbonne Paris Nord).
17h30. Clôture du colloque.