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La référence explicite : éditer les compilations de la Renaissance, de l’index au référentiel ?

La référence explicite : éditer les compilations de la Renaissance, de l’index au référentiel ?

Publié le par Marc Escola (Source : Romane Marlhoux)

La référence explicite : éditer les compilations de la Renaissance, de l’index au référentiel ?

17 novembre 2023, Strasbourg

Journée d’étude coordonnée par Romane Marlhoux (ILLE, UHA) et Madeleine Hubert (Lab, Bnu)
https://divlec.hypotheses.org/files/2023/06/Appel-J1-Proc.pdf


Le projet de recherche PROC (Pratiques de Référencement dans les Œuvres Composites des XVIe-XVIIe siècles), soutenu par la Maison Interuniversitaire des Sciences Humaines d’Alsace, invite à s’interroger sur l’identification et la répartition des autorités dans la production des œuvres composites des XVIe et XVIIe siècles. L’équipe se propose de poser la question de la signature et de l’écriture collaborative, de même que celle de l’attribution des données et leur réutilisation. Tous ces enjeux sont aussi bien au cœur de la problématique de la production humaniste des connaissances et des écrits littéraires de la Première Modernité que de l’écriture numérique et de la construction collaborative des projets de recherche selon les perspectives offertes par les Humanités Numériques et la Science Ouverte.

Une première journée d’étude, « La référence explicite : éditer les compilations de la Renaissance, de l’index au référentiel ? », aura lieu le 17 novembre 2023 à la Maison Interuniversitaire des Sciences Humaines d’Alsace. Comme l’ont montré entre autres A. Moss dans Les recueils de lieux communs : méthode pour apprendre à penser à La Renaissance (traduit en 2002) et A. Blair dans Tant de choses à savoir : comment maîtriser l’information à l’époque moderne (traduit en 2020), les compilations, les florilèges, les bibliographies, les sommes et les ouvrages de mélange connaissent un grand succès à la Renaissance. Ces livres de référence offrent un remarquable éclairage sur des pratiques intellectuelles et culturelles spécifiques : lire pour collecter des savoirs et des idées et écrire pour les transmettre. Ils permettent d’approcher au plus près les façons de manier et de s’approprier les textes et, plus généralement, ils sont le reflet de la culture écrite à un moment où le lectorat s’élargit. Ils engagent un type d’intertextualité caractérisée par l’importance accordée à la citation et à la mention des sources mises en valeur par des mises en page soignées. Auteurs, traducteurs, continuateurs, compilateurs, éditeurs : toutes ces figures conduisent à renouveler la réflexion sur l’autorité et l’auctorialité.

Étudier et plus encore éditer ce type d’ouvrages nécessite donc d’accorder une attention particulière au référencement dans ces textes et d’abord aux auteurs cités explicitement parce qu’ils font autorité (les textes des auteurs antiques, les Pères de l’Église ou les humanistes italiens qu’un lettré se doit de connaître au XVIe siècle par exemple). Il s’agit également de repérer les sources dont on revendique moins l’influence en particulier les autres compilations qui fournissent des informations de seconde main. De l’accumulation à la discussion voire à la contestation des références, ces gestes de réappropriation et réécriture, hérités à la fois des anciennes méthodes scolaires et des nouvelles exigences humanistes, sont essentiels à la construction des connaissances et à la production des savoirs. L’éditeur·ice moderne s’intéresse donc au référencement de ces sources mais se pose également la question des instances auctoriales qui sélectionnent, manient, agencent et interprètent les éléments remobilisés. Il est, la plupart du temps, particulièrement difficile de mesurer la participation de chaque acteur, d’attribuer la responsabilité des énoncés à une de ces autorités et de mesurer la portée réelle de leurs interventions quand bien même leur nom serait mentionné puisque ces pratiques participent aussi de la stratégie de promotion et de légitimation des écrits. Les effets de brouillage sont multiples et sont renforcés par le prestige accordé à la figure d’autorité mais aussi par l’émergence de celle de l’auteur et par le partage de l’auctorialité avec les acteurs du marché du livre imprimé.

La question des entités nommées auctoriales est donc centrale pour comprendre le fonctionnement de ces textes composites et les imaginaires de la connaissance qui leur sont associés. Pour éditer les écrits de la Première Modernité nous devons en tenir compte sur le plan scientifique mais aussi sur le plan technique. Le travail d’élaboration d’outils de catalogage pour faciliter l’identification des auteurs (gestion des variantes graphiques des noms, des homonymes etc.) est mené depuis longtemps dans les bibliothèques et les institutions de conservation. Dans le cadre du programme de transition bibliographique, l’utilisation d’identifiants pérennes, qui se rapportent aux données d’autorité (ARK) et aux identifiants internationaux (ISNI et ISAN), permet de faciliter la recherche des ressources en établissant des liens entre elles dans le contexte du web sémantique. Le défi n’est pas nouveau : rendre les textes identifiables, repérables et remobilisables étaient déjà une des grandes préoccupations des érudits depuis le Moyen Âge. Les ouvrages de référence anciens facilitent la lecture de consultation grâce notamment à la généralisation d’outils de gestion textuelle tels que les tables des matières et surtout les index. De plus en plus élaborés notamment en ce qui concerne la mise en page avec l’imprimerie, il deviennent même un argument de vente qui s’affiche en page de titre d’imprimés très divers, ce qui montre que ce type de lecture discontinue s’est généralisée en dehors des milieux érudits dès la fin du XVIe siècle.

Produit-on des ressources FAIR (Faciles à trouver, accessibles, interopérables, réutilisables) dès le XIVe siècle ? Nous sommes en tout cas tributaires aujourd’hui de ces logiques de recherche et le numérique, en particulier le web sémantique, conduit à les interroger à nouveaux frais. Quelles sont les parentés des outillages numériques avec les systèmes d’indexation et de renvois mis en place à la Renaissance ? En posant le problème en termes de métadonnées et en approfondissant la notion de contribution mise en avant dans les Humanités Numériques, peut-on revenir sur les critères mêmes de définition des autorités et de l’auctorialité ? De même qu’une meilleure compréhension des pratiques anciennes permettra sûrement d’envisager autrement les dispositifs numériques que nous inventons, les réflexions autour des référentiels d’autorités et des entités nommées ouvrira sans aucun doute de nouvelles perspectives de recherche sur les textes composites de la Première Modernité.



Les propositions, d’environ 300 mots, seront envoyées, accompagnées d’une brève présentation bio-bibliographique, à romane.marlhoux@uha.fr et madeleine.hubert@bnu.fr avant le 7 juillet 2023.

Les interventions devront durer une vingtaine de minutes et ne pourront pas être assurées à distance.

Les frais de déplacements et d’hébergement pourront être pris en charge.

Comité d’organisation

Madeleine Hubert (BNU)
Romane Marlhoux (ILLE, UHA)

Comité scientifique

Céline Bohnert (CRIMEL, URCA)
Perrine Hamann (BNU)
Michel Jourde (IHRIM, ENS de Lyon)
Guillaume Porte (ARCHE, Unistra)