« Actualités du théâtre français de la Renaissance »
5-6 décembre 2024 à Metz
Colloque international organisé par
Sandrine Berrégard, Marie Bouhaïk-Gironès, Céline Fournial, et Nina Hugot.
Si le théâtre de la Renaissance, très absent de la scène dramatique française et des programmes du secondaire, peut sembler frapper par son inactualité, ce colloque prend le pari de démontrer tout ce qu’il a déjà dit, et a encore à dire, à notre modernité. Les éditions et approches critiques semblent actuellement être en légère hausse, mais ce corpus reste encore sous-étudié par rapport à d’autres textes théâtraux d’autres périodes, ou encore par rapport à d’autres textes non-théâtraux de cette période. Ce colloque visera donc à poursuivre cet effort de renforcement et de renouvellement des analyses sur ces textes de théâtre, en réfléchissant précisément à la difficile question des actualités des formes théâtrales de la Renaissance.
Prenant place dans le projet ANR Melponum (Melpomène à l’ère numérique), qui entend proposer des éditions numériques et développer différentes actions de valorisation des corpus, le colloque mêlera les approches critiques aux approches pédagogiques (en faisant intervenir des enseignants du secondaire) et théâtrales (avec prestations de plusieurs compagnies et comédien.nes). De même, conformément aux principes défendus dans le dernier numéro de la revue Seizième siècle, nous ne limiterons pas nos travaux aux formes dites humanistes mais analyserons conjointement les formes dites médiévales (et pourtant très largement renaissantes), puisque la discontinuité entre ces esthétiques est aujourd’hui remise en question. Les communications pourront donc porter sur l’ensemble du corpus théâtral français ou néo-latin de la Renaissance – l’objectif étant de repenser les bornes chronologiques imposées traditionnellement par la critique (qui étudie souvent séparément les périodes 1450-1550 puis 1550-1600), nous n’entendons pas ici fixer une temporalité précise aux textes dramatiques étudiés.
Plusieurs angles d’études seront possibles, parmi lesquels nous proposons quelques pistes :
- Quel rapport les formes théâtrales entretenaient-elles avec leurs actualités ? Au-delà des pièces dites d’actualité, on pourra étudier les allusions directes à des évènements contemporains, à l’intérieur des pièces ou dans certains textes liminaires (par exemple le siège de Metz évoqué dans Eugène de Jodelle et dans le prologue de Cleopatre captive), aux circonstances de la représentation, mais aussi aux manières moins directes de représenter (ou de refuser de représenter) d’agir (ou de refuser d’agir) sur l’actualité. Une attention plus particulière pourra à cet égard être accordée à l’identité générique des pièces : les notions d’actualité et d’actualisation ne sont pas conçues de la même manière selon les genres dramatiques, de même que les modalités d’adaptation au public contemporain. On pourra par exemple réfléchir à la manière dont le xvie siècle a remodelé des formes théâtrales issues du xve siècle et s’est approprié les sujets et les genres hérités de l’Antiquité en fonction de l’actualité sociale ou politique du moment et/ou des nouvelles conceptions dramaturgiques qui se font alors jour.
- La notion de mémoire, indissociable de la temporalité, qui constitue une dimension essentielle du genre théâtral, se situera au cœur de la réflexion collective, notamment celle qui concerne la tragédie et les événements traumatiques dont elle porte volontiers la trace. La question sera de savoir comment et dans quelle mesure les pièces ravivent le souvenir de faits anciens, pour nous-mêmes, mais aussi dès l’époque de leur création, puisqu’il n’est pas rare que les dramaturges se saisissent d’un épisode antérieur à leur époque – ce qui peut permettre de nuancer ou de relativiser le concept même d’actualité.
- Puisque les circonstances de l’écriture n’enferment pas les sens des pièces, dans quelle mesure ces dernières peuvent-elles nous éclairer sur notre modernité, voire sur notre actualité ? Christian Biet a par exemple insisté sur l’intérêt que présentait l’analyse commune des pièces des Guerres de Religion avec celles de l’après-Auschwitz[1], et les communications pourront poursuivre ces perspectives.
- Comment décrire et briser la distance qui nous sépare de ces textes ? Les analyses pourront s’intéresser aux difficultés à accéder aux archives liées à la représentation, mais aussi aux enjeux de la compréhension de ces textes, dans l’enseignement ou pour un plus large public. On pourra encore réfléchir aux enjeux éditoriaux (orthographe modernisée ou non ; livres de poche ou volumes plus onéreux) ou aux conséquences des choix de mises en scène. On pourra encore tenir compte de la spécificité des textes néo-latins en réfléchissant aux questions de traduction.
- Dans quelle mesure les outils actuels de la critique permettent-ils d’éclairer le théâtre de la Renaissance ? Les communications pourront se demander par exemple comment les différentes gender, racial ou cultural studiesoffrent de nouveaux regards, pertinents et éclairants, sur ce théâtre ancien.
- Quelles sont les tendances actuelles de la critique, de la mise en scène, et de l’enseignement du théâtre de la Renaissance ? Un versant du colloque sera consacré à l’actualisation de la bibliographie, au recensement des travaux, thèses et projets en cours, et des communications pourront s’intéresser à ces différentes actualités, en réfléchissant à leurs sens et à ce qu’elles révèlent de la spécificité du théâtre de cette période. La prise en compte des lecteurs et des spectateurs, qu’ils soient contemporains de la création des pièces ou ressortissent à une époque ultérieure, permettra enfin d’analyser de plus près le processus d’actualisation et ses modalités de réalisation.
—
Les propositions de communications assorties d’un CV seront à adresser à :
Nina Hugot (nina.hugot@univ-lorraine.fr) avant le 1er février 2024.
Le colloque aura lieu les 5 et 6 décembre 2024 à Metz.
—
Bibliographie indicative
Biet Christian, « Les théâtres de l’après-catastrophe (XVIe-XVIIe siècle) », Astérion [En ligne], 15 | 2016, mis en ligne le 23 novembre 2016, consulté le 02 février 2023. URL : http://journals.openedition.org/asterion/2841 ; DOI : https://doi.org/10.4000/asterion.2841).
Buron Emmanuel et Goeury Julien (éd.), Théâtre tragique du XVIe siècle. Jodelle, Des Masures, La Taille, Garnier, Paris, GF Flammarion, 2020.
Cavallini Concetta et Desan Philipe (dir.), Le Texte en scène. Littérature, théâtre et théâtralité à la Renaissance, Paris, Classiques Garnier, 2016.
Le Cadet Nicolas (dir.), Réforme, Humanisme, Renaissance, n° 23 « La Farce au XVIe siècle », Genève, Droz, 2021/2.
Le Cadet Nicolas (dir.), Seizième siècle, n° 23 « Les Mystères Français au XVIe siècle », Genève, Droz, automne 2023.
Mazouer Charles, Le Théâtre français de la Renaissance, Paris, Champion, 2002.
Parussa Gabriella, « Éditer les textes de théâtre en langue française : aperçu historique et nouvelles perspectives », Médiévales [En ligne], 59 | automne 2010. Mis en ligne le 20 mars 2013, consulté le 04 novembre 2021. [URL : http://journals.openedition.org/medievales/6067]
Peretti Isabelle (de) et Petitjean André (dir.), Pour une didactique du théâtre : entre textes, jeux et représentations, revue Pratiques (linguistique, littérature, didactique), n°193-194, 2022. Consulté en ligne le 05/03/2023. [DOI : https://doi.org/10.4000/pratiques.11285]
Provini Sandra et Bost-Fievet Mélanie, Renaissance imaginaire. La réception de la Renaissance dans la culture contemporaine, Paris, Classiques Garnier, 2019.
Smith Darwin, Parussa Gabriella, Halévy Olivier (dir.), Le Théâtre français du Moyen Âge et de la Renaissance, Paris, L’avant-scène théâtre, 2014.
—
[1] Christian Biet, « Les théâtres de l’après-catastrophe (XVIe-XVIIe siècle) », Astérion [En ligne], 15 | 2016, mis en ligne le 23 novembre 2016, consulté le 02 février 2023.
URL : http://journals.openedition.org/asterion/2841 ; DOI : https://doi.org/10.4000/asterion.2841).