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La Correspondance d’Octave Mirbeau, reflets et secrets (Cahiers Octave Mirbeau, n° 31)

La Correspondance d’Octave Mirbeau, reflets et secrets (Cahiers Octave Mirbeau, n° 31)

Publié le par Léo Mesguich (Source : Samuel Lair)

CAHIERS OCTAVE MIRBEAU n° 31

La Correspondance d’Octave Mirbeau, Reflets et secrets

Éclairage inestimable sur l’histoire de l’art et le contexte politique – l’affaire Dreyfus en tête ‑ mais aussi la vie de notre écrivain, la correspondance d’Octave Mirbeau est un document précieux sur son époque et sur l’évolution des idées durant plus d’un demi-siècle. Son rôle (informatif, sentimental, esthétique, littéraire, éditorial, professionnel) témoigne de la pleine liberté du genre pratiqué par Mirbeau, à l’image de sa forme : les lettres lorgnent à l’occasion vers le tableau, la saynète drolatique, la chronique ou l’article, tant la subjectivité y a sa place. Elles reflètent le maintien de quelques constantes simples, chevillées au tempérament de Mirbeau : l’amitié considérée comme une vertu cardinale, l’anarchisme, l’exigence artistique poussée à son paroxysme.

La correspondance constitue parfois une parole parallèle qui peut surprendre par le décalage avec l’œuvre, le propos journalistique ou le témoignage des contemporains sur Mirbeau : elle dit ce que n’osent proférer d’autres formes de discours ; l’une de ses propriétés est de celer et de receler dans un double mouvement. Les lettres détiennent par ailleurs une valeur performative, dans la mesure où leur « force est celle de la compensation » selon Geneviève Haroche-Bouzinac : développements littéraires destinés à rassurer Mirbeau lui-même sur ses capacités littéraires ou lettres-thérapies adressées aux artistes en manque de confiance, elles ont la spécificité de réaliser en actes l’une des vertus cardinales de l’écrivain, l’amitié. À la croisée des espaces de sociabilité (expositions, salons, vie mondaine, réunions de l’académie Goncourt, élection des membres et attribution du prix) et de la pénombre où l’écrivain compose souvent laborieusement son œuvre, la lettre opère librement ces va-et-vient entre l’univers de l’intime et le champ littéraire ; à mi-chemin du propos murmuré et du discours proclamé, la correspondance obéit aussi à des stratégies d’écriture et à des choix opérés par Mirbeau en fonction de multiples critères, parmi lesquels l’identité des destinataires. L’infléchissement qui en découle pose la question de sa sincérité ainsi que de sa fidélité au réel. Une forme d’autocensure s’exerce-t-il sur elle ?

La correspondance est aussi, à plus d’un titre, le laboratoire de l’œuvre qui s’élabore, le creuset de l’écriture romanesque ; la plume de l’écrivain s’y essaie, y puise son inspiration, se nourrit des échanges épistoliers en les transcrivant parfois par pans entiers. Elle compense le peu de goût de Mirbeau pour les discussions esthétiques et, pourquoi pas, se substitue au journal littéraire qu’il n’écrira jamais. Elle est néanmoins, hélas ! douloureusement lacunaire et s’érige alors en œuvre trouée, compte tenu des silences : silence des lettres reçues qui manquent, silence des lettres écrites perdues, dans un corpus qui, par ailleurs, brille par sa cohérence.

Les propositions d'article sont à adresser à Samuel Lair, samuellair@sfr.fr, jusqu'au 15 février 2024.