Élève de Husserl, Roman Ingarden (1893-1970) est considéré comme l’un des fondateurs de l’esthétique phénoménologique. Son œuvre se confond avec l'ambition de penser la possibilité d’une théorie unifiée des arts. Et il n'est pas indifférent que sa démarche se soit inaugurée sur le terrain littéraire avec la publication de L’Œuvre d’art littéraire en 1931. Ce projet, fondamentalement ontologique, a trouvé son prolongement phénoménologique en 1937 avec La Connaissance de l’œuvre d’art littéraire qui, pour la première fois, donne une place centrale au lecteur et au spectateur, autrement dit, inaugure ce que l’on appelle désormais l’esthétique de la réception. En attendant la publication imminente de la traduction de ce texte majeur en français par les soins de Patricia Limido aux P.U. de Rennes, un colloque se tiendra à Paris les 8 & 9 juin prochain sous le titre "Roman Ingarden : l’acte de lecture entre réception et création", pour favoriser la rencontre entre les points de vue philosophique et littéraire autour du statut des actes de lecture, d’une part, et des différentes dimensions de la création et de la réception esthétique, d’autre part.
Saluons aussi la récente édition par P. Limido de l'essai Ce que nous ne savons pas des valeurs (Mimèsis), l'un des derniers grands textes de Roman Ingarden, écrits dans les années soixante lorsqu'il se consacre à l'élaboration d'une ontologie des œuvres d'art et des valeurs tant artistiques qu'esthétiques. Le statut des valeurs morales y occupe également une place prédominante car il engage la réalité humaine dans ses dimensions culturelles, sociales et politiques.