L’invasion de l’Ukraine par la Russie, qui a récemment remis la guerre au-devant de l’actualité,
engendre une profusion de reportages, de témoignages, d’essais ou d’études historiques : ces
modes non fictionnels de relation de la guerre relancent du même coup la question de la place du
mode fictionnel dans le récit de guerre, qu’abordaient déjà Kate McLoughlin puis Laura Ashe et
Ian Patterson dans leurs ouvrages de 2014. En effet, la quantité d’informations disponible sur le
sujet n’empêche pas que l’on continue de rechercher dans l’art et dans la littérature une forme de
parole propre à ces modes d’expression, comme en témoignent les initiatives des théâtres Prospero
et Centaur de présenter des lectures théâtrales à partir de textes d’artistes ukrainien.e.s, ou encore
l’intérêt médiatique renouvelé pour des figures de la littérature ukrainienne comme Andreï
Kourkov. De même, au printemps de 2022, de façon tout à fait inattendue, la publication de l’inédit
de Louis-Ferdinand Céline, Guerre (Paris, Gallimard), ramène le sujet de la Première Guerre
mondiale dans l’actualité littéraire, et alimente la réflexion sur l’usage de la fiction dans le
témoignage de guerre – réflexion qui est toujours liée, lorsqu’il est question de l’oeuvre de cet
écrivain, à des considérations éthiques. Notre proposition d’atelier est née des questionnements
que suscitent ces événements tout autant que de la problématique plus générale du thème de la
guerre qui, d’une part, continue de résister à la représentation, alors que, d’autre part, le brouillage
des frontières entre la fiction et les sources d’informations qui marque les dernières décennies
semble avoir déplacé les fonctions de la littérature. En effet, pour reprendre la formule de Robert
Dion, nous nous intéressons tout particulièrement aux récits qui inventent, mais pour dire quelque
chose de vrai.
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Nous invitons des communications qui explorent les stratégies contemporaines de mise en fiction
de la guerre à travers des modes d’interaction constamment renouvelés de la littérature avec le
réel. Comment la littérature contribue-t-elle à écrire l’histoire des conflits armés ? Pourrait-elle
révéler des dimensions éthiques de l’expérience de la guerre inaccessibles par des moyens non
fictionnels ? Est-ce que les modes fictionnels de relation de la guerre pourraient nous aider à mieux
saisir le rapport qu’on entretient, à l’époque actuelle, avec l’histoire et la mémoire ? En quoi,
comme le demandent Marie-Hélène Boblet et Bernard Alazet, ces récits éprouvent-ils la valeur
heuristique de la fiction ?
Voici, à titre suggestif, quelques axes d’étude :
- L’axe de la transmission, soit ce que la guerre transmet comme expériences et laisse comme
traces et comment la littérature contemporaine participe à ces transmissions.
- L’axe de la transgression, soit comment la transgression peut être un motif, un mode
d’expression ou un moteur narratif dans les récits de guerre, pour s’opposer aux tabous et
aux interdictions qui régissent l’écriture sur la guerre.
- L’axe de la transposition, soit la réécriture des grands récits ou des mythes fondateurs,
parfois à travers le renversement des idées dominantes, et qui peut aussi se traduire dans
les textes par l’emploi du symbole, par le recours à la synecdoque ou par la transposition
de l’agentivité.
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Les communications pourront porter sur un large corpus dont voici les paramètres :
- Nous acceptons les analyses de tous textes portant sur le thème de la guerre entendu au
sens large, en incluant les guerres civiles, les actes de terrorisme, les guérillas et autres
conflits armés.
- Les textes pourront être des récits, mais aussi des textes de théâtre, des poèmes ou des
romans graphiques.
- En ce qui a trait au champ historique, nous privilégions les textes du XXIe siècle, mais
nous n’excluons pas des textes du XXe siècle (auquel appartient le récit Guerre de Louis-
Ferdinand Céline).
- Nous incluons toutes les littératures francophones.
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Bibliographie sommaire
Ashe, Laura, et Ian Patterson, dir. War and Literature. Cambridge: D.S. Brewer, 2014.
Boblet, Marie-Hélène, et Bernard Alazet, dir. Écritures de la guerre aux XXe et XXIe siècles.
Dijon: Éditions universitaires de Dijon, 2010.
Dion, Robert. Des fictions sans fiction ou le partage du réel. Montréal: Presses de l’Université de
Montréal, 2018.
Fontaine, Kathryne. Poétique du récit de guerre contemporain La littérature comme laboratoire
d’éthique. Québec: Les Presses de l’Université Laval, 2021.
McLoughlin, Kate. Authoring War: The Literary Representation of War from the Iliad to Iraq.
New York: Cambridge University Press, 2014.
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- Date limite pour l’envoi des propositions (titre, résumé de 250-300 mots, adresse,
affiliation et notice bio-bibliographique de 150 mots) à Johanne Bénard
(benardj@queensu.ca) et Kathryne Fontaine (kathryne.fontaine@rmc.ca) le 15 décembre
2022.
- Le colloque annuel 2023 de l’APFUCC sera en personne (à moins que la situation sanitaire
ne le permette pas) avec, possiblement, quelques activités ou interventions en ligne (nous
communiquerons à ce sujet plus tard). Il se tiendra dans le cadre du Congrès annuel de la
Fédération des sciences humaines du Canada.
- Les personnes ayant soumis une proposition de communication recevront un message des
personnes responsables de l’atelier avant le 15 janvier 2023 les informant de leur décision.
L’adhésion à l’APFUCC est requise pour participer au colloque. Il faut également régler
les frais de participation au Congrès des Sciences humaines ainsi que les frais de
conférence de l’APFUCC. De plus amples informations vous seront envoyées à ce sujet.
Vous ne pouvez soumettre qu’une seule proposition de communication, présentée en
français (la langue officielle de l’APFUCC), pour le colloque 2023.