
Sous le soleil exactement
« Le soleil est nouveau tous les jours », écrit Héraclite. Et, comme lui répondant, Ludwig Wittgenstein assène : « Que le soleil se lèvera demain est une hypothèse. » C’est entre ces deux pôles que l’équipe d’En attendant Nadeau vous propose un hors-série consacré au soleil. Une manière d'explorer la fascination qu’exerce sur nous cet astre ambigu, les images qu’il fait surgir, sa place dans nos vies et nos imaginaires. Un panorama chatoyant conçu par Cécile Dutheil de la Rochère à découvrir chaque mercredi du 12 juillet au 16 août. Pendant six semaines, un article chaque jour pour proposer des lectures d’une grande variété à faire, selon son goût, au soleil ou à l’ombre…
Hors-série n° 7 : Soleil
"Imaginons que ces lignes aient été écrites il y a vingt ans, ou même dix ans. Le soleil y eût été fêté, célébré, associé à la vie, à la chaleur, aux bienfaits du corps et de l’esprit. 2023 : tout a basculé. « Chaos is come again », dirait Shakespeare. Le soleil brûle et consume, l’eau se fait rare, des incendies ravagent des pans entiers de continent, les peuples guerroient. Sommes-nous trop pessimistes ? Trop sombres ? Et voilà que ce mot, « sombre, » rappelle qu’à l’inverse, le soleil a surtout été une image de lumière et de splendeur, de beauté et de raison. Le soleil rayonne, c’est une étoile, il rime avec merveille, vermeil, sommeil. Nous-même ne soupçonnions pas la richesse et la diversité que le mot-soleil, l’objet-soleil et l’image-soleil pouvaient convoquer.
Littérature et poésie, philosophie, géographie, art et artisanat, techniques, sciences dures, théâtre, musique, peinture… Ces champs seront tous convoqués au fil de l’été (peut-on encore écrire « bel été » ?), chaque mercredi, du 12 juillet au 16 août, telle l’aiguille d’un cadran solaire indiquant le jour, la nuit et les heures. Chacun, chacune d’entre vous pourra divaguer, rêver, méditer et réfléchir, s’étonner, sourire et ne pas sombrer dans le trou noir de la mélancolie ni de la crainte.
Car vous découvrirez des images resplendissantes. Vous verrez un grand écrivain récemment disparu côtoyer de jeunes plumes jamais publiées. Vous filerez du coton sur de vieux métiers à tisser. Vous arpenterez les marais salins du Var sous un cagnard blafard. Vous voyagerez : au Mexique, au Liban, en Palestine, en Tunisie, en Suisse… Vous redécouvrirez de vieilles BD et de vieux tubes. Vous lirez des vers de poètes photosensibles et des méditations de métaphysiciens ultraviolets. Vous scruterez à la loupe des petites bêtes et des micro-organismes qui s’adaptent aux variations de température depuis toujours. Vous siroterez un drink avec de somptueuses créatures dorées par Scott Fitzgerald…
Mais vous ne trouverez pas de réponse à la question suivante : pourquoi le soleil est-il masculin en français, mais féminin en allemand et en arabe, par exemple ? C’est un mystère ; la cause ou l’effet d’imaginaires trop différents, trop fantasmagoriques. Car l’échelle et la portée du soleil sont celles de l’univers. Et s’il était la preuve que l’Universel existe ? La question n’est pas un sujet de dissertation ni de polémique : il fait chaud, l’été se prolonge, le soleil est encore resplendissant, peut-être un peu menaçant."
— Cécile Dutheil de la Rochère, 12 juillet 2023.
Découvrir les premières livraisons de ce dossier appelé à durer tout l'été…