La série Minores XIX-XX (Revue des Lettres modernes Minard / Classiques Garnier) prévoit d’accueillir en 2024 un volume d’études consacré à Arsène Houssaye (1814-1896), écrivain français aux activités multiples, acteur majeur de la vie littéraire de son temps, mais relativement méconnu, puisqu’à ce jour manque encore, sur lui, une étude d’envergure qui rassemblerait toutes les informations disponibles.
Né à Bruyères-et-Montbérault, dans l’Aisne, François Arsène Housset, dit Arsène Houssaye, quitte sa famille bourgeoise en 1832, pour venir s’installer à Paris. Il se lie d’abord avec Nerval et avec Gautier, et participe de la sorte, en 1835-1836, à la « bohème du Doyenné », du nom du quartier où résidaient ces jeunes gens, près de la place du Carrousel. Houssaye, romancier et poète, commence très tôt à publier : De profundis (1834 ; sous le pseudonyme d’Alfred Mousse), La Couronne de bleuets (1836), Une pécheresse (1837). Il apparaît aussi rapidement comme un homme d’affaires habile, et devient en 1843 le propriétaire de la revue L’Artiste, qui absorbera deux ans plus tard la Revue de Paris. (Houssaye sera aussi, avec Gautier et Du Camp, au nombre des fondateurs de la nouvelle Revue de Paris, en octobre 1851.) Au cours des années 1849-1856, il exerce les fonctions d’administrateur général de la Comédie-Française, puis est nommé en 1857 inspecteur des musées de province. On le retrouve ensuite à la direction littéraire de La Presse (à l’époque où Baudelaire y publie ses Petits poèmes en prose ; la réapparition récente d’une lettre de Baudelaire suggère que l’idée de ce titre appartient à Houssaye). En 1866, il préside aux destinées de la Revue du XIXe siècle puis fonde en 1870 La Gazette de Paris et La Revue de Paris et de Saint-Pétersbourg. À la fin de sa vie, il est également président de la Société des gens de lettres.
Entrepreneur avisé, rapidement enrichi et menant un train de vie dispendieux fondé aussi sur des spéculations immobilières, Houssaye n’a jamais négligé cependant d’accorder ses soins à l’édification d’une œuvre littéraire, dans laquelle ‒ outre les recueils poétiques et les romans ‒ on compte aussi des récits de voyage, des ouvrages d’histoire littéraire et d’histoire de l’art, des essais historiques (notamment sur le XVIIIe siècle, qu’il contribua ‒ avec les frères Goncourt ‒ à remettre à la mode) et des écrits autobiographiques. On ne peut oublier non plus son œuvre de journaliste (mais les innombrables articles qu’il a fournis aux revues, que celles-ci lui appartiennent ou non, ne firent jamais l’objet d’un recensement). Beaucoup de ces articles témoignent de la pratique d’un journalisme « auto-centré », selon une heureuse formule critique : Houssaye ne parle pas moins de lui-même qu’un Alexandre Dumas père (à preuve aussi ses Confessions et ses Souvenirs de jeunesse, publiés à la fin de sa vie).
On aimerait proposer un panorama des œuvres et des activités d’Arsène Houssaye, qui permettrait de préciser l’importance du rôle joué par cet auteur et le caractère exemplaire de ses écrits, entre le milieu des années 1830 et le milieu des années 1890. On souhaiterait aussi que ce volume de la série Minores XIX-XX se penche sur les mystifications et les falsifications auxquelles a recouru Houssaye pour se bâtir une légende. Il a fait servir en effet ses obligés (vivants ou morts) à la construction de sa statue. Il a fait travailler à son profit des confrères impécunieux. Ses « souvenirs », pas toujours fiables, n’ont pas manqué d’exercer une influence ‒ peut-être au détriment de la vérité ‒ sur les historiens de la littérature qui sont venus après lui. Ainsi, pour ne prendre que deux exemples, il a célébré la bohème du Doyenné en minorant le Petit Cénacle (dont il n’avait pas fait partie) ; et il pourrait avoir « inventé » le texte du dernier billet de Gérard de Nerval ‒ que lui seul semble avoir vu ‒, où l’auteur d’Aurélia annonce à sa tante que « la nuit sera noire et blanche ».
On attend, pour le présent recueil, des contributions portant sur le Houssaye officiel, mais aussi sur le Houssaye officieux, ouvrier de sa propre gloire.
Les propositions de contribution (maximum 3000 signes), accompagnées d’une brève notice bio-bibliographique, sont à envoyer à michel.brix@unamur.be avant le 10 novembre 2022.
Les réponses seront données le 1er décembre 2022 ; les contributions devront être remises pour le 15 mai 2023.