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L'Origine interrogée. Entre les Lumières et aujourd’hui (Amiens)

L'Origine interrogée. Entre les Lumières et aujourd’hui (Amiens)

Publié le par Vincent Ferré (Source : Jean-Luc Guichet)

Appel à communications

Colloque international « L'Origine interrogée. Entre les Lumières et aujourd’hui »

Université de Picardie Jules Verne

22-23 septembre 2022 (Amiens, Logis du Roy)

organisé par Jean-Luc Guichet (UPJV – CERCLL) et James Hanrahan (Trinity College, Dublin)


L’origine est d’abord une interrogation. Par nature, elle nous échappe. Comme le relevait Condillac au seuil du Traité des sensations (1754), « Nous ne saurions nous rappeler l'ignorance dans laquelle nous sommes nés : c'est un état qui ne laisse point de traces après lui. » Dans l’ordre implacable des choses en effet, nous ne pouvons nous souvenir du temps antérieur à notre mémoire. Notre commencement, comme être de conscience, vient toujours inévitablement après notre origine. Pourtant, individuellement et collectivement, que ce soit sous une forme ou sous une autre, cette origine, tout en se dérobant toujours à nous, ne cesse à la fois de nous hanter et nous aimanter. Comme si notre temporalité, loin d’être un simple mouvement unilatéral coulant du passé vers l’avenir, était tendue par une double flèche contradictoire, nous projetant en avant et nous aspirant en même temps en arrière, vers cette origine irrémédiablement obscure et indéfinie mais pourtant ineffaçable. 

Faisant suite à la force d’évidence de la première affirmation, la seconde partie de la phrase de Condillac – « c'est un état qui ne laisse point de traces après lui » - laisse cependant bien davantage hésitant. Est-il si certain que l’origine ne laisse point de traces ? L’absolu d’un tel interdit ne couperait-il pas radicalement la continuité de notre être en séparant irrémédiablement passé et présent ? À rebours de l’hypothèse condillacienne, nous ferons le pari contraire en postulant que, dans la profondeur de notre humanité, dans le creux de nos langues, dans les filets de nos littératures, dans le passé de nos cultures, quelque chose comme une trace de l’origine, ou des origines, se trouve, d’une manière ou d’une autre, encore retenue et enveloppée. Certes, ce ne peut être que sous une forme obscure, confuse et ambiguë, tel un sillage de pistes multiples qui à la fois se concurrencent et se recouvrent, écheveau qu’il s’agira autant que possible de démêler. 

Nous prendrons cependant également en compte, outre cette archéologie des traces, les autres choix méthodologiques envisageables pour relever un tel défi, à savoir soit la reconstruction hypothétique de l’origine, véritable « ingénierie » intellectuelle se fondant simplement sur la règle du plus probable, soit l’expérience de la revivescence qui peut être elle-même réelle ou fictive, soit – le dernier mais non le moindre - le récit imaginaire, qu’il soit littéraire ou mythologique. Aucune combinaison entre ces différentes pistes méthodologiques n’étant a priori exclue.

Enfin, l’origine est également un thème moteur pour la création humaine. En ce sens, la thématisation de l’origine, qu’elle soit explicite ou implicite, peut être elle-même considérée comme une origine, facteur puissant de cohérence, de valeur et d’identité, parfois aussi de réappropriation de soi et de liberté face à un présent devenu trop exclusif. Dans le cas du récit, on peut même soupçonner que c’est là l’une de ses dimensions constantes, voire constitutives, ce à quoi il faudra porter attention. Enfin, à une échelle plus large, il s’agira aussi de prendre en considération ce rôle de l’origine dans la constitution et le fonctionnement des cultures et civilisations où il est également central.

Le site privilégié pour cette interrogation de l’origine sera celui des Lumières. Le XVIIIe siècle est en effet le moment historique où, la notion de Dieu ne recouvrant plus aussi massivement que naguère cette question de l’origine, celle-ci tend à se poser à nouveaux frais dans la forme laïcisée que nous lui connaissons encore aujourd’hui. Ce choix n’interdira cependant pas, mais impliquera au contraire, des points de comparaison avec le paysage contemporain, tant le dialogue peut être fécond entre cette époque du XVIIIe siècle, si fertile en interrogations et en visées expérimentales, réelles ou fictives, voire fantasmatiques, d’une part, et, d’autre part, la nôtre qui affiche des résultats scientifiques en regard à ces questions d’hier, mais que l’on peut interroger à leur tour par ces questions.

Porté par cette perspective d’aller-retour du questionnement entre le XVIIIe siècle et aujourd’hui, le colloque L’Origine interrogée s’emploiera à croiser quatre des principales pistes d’interrogation de l’origine qui constitueront autant de volets pour les deux journées prévues à Amiens : 

1. la question de notre provenance humaine, telle que la posent notamment l’anthropologie et la philosophie ;

2. celle de la genèse des langues, au croisement des différentes sciences et théories du langage ;

3. le traitement de l’origine dans la production, le fonctionnement et l’effet des récits (narratologie, études littéraires, etc.) ;

4. enfin sa place récurrente dans les études culturelles et civilisationnistes (area studies, géocritique, histoire, etc.).

Les frais de déplacement sont à la charge des participants (les cas particuliers – jeunes doctorants par exemple - peuvent être examinés), les frais d’hébergement et de restauration sont assurés pendant la durée du colloque.

Date limite d’envoi des propositions de communication (titre, nom, affiliation et un résumé de 400 mots maximum) :

15 mai 2022 à l’adresse : jean-luc.guichet@u-picardie.fr

Date de la décision du comité scientifique : 20 juin 2022