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Topologies de la parole ordinaire. Les lieux du langage quotidien dans la littérature de l’époque moderne XVIe-XXe s. (Université de Lille)

Topologies de la parole ordinaire. Les lieux du langage quotidien dans la littérature de l’époque moderne XVIe-XXe s. (Université de Lille)

Publié le par Marc Escola (Source : Amina Houara)

Appel à communications pour la journée d'étude

"Topologies de la parole ordinaire. Les lieux du langage quotidien dans la littérature de l’époque moderne (XVIe-XXe siècles)" 

Cette journée d’étude se voudrait le prolongement d’une réflexion qui connaît une nouvelle vigueur dans les sciences humaines depuis plusieurs décennies. Une attention toute particulière est en effet portée au concept de « quotidienneté », et qui concerne au premier chef la philosophie (Bruce Bégout, Gregori Jean), la sociologie (Erwing Goffman, Jean-Claude Kauffman), mais aussi les sciences du langage (ethnographie de la parole ou sociolinguistique) et la psychanalyse (à travers la figure de l’homme ordinaire – der gemeine Mann – promue par Freud). Les efforts conjoints de ces disciplines visent à redéfinir à nouveaux frais la quotidienneté, en partant de sa double entente ontologique – telle qu’inaugurée par Martin Heidegger dans Sein und Zeit en 1927 – et sociologique. À cet égard, penser le quotidien, ce n’est pas décrire la vie de tous les jours, c’est tenter de définir les structures et configurations d’une catégorie fondamentale de l’existence. En s’inspirant de ces travaux, les études littéraires se sont employées, à leur tour, à explorer les possibilités épistémologiques ouvertes par le renouvellement du concept de quotidienneté (Michel de Certeau, L’Invention du quotidien, 1980).  Cependant, ce travail a principalement été mené sur les terrains de la description – l’étude de la quotidienneté se traduisant souvent en une entreprise d’inventaire de ces « choses banales » qui tissent la « la trame de notre vie ordinaire » (Daniel Roche, Histoire des choses banales) ; ainsi la belle étude de Marta Caraion consacrée à la « culture matérielle » telle que représentée dans la littérature.

Une moindre attention, nous semble-t-il, a été apportée à la parole quotidienne en littérature, dès lors qu’elle sort des sentiers idéologiques qui, l’associant au concept de « populaire », l’instrumentalisent pour mieux la critiquer ou, de manière plus insidieuse, la réhabiliter. Autrement dit, ce ne sont pas les « voix du peuple » qui retiennent notre attention, et les problématiques qu’elles charrient avec elles de leur légitimation au sein de l’espace littéraire. Si nous choisissons l’axe de la quotidienneté, c’est précisément pour saisir cette parole dans la banalité de son itération. D’où notre recours au concept d’ « ordinaire » comme doublet synonymique (peut-être fallacieux) du « quotidien », les deux permettant de désigner cette catégorie d’actes, de discours et d’objets dont la valeur paradoxale repose sur leur absence de saillance, leur normalité, qui tend à les rendre irreprésentables pour peu que l’attrait de leur vulgarité supposée ne les érige pas en paradigmes d’un « populaire » magnifié. C’est pour éviter ce dernier écueil que nous avons choisi d’entrer dans notre sujet par la question thématique de l’espace ; en effet, si le quotidien se définit précisément en fonction d’un temps saisi au jour le jour, qu’en est-il des lieux dans lesquels cette parole peut s’épanouir ? Peut-on voir se dessiner dans le corpus littéraire de la modernité une cartographie des usages linguistiques de l’ordinaire ? Dans quels territoires les narrateurs-écrivains installent-ils leurs interlocuteurs quotidiens et quelles relations dynamiques ces territoires entretiennent-ils avec les paroles qui s’y échangent d’un point de vue stylistique ? Enfin, dans quelles mesures la parole quotidienne est-elle représentée comme modelée par l’espace qui l’accueille et, parfois, la justifie ? 

Il s’agira ainsi, durant cette journée d’étude, d’interroger de manière volontairement large la manière dont la littérature donne forme à travers les représentations de l’espace aux pratiques langagières quotidiennes.

L’entrée dans le sujet est libre, pourvu qu’elle respecte l’empan chronologique choisi (XVIe siècle-XXe siècle).


Modalités de soumission    


Les propositions d’environ une page, enrichies d'une bibliographie indicative et d'une courte biographie, devront être adressées pour le 9 mai 2022 à l’adresse suivante : journee.etude.topo.populaire@gmail.com.

Les interventions dureront environ 25 minutes et seront suivies de 15 minutes de questions. Ces modalités peuvent varier ultérieurement, en fonction du nombre d’interventions.

Pour celles et ceux qui ne pourraient pas se déplacer, la journée sera également diffusée en hybride sur Zoom. Aussi précisez-nous, dans votre demande de participation, si vous souhaitez communiquer en présentiel ou en distanciel. Les liens de connexion seront communiqués en temps voulu sur cette page, et envoyés par mails aux participants.
 

Calendrier

Les propositions retenues seront annoncées le 10 juin 2022

Les communications seront entendues le mercredi 28 septembre 2022 sur le site de l’Université de Lille (campus Pont de bois), en salle F0. 13.


Comité d'organisation

Amina Houara, Maxime Morin et Clément Richard.

Comité scientifique

Marie-Claire Thomine et Yves Baudelle


Bibliographie indicative

BEGOUT Bruce. La Découverte du quotidien. Éléments pour une phénoménologie du monde de la vie, Paris, Allia, 2005. 

BERTRANT Denis, Topologie de la route et du chemin : sémiotique de l’espace dans Le Mont Damion d’André Dhôtel, Paris, l’Harmattan, 2017.

CARAION, Marta, Comment la littérature pense les objets : Théorie littéraire de la culture matérielle, Paris, Champ Vallon Éditions, 2020.

CERTEAU Michel de, L’Invention du quotidien, Paris, Gallimard, 1990.

Concepts de l’ordinaire, Fasula Pierre et Sandra Laugier (éd.), Paris, Éditions de la Sorbonne, coll. « Philosophies pratiques », n° 6, 2021.

FOUCAULT Michel, « La vie des hommes infâmes », dans Dits et Ecrits, 1954-1988. Tome III : 1976-1979, Paris, Gallimard, 1994.

GREGORI Jean, Ontologie et quotidienneté. Recherches sur la différence phénoménologique, Louvain, Éditions Peeters, 2011.

MUCHEMBLED Robert, Culture populaire et culture des élites dans la France moderne : XVe-XVIIIe siècles, Paris, Flammarion, 1977.

Le Petit peuple dans l’Occident médiéval : terminologies, perceptions, réalités, Pietro Boglioni, Robert Delort et Claude Gauvard (éd.), Paris, Publications de la Sorbonne, 2002.

Le Populaire à table : le boire et le manger aux XIXe et XXe siècles en hommage à Antoine Court, Mireille Piarotas et Pierre Charreton Saint-Etienne, Publications de l’Université de Saint-Etienne, coll. « Travaux », no 119, 2005.

THIESSE Anne-Marie, Le Roman du quotidien : lecteurs et lectures populaires à la Belle-Époque, Paris, le Chemin vert, 1984.

Topographies romanesques, Audrey Camus et Rachel Bouvet, Rennes, Presses universitaires de Rennes , 2011.

Les Voix du peuple dans la littérature des XIXe et XXe siècles, Corinne Grenouillet et Éléonore Roy-Reverzy (éd.), Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2006.

Les Voix du peuple et leurs fictions, André Petitjean et Jean-Marie Privat, (éd.), Metz, Université Paul Verlaine, 2007.

WOLF Nelly, « Lieux communs sur l’ouvrier », Le Peuple dans le roman français de Zola à Céline, 1990, p. 63-96. 

Le Peuple à l’écrit : de Flaubert à Virginie Despentes, Saint-Denis, Presses universitaires de Vincennes, 2019.