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Appels à contributions
La figure du héros dans la littérature, les arts & les discours

La figure du héros dans la littérature, les arts & les discours

Publié le par Perrine Coudurier (Source : Mohamed Anis Abrougui)

« La figure du héros dans la Littérature, les Arts et les Discours »

Colloque pluridisciplinaire – 1er, 2 et 3 Mars 2022

Institut supérieur des études appliquées en humanités de Gafsa & Institut supérieur d'arts et métiers de Gafsa 

Université de Gafsa (TUN)

 
Appel à contributions



Dès l’aube de l’humanité, la puissance écrasante des dieux, de l’environnement, ou de l’ordre établi a été contrebalancée par une classe d’hommes singuliers : les héros. Tantôt pourvus de pouvoirs ou de dons à l’image des demi-dieux, tantôt personnages ordinaires jetés dans des circonstances extraordinaires qui leur permettent de se distinguer, les héros réels ou fictionnels sont des figures qui fascinent les sociétés. En témoigne les représentations incessantes qu’on en fait dans des supports aussi différents que la littérature, la musique, la peinture, la sculpture, et plus récemment la bande dessinée et le cinéma. Certaines disciplines comme la philosophie, la psychanalyse, et l’anthropologie tentent d’expliquer leur raison d’être de manières différentes (projection de valeurs, modèles pour le développement des plus jeunes, figures totémiques). 

Cela dit, depuis les travaux d’Aristote, une modélisation ou une typologie de la figure du héros ne cesse d’évoluer pour nous livrer des distinctions telles que le héros épique, le héros tragique, l’antihéros, ou encore le héros ordinaire opposé au super-héros. Des catégorisations thématiques ont émergé pour identifier des héros religieux, des héros nationaux, des héros militaires, et même des héros dans le domaine du sport et des médias lorsque des qualités comme le courage ou l’abnégation sont affichées de manière étonnante. Vainqueurs mais aussi vaincus, grands hommes ou issus de classes plus basses, les héros ne sont pas forcément les commandants mais parfois les hommes les plus utiles à la cité. Le sémantisme même du mot héros a subi des changements imposés par l’usage au fil de l’histoire qui oblige les contemporains (à composer avec divers sens. Ainsi héros désigne un personnage portant des qualités distinctives à leur plus haut degré, mais aussi le personnage principal d’une représentation quelconque.

En effet, un panorama des héros de littérature laisserait perplexe au premier abord : Roland au Moyen-Âge est un fidèle serviteur de Dieu et de son suzerin, distingué par sa force et son courage tout comme Bewulf dans la littérature anglaise. Tristan ainsi que Lancelot allient les prouesses au combat au respect du code de l’amour courtois.  François Villon évoque Jeanne d’Arc en regrettant sa disparition avant que Shakespeare n’y fasse référence dans Henri VI au XVIe siècle. Son image sera récupérée aussi bien par l’Eglise que par le mouvement national Français et plus récemment par la tendance politique de l’extrême droite. Bonaventure Des Périers offre aux lecteurs, le long de ses histoires, des héros comiques et amusants, caractérisés par leur ruse ou au contraire par leur bêtise. Le XVIIe siècle proposait des modèles hétérogènes comme l’amant fidèle et le guerrier intrépide. Rodrigue de Corneille ; Pyrrhus de Racine, plus conforme à la théorisation d’Aristote du héros tragique, est ni fondamentalement bon ni fondamentalement mauvais ; Dom Juan de Molière est déjà un antihéros ; et les animaux des Fables de La Fontaine cultivent chacun un trait qui les distingue du commun. Le XVIIIe siècle s’attaquera à l’ascendance noble du héros et à ses qualités dans le domaine militaire. L’utilisation ironique du mot « héros » au chapitre évoquant la guerre entre Abares et Bulgares dans Candide de Voltaire en est une illustration claire. Pour autant, la figure militaire s’impose de nouveau grâce à Napoléon Bonaparte. Marthes Robert dans Origine du roman et roman des origines expliquera qu’il servira de modèle à toute une génération de héros qui tenteront de changer leur réalité au lieu de l’accepter : les « bâtards réalistes ». Ce sera Julien Sorel de Stendhal, Eugène de Rastignac de Balzac, Edmond Dantès de Dumas. Manquant cruellement d’attributs héroïques classiques, ces héros d’un nouveau genre perdureront jusqu’à l’ère de Batman et Deadpool, le héros le plus atypique de l’univers de Marvel. D’autres comme Jean Valjean et Ruy Blas de Hugo, ou encore Lantier dans les œuvres de Zola, seront les porte-parole d’une classe sociale et de ses droits. D’autres auront des idées moins glorieuses à incarner. Tel est le cas du père Ubu d’Alfred Jarry qui incarnera l’absurdité mieux que quiconque.   

Les antihéros sont analysés parfois comme des personnages rendant impossible l’identification avec le lecteur, d’autres fois comme plus proches du commun des gens que les héros, car ils vivent un échec existentiel. Dans les romans de formation, le héros réaliste reflète les aspirations de sa génération mais aussi son impuissance. Comme l’affirme Christina Horvath (2007) dans Le roman urbain contemporain en France : « leurs tentatives d’intégration à la société sont vouées d’emblée à l’échec, […] parce qu’ils aspirent vainement à établir de véritables rapports affectifs avec autrui. ». Dans le cinéma d'auteur, Martin Scorsese  revendique sa volonté de « pousser la sympathie des spectateurs vers certains types de personnages normalement considérés comme des vauriens » (Cité par André Corin, 1996).

La référence aux héros dans les discours, notamment dans les médias et dans le monde de la politique, cherche à déployer la charge sémantique et symbolique que certains noms renferment pour valoriser ou dévaloriser. Le passage de certains noms propres à la catégorie du nom commun atteste de la création d’une catégorie, d’un modèle humain. Aussi, cette charge sémantique utilisée souvent contre un adversaire ouvre le débat sur le sujet du héros comme être générant une discorde, un clivage, du fait même qu’il n’existe qu’à travers des ennemis à mater. En effet, Marc Tourret (2011) affirme que les héros « devenus consensuels, perdent toute l’efficacité charismatique du modèle politique et social, civil ou militaire »3. 

Les médias ont notamment popularisé la figure du héros qui se distingue non par ses actions, mais par ce qu’il a subi. L’Arc de Triomphe renferme, par ailleurs, un type original de ces héros-victimes dans une tombe : le soldat anonyme. L'anonymat lui permet de référer à la collectivité et de représenter symboliquement un nombre incalculable d’autres héros de la guerre.

Ayant vocation à favoriser un dialogue interdisciplinaire, cet appel est ouvert à tous les chercheurs et jeunes chercheurs en littérature, en histoire de l’art, en arts visuels, en philosophie et en sociologie. Les communications pourront se faire dans les langues suivantes : Français, Anglais, Arabe, et  s'inscrire dans l'un de ces axes d’étude (liste non exhaustive) :

_ La valeur opératoire de l’adoption d’une typologie particulière de héros pour les artistes

_ Le héros historique et son traitement dans la littérature, les arts et les discours

_  Fonctions critiques/satiriques du héros/antihéros : regards sur la société du point de vue du héros

_ Fonctions emblématiques ou symboliques de ces « vivants sans entrailles »4 (Paul Valéry, 1960) 

_ Le héros dans la réception, notamment l’antihéros qui remet en question l’illusion référentielle et rend caduc le héros-modèle



1         : Christina Horvath, Le roman urbain contemporain en France, Presses Sorbonne Nouvelle, 2007, p. 155
2         : André Corin, « La dernière tentation de Travis Bickle », in Séquences, (183), 1996, pp. 14-26
3         : Marc Tourret, « Qu’est-ce qu’un héros ? », Inflexions, vol. 16, no. 1, 2011, pp. 95-103
4         : Paul Valéry, Œuvres, T. II, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la pléiade I », édition établie par Jean Hytier, 1975 [1960] p. 746

 

Bibliographie indicative : 

- Anne Blanchard, Jean-Bernard Pouy, Francis Mizo, Serge Bloch, L’Encyclopédie des héros, icônes et autre demi-dieux, Gallimard jeunesse, 2012
- J. Cambell, Le héros aux mille et un visages, Paris, J’ai lu, 2013 (1ère éd. R. Laffont,1978)
- P. Centlivres, D. Fabre et F. Zonabend (dir.), La fabrique des héros, Paris, MSH, Ethnologie de la France, cahier n° 12, 1998
- J. Dion (éd.), Le paradoxe du héros ou d'Homère à Malraux, Nancy, Association pour la diffusion de la recherche sur l'Antiquité, 1999
- O. Faliu et M. Touret (dir.), Héros, d’Achille à Zidane, Paris, BNF, 2007
- Gérard Freyburger et Laurent Pernot (Dir.), Du héros païen au saint chrétien. Actes du Colloque organisé par le Centre d'Analyse des Rhétoriques Religieuses de l'Antiquité (C.A.R.R.A.). Strasbourg, ler-2 décembre 1995
- M. Scheller, Le saint, le génie, le héros (traduit de l’allemand) Paris-Lyon, E. Vitte, 1958
- Ph. Sellier, Le mythe du héros, Paris, Bordas, 1985


Comité scientifique : 

-          Moufida Bannour

-          Ali Ben Amor

-          Mohamed Bouattour

-          Martine Chassignet 

-          Mokhtar Farhat 

-          Laurent Jenny 

-          Chokri Rhibi 

-          Mustapha Trabelsi

-          Patrick Voisin 

 

Comité d’organisation : 

Mohamed Anis Abrougui ; Wajdi Belgacem ; Youssef Belgacem ; Rym Ben Tanfous ; Wijdène Bousleh ; Haythem Chiboub ; Mohamed Dhahbi ; Najah Elouni ; Syrine Farhat ; Foued Ghorbali ; Walid Hamdi ; Hatem Krimi ; Nessrine Lahouel ; Ridha Mahfoudhi ; Salim Moussa ; Tahar Rkiwa ; Moez Zammouri 

Modalités pratiques : 

Date limite de soumission des propositions de communication : 16 Janvier 2022

Date de réponse au nom du comité scientifique : 23 Janvier 2022

Les propositions de communication doivent être envoyées en format Word et comporter : titre, auteur ( Nom, prénom, fonction et  établissement / université de rattachement ), mots clefs, résumé et bibliographie sélective.  

Adresse e-mail à laquelle les propositions doivent être envoyées : abrougui.mohamed.anis@gmail.com


Les communications ne dépasseront pas 20mn. 

Les actes feront l’objet d’une publication ultérieure après évaluation des travaux par le comité scientifique. Seuls les travaux des participants seront publiés.

Les frais de déplacement et d’hébergement sont à la charge du participant.