« Est-ce que, moi, la petite fille de l’épicerie de la rue du Clos-des-Parts, immergée enfant et adolescente dans une langue parlée populaire, un monde populaire, je vais écrire, prendre mes modèles, dans la langue littéraire acquise, apprise, la langue que j’enseigne puisque je suis devenue professeur de lettres ? Est-ce que, sans me poser de questions, je vais écrire dans la langue littéraire où je suis entrée par effraction, “la langue de l’ennemi” comme disait Jean Genet, entendez l’ennemi de ma classe sociale ? Comment puis-je écrire, moi, en quelque sorte immigrée de l’intérieur ? ».
Pour la première fois, en 2012, à la demande de la municipalité, Annie Ernaux a accepté de rencontrer les habitants de la petite ville normande où elle a passé son enfance et sa jeunesse, lieu qui se retrouve au cœur de toute son œuvre. C’est le texte fort et émouvant de cette conférence historique que restitue ce livre, ce moment de réconciliation où elle évoque en tant que «femme qui écrit » et « fille du pays », le lien qui unit sa mémoire de la ville et son écriture.
Pour la nouvelle édition 2022 de cet ouvrage, Annie Ernaux a souhaité ajouter plusieurs documents inédits au cahier hors-texte déjà existant : nouvelles photographies personnelles, rédaction et carnet scolaire de la classe de sixième, lettres à son amie Marie-Claude (écrites entre 17 et 22 ans), extrait de son journal au moment de l’envoi de son premier roman, refusé par le Seuil...
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On peut lire sur nonfiction.fr un article sur cet ouvrage :
"Annie Ernaux à Yvetot, lieu origine de sa mémoire", par Anne Coudreuse (en ligne le 10 décembre 2022).